La réalisation des PPP prend le plus souvent la forme d’un montage en financement de projet classique, associant des fonds pr res et des financementop s bancaires.
1/ Dans un montage en financement de projet, la personne publique contracte avec une société de réalisation dédiée au projet (special purpose vehicle – SPV – ou société de projet), titulaire du contrat de partenariat. Cette société assure la réalisation de l’intégralité du projet en contractant avec plusieurs prestataires (bureaux d’étude, entreprises de travaux publics et de maintenance, établissements de crédit, compagnies d’assurance, etc.), et assume ainsi un rôle d’ensemblier.
Les actionnaires de la société de projet sont généralement les entreprises en charge de la construction
53 Les collectivités territoriales sont soumises au principe de l’équilibre réel des budgets, régi par l’article L.1612 ‐ 4 du CGCT. Les sections de fonctionnement et d’investissement doivent donc être votées à l’équilibre. La règle d’or découle de ce principe d’équilibre budgétaire et impose aux collectivités de ne recourir à l’emprunt que pour financer des dépenses d’investissement. Le financement des dépenses de fonctionnement et le remboursement de la dette doivent donc s’opérer à partir des ressources propres de la collectivité.
54 D’autres montages peuvent cependant être envisagés pour des projets de plus faible montant : le financement apporté directement par la société assurant la réalisation du projet, ainsi que les montages en crédit‐bail. Ces deux montages ne sont adaptés qu’à des projets de taille modérée et présentant un degré de complexité limité.
de l’infrastructure, les principaux prestataires de service, les établissements de crédit ainsi que des investisseurs spécialisés55. La participation au capital de la société de projet contribue au partage des risques entre les différents intervenants privés.
Les fonds propres investis par les actionnaires ne contribuent que de manière résiduelle au financement de l’ouvrage (généralement 10% du montage). Un volume limité de fonds propres permet de limiter le coût global du financement, dans la mesure où le taux de rendement interne56 exigé par les apporteurs de fonds propres est plus élevé que les taux d’intérêt bancaires.
2/ La majeure partie du financ ment e du projet est apportée sous forme de dette bancaire, contractée par la société de projet (près de 90 % du montant à financer des projets) :
en phase de construction, la société de projet recourt à des prêts de court terme destinés à assurer la fourniture de trésorerie adaptée au projet de construction ;
en phase d’exploitation, la société de projet refinance la dette à court terme contractée en phase de construction. Les emprunts de long terme sont d’une maturité identique ou proche de la durée du contrat de partenariat. La fixation du coût des crédits (« cristallisation des taux ») peut intervenir dès la signature du contrat ou ultérieurement et au plus tard, à la livraison de l’ouvrage.
3/ Une fraction prépondérante de cette dette bancaire bénéficie de la garantie apportée par
une cession de créance détenue par la société de projet sur la personne publique (dite « cession
Dailly »)57 :
dans ce dispositif, la société de projet cède aux établissements de crédit la créance constituée par l’engagement de paiement des loyers par la personne publique ;
la cession de créance porte sur le montant des loyers d’investissement et de financement. Elle est prévue dès la signature du contrat de partenariat, qui en fixe les conditions. Ce mécanisme, qui
Société de projet Société de projet
Contrat Construction
Contrat PPP
Fonds propres 10%
Etablissement Contrat exploitation et
maintenance Cession de créances
80% acceptation et paiement direct du
loyer
Société de projet Société de projet
Contrat Construction
Contrat PPP
Fonds propres 10%
Etablissement Contrat exploitation et
maintenance Cession de créances
80% acceptation et paiement direct du
loyer investissement
Paiement des loyers
En réduisant le risque supporté par l’établissement prêteur, la cession de créance permet de diminuer le coût de l’emprunt. Avant septembre 2008, les marges de financement associées à un prêt dossé à une cession de créance étaient limita ées à 10 à 20 points de base au‐dessus du prix de la ressource interbancaire (taux Euribor).
Afin de faciliter la réalisation des ouvrages en PPP en période de tarissement des financements bancaires, le législateur a autorisé en 2009 l’octroi de financements publics58.
55 Dans les montages dits « innovants », ou dans certains projets sensibles de l’État (comme dans celui de la
co cf.
innstruction du site du ministère de la Défense sis à Balard), la Caisse des dépôts est actionnaire des SPV ( fra). l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés a prévu que le partenaire privé pouvait se voir confier « tout ou partie » du financement de l’ouvrage.
Ce montage repose cependant sur l’existence d’un financement privé abondant et de long terme. Or, l’examen d’un échantillon de contrats59 montre que la crise financière a profondément bouleversé les conditions d’accès au crédit et remis en cause l’accès quasi illimité des personnes publiques à la liquidité bancaire, tel qu’il avait pu être observé avant 2008 (cf. annexe V). Les déterminants de cette évolution sont multiples :
la crise financière a, de manière générale, conduit à une diminution de l’activité et de la rentabilité des banques, poussant cellesci à augmenter leurs marges ;
le renforcement de la réglementation prudentielle, prévue par le comité de Bâle60, a contraint la capacité de financement des établissements de crédit. Pour faire face aux nouvelles exigences prudentielles, les banques doivent allonger la maturité de leurs passifs et réduire leur dépendance aux financements de court terme afin de limiter la transformation61.
Dans ce contexte, le financement bancaire traditionnel des projets de PPP apparaît menacé par :
un « coût d’opportunité » croissant ; par rapport à un financement sur crédit budgétaire, le coût d’un PPP est devenu très important, en raison de la diminution du rendement des obligations d’État. Depuis 2008, l’écart de coût entre le financement public direct et le financement bancaire a rendu le financement public globalement plus attractif que le financement privé ;
un tarissement des liquidités bancaires, notamment sur des maturités supérieures à 15 ans. Actuellement, la liquidité est apportée principalement par des établissements bancaires étrangers, notamment japonais, allemands et, jusqu’à une période récente, espagnols62, qui bénéficient d’un accès privilégié à la liquidité63 mais dont la présence pérenne sur le marché français ne peut être assurée ;
des exigences de garanties démesurées de la part des établissements bancaires, qui font peser des risques importants sur les acheteurs publics.
59 Afin de documenter l’évolution des conditions de financement des contrats de partenariat, la mission a procédé à l’étude d’un large échantillon de 63 PPP établis par l’État (23 contrats), des établissements hospitaliers (4 contrats) et des collectivités locales (36 contrats), et signés de février 2006 à juillet 2012.
60 Les accords de décembre 2010, dits de « Bâle III », sont en cours de transposition en droit communautaire dans le cadre de la directive « CRD IV ».
61 Autorité de contrôle prudentiel, Présentation du secrétaire général adjoint au Club banque, 19 jui 2010.n
62 Par exemple, pour les banques japonaises : Mizuho, Bank of Tokyo‐Mitsubishi, Sumitomo Mitsui Banking Corporation ; pour les banques allemandes : Bayern LB, KfW, DZ Bank ; pour les banques espagnoles : BBVA et Santander. Les difficultés actuelles des établissements espagnols devraient néanmoins réduire leur rôle sur le marché du financement des infrastructures.
63 À titre d’exemple, le pool bancaire finançant la ligne à grande vitesse Bretagne Pays de Loire dans le cadre d’un CP signé en 2011 entre RFF et Eiffage, est constitué de BBVA, Santander, Société générale, Bayern LB, Mizuho, SMBC, Bank of Tokyo‐Mitsubishi, Sumitomo Mitsui Banking Corporation, ING, KfW, DZ Bank, Unicredit, Crédit mutuel, pour un montant total à financer de 1,02 Md€.