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1. LES TRAITÉS JURIDICO-POLITIQUES

1.2. Les traités royalistes

Dès 1576, Jean Bodin (1530-1596) intègre cet exemplum dans ses Six Livres de la

République. Né dans une famille bourgeoise d’Angers, il s’engage dans la vie politique en qualité

74 On parle communément de la « séparation des pouvoirs » chez Montesquieu. Krzysztof Wroczyński explique que ce n’est pas tant la séparation des pouvoirs entre l’exécutif (exercé par le monarque et les ministres), le législatif (le parlement) et le judiciaire (tribunaux) qui constitue l’essentiel de la pensée du baron de la Brède, mais l’idée de leur contrôle et limitation réciproque : WROCZYŃSKI Krzysztof, « Montesquieu (Monteskiusz) Charles Louis de Secondat »,

op. cit., p. 378. Louis Althusser ne dit pas autre chose lorsqu’il explique que la « séparation des pouvoirs » consiste

dans le « le partage des pouvoirs [législatif, exécutif et judiciaire] entre les puissances [le roi, la noblesse, le « peuple »] et la limitation ou modération des prétentions d’une puissance par le pouvoir des autres » : ALTHUSSER Louis,

Montesquieu, la politique et l’histoire, op. cit., p. 103-104. 75

Dans la présente thèse, nous avons eu recours aux éditions suivantes : MONTESQUIEU, Lettres persanes [1725], éd. VERSINI Laurent, Paris, Flammarion, 2011 ; MONTESQUIEU, De l’esprit des lois [1748], éd. MATTÉI Jean-François, Paris, Flammarion, 2008 ; MONTESQUIEU, Pensées, 1726-1755, en ligne, URL : https://www.unicaen.fr/services/puc/sources/Montesquieu/index.php [consulté le 15 septembre 2017].

76

À ce sujet : EHRARD Jean, « Montesquieu et la Pologne », op. cit., p. 38.

77

SŁUGOCKI Leszek, « La Pologne et les problèmes polonais dans l’Esprit des lois de Montesquieu », op. cit., p. 144.

78

Sur le séjour de Montesquieu à Lunéville et ses liens avec le roi Stanislas et l’Académie de Nancy, voir en particulier : GROSSMAN Roland, « Montesquieu et la Lorraine », Mémoires de l'Académie nationale de Metz, 2001, p. 115-146 ; SŁUGOCKI Leszek, Monteskiusz w Lotaryngii, op. cit., 2005 ; MATYASZEWSKI Paweł, Podróż Monteskiusza,

op. cit., p. 339-349 ; MATYASZEWSKI Paweł, « Montesquieu et le roi Stanislas. De la correspondance de goûts à

l’échange de lettres » in CADILHON François, FIGEAC Michel, LE MAO Caroline (dir.), La Correspondance et la

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d’avocat au parlement de Paris, « gruyer et procureur du roi », maître des requêtes et conseiller du duc d’Alençon, procureur du roi au présidial de Laon, consultant ponctuel du roi et de député du tiers aux états généraux de Blois (1576). Il rejoint aussi momentanément la Ligue, reconnaissant la primauté du cardinal de Bourbon sur Henri de Navarre, et contestant la justesse des choix politiques de ce dernier79. S’intéressant à des domaines aussi variés que l’économie, l’histoire, la politique et la démonologie, il se fait remarquer comme théoricien du pouvoir absolu et comme le « père fondateur de la doctrine moderne de la souveraineté »80. Ses idées ont eu un grand impact sur la pensée politique moderne, comme l’atteste le succès de sa République. Le traité connaît 25 éditions françaises entre 1576 et 1629, 15 latines, sans compter les traductions en d’autres langues vernaculaires, comme l’allemand, l’anglais, l’espagnol ou l’italien81.

Bodin n’a jamais été en Pologne, mais il a eu des contacts avec les Polonais, en l’occurrence avec l’ambassade venue chercher Henri de Valois à Paris. Il l’a accueillie à Metz avec Charles Descars, évêque de Langres82. Comme l’indique le titre complet de La Harangue de

messire Charles Des Cars, prononcée aux magnifiques ambassadeurs de Poulongne, estans à

Metz le huictiesme jour d'aoust 1573. Tournée en françois par Jan Bodin83, c’est ce dernier qui a

été chargé de traduire le texte du latin au français. Il n’est pas exclu que Bodin ait lui-même été l’auteur du discours84. Ses relations avec les députés sarmates ont sans aucun doute enrichi ses connaissances sur ce pays.

Un autre auteur royaliste de notre corpus a été engagé dans l’expérience polonaise d’Henri. Il s’agit de Louis Le Roy (1510-1577), juriste né à Coutances, homme proche de la cour, député en Angleterre, professeur royal de grec et humaniste passé dans la postérité pour ses traductions de Platon et d’Aristote85. En 1574, Le Roy est chargé de traduire l’oraison parisienne

79

Sur le parcours de Bodin, voir : TURCHETTI Mario, « Introduction », op. cit., p. 33-46 ; GOYARD-FABRE Simone, Jean

Bodin, op. cit., p. 6. 80

BODIN Jean, Les Six Livres de la République. De Republica libri sex. Livre I [1576], éd. TURCHETTI Mario, Paris, Garnier, 2013. Voir la quatrième de couverture. Sur l’œuvre intellectuelle de Bodin, voir : TURCHETTI Mario, « Introduction », op. cit. Sur les aspects novateurs (ou non) de la pensée bodinienne : GOYARD-FABRE Simone, Jean

Bodin, op. cit., p. 9-10. 81

TURCHETTI Mario, « Introduction », op. cit., p. 83. À noter qu’il y a des différences entre les diverses éditions. Dans le présent travail, nous suivons les études déjà réalisées sur la Pologne dans l’œuvre de Bodin, en particulier : KOT Stanisław, Rzeczpospolita Polska w literaturze politycznej Zachodu, op. cit., p. 44-70 ; ORZEŁ Joanna, « Rzeczpospolita Obojga Narodów w pismach Jeana Bodina » in ORZEŁ Joanna, MRÓZ Mariusz (dir.), Kontakty, tradycje i stosunki

polsko-francuskie od XVI do początków XX wieku, Toruń, Adam Marszałek, 2012, p. 44-56. Les deux ont eu recours à

l’édition latine de 1591.

82

TURCHETTI Mario, « Introduction », op. cit, p. 36.

83

DESCARS Charles, La Harangue de messire Charles Des Cars, prononcée aux magnifiques ambassadeurs de

Poulongne, estans à Metz le huictiesme jour d'aoust 1573. Tournée en françois par Jan Bodin, Paris, Pierre l’Huillier,

1573.

84

KOT Stanisław, Rzeczpospolita Polska w literaturze politycznej Zachodu, op. cit., p. 21-22 ; ORZEŁ Joanna, « Rzeczpospolita Obojga Narodów w pismach Jeana Bodina », op. cit., p. 47.

85

Sur la vie et l’œuvre de cet écrivain : GUNDERSHEIMER Werner L., The Life and Works of Louis Le Roy, Genève, Droz, 1966 ; DESAN Philippe, « Loys Le Roy et l’anthropologie historique » in BOHLER Danièle, MAGNIEN SIMONIN Catherine (dir.), Écritures de l’histoire (XIVe-XVIe siècles), Genève, Droz, 2005, p. 39-47 ; GAILLE-NIKODIMOV Marie, « Un humaniste peut-il inventer ? L’idée d’un progrès de l’art politique chez Louis Le Roy », Laboratoire italien.

Politique et société, 2005/6, p. 55-77 ; POUILLOUX Jean-Yves, « Le Roy Louis (1510-1577) » in Encyclopædia

universalis, en ligne, URL : http://www.universalis-edu.com.faraway.parisnanterre.fr/encyclopedie/louis-le-roy/

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de Jan Zamoyski qui annonçait à la capitale l’élection du prince français86. À la même époque, Le Roy aurait projeté la rédaction d’un ouvrage sur la République sarmate, dont seule une partie ̶ une description géographique du pays ̶ a été retrouvée à l’état de manuscrit87. L’humaniste devait posséder une bonne connaissance de l’État polono-lituanien, peut-être acquise à l’occasion de ses contacts avec les députés polonais. Cela explique sans doute pourquoi on retrouve la Pologne dans le traité De l’excellence du gouvernement royal, publié en 157588.

*

Les théoriciens du pouvoir absolu de la première moitié du XVIIe siècle n’ont pas eu les mêmes liens avec les affaires de Pologne que ceux des derniers Valois, mais on retrouve dans certains de leurs traités des remarques sur la République nobiliaire. L’élection de 1573 a donc laissé une empreinte durable sur la littérature royaliste française, bien qu’après la déposition d’Henri, les relations diplomatiques entre les deux pays soient devenues plus distantes. Nous avons repéré quatre Polonica pour la période, dont deux qui n’ont jusqu’alors jamais été remarqués89.

Le premier est de la plume de Jérôme Bignon (1589-1656) qui, dès sa plus tendre enfance, se fait remarquer pour sa bonne éducation et ses capacités intellectuelles90. Henri IV le nomme enfant d’honneur du dauphin, futur Louis XIII. Il continue sa carrière sous les deux premiers Bourbons en devenant successivement avocat général au grand conseil (1620), conseiller d’État, avocat général au parlement (1625) et enfin grand maître de la bibliothèque du roi (1642). Il effectue des missions politiques et diplomatiques pour la monarchie française et est l’un des premiers à être appelé à l’Académie française91. En 1610, il publie le traité De l’excellence des

86

L’Oraison du Seigneur Jean Savius de Zamoscie, gouverneur de Belz et Zamech, l’un des ambassadeur envoyez en

France par les Estats du royaume de Poloigne et du grand duché de Lithuanie, au Serenissime Roy eleu de Poloigne, Henry, fils et frere des Roys de France, duc d’Anjou, sur la declaration de son election et pourquoy il a esté preferé aux autres competiteurs. Traduicte de Latin en françois par Loys Regius, suivant le commandement dudit seigneur Roy et à la requeste des seigneurs ambassadeurs, Paris, Frederic Morel, 1574. Plus d’informations sur ce texte dans :

GUNDERSHEIMER Werner L., The Life and Works of Louis Le Roy, op. cit., p. 22.

87

Il s’agit du De Regno Poloniae per Ludovicum Regium Constantinum, libri duo, ad serenissimum Regem Poloniae

Henricum, conservé à la Bibliothèque Nationale de France : ibidem.

88 LE ROY Louis, De l’excellence du gouvernement royal, Paris, Frederic Morel, 1575. Sur ce traité voir : GUNDERSHEIMER Werner L., The Life and Works of Louis Le Roy, op. cit., p. 81-83. Sur les autres écrits et pamphlets politiques de l’humaniste : ibidem, p. 59-91 ; BECKER Abraham Henri, Un Humaniste au XVIe siècle, Loys Le Roy,

Ludovicus Regius, de Coutances, Paris, Lecène, Oudin et Cie, 1896.

89

Deux ̶ ceux de Jean Baricave et de Claude de Rubis ̶ sont signalés par Stanisław Kot, Rzeczpospolita Polska w

literaturze politycznej Zachodu, op. cit., p. 79-81. Les deux autres ̶ ceux de Jérôme Bignon et de Cardin Le Bret ̶ sont

le fruit de nos recherches.

90

Selon les notices biographiques du XIXe siècle, il aurait publié une Description de la terre sainte (Paris, 1600) dès l’âge de dix ans, puis peu de temps après un Discours de la ville de Rome (1604) et un Traité sommaire de l’élection du

pape (1605) : « Bignon (Jérôme) » in Biographie universelle ancienne et moderne, Paris, Desplaces, 1854, t. IV,

p. 302 ; « Bignon, Jerome » in Encyclopedia Britannica, Archibald Constable & Company, 1817, p. 611.

91

Ibidem. TAUSSIG S., « Bignon, Jérôme (1590-1656) » in FOISNEAU Luc (dir.), Dictionnaire des philosophes français

du XVIIe siècle, op. cit., p. 278. MOUSNIER Roland, L’Assassinat d’Henri IV, op. cit., p. 226. L’abbé Péreau lui consacre

une biographie en 1757 : PÉRAU (abbé), Vie de Jérôme Bignon, avocat general et conseiller d’État, Paris, Hérissant, 1757. Il y est présenté comme un homme d’État modèle, bien que d’autres lui reprochent sa pusillanimité : TAUSSIG S., « Bignon, Jérôme (1590-1656) », op. cit., p. 278.

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rois et du royaume de France, dédié à Henri IV92. Le texte a pour objectif de prouver la préséance

des rois de France sur les autres monarques d’Europe, en particulier d’Espagne. C’est à cette occasion que la République nobiliaire est évoquée.

Quatre ans plus tard, Jean Baricave, né en Haute-Garonne vers 1562, publie La Defense

de la monarchie françoise, et autres monarchies (1614), dédiée à Louis XIII93. Docteur en

théologie, chanoine pénitencier et official à l’archevêché de Toulouse94, Baricave y défend la supériorité, la sacralité et la souveraineté absolue du monarque, refusant par là même tout système à caractère républicain ou électif95. En tant que réfutation des Vindiciae, un passage est spécialement consacré à la contestation de l’argument polonais présent dans le texte protestant.

La même année, paraît la Conference des prerogatives d’ancienneté et de noblesse, de la

monarchie, roys, royaumes, et maison royale de France de Claude de Rubis (1533-1613)96. Offert

à Louis XIII, l’ouvrage entend démontrer la supériorité des royaumes héréditaires sur les électifs et la préséance d’origine divine des rois de France. Pourtant, l’auteur était mal placé pour rédiger un tel panégyrique de la monarchie bourbonienne. Docteur en droit, conseiller au présidial de Lyon et au parlement des Dombes, échevin et procureur général de Lyon lors de la Ligue, Claude de Rubis s’est très rapidement engagé dans ce mouvement d’opposition. Auteur de plusieurs libelles, notamment du Bouclier de la réunion des vrais catholiques françois, contre les artifices

du Béarnoys, des hérétiques & leurs fauteurs & adhérantz (1589), il défendait le droit des états de

contrôler le pouvoir royal, de déposer un souverain et d’en élire un nouveau97. Après l’échec de la Ligue, il s’exile à Avignon. Après six ans, il finit par se rallier au pouvoir royal. La Conférence, où l’argument sarmate est discuté, témoigne de ce retournement98.

Enfin, Cardin Le Bret (1558-1655) ̶ avocat au parlement de Paris, issu d’une famille anoblie par Henri III ̶ soutient constamment l’autorité et les intérêts du roi et de la couronne, que ce soit dans son activité administrative et politique ou dans ses écrits. Grâce à cela, il obtient en

92 BIGNON Jérôme, De l’excellence des rois et du royaume de France traitant de la preseance, premier rang, et

prerogatives des roys de France par dessus les autres, et des causes d’icelles, Paris, Hierosme Drovart, 1610. 93

BARICAVE Jean, La Defense de la monarchie françoise, et autres monarchies contre les detestables et execrables

maximes d’Estat d’Estienne Iunus Brutus, et de Louys de Mayerne Turquet, et leurs adherens, Toulouse, Jean Boude,

1614.

94

GABRIEL F., « Baricave, Jean » in FOISNEAU Luc (dir.), Dictionnaire des philosophes français du XVIIe siècle, op. cit.,

p. 211-212 ; « Baricave Jean (156.-16..) », Catalogue IdRef, en ligne, URL : https://www.idref.fr/autorites.jsp [consulté le 31 mai 2018]. Nous ne possédons pas plus d’informations sur cet auteur.

95

GABRIEL F., « Baricave, Jean », op. cit. Le penseur lie la désobéissance aux autorités civiles au rejet des autorités ecclésiastiques (la papauté). Les guerres civiles sont donc selon lui un résultat de la Réforme. Il s’oppose donc aux conséquences non seulement théologiques mais aussi politiques de cette dernière.

96

RUBIS Claude (de), Conference des prerogatives d’ancienneté et de noblesse, de la monarchie, roys, royaumes, et

maison royale de France, Lyon, Simon Rigaud, 1614. 97

À ce sujet, voir : ESTIER Delphine, « 1589-1594 : la maîtrise de l’opinion à Lyon pendant la Ligue, ou le secret nécessaire », Rives méditerranéennes, 2004, 17, p. 63-83 ; CROUZET Denis, Les Guerriers de Dieu. La Violence au

temps des troubles de religion vers 1525-vers 1610, Seyssel, Champ Vallon, 1990, p. 473. Dans Le bouclier, la Pologne

n’est mentionnée qu’à l’occasion du récit du retour d’Henri en France.

98

Voir la biographie de l’auteur dans : Biographie universelle, ancienne et moderne ou histoire, Paris, Michaud, 1825, t. 39, p. 248 ; BOUCHER Jacqueline, Vivre à Lyon au XVIe siècle, Lyon, Editions Lyonnaises d’Art et d’Histoire, 2001,

49

1632 une place au Conseil d’État99. Son traité De la souveraineté du roy paraît la même année100. Le théoricien y défend les prérogatives du monarque ainsi que le caractère absolu et l’origine divine de son pouvoir101.

*

Sous le règne personnel de Louis XIV, les traités philosophiques et juridiques se font moins nombreux. Ran Halévi écrit à ce sujet :

« Le plus long règne de l’Ancien Régime n’a pas été très fécond dans le domaine de la pensée politique. Louis XIV n’eut ni un Bodin, ni un Loyseau, ni un Le Bret pour parer des prestiges du savoir le demi-siècle de son gouvernement personnel. »102

On peut nuancer cette assertion, ne serait-ce qu’en évoquant les œuvres de Bossuet. Il n’en reste pas moins que parmi les Polonica de cette période, seuls deux peuvent être rangés, encore que de façon imprécise, dans cette catégorie.

Tel est le cas des ouvrages de Samuel Chappuzeau (1625-1701), prédicateur calviniste, avocat, médecin, enseignant, conseiller, directeur de pension et homme de lettres103. Ce personnage aux si nombreuses facettes est aussi un grand voyageur. Il a parcouru une grande partie de l’Europe (France, Suisse, principautés allemandes, Angleterre, Pays-Bas,…)104. Se disant « citoyen de l’Europe », Chappuzeau entretenait aussi de nombreux contacts avec les érudits et les politiques de son temps, tels Comenius ou Bayle105. Ses expériences sont consignées dans

L’Europe vivante, dont la première partie est publiée en 1666-1667, la seconde en 1669 ; toutes

deux avec privilège du roi de France106. Des remarques et un chapitre entier y sont consacrés à la Pologne. Chappuzeau aurait lui-même séjourné à Gdańsk en 1669107. Par ailleurs, son père

99

Voir la biographie de l’auteur dans : FOISNEAU Luc, « Le Bret, Cardin (1558-1655) » in FOISNEAU Luc (dir.),

Dictionnaire des philosophes français du XVIIe siècle, op. cit., p. 1015-1016 ; THUAU Étienne, Raison d’État et pensée

politique à l’époque de Richelieu, Paris, Albin Michel, 2000 [1re édition : 1966], p. 276.

100

LE BRET Cardin, De la souveraineté du Roy, Paris, Toussainct du Bray, 1632.

101

THUAU Étienne, Raison d’État, op. cit., p. 275-277. Il préconise cependant la modération (respect des traditions et des lois fondamentales, rôle de gardien des états généraux et des parlements, prise en compte des forces de l’Église et des restes de la féodalité) : ibidem, p. 278. FOISNEAU Luc, « Le Bret, Cardin (1558-1655) », op. cit., p. 1017. Ce dernier parle d’« absolutisme modéré ». Sur Cardin Le Bret, voir également : PICOT Gilbert, Cardin Le Bret, 1558-1655, et la

doctrine de la souveraineté, thèse de droit, Université de Nancy, 1948 ; LE ROY LADURIE Emmanuel, MÉCHOULAN

Henry, L’État baroque : regards sur la pensée politique de la France du premier XVIIe siècle, Paris, Vrin, 1985, p.

36-38.

102 HALÉVI Ran, « Savoir politique et “mystères de l'État”. Le sens caché des Mémoires de Louis XIV », Histoire,

économie et société, 2010, vol. 19, nr 4, p. 451-452.

103 Sur la vie et l’œuvre de Samuel Chappuzeau, voir : JENNINGS Neil, JONES Margaret, A Biography of Samuel

Chappuzeau, a Seventeenth-Century French Huguenot, Playwright, Scholar, Traveller, and Preacher. An Encyclopedic

Life, Lewinston, Queenston, Lampeter, The Edwin Mellen Press, 2012 ; GOETINCK Jean F., Essai sur le rôle des

Allemands dans le Dictionnaire historique et critique (1697) de Pierre Bayle, Tübingen, Gunter Narr Verlag, 1982,

p. 27.

104

Sur sa vie de voyageur : ibidem, p. 27-29 ; JENNINGS Neil, JONES Margaret, A Biography of Samuel Chappuzeau,

op. cit. 105

Ibidem, p. 1 ; GOETINCK Jean F., Essai sur le rôle des Allemands, op. cit., p. 28, 30-31.

106

Sur les diverses éditions de ces ouvrages : JENNINGS Neil, JONES Margaret, A Biography of Samuel Chappuzeau,

op. cit., p. 112-120. Dans le cadre de cette thèse, nous avons eu recours, pour le premier volume à l’édition datée de

1667 avec la dédicace aux puissants souverains chrétiens : CHAPPUZEAU Samuel, L’Europe vivante, t. I, Genève, Jean Herman Widerhold, 1667 ; ainsi qu’à : CHAPPUZEAU Samuel, L’Europe vivante, t. II, Genève, Jean Herman Widerhold, 1669.

50

Charles a été au service de Condé pendant 25 ans108. Samuel lui-même rend visite au prince vers 1666109. Or celui-ci était alors très engagé dans les affaires de Pologne, où la reine Louise-Marie de Gonzague militait en faveur de sa candidature au trône. Samuel en a peut-être reçu des échos, qui auraient par la suite alimenté sa réflexion du second tome de L’Europe vivante (le premier étant alors déjà paru). Cet ouvrage en deux volumes n’est pas à proprement parler un traité, mais plutôt une description détaillée des États européens et de leur système politique. À cette occasion, l’auteur exprime des opinions favorables au pouvoir absolu des princes. En outre, il compare explicitement la République au royaume des lys, ce qui est d’un grand intérêt pour notre problématique. Notons enfin que grâce à cet imprimé, l’auteur a reçu la citoyenneté genevoise110. L’ouvrage est aussi offert à Louis XIV et à d’autres princes dans l’espoir d’obtenir des récompenses111. Cet aspect peut aussi éclairer sa glorification de la majesté des souverains, en particulier dans la dédicace du premier volume.

Pierre Bayle (1647-1706) prend lui aussi la défense de la monarchie absolue dans le monde protestant, et ce malgré la révocation de l’édit de Nantes. Né près de Toulouse dans une famille calviniste, il s’exile dès 1670 à Genève, puis à Sedan où il enseigne à l’académie protestante (fermée en 1681), et enfin à Rotterdam, où il meurt en 1706112. Il est l’auteur du

Dictionnaire historique et critique (1697), qui connaît une multitude de rééditions113. On lui attribue également l’Avis important aux réfugiés sur leur prochain retour en France, publié en 1690114. La Pologne apparaît très secondairement dans ces deux ouvrages. Ceux-ci révèlent les opinions politiques et religieuses de l’auteur. Un des pères de la tolérance moderne et partisan du pouvoir royal absolu, Bayle dénonce les persécutions menées par Louis XIV mais s’oppose à la résistance active, la liberté religieuse ne pouvant être, selon lui, imposée par la force115.

108

Sur Charles Chappuzeau : JENNINGS Neil, JONES Margaret, A Biography of Samuel Chappuzeau, op. cit., p. 7-16 ; GOETINCK Jean F., Essai sur le rôle des Allemands, op. cit., p. 27.

109

JENNINGS Neil, JONES Margaret, A Biography of Samuel Chappuzeau, op. cit., p. 112.

110

GOETINCK Jean F., Essai sur le rôle des Allemands, op. cit., p. 41.

111

JENNINGS Neil, JONES Margaret, A Biography of Samuel Chappuzeau, op. cit., p. 112 ; GOETINCK Jean F., Essai sur

le rôle des Allemands, op. cit., p. 29. 112

Plus d’informations sur la biographie de l’auteur dans : SOLÈRE J. L., « Bayle, Pierre (1647-1706) » inFOISNEAU Luc