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C. Les stratégies socio-affectives

2.15 LES PHENOMENES DE L’ERREUR

De prime d’abord une distinction entre faute et erreur s’impose, compte tenu de notre contexte de recherche où le terme « mistake » s’emploie souvent dans les deux cas malgré l’existence de « error », sans qu’on ne se soucie de la distinction.

Besse et Porquier (1984 :209) nous renvoient à distinction établie par la théorie Chomskyenne où erreur relèverait de la compétence et faute de la performance.

Selon un tel raisonnement, un apprenant ne peut pas corriger ses erreurs qui sont représentative de sa grammaire intériorisée, mais devait pouvoir corriger ses fautes imputables « à des lapsus, à la fatigue ou à diverses causes psychologiques ».

Les fautes montrent que l’apprentissage ne se fait pas seulement dans l’accumulation de mots et la mémorisation des règles plus ou moins compliquées et souvent déroutantes.

Besse et Porquier (op.cit :207), affirme que :

« Lorsque les besoins linguistiques ne sont pas assurés par la langue, les fautes servent à combler ce déficit, jouant ainsi un rôle fonctionnel dans la communication ».

En ce qui concerne les erreurs, elles peuvent « constituer des indices positifs

d’acquisition et relever de stratégies d’apprentissages ou de communication ».

Si nous avons décidé de consacrer quelques réflexions à l’erreur en classe de français langue étrangère, c’est parce que beaucoup d’enseignants (sans la distinguer de la faute), la voient comme signe d’échec, « une lacune, un défaut, un manque que l’enseignant est censé

combler, « guérir » avec les remèdes dont il dispose » (Jorro, 2000 : 24).

Pour Besse et Porquier (op.cit : 211), les attitudes envers l’erreur, souvent négatives et péjorativement canotées, sont liées à des représentations socio-culturelles et idéologiques. Cela fait que l’erreur est associée à la faiblesse des élèves « faibles » sont ceux qui commettent le plus d’erreurs, et ses effets sur l’apprentissage sont négatifs, pour ne pas dire désastreux.

Or l’erreur, nous savons, fait partie de l’apprentissage, quel que soit le contexte, le domaine ou les conditions dans lesquelles il se déroule. Malgré tous les efforts, il est inévitable que les erreurs se produisent.

A tous les niveaux, comme le dit Grandguillot (1993), l’enseignement se trouve confronté à une importante production d’erreurs dont l’éventail est d’autant plus large que l’hétérogénéité du groupe est forte.

Selon Cordier (1980 :9), plutôt que de se préoccuper des fautes elles-mêmes, «nous

devons concentrer notre ingéniosité sur des techniques de traitement » une fois qu’elles se

soient produites.

D’après lui, les erreurs de l’élève manifestent le système linguistique qu’il utilise à un moment donné du programme qu’il suit et ont une triple signification :

 D’abord pour l’enseignant, s’il est assez attentif pour entreprendre une analyse systématique, ces erreurs peuvent lui indiquer où en est arrivé l’élève par rapport au but visé et donc ce qui lui reste à accomplir.

 Les erreurs commises par les élèves fournissent au chercheur « les indications sur la façon dont une langue s’apprend ou s’acquiert » (op.cit :13) mais aussi sur les stratégies et les processus que l’élève utilise dans sa découverte de la langue.

 Les erreurs sont indispensables à l’apprenant, car il s’en sert pour apprendre. C’est pour lui, « une façon de vérifier ses hypothèses sur le fonctionnement de la langue qu’il

apprend » (op.cit).

Ces trois éléments nous renvoient à l’importance des objectifs formulés par l’enseignant au début de l’apprentissage et l’efficacité de l’évaluation privilégiée.

Jorro (op.cit :27), évoque deux conceptions de l’erreur : la première est la conception symptomatique qui campe sur une position d’extériorité, la deuxième et la conception formative qui appelle à une double centration :

« Point de focalisation unique sur l’élève mais réflexion de l’enseignant sur sa pratique ». Selon la conception symptomatique de l’erreur, « l’élève n’a pas la possibilité de rejouer les compétences dans de nouveaux contextes. quant à la conception formative dont le point fort est qu’elle appelle une réflexion du praticien sur sa démarche » (op. cit.), la réflexion est centrée sur le fait que l’enseignant peut revenir sur des situations de réussite et des situations d’erreurs. Cette réflexion constitue à la fois un enjeu de personnalisation et un regard nouveau porté sur l’action évaluative.

Selon Allwright et Bailley, quand une erreur n’est pas corrigée, les autres apprenants pourraient fixer cette forme ou fonction comme étant juste et il y a risque d’aller jusqu’à modifier les hypothèses existantes.

Quand et comment faut-il corriger l’erreur ? Dans le cas d’une attitude négative, celle-ci débouche sur « des pratiques directives, voire coercelle-citives et sur une sanction négative

dans l’évaluation et la certification des acquis » Besse et Porquier (op.cit).

Nous savons l’effet que cela peut avoir sur l’apprentissage et l’attitude éventuelle des apprenants qui se manifeste en inhibition ou stratégie d’éludage dont les productions orales et écrites portent souvent la trace matérielle. Bon nombre d’enseignants corrige la faute tout de suite, soit en cherchant la correction chez les autres apprenants, soit en encourageant l’apprenant à s’auto-corriger. Cela se fait souvent à travers des exercices structuraux et a peu de prise sur les causes même des erreurs, et sur leur relation à la grammaire intériorisée, stabilisée ou mouvante dont elles découlent.

Nous savons à partir de notre expérience que pour l’enseignant non-natif, le problème se pose au niveau de son incapacité à repérer l’erreur. Il est possible qu’un tel enseignant ne possède pas toutes les règles phonologiques, lexicologiques ou syntaxiques communicatives pour repérer et traiter toutes les erreurs dans la production de l’apprenant.

Quoi qu’il en soit, cet enseignant doit savoir que puisque les besoins des apprenants sont différents, même dans la classe, il ne peut pas, à chaque fois corriger l’erreur de la même façon.

Allwright et Bailley proposent trois façons de procéder quelque soit le cas : Il faut d’abord dire à l’apprenant qu’il a commis une erreur, ensuite lui expliquer où se trouve l’erreur et après lui montrer l’erreur.

Certains enseignants cherchent à responsabiliser les apprenants en leurs demandant de repérer eux-mêmes l’erreur et la corriger, seuls ou par paire.

Nous avons aussi remarqué qu’il y a des enseignants qui ne corrigent pas les erreurs des apprenants, « de peur de les décourager ». Nous somme d’accord que chaque enseignant connaît bien ses apprenants et l’effet qu’aurait une correction devant les pairs et c’est pour cette raison qu’il faut faire attention à la façon de corriger ; plutôt que de ne pas corriger du tout.

Une autre question se présente dans la classe de langue étrangère, notamment celle de l’interférence venant des langues en présence dans le milieu social (les langues qui sont parlées quotidiennement à l’extérieur de la classe et qui ne sont pas des langues écrites).