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Les lacunes de la procédure UTN

Annexe 1 : Caractéristiques des 7 profils typologiques de stations dans le massif alpin

B. Les lacunes de la procédure UTN

Du point de vue environnemental, et face aux importants enjeux d’une artificialisation toujours plus étendue, la procédure UTN s’avère lacunaire sur deux

11 CE 4 juill. 1994, Cne de Vaujany, req. n° 129898. Voir également les conclusions de M. Pochard sur CE 15 mai 1992, Cne de Cruseilles, Revue Droit administratif, sept. 1992, chron. pp. 1-5. 12 Sur l’effectivité du droit, voir dans cet ouvrage V. Neirinck, Redéfinir l’intérêt général en

montagne.

13 Art. L. 122-1-10 du C. urb. Voir sur ce point, dans cet ouvrage J.-M. Février, Urbanisme opérationnel : place, fonctionnement et devenir de la procédure UTN, J.-F. Joye, Encadrer localement l’urbanisme en zone de montagne : recours au droit adapté aux massifs ou crédibilité du droit commun ? Voir égal. M. Carraud et J.-F. Davignon, La montagne : entre aménagement et protection, AJDA 2005, p. 1278, sp. p. 1282 ; Y. Jégouzo, La réforme du régime des unités touristiques nouvelles peut entrer en vigueur, AJDA 2007, p. 7.

14 Art. L. 145-11, art. R. 145-2, art. R. 145-3 du C. urb.

15 Voir sur ce point : CAA Lyon, 16 juil. 1999, Ass. Puy-de-Dôme-Nature-Environnement, RJE

2000, p. 115, concl. M. Veslin ; Collectivités-Intercommunalités 2000, comm. n° 19, cité par Ph. Billet, note sous CE 22 janv. 2003, Cne de Saint-Ours-Les-Roches, req. n° 212522, JCP A 2003, n° 30, 1708, p. 1041.

points essentiels : elle n’est pas soumise à étude d’impact (1) et n’intègre aucune réflexion sur la remise en état des lieux pour un aménagement devenu obsolète (2).

1. L’absence d’étude d’impact

Si certains aménagements réalisés dans le cadre d’un projet d’UTN sont assujettis à l’étude d’impact16, mécanisme fondamental du droit de l’environnement, la procédure de création d’une UTN lui échappe toujours17.

C’est d’autant plus regrettable que l’introduction de la procédure UTN dans le droit français est contemporaine de celle de l’étude d’impact, et que dès l’époque de la directive précitée de 1977, l’évaluation environnementale avait toute sa place dans ce qui était alors appelé « l’étude préalable » à la réalisation de l’UTN.

Or, si désormais les mesures compensatoires à l’impact du projet ont fait leur apparition dans le dossier de création UTN18, l’occasion d’avoir une étude ciblée quant aux effets néfastes produits par de telles réalisations sur l’environnement a été manquée. À cela s’ajoute, le risque réel d’une dilution de l’analyse des impacts dans l’évaluation environnementale du PLU19.

Surtout, il est plus difficile de pouvoir parer à temps à l’irréversibilité du projet, en ne disposant pas de la possibilité d’introduire devant le juge administratif un « référé étude d’impact »20.

Il y a au moins une consolation, cependant, à constater que la loi Grenelle 221 a prévu la possibilité de soumettre, sur décision motivée de l’autorité administrative, à la procédure de « l’évaluation d’incidences », les PLU des communes dont le territoire est couvert par un site Natura 200022.

2. L’absence de remise en état

L’une des lacunes majeures du droit applicable aux équipements lourds réalisés en montagne, et régis par la procédure UTN, est qu’il n’existe aucune obligation de remettre le site en état lorsque des équipements cessent d’être exploités : remontées mécaniques, terrains de golf, terrains aménagés pour la pratique de sports ou de loisirs motorisés… Sur ce point, il faut souligner que le droit français est en contradiction avec le droit international, plus précisément avec le Protocole à la Convention alpine relatif au tourisme23. Ce dernier prévoit en effet que les « nouvelles autorisations d’exploitation de remontées mécaniques, ainsi que les concessions, seront

16 Voir l’annexe à l’art. R. 122-2 du C. env. : 41° (remontées mécaniques), 42° (pistes de ski), 43° (installations d’enneigement), 44° (aménagement de terrains pour la pratique de sports motorisés ou de loisirs motorisés), 45° (terrains de camping et caravaning permanents), 46° (terrains de golf).

17 Art. L. 122-1 et s. et R. 122-1 et s. du C. env. 18 Art. R. 145-6 du C. urb.

19 Art. R. 121-14 du C. urb. 20 Art. L. 122-2 du C. env.

21 Loi n° 2010-788 du 12 juil. 2010 portant engagement national pour l’environnement, JO 13 juil. 2010.

22 Art. R. 121-14 du C. urb., issu du décret n° 2012-995 du 23 août 2012 relatif à l’évaluation environnementale des documents d’urbanisme.

23 Protocole d’application de la Convention alpine de 1991 dans le domaine du tourisme, Bled, 16 oct. 1998.

assujetties au démontage et à l’enlèvement des remontées mécaniques hors d’usage et à la renaturalisation des surfaces inutilisées avec en priorité des espèces végétales d’origine locale »24. La France ayant ratifié ce Protocole en 200525, elle aurait dû depuis réformer son droit interne et introduire, dans la procédure UTN, une obligation de remise en état en fin d’exploitation. Une modification par la loi Grenelle 2 aurait suffit.

Sur cette question de la restauration des écosystèmes quand une activité dommageable pour l’environnement prend fin, il faut remarquer que le droit français est particulièrement incohérent. Ce n’est pas l’ampleur de l’atteinte environnementale qui conditionne l’obligation de remise en état : ainsi, elle n’est pas imposée en cas d’arrêt des travaux d’exploitation d’une mine26 ou de fin d’exploitation d’une installation hydraulique concédée27. Ce qui importe est de savoir quelle est l’origine de la règle juridique applicable : l’obligation de remise en état est de plus en plus fréquemment prévue pour les ouvrages et aménagements soumis au code de l’environnement (installations classées28, éoliennes29, installations relevant de la nomenclature eau30), qui prévoit en outre que cette remise en état est d’intérêt général31. Mais elle peine à s’imposer dans les autres domaines du droit, et particulièrement en droit de l’urbanisme, conçu pour régir des aménagements pérennes, dont la réversibilité n’est pas envisagée. En montagne comme ailleurs, il n’y a pas de retour en arrière prévu pour des réalisations signifiant un progrès économique et une conquête du territoire32.

Toutefois, pour les projets régis par la procédure UTN et soumis à étude d’impact environnemental33, est-il possible de contraindre l’aménageur à envisager une fin d’exploitation et une remise en état du site ? À titre de comparaison, pour les installations classées les conditions de remise en état du site après exploitation doivent être présentées dès cette étape de l’évaluation environnementale34. Mais, l’argumentaire scientifique imposé pour une étude d’impact de droit commun ne va

24 Art. 12.2 du Protocole.

25 La ratification française date du 19 mai 2005, et l’entrée en vigueur de ce Protocole pour la France date du 11 oct. 2005.

26 Art. L. 163-3 et s. du C. minier. 27 Art. L. 214-3-1 du C. env.

28 Art. L. 512-6-1 (ICPE soumises à autorisation), L. 512-7-6 (ICPE soumises à enregistrement), L. 512-12-1 (ICPE soumises à déclaration) du C. env.

29 Art. L. 553-3 du C. env. 30 Art. L. 214-3-1 du C. env. 31 Art. L. 110-1.II du C. env.

32 Sauf à établir que le permis de construire est illégal. Par ex., CE 14 oct. 2011, Cne de Valmeinier, req. n° 320371 : démolition ordonnée d’un parc de stationnement de 499 places dont les travaux avaient commencé, « eu égard aux atteintes particulièrement graves que le maintien de ce bâtiment porterait au caractère et à l’intérêt du site, sa démolition totale n’entraînerait pas une atteinte excessive à l’intérêt général ».

33 Annexe à l’art. R. 122-2 du C. env. : 41° (remontées mécaniques), 42° (pistes de ski), 43° (installations d’enneigement), 44° (aménagement de terrains pour la pratique de sports motorisés ou de loisirs motorisés), 45° (terrains de camping et caravaning permanents), 46° (terrains de golf).

pas jusque-là : il ne porte que sur les conséquences environnementales du projet lors de sa réalisation35, et non lorsque les aménagements cesseront d’être utilisés.

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