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La sanction de l’incapacité juridique du mineur

Dans le document LA PROTECTION DU MINEUR DANS LE CYBER ESPACE (Page 152-155)

2-b. Les supports numériques

Chapitre 1. LA CAPACITÉ JURIDIQUE DU MINEUR DANS LE CYBERESPACE

A. La validité des contrats électroniques conclus par le mineur

2. La sanction de l’incapacité juridique du mineur

Le mineur en dessous d’un certain âge serait soumis à une incapacité générale. Dans cette phase le mineur ne pourrait s’obliger à aucun contrat. Un tel contrat serait nul de nullité absolue. Une interrogation demeure quant à la détermination de l’âge de référence pour mettre en œuvre cette incapacité absolue. L’âge de 13 ans retenu par l’ordonnance du 2 février 1945 alinéa 2 comme minimum en dessous duquel il ne peut y avoir de responsabilité pénale, serait trop élevé pour le droit civil et le droit commun des contrats464. A l’inverse, l’âge de 7 ans

461 Une incapacité de jouissance est une interdiction de conclure un contrat en particulier, l’intéressé ne peut exercer son droit par autrui, il est purement et simplement privé de ce droit, cf. Hubert Bitan dans Contrats électroniques, Litec, Editions du Juris-Classeur.

462 Hubert Bitan, Contrats informatiques, op.cit, p. 43.

463 Cass. Civ. 1ère, 4 novembre 1970, JCP 1971 II 16631. Les faits : un mineur souscrit un contrat de location d’un véhicule de tourisme. A la suite d’un accident de la circulation, le véhicule est endommagé. La société de location lui demande de payer les réparations vu que le jeune homme n’avait souscrit qu’une assurance au tiers. Ce dernier refuse au motif que le contrat de location n’était pas valablement formé compte tenu de sa minorité ; par conséquent il ne devait pas assurer les réparations du véhicule endommagé. Solution : la Haute juridiction rejette le motif minorité.

152 vise trop bas. Il faut s’en remettre alors au cas par cas, prendre en considération tous les éléments et les circonstances particulières comme dans le cas de contrats électroniques.

La doctrine a considéré quelquefois que l’acte accompli par un enfant privé de discernement en raison de son âge devait être nul de nullité absolue pour absence de consentement465. Seulement la nullité d’un acte pour incapacité visait à protéger le contractant dont la volonté n’avait pas été libre. Un mineur qui a conclu un contrat ne l’a pas nécessairement fait sous la contrainte ou par manque de discernement ou en étant victime d’un dol. Comment appliquer au contrat conclu une nullité absolue sans autre considération ? Intervient alors une idée de nullité relative pouvant être invoquée par l’auteur de l’acte ou par son représentant, administrateur légal ou tuteur.

Le contrat électronique ne peut en principe pas prospérer si l’incapacité d’un des cocontractants est connue des deux parties. Le vendeur qui prend connaissance de l’incapacité est en droit de récupérer le produit vendu en restituant le prix466 perçu. La nullité des actes juridiques accomplis par un mineur est une mesure de protection nécessaire ; cette nullité reste encourue en cas de fausse déclaration de majorité467, les intérêts de l’incapable sont supérieurs à ceux du tiers468.

Les actes accomplis par le mineur ne sont pas nuls sans distinction, la nullité peut être subordonnée à une lésion469, c'est-à-dire que l’acte a été conclu sous des conditions anormales laissant penser que l’on a profité de l’inexpérience du cocontractant, ou qu’il est inutile ou disproportionné aux moyens du mineur470 (article 1305 et suivant et du code civil)471.

Le fait qu’un mineur ait indiqué son âge lors d’une commande ne suffit pas à annihiler la possibilité d’annuler le contrat pour incapacité. Qu’en est-il lorsque le fournisseur a négligé

465

Christian Larroumet, Droit civil. Les obligations. Les contrats, Tome 3, Economica 3e Edition 2003, p. 289. – Le mineur est de plein droit incapable, sans qu’il y ait lieu de provoquer une intervention judiciaire à cette fin, art. 488 du code civil.

466

Xavier Linant de Bellefonds, préc, p. 38. 467 Art. 1307 du code civil.

468 Florence Laroche Gisserot, Les droits de l’enfant, 2e Edition Dalloz, Connaissances du droit, p. 42.- Cour de cassation, chambre criminel, 30 mars 1999, Dalloz. 1999, IR 130 ; un mineur avait usurpé une fausse identité. 469 Christian Larroumet, op.cit.

470

Florence Laroche Gisserot, Les droits de l’enfant, op.cit.

471 Article 1305 issu de la Loi n° 64-1230 du 14 décembre 1964 Journal Officiel du 15 décembre 1964 en vigueur le 15 juin 1964 ; « La simple lésion donne lieu à la rescision en faveur du mineur non émancipé, contre toutes sortes de conventions ».

153 de vérifier une mention relative à l’âge destinée à établir l’incapacité de son client472. Cependant l’absence de mentions relatives à l’âge conduisant à l’impossibilité pour le vendeur de vérifier la capacité de son client aboutit à l’application de la théorie de l’apparence : l’obligation d’honorer le montant de la transaction retombe sur les parents du mineur. Par ce biais on entend indirectement contraindre les parents des mineurs à limiter l’activité de ces derniers sur Internet par le biais de logiciels restreignant l’accès aux sites marchands473 ou du moins à prendre leurs responsabilités par rapport aux actes posés par leurs enfants mineurs dans le cyberespace.

En tout état de cause, les parents ne peuvent être tenus responsables des obligations nées de contrats passés par leur enfant mineur, que ce soit ou non dans le cadre des actes de la vie courante. Dès lors, le cocontractant d’un mineur doit vérifier, avant de s’engager, la capacité juridique de la personne qu’il a en face de lui. Est-ce à dire que tous les risques pèsent sur le cocontractant du mineur qui n’a pas recherché ou qui n’a pas su ou pu déterminer la minorité et donc l’incapacité juridique à contracter de ce dernier? Le parent ou tuteur légal est responsable des dommages que le mineur a infligés à autrui conformément à l’article 1183 du code civil. Peut-on assimiler le fait que le cocontractant du mineur n’ait pas été en mesure de déterminer sa minorité comme un fait dommageable ? Assurément pas. La minorité d’un cocontractant ne génère pas nécessairement la nullité du contrat. La nullité pour erreur sur la personne ne peut être invoquée que pour les contrats conclus intuitus personae.

En définitive, force est de constater qu’aucun texte n’a expressément réglé la question de la capacité ou plutôt de l’incapacité contractante du mineur en ligne. Ce contrat est nul selon le droit commun ce qui représente un risque considérable pour les entreprises dépendantes du commerce électronique474. Dans la pratique (en cela Internet s’aligne sur le droit commun), on admet que le mineur puisse conclure des contrats en ligne mais avec le concours et l’autorisation des parents (même si ce n’est pas souvent le cas notamment pour des transactions d’un faible montant). Dès lors que l’on admet que le mineur peut conclure des contrats électroniques, se pose la question de leurs conditions de validité comme pour tout autre contrat.

472 Florence Laroche Gisserot, Les droits de l’enfant, op.cit. 473 Ibid.

154

B. La validité intrinsèque du contrat électronique.

Le contrat qu’il soit électronique ou non obéit aux normes posées par l’article 1108 du code civil : le consentement, la capacité des cocontractants, la cause et l’objet du contrat475.

L’objet du contrat

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Pour être valide, un contrat doit avoir un objet déterminé, licite et qui est dans le commerce. L’extranéité d’Internet pose encore quelques problèmes ; la licéité d’un objet varie selon les législations nationales. Certains objets font cependant l’objet d’une condamnation générale, à l’instar des stupéfiants.

La cause du contrat

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Elle doit être existante et licite. A la différence de l’objet illicite, la cause illicite procède du caractère illicite de la motivation du débiteur de l’obligation.

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