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Les insuffisances du droit de l’urbanisme pour pallier aux difficultés de l’hébergement permanent

Annexe 1 : Caractéristiques des 7 profils typologiques de stations dans le massif alpin

B. Les effets de la servitude sur la propriété du fond servant

II. Les insuffisances du droit de l’urbanisme pour pallier aux difficultés de l’hébergement permanent

En zone de montagne, l’une des préoccupations des autorités publiques – en particulier des rédacteurs du document d’urbanisme local – est donc de contribuer au développement de l’habitat régulier sur l’année qu’il soit permanent ou touristique. Le droit de l’urbanisme est alors régulièrement utilisé pour ce faire. Il s’agit par exemple de trouver des solutions afin de favoriser la gestion locative (résidences de tourisme ou hôtelières) comme le prône du reste le IV de l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme. Le droit de l’urbanisme français n’est toutefois pas toujours en mesure de remplir ces objectifs. En voici quelques exemples3. Tout d’abord, en terme de droits à construire, le code de l’urbanisme ne permet pas de favoriser l’habitat permanent au détriment de l’hébergement temporaire puisque dans le règlement du PLU la différenciation des coefficients d’occupation des sol en fonction des usages n’est pas possible au sein d’une même catégorie de destination des constructions. Ensuite, le code de l’urbanisme ne permet pas de contrôler l’évolution des logements gérés anciennement en formule locative par le biais de la résidence de tourisme en habitation secondaire4. En effet, la résidence de tourisme n’est pas assimilée à la destination « hébergement hôtelier », l’une des catégories de destination de l’article R. 123-9 du code de l’urbanisme, mais à la catégorie habitation. Pour autant, les PLU de montagne peuvent favoriser les résidences de tourisme. L’incitation s’opère notamment par l’octroi de droits à construire accrus. Cependant, le règlement qui distingue le COS des résidences de tourisme de celui appliqué aux autres habitations de type individuel est illégal. En effet, cela revient en pratique à créer des sous-catégories de destination et à traiter différemment des constructions qui ont la même vocation : l’habitation5.

Face à ces difficultés, il convient de trouver des réponses et savoir comment utiliser la règle de droit dans le sens du maintien de l’hébergement permanent en

3 Ces exemples sont tirés de : J.-F. Joye, écriture des plans locaux d’urbanisme de montagne, Les Cahiers du Gridauh, 2012, n°23, pp. 495-564.

4 Les résidences de tourisme favorisent un hébergement locatif mieux étalé sur l’année car tout propriétaire doit donner en location son logement pour une durée minimum de neuf ans. À l’échéance du bail initial, le propriétaire peut renouveler le bail avec l’exploitant de la résidence ou récupérer la pleine jouissance de son bien pour le céder ou en faire son habitation secondaire et donc un nouveau « lit froid ».

5 V. TA Grenoble, 25 mai 2010, Syndicat des copropriétaires de la résidence Les silènes et a. c. / Cne de Val d’Isère, n°0802129-2.

montagne. Sans doute, est-il nécessaire de combiner entre eux les outils juridiques existants qu’ils soient issus du code de l’urbanisme, du code du tourisme ou d’autres matières de droit public ou de droit privé. Les contributions qui suivent apportent successivement un éclairage de droit comparé avec les exemples de réglementations utilisées dans des pays alpins voisins et destinées à limiter le phénomène des lits froids et des résidences secondaires puis abordent les règles propres à améliorer la maîtrise des destinations dans le temps.

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Master 2 Droit de la Montagne (Grenoble),

assistante à l’Institut de droit européen de l’Université de Fribourg1

Introduction

En tant que destination touristique, les Alpes suisses hébergent un nombre de résidences secondaires important. La construction des résidences secondaires a débuté dans les années 1950. Ce n’est toutefois qu’à partir de 2000 que la construction des résidences secondaires a atteint son paroxysme et vise essentiellement à satisfaire la demande d’une clientèle de plus en plus riche2. La Suisse compte aujourd’hui environ 500 000 « logements habités temporairement »3, ce qui correspond à 12 % de l’ensemble des logements du pays4. Au sein de quelques cantons, tels que les Grisons et le Valais, ce chiffre dépasse même les 35 %. Au niveau communal, le pourcentage de lits froids peut atteindre des valeurs comprises entre 50 et 80 % dans les régions touristiques5. La construction de résidences secondaires à des fins

1 L’auteure tient à remercier Messieurs Pascal Vonlanthen et Gaëtan Blaser (MLaw, assistant à l’Institut de droit européen de l’Université de Fribourg) pour la relecture critique du manuscrit. 2 Clivaz/Nahraht, Le retour de la question foncière dans l’aménagement des stations touristiques

alpines en Suisse, Revue de géographique alpine (RGA) 2010, point 14.

3 C’est le « domicile économique » qui sert de critère. Les logements habités temporairement comprennent en outre des résidences utilisées à des fins touristiques, mais il peut également s’agir de résidences utilisées à des fins professionnelles, tant qu’il ne s’agit pas du « domicile économique » ; il est également possible qu’il s’agisse d’une résidence principale (Office fédéral de la statistique (OFS), Recensement fédéral de la population dans l’année 2000 (Recensement de la population, des ménages, des bâtiments et des logements) Description des données GEOSTAT, 2009 ; cf. également Rütter+Partner, Wirkung der Eidgenössischen Volksinitiative « Schluss mit uferlosem Bau von Zweitwohnungen ! » – Im Auftrag des Bundesamtes für Raumentwicklung ARE, Rüschlikon, 2008, 45).

4 ARE, Fiche d’information : Les résidences secondaires en Suisse, dernière modification du 13.03.2012, <http://www.are.admin.ch/themen/raumplanung/00236/04094/index. html?lang=fr> (consulté le 27 mars 2012). La dernière relève statistique remonte au recensement de la population en 2000. Le chiffre mentionné s’appuie sur l’évolution des dernières décennies et sur l’hypothèse qu’elle s’est poursuivie entre 2000 et 2010.

5 ARE, Fiche d’information : Les résidences secondaires en Suisse ; Clivaz/Nahraht, RGA 2010, point 14.

touristiques entraîne une augmentation des surfaces urbanisées ainsi que le mitage du paysage, ce qui est contraire au principe constitutionnel d’une « utilisation judicieuse et mesurée du sol » (article 75 de la Constitution fédérale (Cst.6)7. S’ajoute à cela la surenchère des prix du terrain, qui a pour conséquence l’exclusion de la population locale du marché de logement, des frais élevés pour les communes qui sont forcées de prévoir des infrastructures adaptées aux taux d’occupation maximal des logements alors que celui-ci n’est atteint que quelques semaines par année, ainsi qu’une perte d’attractivité du lieu touristique en raison des volets clos durant des mois8.

Suite à l’initiative populaire fédérale du 11 mars 2012, qui limite les résidences secondaires à 20 % par commune, la situation juridique s’avère être particulièrement intéressante puisqu’un grand nombre de questions concernant l’exécution et la mise en œuvre de l’initiative sont apparues. C’est la raison pour laquelle cet article est principalement consacré aux réglementations suisses (I.). Des réglementations d’autres pays alpins, respectivement d’autres régions alpines (notamment l’Autriche (II.), et l’Allemagne (III.)) sont également présentées, quoique de manière moins exhaustive, afin de permettre une comparaison. Un bilan est établi à la fin de l’article (IV.).

L’article présente en premier lieu les dispositions d’aménagement du territoire qui visent à réglementer la construction des résidences secondaires. Les dispositions qui ne font pas partie strictu sensu du droit de l’aménagement du territoire, mais qui peuvent avoir une influence indirecte sur celui-ci, telle que par exemple des mesures fiscales, sont également prises en compte.

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