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La lutte contre la désaffection religieuse

1.5 La force de la religion à Bristol

1.5.6 La lutte contre la désaffection religieuse

De 1840 à 1890, une grande campagne de construction d’églises est entreprise à travers le pays afin de rendre les lieux de culte accessibles à tous et ce, même dans les quartiers populaires jusqu’alors négligés. Cet élan est motivé par deux facteurs : le souci de raviver la ferveur religieuse de la population et de convertir plus de fidèles mais aussi la compétition accrue entre les différentes confessions. Dans la plupart des comtés on assiste à une transformation du paysage urbain avec l’apparition de clochers et de nouveaux édifices religieux

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« *…+ this and the reason which follows are the causes of what is called the ‘indifferentism’ of the poor to religion ; the statement that they are not hostile to religion but that they only do not care about it. Such indifferences bred of the facts and accidents of their daily lives ; they are often too hurried, too driven, to care about anything. ‘Out of the Depths’ of some supreme sorrow or trouble, the heart may cry to the Father; but under the ceaseless bondage of the anxieties day by day, year by year, of precarious employment, wearying to both mind and body, it is difficult to realise the Divine presence. The indifference of the poor is not to religion only, but often too all except those interests that affect their bodily life, its needs and toils. » Report to

Inquire into the Condition of the Bristol Poor, p.194.

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BRL B7060, rapport de 1843, p.3.

286 Ibid., p.4.

140 dans les centres villes mais aussi les quartiers résidentiels ou populaires288. Afin de financer ces campagnes, l’Eglise anglicane dispose bien entendu du soutien de l’Etat, le parlement vote et accorde des fonds pour financer le travail de l’église dans les quartiers les plus peuplés289, alors que les non-conformistes ne peuvent compter que sur le financement des membres de leur congrégation. Au sein de l’église officielle on forme aussi des associations de volontariat pour lutter contre l’influence du milieu urbain, on assiste ainsi à la création du « Church Pastoral Aid Society » pour amasser de l’argent pour les quartiers défavorisés, la « Society for Promoting The Employment of Additional Curates in Populous Places », et d’autres associations pour récolter des fonds qui serviront à la construction d’églises. A la fin du siècle, l’Eglise anglicane dépense plus de deux millions de livres par an pour construire et restaurer ses lieux de culte290. Mais la présence physique de l’église n’est pas suffisante. Il faut aussi apporter des solutions aux problèmes de fond qui détournent les populations du droit chemin, comme l’explique ce missionnaire :

What can be done to improve and elevate this portion of our fellow creatures? Preaching will not do it, for they will not come to hear it; and occasionally visiting and talking to them is nearly as useless. Nor will merely supplying them with food and clothing, for this only tends to increase idleness and improvidence. Two things are essential requisites, - EMPLOYMENT and EDUCATION291.

Cependant, le clergé prend conscience que l’amélioration des conditions de vie des classes inférieures doit également aller de concert avec une autre

288

Hugh McLeod, Religion and Society in England, p.72. Si les édifices religieux dans les quartiers ouvriers sont moins grandiloquents, ces derniers sont inondés de petites chapelles, missions, salles paroissiales, instituts et écoles du dimanche.

289

Kenneth Stanley Inglis, op cit., p.57.

290

Id.

291 BRL B7060, rapport de 1843, p.4. On laissera ici de coté la discussion sur l’utilité et le bien-fondé des œuvres caritatives mais il suffit de noter que bien souvent les discours du clergé et des réformateurs condamnent l’action caritative. D’ailleurs les conclusions d’un pasteur de Liverpool font échos à ces dires puisque celui-ci va même jusqu’à dire que les œuvres caritatives et l’aide proposée entraînent parfois plus de mal que de bien en confortant les gens dans leur situation. « I would briefly advert to the influence of the over-numerous public charities upon the conduct and happiness of the lower working classes in this town. Having observed their general effects with as much attention as was in my power, I can rest upon no other conclusion than that, though at their first institution they may possibly do more good than evil, they usually issue, in the proportion to the scale of their means and operations, in doing far more evil than good ». BRL B7060, rapport de 1843, p.5.

141 réforme, celle qui consiste à proposer à cette partie de la population une église dans laquelle elle se reconnaisse. Shearman admet que pour être efficaces, les offices célébrés à la chapelle doivent être adaptés à la vie et la condition des auditeurs, il faut qu’il y ait une résonance et une identification possible.

In the ministrations here conducted, particular care has been taken to adapt them to the daily life, wants and difficulties of the people. Their trails and habits are peculiar, and to do them good, the preaching by whomsoever conducted, must be suited accordingly292. Dans le Report to Inquire into the Condition of the Bristol Poor les conclusions sont identiques. Il convient de faciliter le contact entre les pauvres et la religion en s’adaptant à leur réalité tout en se gardant d’adopter des attitudes trop condescendantes, qui comme nous l’avons souligné précédemment, éloignent les classes populaires de la religion :

If the poor are to retain interest in, if to be won to ready observance of, religious worship, religious services must be adapted to suit their minds, tempers and characters …If religious influences are to reach the poor they must be taken to their homes, but in no professional or patronizing way, rather by men and women living among tem, knowing them and being known of them293.

On retiendra donc de ces réflexions, qu’à l’époque Victorienne, la religion et la condition spirituelle de la nation sont considérées comme étant des questions essentielles. Le grand recensement de 1851 en est la preuve. Les témoignages ici rassemblés mettent en évidence un certain déclin de l’assiduité religieuse mais soulignent surtout les raisons pour lesquelles les plus défavorisés s’éloignent des églises. Le « marqueur de classe » associé à l’Eglise anglicane lui est notamment néfaste. Cette section de notre travail a aussi montré que l’église établie, tout comme les sectes non-conformistes, tente par différents moyens de regagner ces populations en manque de spiritualité. Cependant, il est intéressant de constater que le problème de la désaffection religieuse ne se soit pas confirmé à Bristol. Au contraire comme vise à le démontrer le passage qui suit, Bristol est demeurée à travers toute la période victorienne une ville

292 BRL B7060, rapport de 1858, p.17.

142 particulièrement pratiquante, très attachée à la fois à l’église officielle mais aussi aux sectes dissidentes.