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La transition agro-écoloique est une notion très utilisée dans la littérature. Plusieurs définitions en sont données. Les définitions les plus célèbres sont celles de Gliessman et d‟Altieri. Pour Gliessman (1998), « l’agro-écologie est l’application de l’écologie à l’étude,

la conception et la gestion des agro-écosystèmes durables ». Altiéri (1995) considère que « l’agro-écologie est l’application de concepts et de principes écologiques pour concevoir et gérer des agro-écosystèmes durables par un cadre d’évaluation sur la complexité des agro- écosystèmes ». Buttel (2003) avance une définition qui met en avant une dimension science

sociale. Selon l‟auteur « l’agro-écologie est l’application de l’écologie à l’étude, la conception et la gestion des systèmes agro-alimentaires. Elle est par définition une pratique interdisciplinaire qui implique une redéfinition des frontières scientifiques et sociales, ce qui constitue un défi intellectuel majeur pour la recherche en agronomie ».

L‟agro-écologie est un concept d‟orientation (Stassart et al., 2012) et sa définition dépend du champs d‟action, la production agro-écologique peut être vue comme le produit d‟une co- évolution des êtres humains et de la nature. Elle va dépendre donc des interactions des uns par rapport aux autres à l‟intérieur de chaque système. Les conditions de ces interactions sont très variées et ne sont pas statiques, elles se construisent selon une dynamique inter-systèmes. L‟homme intervient par une altération des écosystèmes pour les convertir en agro- écosystèmes. De ce fait, la production agricole est le résultat de pressions socio-économiques exercées au fil du temps sur les écosystèmes naturels (Pérez-Vitoria et Sevilla Guzman, 2008). L‟agro-écologie se trouve au cœur d‟une analyse des différents systèmes de production afin de déterminer les pratiques agricoles qui englobent les dimensions écologiques, économiques et sociales.

La transition agro-écologique correspond donc à la période de transformation des systèmes agricoles conventionnels vers de systèmes basés sur les principes de résilience, d‟autonomie, de diversité, d‟écologie et d‟équité, croisant les dimensions économiques, sociales, et environnementales. Costababer (2004) la définit comme un processus graduel de changements à travers le temps où la gestion des systèmes de production a comme objectif le passage d‟un système conventionnel vers un système alternatif en intégrant les méthodes et les techniques agro-écologiques. Caporal et Costababer (2004), expliquent la transition ago-écologique

comme un processus social qui cherche l‟obtention d‟indices plus durables, stables, productifs et équitables pour améliorer la qualité de vie dans l‟activité agricole.

Comme pour les définitions nous constatons une diversité d‟approches pour étudier la transition agro-écologique (Calle Collado et al., 2013). Ces approches conduisent à prendre en compte différents éléments, par exemple les dimensions territoriales et l‟ancrage social au niveau de la coopération dans les mouvements professionnels et militants pendant la transition agro-écologique. Leur analyse prend en compte les dimensions personnelles (en termes de conscience de la personne), micro-sociales (coopération sociale), éco-structurales (flux social, économique ou technologique). De notre part, ces éléments nous servent à problématiser notre étude.

L‟une des références incontournables en matière d‟étude de la transition agro-écologique est celle de la théorie de la transition socio-technique de Geels (2002, 2005a, 2011). Pour mieux comprendre la configuration et les raisons du changement dans le système sociotechnique, la théorie de la transition (Rip et Kempt 1998 ; Kemp, Rip et Schot, 2001 ; Elzen et al., 2004 ; Geels, 2005a-2005b ; Loorbach et Rotmans, 2006 ; Geels et Schot 2007 ) introduit une perspective à plusieurs niveaux « Multi-level Perspective » (MLP) pour mieux analyser les changements au sein des trois niveaux. La lecture d‟une innovation par le cadre MLP est faite à partir de l‟évolution économique et sociale d‟une technologie, sur son histoire et sa trajectoire. La théorie explique que les différents niveaux existants sont le cœur d‟un système d‟innovation, car ce sont les interactions entre niches qui dessinent le chemin suivi par un changement sociotechnique.

Figure 6. Hiérarchie selon les multiples niveaux

Source : Geels, 2002

Nous utilisons ce cadre d‟analyse de la perspective multi-niveaux pour étudier la transition agro-écologique des exploitations agricoles. Dans le cas d‟une agriculture doublement performante, un système d‟innovation commence à émerger. En effet, cela peut constituer des niches à partir desquelles le système de production conventionnel peut s‟hybrider pour constituer un nouveau système (Fares et al., 2012) plus durable.

Figure 7. Dynamique de la perspective multi-niveaux des systèmes d‟innovation

Source : Geels, 2002

En effet, nous nous intéressons à l‟analyse des différents types d‟acteurs positionnés dans un territoire (Gers). Notamment, au niveau individuel et au niveau collectif correspondant à l‟échelle micro. Les raisons pour lesquelles nous nous concentrons sur cette première échelle sont tout d‟abord qu‟elle permet de connaître les éléments qui structurent le système et le processus d‟innovation des agriculteur et le rôle du collectif, ainsi que les freins et les atouts qui impactent les performances des exploitations agricoles. Notons que dans la littérature, les travaux portant sur l‟échelle micro sont présents. Les recherches se sont plutôt intéressées aux échelles macro et méso (Markard et Truffer, 2008 ; Klerkx et al., 2010 ; Hermans et al., 2013). Or, nous considérons que c‟est à cette échelle micro (individuel/groupe social) que les actions et les dynamiques innovantes en faveur de la transition agro-écologique naissent et se développent.

Figure 8. Chemin de transformations dans les systèmes d‟innovation

Source : Geels, 2005

L‟échelle d‟étude micro permet d‟éclaircir le processus d‟innovation, les trajectoires et la réussite des exploitations agricoles dans la transition agro-écologique. Ce positionnement nous conduit à identifier la logique d‟action de l‟agriculteur, les raisonnements qui conduisent au changement des pratiques et l‟introduction du changement dans son exploitation (stratégies).

Ce positionnement ne signifie pas l‟abandon des autres échelles. En effet, les deux niveaux micro et méso sont mêlés. Les niches et le régime se trouvent dans une relation indissociable car l‟un dépend de l‟autre. C‟est-à-dire que d‟un côté, les niches en s‟associant, en s‟accompagnant et en travaillant ensemble vers le changement de pratiques ont un effet sur le régime et le régime également a un effet sur ces niches. Il met en place des mécanismes facilitateurs et favorise leur adoption en essayant de stimuler les acteurs principaux vers un changement des pratiques agro-écologiques. C‟est donc dans ce contexte qu‟il est possible d‟imaginer que l‟AB peut devenir un vecteur de développement local et réciproquement la dynamique locale peut contribuer au développement de l‟AB. Dans cet ordre d‟idées, le collectif contribue à l‟essor du processus d‟innovation et sa dynamique facilite la réussite vers la transition agro-écologique des exploitations agricoles.