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À l’instar du latin, l’histoire médiévale de la « résistible ascension du vulgaire98 » à l’écrit est longue, progressive et inégalement linéaire. Par ailleurs, de même que pour le latin, l’usage du singulier, héritage d’une histoire plus républicaine que médiévale est faussement trompeur car le français des XIVe et XVe siècle renvoie à plusieurs scripta99 contemporaines dont l’influence et la suprématie varient dans le temps et l’espace. Nous ne reprendrons pas la totalité de la question, déjà abondamment étudiée et sensiblement mieux connue que son versant latin. Nous nous concentrerons ainsi sur notre période d’étude qui se présente comme l’un des tournants importants de l’évolution du statut de la langue française. Rappelons donc sommairement que l’usage de la langue romane dans l’espace français s’affirme à partir du XIIe siècle dans le domaine spécifique de l’écrit littéraire. Là, il acquit, dans le creuset qu’était la culture courtoise, une force symbolique et une puissance signifiante majeure en même temps que des pratiques de traductions et réécritures contribuaient à enrichir le stock lexical disponible. Realia médiévales, sentiments, valeurs nobiliaires, mais aussi de façon plus

98 Nous reprenons ici le titre de la journée d’étude organisée par Benoît Grévin et Henri Bresc, La Résistible ascension des vulgaires. Contacts entre latin et langues vulgaires au bas Moyen Âge. Problèmes pour l’historien, Actes des journées d’études des 8 et 9 mars 2003, Université de Paris X-Nanterre, « Mélanges de l’École française de Rome », 117. 2, Rome, École française de Rome, 2005.

99 Rappelons que si la période tend à voir s’étendre l’aire d’utilisation du français d’Île de France en parallèle de l’essor du pouvoir royal, le français n’est pas pour autant unifié autour d’un paradigme unique. Le contexte de la guerre de Cent Ans voit ainsi, par exemple, perdurer l’usage du français à la cour anglaise.

136 discrète, spiritualité étaient donc à portée de plume en français dès cette époque : le XIIIe siècle y ajouta le domaine historique avec l’essor des chroniques en langue romane100. Si donc le français n’était en rien une langue indigente à l’aube du XVe siècle il n’en restait pas moins frappé d’un double signe négatif, rhétorique et technique comme le rappelle Serge Lusignan en parlant des traductions :

L’insatisfaction du traducteur tenait souvent à son incapacité de rendre en français la beauté littéraire du latin. La traduction se faisait au prix d’un décalage stylistique qui abaissait l’œuvre traduite au niveau du style simple du français, celui de la langue parlée correcte. […] La langue du droit se trouvait confrontée aux mêmes exigences.

Langue technique, elle devait posséder un vocabulaire propre qui la distingue du langage ordinaire101.

Du point de vue lexical donc, si le français répondait amplement aux besoins de l’expression commune et même littéraire, il s’avérait insuffisant pour des pratiques plus spécifiques, mais aussi plus prestigieuses, comme le droit mais aussi les sciences ou la philosophie. Du point de vue rhétorique, il ne pouvait non plus se targuer de l’épais substrat littéraire fournissant au latin sa densité intertextuelle, mais aussi ses modulations entre des registres linguistiques plus ou moins prestigieux.

Certes, la langue romane avait depuis longtemps fait sienne la souplesse de l’expression versifiée, mais la ligne de la période oratoire (dont on a vu qu’elle commençait à s’imposer au latin) lui restait étrangère. Ce double handicap pouvait apparaître comme un frein pour l’utilisation du français dans des lieux aussi prestigieux que les chancelleries royales : c’est précisément là que se joue l’une des évolutions de la période.

Mais le statut de la langue romane est rendu plus complexe encore jusqu’à la période qui nous intéresse du fait de la coexistence de plusieurs types de français correspondant chacun à une scripta spécifique : le français picard, le français parisien et le français anglo-normand. Si l’intercompréhension demeure la règle entre ces différents idiolectes, ils n’entretiennent pas moins des relations de tension jusqu’au XVe siècle chacun mettant en œuvre des stratégies d’hégémonie :

Si la capacité d’une langue d’en dominer une autre en situation de contact soutenu permet de lui reconnaître le statut de langue haute, la scripta parisienne ne peut avoir l’exclusivité de ce titre. À l’écrit, le français picard fut très peu marqué par le flamand, sinon sur le plan du lexique, en région néerlandophone. […]

En revanche, l’influence du français sur la langue néerlandaise fut très marquante.

[…] Salverda de Grave constate qu’un très grand nombre de mots français sont

100 Nous renvoyons pour cette partie historique aux nombreux travaux de Serge Lusignansur lesquels nous nous sommes appuyée pour notre réflexion : Parler vulgairement. Les intellectuels et la langue française aux XIIIe et XIVe siècles, Paris/Montréal, Vrin/ Presses de l’université de Montréal, 1986 ; Id., La Langue des Rois au Moyen Âge. Le Français en France et en Angleterre, Paris, PUF, 2004 ainsi qu’à Serge Lusignan, France Martineau, Yves Charles Morin et Paul Cohen, L’Introuvable unité du français, Contacts et variations linguistiques en Europe et en Amérique (XIIe-XVIIIe siècle, Laval, PUL, 2012.

101 Serge Lusignan, La Langue des rois au Moyen Âge, op. cit., p. 18.

137 passés en néerlandais, mais dans leur forme picarde. […] [L’influence profonde du

français sur le néerlandais] se produisit vraisemblablement avant la fin du

XIVe siècle, puisqu’à partir de cette période les ducs de Bourgogne introduisirent le français central dans ces régions102.

Si ces différents codes n’ont pas le même statut selon les espaces géographiques et cherchent à s’imposer diversement il reste qu’un important fonds commun caractérise les différentes scripta et ce en raison d’évolutions convergentes, quoiqu’indépendantes.

On le comprend dès lors, on ne peut se contenter d’affirmer qu’à la fin du Moyen Âge le français tend à s’imposer à l’écrit. C’est passer sous silence le type de français qui s’impose, le français parisien, les canaux de diffusion qui sont les siens, le milieu curial, et le code écrit qu’il adopte, une réfection de l’oral français sur le modèle de la langue lettrée latine. Les ressorts qui conduisent à l’usage majoritaire du français dit central, ou parisien, ne sont pas évidents : il s’agit néanmoins d’une évolution qui, si elle n’est pas linéaire, est profondément liée à celle du pouvoir royal. Le français du roi est en effet le français parisien et, après un retour au latin avec Jean II, il tend à s’imposer. Charles V maîtrisait en effet mal le latin : sa réforme de l’administration fait de la langue vernaculaire un instrument du pouvoir politique. Mais son important mécénat culturel sait également transformer habilement l’outil politique en vecteur des valeurs idéologiques de la royauté. Déjà langue de la culture aristocratique, le français devient la langue du savoir promu par le roi103.

Dès lors, la langue vernaculaire peut faire son entrée dans le milieu des chancelleries : Serge Lusignan montre ainsi une inversion entre 1328 et 1350 (bien avant l’édit de Villers-Cotterêts) de la proportion d’actes écrits en latin et en français104. Certes le français ne remplace jamais tout à fait le latin : les chartes écrites en latin sont citées en l’état, témoignant d’une intraduisibilité des textes juridiques. Il n’empêche, à partir du milieu du XIVe siècle le français est devenu une langue possible pour le droit, par suite d’une volonté royale marquée. Or, les pratiques de la chancellerie royale inspirent largement celles des chancelleries ducales, notamment celle du duché de Bourgogne.

Les ducs sont en effet francophones105 : ils favorisent de fait l’usage du français dans leurs documents voire tentent de l’imposer dans leurs territoires flamands. Ils recrutent de ce fait leur personnel

102 Serge Lusignan, L’Introuvable unité du français, op. cit, p. 101-102.

103 Pour une approche plus approfondie de la dimension idéologique du pouvoir royal mis en place notamment à partir de Charles V on se reportera à l’ample synthèse deJacques Krynen, L’Empire du roi. Idées et croyances politiques en France, Paris, Gallimard, 1993.

104 Serge Lusignan, « Quelques remarques sur les langues écrites à la chancellerie royale de France », dans Écrit et pouvoir dans les chancelleries médiévales : espace français, espace anglais, Louvain-la-Neuve, Fédération internationale des instituts d’études médiévales, 1997, p. 99-107. Pour une mise en perspective de ces questions pour la période immédiatement postérieure on consultera l’introduction de l’ouvrage collectif, Le Choix du vulgaire.

Espagne, France, Italie, (XIIIe-XVIe siècle), Nella Bianchi Bensimon, Bernard Darbord, Marie-Christine Gomez-Géraud (éd.), Paris, Garnier, 2015, p. 7-19.

105 Notons toutefois qu’à partir de Jean sans Peur les ducs de Bourgogne parlent également flamand par suite d’une éducation menée en ce sens. Voir Serge Lusignan, La Langue des Rois, op. cit, p. 146.

138 administratif dans les mêmes milieux que la chancellerie royale (dont les collèges parisiens) : ils sont donc eux aussi de forts vecteurs du français parisien.

On aurait pourtant tort d’apprécier ce tournant comme la relégation irrésistible du latin par le français : même si de fait les textes écrits dans une langue tendent à marginaliser l’autre, leurs interactions sont autrement plus complexes. D’une part, parce que jusqu’au XVIe siècle les deux langues ne sont pas nettement distinguées et leurs frontières restent poreuses106. D’autre part parce que l’adoption du français à l’écrit passa par sa ré-élaboration sur le modèle du latin :

De ce point de vue le français écrit du Moyen Âge ne serait pas le fruit d’une transposition de la langue orale dans l’écrit, mais d’une subsomption de l’oral dans des formes lettrées empruntées au latin. Si l’on ajoute à l’hypothèse cette autre qui suppose des emprunts possibles d’une scripta à l’autre, il faut conclure que la représentation graphique du français serait née d’une mise en forme de la langue parlée dans des modèles linguistiques préexistants, latins ou vernaculaires lettrés107.

Ainsi, les périodes d’avancée majeure de l’emploi du français dans le milieu des chancelleries s’accompagnent chez les notaires, qui abandonnent peut-être le latin à regret, d’un usage massif de consonnes dites quiescentes que le français moderne a parfois conservées. Les textes émanant du milieu des traducteurs présentent de semblables traits qui, selon Bernard Cerquiglini, cherchent à donner au français « [le] volume, [...] l’élégance, voire [...] l’apparat » du latin écrit108. Serge Lusignan y insiste également : « Le français de la chancellerie [est] un latin du roi109 »

Les sermons de Jean Gerson s’inscrivent pleinement dans ce tournant linguistique : le corpus homilétique est en effet bilingue ; bien plus la partie française est plus conséquente que la partie latine ce qu’on ne peut imputer à des causes linguistiques110. Il est en outre éminemment lié au contexte curial puisque nombre de sermons français sont des sermons de cour, et non, comme on a

106 Serge Lusignan, L’Introuvable unité du français, op. cit. p. 105 sq.

107 Ibidem, p. 105.

108 Serge Lusignan, La Langue des rois au moyen Âge, op. cit., p. 135.

109 Serge Lusignan, « La résistible ascension du vulgaire : persistance du latin et latinisation du français dans les chancelleries de France et d’Angleterre à la fin du Moyen Âge », dans La Résistible ascension des vulgaires. Contacts entre latin et langues vulgaires au bas Moyen Âge. Problèmes pour l’historien, Actes des journées d’étude des 8 et 9 mars 2003, Henri Bresc, Benoît Grévin (éd.), Mélanges de l’École française de Rome, n° 117/2, Rome, École française de Rome, 2005, p. 471-508, cit. 489.

110 On pourrait en effet proposer comme première explication de cette dissymétrie le fait que le latin tend à être plus concis que la langue française, le système casuel permettant l’économie de certains termes, notamment les prépositions. Mais ce schéma herméneutique ne tient pas face à un examen rigoureux : on compte en effet dans l’édition Glorieux 39 semons latins, et 3 collations pour 46 sermons français et 3 collations. L’écart entre les deux sous-ensembles, réel mais relatif, interdit de parler de précellence écrasante du domaine français ; il souligne néanmoins qu’à cette période une prédication française lettrée est tout sauf marginale puisqu’elle supplante de peu l’homilétique latine chez un même individu. Il convient toutefois de ne pas sous-estimer le poids des circonstances historiques de prédication dans l’analyse de cet écart : ce dernier est en effet tout autant dû au fait que Gerson a prêché plus souvent devant un public français.

139 pu le penser, des sermons populaires prononcés à l’église de Saint-Jean-en-Grève111. Précisons toutefois que si Gerson illustre bien l’essor de la langue française, c’est de manière dynamique, ses sermons apparaissant plutôt comme le chantier d’une éloquence de la chaire française que comme un parangon achevé d’une homilétique vernaculaire. Ce dynamisme se perçoit tout d’abord dans les essais fréquents pour recréer une amplitude stylistique à même de rivaliser avec l’épaisseur symphonique des niveaux de l’éloquence latine hérités d’Augustin :

Helas qui est le pechie a jugier petit qui est mortel, qui oste l’amour de Dieu, qui livre a pardurable mort ? Qui est le pechie a jugier petit, qui fait souvent ung noble seigneur ou prince parjurer sa foy et loyaulte sollennellement promise en mariage, ce qu’il ne daigneroit ou vouldroyt faire a ses ennemys pour perdre la vie, comme apparu de Regulus et Attilius. Qui est le pechie a juger petit, qui fait aux prebstrez et religieux brisier et enfraindre le veu sollennise qu’ilz ont de vivre chastement, comme l’ont voue tous ceulx qui ont receu l’ordre de presbtrise ? Regardons aussi qui fit noier le monde par le deluge ? Qui fit fouldroier les cinq citez et le pais d’entour ? Qui fist detruire Troie le grant ? Qui chassa hors de Rome Tarquinus et sa lignie royalle ? Qui vainquist tant de victorieux empereux et roys ; Alixandre, Jule Cesar, Anthoine, David le sainct, Salomon le Sage, Samson le fort, et aultrez sans nombre ? Tout cecy fit luxure charnelle. N’est doncques pas petit pechie112.

La langue elle-même met ici en évidence les ressorts rhétoriques mobilisés pour inventer une éloquence homilétique en français. Le registre visé est clairement le « style élevé et sublime, qui n’exclurait certes pas les figures mais qui pourrait aussi s’en passer serait destiné à émouvoir très fortement les esprits et à inciter ainsi les hommes à l’action113 » selon la définition qu’en donne Erich Auerbach pour Augustin. Questions rhétoriques, avec le martèlement du monosyllabe accentué

« qui » particulièrement efficace, jeux de répétitions insistantes « qui est le pechie a jugier petit », qui entremêlent subtilement les assonances, les gradations cisèlent la langue pour la hisser au sommet de l’émotion oratoire. Aux procédés de l’emphase s’ajoute la force des références mythiques, où pointe discrètement le goût laïc pour l’histoire romaine à côté des figures tirées des neuf preux et des personnages bibliques. Si l’art rhétorique latin est ici une matrice évidente et féconde pour l’éloquence française, la langue classique l’est tout autant pour sa descendante romane pour peu qu’on s’y montre attentif comme le montre la chute de ce bref passage. Celle-ci en effet après une construction ascensionnelle qui fait de la luxure le fléau universel114 semble bien mise à mal par ce qui ressemble à une petite mise au point théologique, sorte de sous-titrage catéchétique « Tout cecy

111 Sur ce point, voir notre tableau chronologique en annexe.

112 Certamen forte dedit illi, OC, n° 345, p. 565-566.

113 Erich Auerbach, Le Haut langage, op. cit., p. 39.

114 On notera au détour de cette analyse que Gerson s’inscrit ici brillamment dans la tradition des dénonciations emphatiques et ascendantes des fléaux du genre humain, qu’il s’agisse de la rumeur ou de la luxure, et qui court depuis Virgile jusqu’à Beaumarchais.

140 fit luxure charnelle. N’est doncques pas petit pechie ». Or, la construction postposée du sujet luxure charnelle suit peu en réalité le génie de la langue vernaculaire : c’est plutôt, nous semble-t-il, le latin qui ici inspire Gerson avec la tournure typique « hoc facit… ». Splendeur et misère de la langue romane ? On est en droit de juger que l’effet diffère de part et d’autre et que le prestige reste définitivement du côté du latin tandis que le français fait voir un aplatissement de l’effet rythmique.

C’est également le cas du vocabulaire qui ici, reste relativement ordinaire : rien dans « qui est le pechie a jugier petit qui est mortel » ne hisse vers des hauteurs lexicales propres à soutenir le style élevé. Nous sommes d’avis pourtant de renverser la perspective et de saluer un art oratoire français qui touche réellement au sublime. Car certes, pour les lecteurs que nous sommes, Gerson n’atteint pas le sublime d’un Bossuet, et pour ses contemporains, il restait très certainement bien loin de l’émotion d’un texte d’Augustin. Pourtant, sans doute s’agissait-il là d’une des premières fois où le français touchait à ces hauteurs rhétoriques et ce, avant même Alain Chartier : sur le plan diachronique le travail stylistique de Gerson peut paraître pauvre et bien peu souple, sur le plan synchronique, au regard de la production française, il fait figure de maître.

Il resterait, pour apprécier plus encore la place de Gerson dans l’évolution de la langue française, à mettre en œuvre un travail fin et systématique de lexicologie pour évaluer le poids des latinismes dans ses textes, notamment par la quantification des consonnes quiescentes dont Serge Lusignan montrait la portée symbolique. Plusieurs obstacles ne nous permettent pas de nous acquitter d’une telle tâche dont la portée scientifique serait infiniment précieuse : il faudrait idéalement disposer d’un corpus conséquent fiable au plan de l’édition, si possible numérisé, comportant un nombre équivalent de textes juridiques, de traductions (lesquels auraient valeur de référence en ce qui concerne la préciosité étymologisante) et de sermons de Gerson. Ces conditions sont loin d’être réunies. Il est possible toutefois de se reporter pour le corpus homilétique au moins à un texte ayant fait l’objet d’une étude scientifique, le sermon Ad Deum vadit édité par David Hobart Carnahan115. Précisons toutefois que si le texte a été établi à partir d’un manuscrit certes réalisé du vivant de Gerson, et proche des milieux qu’il fréquentait (puisque le manuscrit a été possédé à un moment par l’abbaye de Saint-Victor à laquelle une partie de la bibliothèque du chancelier a peut-être été léguée), il ne s’agit pas d’un manuscrit autographe116. Le texte ne peut donc fournir qu’une idée lointaine de la pratique effective de Gerson :

He, my ! Doulce mere, ou estiés vous lors ? Que faisiés vous ? Se le faulx traïte Judas

115 David Hobart Carnahan, The Ad Deum vadit of Jean Gerson, Urbana, University of Illinois, 1917.

116 Nous reviendrons sur les questions de copie et d’autographie dans notre chapitre 3 (pages) mais l’on pourra d’ores et déjà sur ces questions consulter la mise au point que fait Gilbert Ouy dans Gerson bilingue. Les Deux rédactions latine et française de quelques œuvres du chancelier parisien, Paris, Honoré Champion, 1998, p. XXXI-XXXIV.

141 veilloit si songneusement pour traïr vostre benoit filz, ce n’est point à croire que

vostre amour ne vous eveillast plus a penser sur luy et de luy que malice ne faisoit veiller Judas encontre luy ? Et ne peut on aussi bien penser religieusement que l’angle vous confortoit a celle heure, comme dit yci l’euvangile, que l’angle du cil confortoit vostre benoit filz ? Se l’angle du ciel estoit tant begnin et misericors qu’il confortoit Jhesus selon sa sensualité […], c’est bien a penser que vous, dame, qui aviés plus grant besoing de consolation et de confort, ne demourastes pas seule sans

vostre amour ne vous eveillast plus a penser sur luy et de luy que malice ne faisoit veiller Judas encontre luy ? Et ne peut on aussi bien penser religieusement que l’angle vous confortoit a celle heure, comme dit yci l’euvangile, que l’angle du cil confortoit vostre benoit filz ? Se l’angle du ciel estoit tant begnin et misericors qu’il confortoit Jhesus selon sa sensualité […], c’est bien a penser que vous, dame, qui aviés plus grant besoing de consolation et de confort, ne demourastes pas seule sans