• Aucun résultat trouvé

Chapitre 2. Orientations méthodologiques

2.2. Le choix des systèmes numériques

Nous interrogeons dans cette recherche nombre d’élèves par rapport au fonctionnement de deux systèmes numériques en particulier : le Tableau Numérique Interactif et le Smartphone tactile. Le choix de ces dispositifs a été dicté par deux critères : d’un côté il s’agit de dispositifs proches et familiers des élèves ainsi qu’accessibles à leur étude formalisée et, de l’autre côté, il s’agit des dispositifs comparables à la fois sur la plan fonctionnel et structurel. 2.2.1. Du point de vue de leur proximité vis-à-vis des élèves

Introduits formellement en France en octobre 2004 dans le cadre du projet PrimTice (Ministère de l'Education Nationale, de la Jeunesse et de la Vie Associative, 2011), la présence des Tableaux Numériques Interactifs dans les établissements scolaires françaises n’a cessé d’augmenter54 depuis, principalement dans le secteur primaire et le secteur secondaire (Ministère de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, 2015 ). Les TNI sont effectivement installés dans des nombreuses salles de classes et, par conséquent, accessibles à l’examen et à l’étude de nombreux élèves à travers l’enseignement de la technologie.

En ce qui concerne les Smartphones tactiles, le contexte est encore plus favorable à l’accès des élèves à ces dispositifs. Comme le mesure l’INSEE (2016), en 2014 un nombre très important (91 %) des ménages français était équipé de téléphones portables. Or, précise le site, les ménages français privilégient davantage les Smartphones. Alors que ceux-ci représentaient les trois quarts des achats en 2014 (77%) – deux tiers en 2013 – ils représentent 84 % des téléphones acquis en 2015. Le document parle en ce sens d’« explosion » pour se référer à l’achat des Smartphones et des tablettes tactiles : « l’achat de Smartphones sans engagement explose à nouveau cette année (+ 70 %), renforçant encore la suprématie des Smartphones sur le marché » (INSEE, 2016).

Les Smartphones tactiles sont aujourd’hui, en effet, des « objets de la vie courante » les plus banaux. Ils se trouvent de ce fait dans la poche de nombreux élèves et sont également accessibles à leur examen détaillé et médiatisé par l’enseignant de technologie. L’intérêt et l’actualité que peut présenter l’étude de ce dispositif dans l’enseignement de la technologie et

54Par rapport à d’autres pays européens, notamment avec l’Angleterre, cette augmentation n’a été en France que

très discrète et modérée. Par exemple, en 2007 et selon le Becta Harnessing Technology Schools Survey, plus de 98% des écoles (primaires et collèges) au Royaume-Uni étaient équipées en TNI, tandis que dans le même période le paysage scolaire français (écoles, collèges et lycées) comptait avec environ 7 000 TNI.

des sciences en général sont attestés par la présence d’un ensemble de ressources mis à disposition par le Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (2016), afin d'accompagner la mise en œuvre des nouveaux programmes du collège.

2.2.2. Des similitudes entre les systèmes : fonctionnelles et structurelles

Le choix des systèmes Tableau Numérique Interactif et Smartphone tactile a aussi été dicté par le fait qu’il s’agit de deux systèmes présentant des similitudes fonctionnelles et structurelles importantes. En effet, de par leur caractère de systèmes numériques, tant le fonctionnement du Smartphone comme celui du TNI dépendent de la présence d’une unité de traitement de l’information équipée des processeurs et des logiciels. Leur fonctionnement dépend aussi des processus de transmission de l’information entre les différents composants du système. En outre, tant le fonctionnement du TNI que celui du Smartphone ne sont possibles que parce qu’il existe une unité de détection composée de capteurs et dont le rôle est la prise en charge des différentes actions de l’utilisateur sur le système. Prendre en compte l’action et la détection en tant que blocs fonctionnels, ainsi que relever la présence des capteurs en tant que composants sont donc des dimensions fondamentales vis-à-vis de la description du fonctionnement des deux artefacts ici retenus : ce sont essentiellement les actions de l’utilisateur sur le système qui seront d’abord détectées, puis transmisses et traitées dans l’unité de traitement afin de répondre aux attentes de l’utilisateur et d’assurer ainsi un fonctionnement adéquat. Enfin, les deux dispositifs concrétisent leur fonctionnement par une dernière étape assurant l’affichage que nous appelons ici « Sortie ».

2.2.3 Des différences entre les systèmes : transparences et usages

En revanche, bien que les deux artefacts présentent des points communs relatifs à la structure et au fonctionnement, ils accusent aussi des différences bien marquées, notamment du point de vue de leur transparence structurale et du point de vue des usages dont ils font l’objet chez les élèves. En effet, les élèves perçoivent et interagissent avec ces artefacts de manière fondamentalement distincte : alors que le système TNI révèle aux élèves une certaine transparence structurale, le système écran tactile révèle aux élèves une opacité structurale absolue.

Le système TNI expose effectivement aux élèves un certain nombre de composants tels que les câbles, l’ordinateur, le vidéoprojecteur, le stylet et l’écran. Cette transparence structurelle

du dispositif – qu’on peut qualifier de type « boite de verre » (Rabardel, 1993) – permet aux élèves de constater les liaisons filaires entre certains des éléments du système et de délimiter ainsi le périmètre caractérisant l’« ensemble TNI ». Or, précisons avec Lebeaume (2011) que l’architecture d’ensemble du Tableau Numérique Interactif ne peut en aucun cas être réduite aux seuls éléments perceptibles « car ils masquent le traitement, les entrées et les sorties ainsi que le stockage de l’information assurés par le logiciel, les connexions Internet et les liaisons Wifi » (p. 162). La question est donc de savoir si la modélisation des élèves tient compte de ces aspects masqués.

En revanche le téléphone à écran tactile, quant à lui, il n’expose aux élèves que son écran et quelques boutons. La transparence associée au Smartphone est donc de type « boite noire » et repose sur l’invisibilité de l’intérieur du système. A contrario donc du TNI, l’opacité structurale du système Smartphone empêche aux élèves de constater à la fois la présence de l’ensemble des composants constituants et des liaisons entre ces composants.

Ajoutons à ces éléments une deuxième dissemblance, à savoir l’existence de deux processus de « genèse instrumentale » (Rabardel, 1995a) car différemment mis en œuvre dans l’interaction des élèves avec les artefacts qui ont été proposés à leur investigation et analyse dans cette recherche. En effet, en tant que téléphones portatifs, les téléphones tactiles sont des artefacts particulièrement proches des élèves et, de ce fait, font l’objet de manipulations et d’utilisations multiples. Le tableau numérique, en revanche, est un dispositif réservé plutôt aux usages de l’enseignent et, en conséquence, fait rarement l’objet de manipulations chez les élèves. De ce point de vue, les processus d’instrumentation relatifs à chacun des systèmes numériques ici retenus conduisent les élèves, en principe, à conceptualiser et à se représenter différemment les similitudes précédemment évoquées.

Malgré les différences apparentes entre les deux systèmes : est-ce que les élèves sont en mesure d’identifier les étapes à la fois essentielles et communes à la description du fonctionnement des deux systèmes proposés ? Par étapes essentielles et communes nous entendons les étapes « Action », « Détection », « Transmission », « Traitement » et « Sortie ». Est-ce que les élèves sont en mesure d’identifier les composants essentiels et communs aux deux systèmes proposés ? Par composants essentiels et communs nous entendons les capteurs, les logiciels, l’information, le processeur. Est-ce que les élèves identifient l’information en tant que matière d’œuvre essentielle au fonctionnement des deux systèmes ? Dans quelle mesure les modèles sous-jacents aux explications des élèves sont-ils sous l’emprise des caractéristiques apparentes des systèmes proposés ?