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les PeUPles et les langUes

2. les langUes

Le plateau des Uele est caractérisé par la com-plexité linguistique consécutive à la rencontre de plusieurs mouvements migratoires bantous et sou-danais. Ces deux blocs linguistiques s’entremêlent sur presque toute l’étendue du district du Bas-Uele.

Puis vint s’ajouter une langue de très grande diffu-sion : le lingala. Mais dans le district du Bas-Uele, le parler lingala devient très fortement influencé par les éléments des langues swahili, nemangbetu, pazande, logoti, etc. On va jusqu’à distinguer le lingala de cette variante locale du Bas-Uele, dite ici « bangala », une sorte de pidgin africain construit à partir du lingala.

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Le bangala joue le rôle de lingua franca, de langue d’intercommunication entre les membres des diffé-rentes communautés linguistiques du Bas-Uele.

Cette mosaïque linguistique est construite sur trois couches, à savoir  : langue officielle, langue nationale et langues locales en partant de la couche supérieure. Voici, en détail, la répartition de ces lan-gues sur l’étendue du district.

2.1. langUe OffICIelle

La langue officielle, qui est le français, est utilisée sur toute l’étendue du district, dans l’enseignement, l’administration et notamment les chefs-lieux de dis-trict (Buta) et de territoires (Aketi, Ango, Bambesa, Bondo et Poko).

2.2. langUe natIOnale

Le lingala est la langue nationale qui est présente dans le Bas-Uele. Il s’agit d’une langue bantoue de la zone C, sigle C36c, d’après la classification de Guthrie (Guthrie 1967). Si le «  bangala  », dans sa forme pidginisée, est parlé sur toute l’étendue du dis-trict, le lingala classique se limite à l’enseignement et aux églises pour les homélies.

Le lingala intervient dans les trois premières années du primaire, tandis que le français couvre les trois années supérieures du primaire et tous les cycles secondaire, supérieur et universitaire.

2.3. langUes lOCales

Les autres langues locales sont réparties en deux familles génétiques d’après la classification de Greenberg (Greenberg 1966)  : Congo-Kordofan (Niger-Congo) et Nilo-saharienne (Soudan central).

La sous-famille Niger-Congo, présente dans le Bas-Uele, renferme les langues bantoues et les langues non bantoues du groupe Adamawa-Oriental, sous-groupe oriental ou oubanguien. La sous-famille du Soudan central ne renferme que les langues non bantoues.

2.4. lOCalIsatIOn des dIfféRentes langUes dans les teRRItOIRes dU dIstRICt dU Bas-Uele

2.4.1. teRRItOIRe d’aketI

Du point de vue linguistique, c’est le territoire le plus complexe du district. Il s’y rencontre les langues bantoues, notamment le lebuale (ababua)

(C44f d’après la classification de Guthrie) et ses dia-lectes apagibete, benge et bati (Motingea 2005 : 3) et le kibenza ainsi que les langues oubanguiennes, notamment pazande et longbandi.

Ces langues se répartissent à l’intérieur du terri-toire d’Aketi. Les langues du groupe lebuale (ababua) C44 sont présentes dans sept secteurs et chefferies sur les huit du territoire d’Aketi. Il s’agit de :

- dans la chefferie Avuru-Duma, le pazande est la langue principale. Il s’y parle en minorité deux dialectes du lebuale : apagibete et benge ; - dans la chefferie Avuru-Gatanga, le pazande est

majoritaire et les dialectes lebuale sont apagi-bete et benge ;

- dans la chefferie Bandongola, c’est le groupe lebuale qui constitue la majorité linguistique avec ses dialectes apagibete et bati. La langue minoritaire est le kibenza, langue bantoue du groupe Ngombe C40 ;

- dans le secteur Kolongbandi  : c’est le long-bandi, dans sa variante dite « yakoma » ; l’autre variante de cette langue se dénomme « sango », parlée en RCA  ; le lebuale, avec ses dialectes apagibete et benge, y constitue la minorité ; - dans le secteur Mobati-Boyele, c’est le lebuale

qui est parlé à travers ses deux dialectes apagi-bete et bati ;

- dans le secteur Mabinza, le kibenza constitue la grande majorité linguistique ; le lebuale est minoritaire aves ses deux dialectes apagibete et bati ;

- dans le secteur Ngbongi : le kibenza est la langue majoritaire ; le lebuale est la langue minoritaire avec ses deux dialectes apagibete et bati ; - dans le secteur Yoko, c’est le kibenza qui

domine, appelé aussi « bokoy », auquel s’ajou-tent les parlers kingelema et kipoto.

2.4.2. teRRItOIRe de BUta

Deux langues se partagent l’espace de ce terri-toire : lebuale et pazande.

Le lebuale constitue la grande majorité lin-guistique, présent dans les entités administratives suivantes :

- dans l’ensemble des chefferies Bayeu Bogbama et Bayeu Bogongea ;

- dans le secteur Barisi-Mongingita-Bakango mais aux côtés de la variante minoritaire (ba) kango ;

deuxIèMe PARTIe – leS HOMMeS

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- dans le secteur Mobati mais aux côtés du dia-lecte (ba) qui n’est parlé que dans le groupement Bawenza.

Le pazande est parlé majoritairement dans la chefferie Nguru. Il y a aussi le ngbenda, un dialecte du lebuale mais fortement influencé par le pazande.

2.4.3. teRRItOIRe de BaMBesa

Il présente une forte complexité linguistique.

C’est le carrefour des langues bantoues, d’une langue oubanguienne et d’une langue du Soudan central. La situation se présente comme suit :

· chefferie Bokiba aux côtés du makere,

· chefferie Mange aux côtés du kango. La lan-gue dominante ici est le pazande ;

- le makere se parle de façon homogène dans les chefferies suivantes :

· chefferie Makere I, aux côtés des parlers awolo et kango (groupement Awolo),

· chefferies Makere II et Bakete.

2.4.4. teRRItOIRe de BOndO

La situation linguistique est aussi complexe. Il s’y rencontre deux groupes linguistiques : bantou, repré-senté par la langue benge du groupe lebuale C44 ; oubanguien représenté par le pazande, longbandi et nzakara. À noter que les Azande et les Nzakara parlent des langues étroitement liées ; il a été relevé entre elles une similarité lexicale à 74 %.

Ci-après, la répartation de ces langues :

· le pazande est parlé entièrement dans six chef-feries : Gbiamangi, Boso, Duaru, Gama, Gaya et Goa ;

· la chefferie Deni partage le pazande majoritaire et le nzakara minoritaire ;

· dans la chefferie Kasa, seule la langue long-bandi est parlée ;

· dans la chefferie Soa, le ngbandi est minoritaire et le nzakara devient majoritaire ;

· dans la chefferie Mobenge-Mondila, c’est le benge, un dialecte de lebuale, qui domine.

2.4.5. teRRItOIRe d’angO

Dans le territoire d’Ango, il n’est parlé qu’une seule langue locale, le pazande.

2.4.6. teRRItOIRe de POkO

Cinq langues locales sont parlées dans le territoire de Poko  : deux langues oubanguiennes (pazande, barambo), deux du Soudan central (kilele et madi) et une langue bantoue, le kikango.

Le territoire de Poko est composé de deux sec-teurs et de onze chefferies. Sur les treize entités administratives, douze parlent les langues locales presque homogènes et une entité partage deux lan-gues locales différentes.

Ci-après la répartition de ces langues par entité.

Six entités parlent le pazande  : chefferies Bakengai, Kipate, Kumbandani, Gamu et Zuna ; sec-teur Kembisa.

Dans les zones limitrophes de certaines de ces entités, des langues locales autres que le pazande se parlent de façon minoritaire. Ainsi, à la limite de la chefferie Kipate du territoire de Poko et de la chefferie Mayogo-Mabozo du territoire de Rungu (district du Haut-Uele), se parlent le mayogo, une autre langue oubanguienne, et le nemangbetuti, une langue du Soudan central, sous-groupe moru-mangbetu. Se parle aussi en minorité le barambo, une langue oubanguienne, à la limite de la chefferie Gamu et des chefferies Barambo voisines : Babena, Mabanga, Ngbaradi. Il se trouve, aux confins de la chefferie Bakengai et celle de Malele, une minorité linguistique kilele et à l’intérieur même de la chef-ferie, notamment dans le groupement Nedugwe, deux petites enclaves linguistiques barambo, à savoir : le mefere et menza. Aux confins de la chef-ferie Kumbandani du territoire de Poko et de celle d’Azanga en territoire de Rungu dans le Haut-Uele, il se parle en minorité le nemangbetuti, une langue du Soudan central, moru-mangbetu. Dans la chefferie Zuna, on a identifié quelques enclaves mangbetu à la limite avec la chefferie Ndey du territoire de Rungu, dans le Haut-Uele notamment dans les groupements Nakokoloko et Yule. Aussi, dans le secteur Kembisa avec quelques enclaves Barambo, notamment dans les groupements Bahpere et Menza, et Bakango dans le groupement Mangali-Bakango.

Le barambo est parlé dans les chefferies Babena, Mabanga, Ngbaradi et Soronga ; et dans le secteur Abarambo.

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Le pazande est parlé aux confins des chefferies Babena, Mabanga et Ngbaradi voisines de la cheffe-rie azande de Gamu.

Le kilele est parlé dans la chefferie Malele.

Le malele, une autre langue du Soudan central, moru-mangbetu, est parlé dans une seule entité, la chefferie Malele.

Le pazande et le madi sont parlés dans la chef-ferie Madi.

Les Azande constituent près de la moitié de la population totale du Bas-Uele. Maniant plusieurs stratégies, dont les armes et la diplomatie, ce peuple guerrier a réussi à étendre son hégémonie dans la région. Il menait surtout une politique d’assimilation des peuples vaincus en leur faisant adopter le parler pazande.