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3 Cadre théorique

3.2 Le processus de décision d’achat

Notre objectif est de décrire le processus d'achat traditionnel, afin d’en comprendre les étapes et le comportement lié à chacune d’entre elles, pour ensuite mettre l’accent sur l’influence de l’essor du numérique sur ce processus, en particulier le web, les réseaux sociaux, les sites de vente en ligne et les applications d’évaluation.

La théorie sur le processus de décision d'achat le plus courant chez la plupart des auteurs est celle des cinq étapes : la reconnaissance du problème, la recherche d'information, l’évaluation des alternatives, la décision d’achat et le comportement post-achat. Pour décrire chaque phase, nous nous appuierons sur les définitions les plus récentes des auteurs Brée (2017), Kotler & Armstrong (2019), et Salomon (2013) :

Figure 3: Les 5 étapes du processus d’achat (Kotler & Armstrong, 2019, p. 148)

Étape 1 : La reconnaissance du problème

Elle se produit lorsque nous constatons une différence importante entre notre état actuel et un état que nous souhaitons. Cette reconnaissance peut être très simple, immédiate et liée à des stimuli internes comme une forte sensation de faim (reconnaissance du besoin), ou à des besoins plus subjectifs du consommateur contemporain, et liés à des stimuli externes comme l’exposition à une affiche publicitaire pour une barre de chocolat (reconnaissance de l'opportunité) (Kotler &

Armstrong, 2019).

Dans les deux cas, le problème doit trouver une solution. Le sentiment d’un écart entre un état actuel et un état souhaité est une condition nécessaire pour initier le processus, c’est-à-dire qu’il existe un besoin à satisfaire. La reconnaissance de ce besoin n'est pas suffisante pour conclure un achat, car elle peut se heurter à des questions financières ou temporelles (Brée, 2017).

Dans cette étape, la publicité numérique ou traditionnelle et les réseaux sociaux dans lesquels le consommateur est inséré jouent un rôle important. Ils peuvent rester dans sa mémoire et susciter en lui le désir ou le souhait d’un produit et conséquemment l’amener aux prochains actes de ce processus d’achat.

Étape 2 : La recherche d’information :

La recherche d'information est un processus par lequel le consommateur cherche autour de lui les données qui l'aideront à résoudre le problème de manière sensée.

Il peut chercher ou non des informations complémentaires, et l’intensité de la recherche peut dépendre de différents facteurs comme : la force du besoin, la quantité d’informations qu’il possède déjà, la facilité à obtenir plus de détails, la satisfaction d’effectuer des recherches, la valeur qu’il accorde à ces nouvelles informations et le temps qu’il a à disposition (Kotler & Armstrong, 2019).

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Avant l’achat, selon les mêmes auteurs, le consommateur qui choisit de chercher des informations supplémentaires peut faire appel à plusieurs sources : la mémoire et les expériences passées, où il a les paramètres minimums de connaissance de l'information dont il a besoin, les sources personnelles (la famille, les amis, les connaissances, les réseaux sociaux, etc.), les sources commerciales (publicités, sites de vente en ligne, vendeurs, etc.), les sources publiques (articles de presse, les applications comparatives, etc). « L’influence respective de ces différentes sources varie en fonction du produit considéré et des caractéristiques de l’individu » (Kotler &

Armstrong, 2019, p. 149).

Les auteurs citent aussi les consommateurs qui ne font pas de recherches préalables et font leurs achats sans analyses. Par exemple, lorsqu’il s’agit d’un produit qu’ils achètent régulièrement et qui est facile à trouver.

Dans le cadre de cette recherche, nous allons étudier l’effort et les outils employés par les consommateurs dans les recherches d’informations avant d’effectuer l’achat.

Étape 3 : Évaluation des alternatives

Ensuite, pour comparer les différentes options, le consommateur va croiser les informations collectées avec ses critères personnels. Ce n’est pas une étape nécessairement facile. De nombreux autres facteurs internes et externes peuvent avoir un impact. Dans certains cas, le consommateur va analyser soigneusement les pour et les contre d’une façon logique, tandis que des autres cas l’achat sera impulsif et basé sur des intuitions.

« Les acheteurs prennent parfois seuls la décision d’achat, mais ils font aussi parfois appel au jugement des autres consommateurs, aux conseils de leurs amis ou des vendeurs » (Kotler & Armstrong, 2019, p. 149). Dans ce passage, les auteurs illustrent leur propos avec l’exemple d’un consommateur ayant réduit son choix à trois modèles de voitures. La décision finale repose sur quatre attributs : le prix, le coût d’utilisation, la garantie et le style. La logique voudrait qu’il opte pour la voiture qui réunit tous les attributs, mais il est rare qu’un produit possède toutes ces qualités. Il peut privilégier un seul critère ou se baser sur les critères les plus importants en fonction de son profil et, surtout, de sa culture (Kotler, & Armstrong 2019).

Cette phase mène en effet à la formation d’une attitude à l’égard d’un produit ou d’un service pouvant être suffisamment favorable pour que le consommateur envisage de l’acheter.

Étape 4 : La décision d’achat

Il constitue la conséquence logique des étapes précédentes. Néanmoins, des facteurs situationnels au point de vente (disponibilité, prix, qualité de l’accueil, recommandations et expériences de son entourage) peuvent agir à ce niveau, en amenant même à une reconsidération du processus évaluatif.

Ce processus peut varier considérablement en fonction de la complexité de l'achat.

Selon Salomon (2013) nous avons trois situations d'achat différentes :

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1. L’achat entièrement planifié : le consommateur entre dans le magasin en ayant déjà pris sa décision.

2. L’achat partiellement prévu : il y a intention d'acheter, mais la décision concernant la marque sera définie dans le magasin.

3. Achat non planifié : le produit et la marque sont définis au sein du magasin. Ne pas confondre avec l'achat impulsif, car le consommateur a déjà l'intention d'acheter mais ne l’a pas exprimée ou inscrite sur une liste d’achats.

Ces définitions s'appliquent davantage aux achats dans des magasins physiques, mais dans l'environnement virtuel, le consommateur a la possibilité d'être sur plusieurs sites de ventes en ligne en même temps, de consulter et de comparer les prix dans les moteurs de recherche et de générer ses critères de décision de manière très dynamique. Les achats impulsifs sont également plus probables lorsque l'on peut faire un achat en un seul clic.

Dans le cadre de cette étude, nous nous concentrerons sur l’analyse de l’utilisation des canaux digitaux ou traditionnels pour effectuer l’achat des produits alimentaires bio.

Étape 5 - Le comportement post-achat

Cette dernière étape vise à apprécier l’adéquation de la solution retenue au problème initial. Le consommateur évalue le degré de satisfaction ou d’insatisfaction après achat (Brée, 2017).

Un client satisfait a tendance à acheter de nouveau le même produit et aussi les autres produits qui appartiennent à la marque. En plus de résister à des campagnes de marques ou produits concurrents, il va aussi transmettre son avis par le bouche-à-oreille (Kotler & Armstrong, 2019). Cependant un client insatisfait a un pouvoir de nuisance très forte, puisqu’il peut choisir de parler de son expérience négative avec son entourage et aussi via les réseaux sociaux.

Finalement, nous voyons que le processus d’achat commence bien avant et continue bien après l’achat. Dans cette étude nous nous pencherons surtout sur l’influence du numérique sur la consommation de produits alimentaires bio par rapport aux étapes du processus d’achat : 2. la recherche d’information, 4. la décision d’achat et 5. le comportement pos-achat.

Il est également important pour cette recherche de comprendre l’évolution du numérique, les acteurs déjà existants ou nouveaux de l’univers digital et enfin analyser l’influence qu’ils ont dans les différentes parties de ce processus d’achat.

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L’évolution du numérique et le comportement du consommateur

Le progrès du numérique, la vitesse à laquelle apparaissent les innovations et la croissance du nombre de citoyens connectés à travers le monde impactent plusieurs secteurs, dont la consommation et le processus d’achat. Internet et le web social sont les emblèmes de cette évolution et ont notamment révolutionné la façon de consommer. Le web existe depuis plus de 25 ans. Il est devenu une source d'information quotidienne et omniprésente dans la vie de nombreuses personnes.

Comprendre son évolution contribue à comprendre son impact sur la consommation.

Le web est né en 1989, en Suisse, dans l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN) lorsque le chercheur britannique Tim Berners-Lee a inventé le « World Wide Web ». « À l’origine, le projet a été conçu et développé pour que des scientifiques travaillant dans des universités et instituts du monde entier puissent s'échanger des informations instantanément » (CERN, s. d.). Le web 1.0 a été qualifié comme « web réplicatif » car on voit se répliquer sur Internet les modèles qu’on avait précédemment offline, comme les médias et les services traditionnels.

(Scheid, Fontugne, Vaillant & Montaigu, 2019) Nous pouvons le résumer comme le web qui a contribué à la mise en ligne des données.

Depuis le début, Internet « suscite immédiatement un très grand intérêt dans la sphère du retail » (Cliquet, Picot-Coupey & Basset, 2018, p. 37). Il a aussi un grand impact sur l’économie et sa progression.

Dans la deuxième moitié des années 90, l’e-commerce fait son apparition sur les écrans des ordinateurs de bureau et sur les ordinateurs portables. (Cliquet, Picot-Coupey & Basset, 2018). Tout va alors très vite et dès fin 2002, l’heure d’Internet grand public décolle en termes d’usage dans un nombre record de foyers, ainsi que le début de « web 2.0 » (Scheid, Fontugne, Vaillant & Montaigu, 2019).

Les auteurs et spécialistes dans le domaine Kaplan & Haenlein ont bien élucidé le terme comme :

« Un terme utilisé pour la première fois en 2004 pour décrire une nouvelle façon dont les développeurs de logiciels et les utilisateurs finaux ont commencé à utiliser le World Wide Web, c'est-à-dire comme une plateforme où le contenu et les applications ne sont plus seulement créés et publiés par des individus, mais sont au contraire continuellement modifiés par tous les utilisateurs de manière participative et collaborative » [traduction libre] (Kaplan

& Haenlein, 2010, p. 60).

C’est pour cela qu’il est qualifié comme un « web de collaboration », qui permet beaucoup plus de participation et sociabilisation. « Nous entrons dans une période d’interaction. L’internaute devient une personne active sur la toile. Nous devenons des potentiels producteurs des contenus. Le web se démocratise et se dynamise » (Badillo, 2019. Introduction à la Communication Digitale [notes de cours], Université de Genève, le 27 mars 2019). Les acteurs du numérique ont utilisé ces innovations pour offrir de nouveaux services. « Ces services placent l’internaute au centre d’Internet et l’aspect relationnel au cœur de la logique 2.0 avec trois usages clés » (Scheid, Fontugne, Vaillant & Montaigu, 2019, p. 36) :

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1. Le partage : la possibilité de partager n’importe quel contenu à n’importe à quel moment. (textes, vidéos, images, podcast, etc.).

2. La contribution : l’internaute et/ou consommateur passe de passif à actif (en publiant du contenu (commentaires, opinions, notations, etc.) via les blogs, Wikipédia, etc.

3. La communauté : la possibilité de se connecter, s’engager, d’échanger et de créer un lien avec les autres internautes ou consommateurs via les nombreux réseaux sociaux

Le concept de web 3.0 est apparu en 2008, aussi appelé « web sémantique », qui tente de donner du sens à l’énorme quantité de données recueillies tous les jours. Il est aussi considéré comme un web plus portable et qui fait progressivement le lien entre monde réel et monde virtuel, ou magasins traditionnels et magasins en ligne. Il répond aux besoins d’utilisateurs mobiles, toujours connectés à travers une multitude de supports et d’applications. Le web 3.0 « souligne l’évolution dynamique du marketing digital » (Scheid, Fontugne, Vaillant & Montaigu, 2019, p. 39). Il est plus intuitif et rapproche le consommateur de ses préférences en utilisant les modèles prédictifs, autrement dit un modèle mathématique qui permet d’évaluer et prédire l'action future d'un client ou prospect.

Déjà dans un contexte futuriste, des chercheurs parlent de web 4.0, ou « web intelligent ». Il effraie autant qu’il fascine, parce qu’avec ce concept nous passons du réel au virtuel. Il pousse à la voie de la personnalisation ouverte par le web 3.0, mais il pose par la même occasion de nombreuses questions quant à la protection de la vie privée, au contrôle des données, etc. (Badillo, 2019. Introduction à la communication digitale [notes de cours], 27 mars 2019).

En paraphrasant Dominique Cardon dans son ouvrage la Culture numérique : « Si nous fabriquons le numérique, le numérique nous fabrique aussi » (Cardon, 2019, p.

9).

Nous voyons que le web a engendré un nombre important de changements et des nouvelles plateformes digitales et canaux de communication ont été mis à disposition des consommateurs, leur permettant de rechercher, comparer, acheter ou recommander les produits, ce qu’ils ne pouvaient pas faire avant.

23 personnalisation et en attente d’une relation commerciale plus individuelle. « Les nouvelles pratiques des consommateurs tendent à se fragmenter et se caractérisent par un recours à des canaux2 et à des formats de plus en plus varies » (Badot &

Lemoine, 2013, p. 3), uniquement dans un magasin physique, uniquement sur Internet et/ou multicanal, c’est-à-dire, sur plus d’un canal de vente, incluant des points de vente hors ligne (physiques) et les points de vente en ligne.

Actuellement, les consommateurs peuvent faire des achats 24/7 (vingt-quatre heures sur vingt-quatre heures, sept jours sur sept) sans quitter leur domicile, consommer de l’information sans aller dans un kiosque à journaux et même accéder à toute l’information sur un produit à travers quelques clics ou touches, grâce à l’utilisation croissante de ces appareils connectés (smartphone, tablettes et ordinateurs portables ou fixe). La présence de ces appareils dans la vie quotidienne des consommateurs change leur comportement et leur parcours d’achat, en mettant à disposition une de leur caractéristique principale : leur dimension ubiquitaire.

« L’acronyme ATAWADAC pour Any time, any where, any device, any content a été créé pour rendre compte de ces contenus ou services accessibles à tout moment, partout et sur tous les supports digitaux par ce nouveau genre de consommateur ubinaute3 » (Cliquet, Picot-Coupey & Basset, 2018, p.100).

D’après Net-Metrix (2019), il y a en Suisse une hausse continue de l'utilisation des smartphones parmi les internautes : « le nombre d'utilisateurs de smartphones a augmenté de 376'000 personnes en une année. » En pourcentage cela correspond à 82,5% de la population, ce qui démontre que les smartphones sont devenus un assistant indispensable dans le quotidien des utilisateurs. En plus, ils montrent aussi que 62,1% utilisent l’ordinateur de bureau et 50,3% les tablettes.

« Le consommateur digital est devenu un enjeu majeur pour les marques, car il prend ses distances avec les approches marketing classiques, basées sur la persuasion. Il est exigeant, complexe et plus difficile à fidéliser. Les vieilles recettes ont vécu » (Riou, 2017, p. 18). Actuellement, nous vivons dans un nouveau monde.

La manière de prendre des décisions connaît des changements drastiques.

L’Internet, qui a apporté la connectivité et la transparence à nos vies, est largement responsable de ces changements (Kotler, Kartajaya, Setiawan & Vandercammen, 2017). « Il n’y a pas de doute que la révolution numérique est le phénomène qui aura l’impact le plus significatif sur le comportement des consommateurs » (Solomon, 2017, p. 16).

2 Toutes les interfaces (physiques ou virtuelles) qui permettent au client de rencontrer un produit, service et/ou marque.

3 Consommateurs vivant une expérience d’achat ubiquitaire.

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3.3 Les acteurs impliqués dans la prise de pouvoir des consommateurs