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Impôts sur les résidences secondaires

Annexe 1 : Caractéristiques des 7 profils typologiques de stations dans le massif alpin

C. Impôts sur les résidences secondaires

En Allemagne, la taxe sur les résidences secondaires existe depuis les années 70. Il s’agit d’une taxe annuelle imposée d’après la dépense que peuvent prélever les communes – peu importe s’il s’agit de communes touristiques ou pas101 –, qui se base sur le fait que le contribuable possède une résidence secondaire dans la commune102. Pour cela il est nécessaire que la résidence soit utilisée par le propriétaire ou le locataire, une imposition n’est cependant pas possible si la résidence sert seulement de placement de capital103. Cependant les communes ne peuvent exonérer ni l’utilisation

97 Il s’agit donc de conditions subjectives (Greiving, DVBl. 2001, 336 (342)). Cf. Doubleday, Sicherung von Gebieten mit Fremdenverkehrsfunktion, 220 et ss. pour une présentation détaillée de cette excep tion.

98 Cf. Portz, Einheimischenmodelle auf dem Prüfstand der EU-Kommission, Kommunaljurist 2010, 366 (366).

99 Sur ces modèles en général Huber/Wollenschläger, Einheimischenmodelle, 2008, passim.

100 Procédure 2006/4271.

101 La base légale se trouve dans l’article 105 al. 2a GG (Loi fondamentale), les lois sur les impôts communaux des Länder et les réglementations des communes.

102 Kasper, Die Zweitwohnungssteuer, Deutsches Steuerrecht (DStR) 2006, 2005 (2005).

103 Kasper, DStR 2006, 2005 (2007 et s.). Si la résidence est louée et utilisée en tant que résidence secondaire, c’est au locataire de payer l’impôt.

de la résidence à des fins professionnelles ou d’études104, ni les propriétaires/ locataires qui ont une résidence principale dans la même commune. Ceci serait contraire au principe d’égalité de l’article 3 al. 1 GG.105. Les réglementations des communes peuvent également prévoir que les camping-cars et mobile-homes avec un emplacement fixe tombent sous la définition de résidences secondaires, puisque cette taxe n’est pas similaire au sens de l’article 105 al.  2a GG à l’impôt sur les véhicules automobiles, qui est prélevée par l’état106.

Le taux est déterminé en fonction de la valeur locative. Il est déterminé par les communes et correspond en général à 5-20 % de la valeur locative annuelle107. Une exemption ou un allègement fiscal est possible si la résidence est louée de manière commerciale108.

La taxe a été introduite pour la première fois par la commune de Ueberlingen, au bord du lac de Constance en 1972109. En Bavière l’impôt sur les résidences secondaires a été interdit en 1989. C’est seulement grâce à une modification du droit communal en 2004 que les communes peuvent désormais prélever cet impôt sur la base de l’article 3 al. 3 BayKAG (Kommunal abgabengesetz Bayern – loi sur les impôts communaux)110. Une exception est prévue dans le cas où le revenu imposable de la personne concernée est en dessous de 25 000 € lors de l’année précédant le prélèvement initial de l’impôt sur les résidences secondaires (article 3 al. 3 ph. 2 KAG).

IV. Bilan

Il semble que tous les pays alpins – bien qu’ils soient touchés de manières différentes par la problématique – soutiennent de manière unanime qu’il y a besoin de réagir face à l’inflation des résidences secondaires et des lits froids et de trouver des solutions pour sauver les Alpes, non seulement en tant qu’espace naturel, mais également en tant qu’espace de vie et qu’espace économique.

Les expériences internationales démontrent que de nombreuses mesures sont mises en œuvre. Selon les pays, leur application concrète diffère cependant grandement. La prise en compte d’une seule mesure pour limiter l’augmentation des résidences secondaires ne permet de lutter contre ce phénomène que de manière limitée. C’est pourquoi il est préférable d’opter pour des stratégies qui combinent différentes mesures d’aménagement du territoire ainsi que des mesures fiscales. En effet, alors que les premières poursuivent essentiellement le but de limiter la construction de nouvelles résidences secondaires, la perception d’un impôt vise

104 BVerwGE 111, 122.

105 BVerfG du 6.12.1983, NJW 1984, 785. Sur la question si l‘impôt sur les résidences secondaires est conforme au droit européen, Wollenschläger, Kommunalabgabenrecht unter europäischem Einfluss : Die Zweitwohnungssteuer auf dem Prüfstand des Gemeinschaftsrechts, Neue Verwaltungszeitschrift (NVwZ) 2008, 506 et ss.

106 Kasper, DStR 2006, 2005 (2007). 107 Kasper, DStR 2006, 2005 (2010). 108 Kasper, DStR 2006, 2005 (2012).

109 Cf. Frey, dans : CIPRA alpmedia  (éd.), Construction de résidences secondaires dans l’espace alpin, 2008, 22 ; Kasper, DStR 2006, 2005 (2005).

110 L’imposition d’une taxe sur les résidences secondaires est donc désormais possible sur tout le territoire allemand (Kasper, DStR 2006, 2005 (2005)).

en premier lieu des aspects fiscaux et permet aux communes de couvrir les coûts supplémentaires engendrés par une inflation du nombre de résidences secondaires.

Il faut souligner qu’en Allemagne, les communes peuvent apprécier librement la nécessité de prendre des mesures. L’obligation d’interdire la construction de résidences secondaires ou de les limiter à un quota fixe n’est prévue ni au niveau fédéral, ni au niveau des Länder. Ceci permet de trouver des solutions individuelles et adaptées à chaque commune.

L’Autriche a opté pour une solution intermédiaire, au niveau desétats fédéraux. Dans le Land Salzburg et le Land Tirol, la construction de nouvelles résidences secondaires est uniquement permise si le plan d’affectation prévoit une zone spéciale à cet effet. Alors que dans le premier la délimitation de nouvelles zones de résidences secondaires n’est admise que si le taux des résidences secondaires dans la commune n’a pas atteint les 10 % – tout en laissant une grande marge d’appréciation en ce qui concerne le nombre potentiel de nouvelles résidences secondaires dans cette zone –, le Tirol interdit toute nouvelle construction de résidence secondaire – mêmes dans ces zones spécifiques – lorsque la commune a atteint un quota de 8 % de résidences secondaires. La réglementation tyrolienne semble ainsi être beaucoup plus stricte. Pour le Land Tirol une taxe spéciale pour les résidences secondaires est obligatoire pour toutes les communes, alors que dans le Land Salzburg les communes décident elles-mêmes si une telle taxe est nécessaire.

Contrairement à cela, en tout cas en ce qui concerne l’une des mesures clé d’aménagement du territoire pour limiter la construction de nouvelles résidences secondaires, le peuple suisse a opté pour une solution au niveau constitutionnel : chaque commune devra désormais respecter un quota de 20 % de résidences secondaires sur son territoire. Il s’agit là d’une mesure plutôt rigide, compte tenu du fait que les raisons engendrant une forte augmentation des résidences secondaires ne sont pas les mêmes dans les communes touristiques et les communes rurales. Des solutions spécifiques, adaptées aux différentes problématiques locales et régionales, ne devraient plus être possibles, ou en tout cas être plus difficile à mettre en place. Les développements en Suisse sont à suivre avec un très grand intérêt et la nouvelle législation d’exécution devra être soumise à un regard juridique critique. Les exemples autrichiens démontrent qu’une des difficultés principales sera notamment la mise en œuvre d’un système de contrôle effectif pour vérifier le respect de ces règles d’aménagement du territoire.

méLAnie pAinchAux

Maître de conférences HDR de droit privé au Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM)

Objectif. – Savoir maîtriser la destination des constructions dans le temps, c’est savoir optimiser le parc d’hébergements existants. En matière d’immobilier de loisirs, c’est être parvenu à atteindre un taux de remplissage optimal toute l’année des lits touristiques, marchands ou non. Autrement dit, la commune qui parviendrait à réaliser cela pourrait se targuer de n’avoir que des lits chauds, c’est-à-dire des lits occupés au moins douze semaines par an. Plus précisément, vouloir maintenir la destination des constructions dans le temps, c’est, au sens du droit de l’urbanisme, vouloir maintenir l’usage pour lequel l’immeuble de loisirs a été construit puis occupé. Pour les hébergements touristiques, il ne peut y avoir que deux usages : l’habitation et l’hébergement hôtelier1.

Causes. – Or, à bien regarder la situation actuelle des stations de montagne2, cet objectif de remplissage optimal des unités d’hébergement est devenu un vœu pieu. On assiste, en effet, à une désaffection progressive des consommateurs d’immobilier de loisirs pour les structures existantes d’hébergements. Les immeubles sont de moins en moins occupés donc de moins en moins entretenus ; ils se dégradent et deviennent froids. Les raisons de ce divorce sont multiples : certaines sont sociologiques, d’autres sont économiques et d’autres, enfin, sont structurelles.

Sociologiquement, la consommation des loisirs en montage conduit à une forte réservation pendant la saison hivernale et, selon l’emplacement de la station, à une relative fréquentation pendant les mois d’été. Le lissage sur une année civile du remplissage des stations et de la réservation des lits touristiques ne semble pas aller de soi. En effet, l’habitude s’est prise d’assurer principalement, voire quasi-exclusivement, la promotion de la pratique des sports d’hiver. Depuis le plan neige des années 70, on suppose que le consommateur d’immobilier de loisirs en montagne, passant quasiment six heures sur les planches, n’a ni besoin d’autres distractions que l’usage intensif de son forfait de remontée mécanique, ni envie d’espaces de vie aménagés autrement qu’en dortoirs pour son hébergement. Cette supposition a fait long feu : désormais, les consommateurs veulent une offre d’activités et de

1 Art. R. 123-9 C. urb.

2 Dans cette première approche, nous ne distinguerons pas entre les stations de village et les stations intégrées. – Pour leur description, B. Fareniaux et E.Verlhac, Rapport sur le dysfonctionnement des marchés de logement en zone touristique, janvier 2008, CGPC, p. 23.

logement diversifiée3. Ils se détournent donc des immeubles de loisirs existants qu’ils jugent obsolètes par leur surface et le sous-dimensionnement de leurs équipements individuels ou collectifs4.

économiquement, les lits touristiques se refroidissent car, en raison du modèle jamais remis en cause des années 70, l’offre n’est plus adaptée à la demande. La destination habitation est particulièrement touchée. Le modèle plan neige rappelé ci-dessus a conduit à multiplier sur le territoire des communes des immeubles de plusieurs étages composés principalement de studios, T.1 ou T.2. Il s’agissait évidemment pour les promoteurs de s’assurer de la faisabilité de leurs opérations en vendant des unités d’hébergement peu onéreuses pour les consommateurs car de faible dimension. Les effets pervers d’une telle aubaine n’ont pas tardé à se faire sentir. Les promoteurs n’ont proposé que du logement standardisé, délaissant totalement tout investissement dans d’autres formules, notamment hôtelières5. Les communes ont laissé faire tant que ce modèle d’opération de construction leur assurait une fréquentation constante, voire un taux d’occupation en progression. Or, cette promiscuité tant à l’échelle des immeubles de la commune qu’à l’intérieur des appartements fait maintenant fuir. S’instaure alors un cercle vicieux. Pour le propriétaire, il n’y a aucun intérêt à engager des travaux plus ou moins coûteux de rafraîchissement, voire de rénovation, puisqu’il ne loue pas son unité d’hébergement. Pour le consommateur d’immobilier de loisirs, il se désintéresse de la location puisque l’offre ne correspond pas à ses critères impératifs de choix. Or, si les résidences de tourisme sont bien gérées et entretenues6, elles sont économiquement très attractives pour les consommateurs. Par exemple, elles présentent un meilleur rapport qualité/ prix que les nuitées d’hôtels et elles ont alors à la revente, les mêmes avantages et les mêmes variations que l’immobilier traditionnel. Seulement, pour retrouver cet objectif, il faut accepter d’engager des dépenses parfois lourdes pour remettre les unités d’hébergement aux goûts du jour.

Structurellement, comme la philosophie du plan neige n’a jamais été remise en cause, la politique globale des acteurs de l’immobilier de loisirs7 est tournée vers la construction dans le neuf et la consommation de nouveaux espaces fonciers plutôt que vers l’amélioration de l’ancien et la rénovation de l’existant. Or, le prix d’acquisition est souvent plus avantageux pour une même situation dans le neuf que

3 Les Échos, n°19562, 15 déc. 2005, p. 26. – CEMAGREF, Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion foncière ? : http://www.tourisme.gouv. fr/stat_etudes/etudes/territoires/zone_montagne.pdf, p.2.

4 Sur ce modèle des années 70, le seul espace commun d’une résidence de tourisme est bien souvent le local à skis là où le consommateur s’attend à trouver une piscine, un centre de remise en forme, un sauna, etc., même si le coût à la nuitée est plus élevé.

5 Il est impossible dans certaines communes de trouver des hôtels. La résidence de tourisme règne alors en maître.

6 Malgré sa forte destination touristique, la résidence de tourisme n’est pas considérée comme faisant partie de la catégorie hôtellerie : comp. Art. D. 321-1 et D. 311-4 C. tour. – Le fait de mettre à disposition du linge de maison, de nettoyer en fin de séjour les unités, n’est pas considéré comme constituant des prestations hôtelières ou para-hôtelières : CE, 5 déc. 1999, Sté Dixtex,

n°307077.

dans l’ancien que le consommateur soupçonne, d’ailleurs, avoir déjà tiédi et être plus onéreux à l’entretien. De plus, il faut construire car, précisément, l’existant est trop cher et ne plaît plus (ad libitum)

Réchauffement des lits et classements touristiques. – L’entrée en vigueur du dispositif « modernisation et rénovation des services touristiques »8 aurait pu être le facteur déclenchant d’une rénovation massive du parc existant puisque, à cette occasion, le législateur a intégralement revu les normes de classement des hébergements touristiques. En effet, les critères de classement rénovés prennent en compte les aspirations actuelles des consommateurs en terme de logement et de services associés9. Malheureusement, c’est un peu vite oublier que ce classement est resté facultatif, le législateur n’ayant pas voulu entrer en concurrence avec les labels privés10. Il n’y a et il n’y aura pas de montée en gamme automatique des hébergements touristiques marchands et non marchands11. Ce n’est donc pas par cette partie du Code du tourisme qu’il faut attendre la rénovation et le réchauffement des lits permettant le maintien de la destination dans le temps.

4. – Pistes de solutions. – D’autres solutions pour un réchauffement des lits existants sont donc à trouver. Certaines existent déjà ou sont à l’étude ; elles sont sectorielles (I.). Elles ne permettent qu’un réchauffement limité en fonction de leur champ d’application. Ces techniques s’inscrivent dans leur siècle : contribuant à un droit « mille-feuilles », elles ne font que participer à une politique législative d’accumulation de solutions sans cohérence entre elles. Il faut donc tenter de changer de paradigme et proposer une solution globale qui prendrait en compte l’ensemble des paramètres (II.) pour permettre un réchauffement des lits froids12 ou tièdes13. Il s’agit ainsi d’envisager une solution mêlant les forces des acteurs publics et privés pour tenter de reconstruire non pas isolément des unités d’hébergement, mais, globalement, la station sur la station. Il faut donc rechercher un modèle juridique et économique conciliant capacité d’accueil, services diversifiés, taux d’occupation élevés et financement public maîtrisé.

I. Des outils sectoriels pour le maintien de la destination dans le temps

Des outils diversifiés. – Parmi ces solutions ciblées, certaines sont connues et de droit positif. D’autres existent à l’état de projet dans des rapports. Toutes font état de deux préoccupations : il faut cesser de consommer de l’espace à bâtir en privilégiant la rénovation de l’existant et il faut concilier les objectifs environnementaux de protection des sites avec le nécessaire développement

8 L. n°2009-888 du 22 juillet 2009 et ses textes d’application in C. tour. : M. Painchaux, Le droit de l’immobilier de loisirs, Paris, Lextenso éd. 2011, 474 p.

9 Par ex., surface minimale, qualité et quantité des équipements intérieurs ou communs (connexion internet…).

10 Par ex. Gîtes de France.

11 À titre d’exemple, seuls 5 000 hôtels ont été classés en quatre ans dont 800 appartiennent au même groupe hôtelier.

12 Loués entre 2 et 4 semaines par an. 13 Loués de 4 à 12 semaines par an.

économique et touristique14. Seules des opérations de réhabilitation permettent de réaliser cet objectif « d’utilisation rationnelle du patrimoine bâti existant »15. L’enjeu est évidemment de rendre attractif ce qui existe déjà en incitant les propriétaires à rénover. La conservation de la destination dans le temps ne peut être viable qu’à ce prix. Qu’il s’agisse de solutions existantes ou de projets, trois leviers dominent : la politique foncière par le biais de l’urbanisme et de l’aménagement (A), la politique fiscale (B) et la politique d’action publique (C).

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