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Section 2 : Typologie et sources de financement de l’aide internationale au développement

2.2. Le financement de l’aide publique au développement

Parler de financement de l’aide publique au développement consiste à toucher du doigt le mécanisme mis en place pour mobiliser les ressources qui ont pour but de promouvoir le développement des pays pauvres. Dans le domaine de l’aide, la contribution la plus connue est celle qui vise à porter l’APD à 0,7 % du Revenu National Brut (RNB) des pays membres du CAD. Plusieurs modèles de financement de l’APD se sont succédés, mais l’apport de 0,7 %, du revenu national des pays donateurs a perduré et continue à être réaffirmé (Gabas et Riber, 2013 ; Raballand, 2015)7.

7 La norme internationale pour le financement du développement reste fixée à 0,7 % du RNB des pays

membres du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE depuis le début des années 1960. Cette norme n’a jamais été remise en question dans ses fondements.

60 La véritable signification de l’apport de 0,7 % du RNB des donateurs est difficile à appréhender en dehors du contexte historique dans lequel il fut adopté. Nous tentons ici de l’expliquer. La décennie 1970 est marquée par la revendication du mouvement de la Dependancia8 qui motive

les États du nord à proclamer un nouvel ordre économique international (NOEI) qui stipule que le modèle de l’aide au développement des décennies précédentes, basé sur l’industrialisation et la croissance économique, soit remplacé par une nouvelle idéologie où l’accent serait mis sur la redistribution des richesses et l’aspect équitable de la croissance. Les pays pauvres avaient en effet réclamé, lors de plusieurs conférences internationales, le partage des bénéfices de la croissance entre les États de la planète et plaidé pour une aide fondée sur la compensation des échanges qu’ils considéraient comme inégaux (Thérien, 2001). C’est donc dans un contexte marqué par d’intenses préoccupations de redistribution sur le plan mondial que l’objectif de transférer un pourcentage de la richesse des pays développés vers les pays en développement, trouve son sens premier. Selon cette nouvelle idéologie, « l’aide s’apparente à un impôt international payé par les pays riches au profit des pays dans le besoin » (Jacquet, 2006, p. 943). À cette nouvelle idéologie naissante de l’aide s’est ajouté le questionnement de savoir quelle part de leur richesse (RNB) les pays développés devraient consacrer à l’aide. In fine, dans sa configuration actuelle, l’aide publique au développement réunit l’ensemble des contributions équivalent à au moins 0,7 % du RNB des pays donateurs.

2.2.1. Les montants en jeu

L’importance accordée à l’APD se jauge aussi par les chiffres, c’est-à-dire les montants qui lui sont dédiés. Depuis 19609, le volume de l’APD a progressé à un rythme plus ou moins régulier. Il est passé de 5 milliards de dollars en 1960 à 62 milliards en 1992. Après avoir atteint ce pic, l’APD s’est fortement contractée jusqu’en 1997, année à partir de laquelle elle est repartie progressivement à la hausse pour atteindre, en 2005, 108 milliards de dollars. Après 2009, l’APD renoue progressivement avec la croissance pour atteindre, en 2010, un nouveau record à la hauteur de 128 milliards de dollars comme en témoigne la figure 3. Les chiffres révèlent également une baisse des montants de l’APD à partir de 2011 pour attendre 125 milliards de dollars en 2012 (OCDE, 2012), mais une reprise à la hausse en 2013, année au cours de laquelle

8 Le mouvement de la « Dependancia » soutenait que les États du Nord tireraient leur croissance économique

de l’exploitation des ressources naturelles et de la main d’œuvre des pays pauvres. Ce ne serait donc pas une intégration au marché capitaliste qui permettrait le développement des pays du Sud mais, au contraire, la sortie de ce système.

9 Les chiffres de l’APD débutent en 1960 année à partir de laquelle l’OCDE a commencé à tenir les statistiques

61 l'APD de tous les pays du CAD a atteint un montant de 134,8 milliards de dollars, soit une augmentation de 6,1% par rapport à 2012. En 2014, l’APD atteint le montant record de 161 milliards de dollars et a connu une légère baisse en 2016 affichant plus de 157 milliards de dollars.

Pour la bonne compréhension de la figure 3, nous aimerions apporter des éclaircissements. L’aide au développement peut se chiffrer de plusieurs manières :

 En valeur absolue (en monnaie) ;  Par rapport au PIB du pays donneur ;

 Par rapport au PIB du pays bénéficiaire, ce qui indique le poids relatif de l’APD par rapport à l’ensemble de l’économie du pays ;

 Ou encore par rapport au RNB dans le pays bénéficiaire ou dans le pays donneur. Ici, nous nous appuyons sur la première manière de la chiffrer et l’une des plus courantes : le chiffrage de l’ensemble des fonds levés pour l’APD en valeur absolue, c’est-à-dire en monnaie. Aussi, le volume de l’APD est généralement exprimé en dollars des États-Unis. Il peut être présenté à prix (taux de change) courants ou à prix constants (taux de change moyen) par rapport à une année de référence précise qui est, communément, l’avant-dernière année pour laquelle on dispose des chiffres vérifiés.

62 Figure 3 : L'APD octroyée par les pays de l'OCDE de 1960-2016 en milliards de dollars USD

Source : Site de l’OCDE : www.oecd.org/dac/stats/idsonline . Consulté le 18 mars 2018.

En Côte d’Ivoire, la question de l’APD suscite des débats au regard des montants importants octroyés. Avec une progression constante depuis 1960, l’APD s’élevait à 1,5 milliard de dollars en 1994. Elle a ensuite dégringolé et s’élevait à 845 310 000 millions de dollars en 2010 pour atteindre un pic sans précédent de 2,9 milliards de dollars. Elle a de nouveau replongé dès l’année suivante et totalisait en 2016 un montant de 658 490 000 de dollars US (voir figure 4). Ces montants considérables interpellent, comme l’exigent les accords de l’OCDE, que l’on s’intéresse à l’évaluation de la performance des programmes ou projets financés.

63 Figure 4 : L'APD reçue par la Côte d'Ivoire de 1960-2016 en milliards de dollars USD

Source : Site de l’OCDE : oecd.org/dac/stats/idsonline. Consulté le 18 mars 2018.

La Côte d’Ivoire, comme plusieurs pays de l’Afrique sub-saharienne, vit une situation économique et sociale difficile et donc sujette à l’aide internationale au développement. La Côte d’Ivoire a connu une série de crises socio-politiques de 2000 à 2011 ayant conduit au recul du PIB réel par habitant de 21%. Sous l’impulsion d’importantes réformes structurelles et d’appuis de bailleurs de fonds au développement, l’activité économique a fortement repris depuis 2012, avec un taux de croissance de 9,8%, contre une baisse de 4,7% en 2011. Cette croissance, favorisée par l’amélioration de la situation socio-politique, a été tirée par le secteur secondaire (+19,2% de croissance) en particulier les branches « bâtiments et travaux publics » (BTP) et « extraction pétrolière », soutenu par la banque mondiale, et le secteur tertiaire (+13,5% de croissance) en liaison avec la bonne tenue du transport. Le secteur primaire a, pour sa part, enregistré un ralentissement en 2012 du fait des contre-performances de l’agriculture. La situation budgétaire s’est relativement améliorée depuis 2012. La Côte d’Ivoire a atteint le point d’achèvement de l’initiative pays pauvres très endettés (PPTE) en juin 2012. Cela a été possible

64 grâce à un programme économique et financier soutenu par le fonds monétaire international (FMI) et la Banque Mondiale (Source : FMI et autorité ivoirienne)10.

De nombreux jeunes sont sans emplois du fait des crises récentes. La structure du chômage reflète une vulnérabilité relative des jeunes (12,2% de chômage chez les 15-34 ans), en particulier les jeunes femmes (15,0% de chômage contre 9,7% pour les jeunes hommes) et un chômage de primo-insertion (69,9% des chômeurs cherchent leur premier emploi). En raison de cet état économique et social difficile, la Côte d’Ivoire bénéficie de l’aide bilatérale ou multilatérale, de plusieurs bailleurs de fonds.

Parler de l’APD c’est aussi connaître ceux qui la donnent (2.2.2.) et ceux qui la reçoivent (2.2.3.).

2.2.2. Les pays donateurs

L’APD est financée par trente-cinq pays membres du CAD-OCDE11. Un autre groupe de pays donateurs est constitué par les pays arabes exportateurs de pétrole, ceux-ci sont présentés. Par ailleurs, de plus en plus de pays acquièrent le statut de « bénéficiaire et contributeur de l’aide ». On les regroupe sous le terme de « donateurs émergents ».

L’aide internationale au développement qu’elle soit financière ou non financière, qu’elle soit de source publique ou privée, peut être bilatérale ou multilatérale.