• Aucun résultat trouvé

Conclusion  du  chapitre  1

4.1.3. La discipline et le régime, un choix d’action

Ces règles ne peuvent s'agencer uniquement lorsque les acteurs, et leurs intentions de contrôle, se fixent à un discours suffisamment stable pour que l’action puisse être accomplie avec un optimum de chance. Un choix est donc fait par le collectif ainsi constitué sur la posture qu’il doit prendre face aux autres espaces d’échanges dont il est devenu autonome, principe fondamental de l’encastrement.

Les acteurs déterminent la manière dont ils vont exécuter l’échange. C’est ce que White appelle la discipline, « Chaque discipline (…) est un mécanisme qui façonne des identités, mais seulement en tant que soutien pour l’accomplissement d’une tâche ou la réalisation d’un

objectif. », (White, Godart, & Corona, 2008, p. 28). Il s’agit donc d’un mécanisme de

consolidation de l’encastrement, car il coordonne les liens entre les identités présentes. Cette discipline est un espace dans lequel les demandeurs140 vont faire leur choix. Elles sont des organisations qui « émergent de l’activité coordonnée autour de différents ensembles de sens

auxquels des identités sont rattachées. », (ibid.). Ces disciplines peuvent être de trois types

distincts u l’interface, l’arena, et le conseil.

• La discipline de type « interface » représente les flux d’échanges de biens ou de services non spécialisés qui établissent des relations avec plusieurs espaces d’échanges. Bien que son espace soit étendu et multiple, l’interface est néanmoins encastrée au niveau le plus global de l’échange comme, par exemple le marché de la production. Sa caractéristique est l’engagement, dans une dynamique d’échanges soutenus avec les autres.

• La discipline de type « arena » est quant à elle soumise à des jugements qui permettent l’inclusion ou l’exclusion d’un espace d’échanges à un niveau inférieur que celui de l’ « interface ». Ils sont par conséquent potentiellement en compétition avec ceux qui sont à l’extérieur de cet espace. L’incertitude se fait ici plus précise. Le processus sur lequel se fonde cette discipline est la sélection, la « valeur de sélection est la pureté », (Grossetti & Godart, 2007), c’est à dire l’adéquation et la performance de l’objet141 de l’échange. Elle doit être « comprise comme la convergence des intérêts ; l’activité principale dans une arène est l’appariement (des intérêts ou des besoins) suivi par un

échange. », (Steiner, 2008, p. 67).

140 Donneur d’ordres, acheteurs, consommateurs par exemple.

• La discipline de type « conseil » est un espace de prestige au sein duquel se situent les identités, acteurs, par leur expertise et leur spécification. Ainsi, ils influent sur les décisions des autres acteurs de l’espace. Ils ne sont plus cantonnés uniquement à subir. Cette discipline repose sur le processus qui est « la médiation, et la valeur le

prestige », (Grossetti & Godart, 2007).

La figure 10 reprend les 3 disciplines et leurs principales caractéristiques. Adaptée de Grossetti et Godart (ibid.), nous la complétons par l’intégration d’une possibilité de découplage et d’encastrement que les disciplines peuvent permettre de formaliser142. Il existe d’autres niveaux d’encastrement possibles que celui des disciplines, comme nous l’avons expliqué précédemment.

Figure 10 - Les 3 Disciplines de White, leur processus et leur valeur.

Adapté de Grossetti et Godart (2007).

Le premier type de discipline est propice à l’involution. L’homogénéisation condamnée à se fondre dans un ensemble plus vaste, un niveau encore supérieur. Nous pouvons l’identifier au marché général de la logistique. Le deuxième type caractérise la sélection. Elle est principalement focalisée sur la « maximisation des profits en comparaison à la performance des autres entreprises », (White, Godart, & Corona, 2008, p. 24). Elle peut correspondre à l’espace d’échanges du modèle « Plug and Play ». La dernière vise à influencer son environnement, c’est par définition la discipline qui s’efforce le plus à agir pour le contrôle de l’incertitude. La discipline implique l’action, c’est à dire un choix, un mouvement stratégique

142 Dans la figure précédente (figure 9), ce peut être l’identité qui agit afin de sortir de l’espace d’échanges « x » pour s’agréger au mouvement des autres identités qui également agissent pour le contrôle.

et une opérationnalisation143. Cette dernière peut prendre l’aspect d’une expertise dans un domaine à l’intérieur même de l’espace d’échanges « Plug and Play », la géolocalisation des produits, une capacité à manutentionner un type de marchandise, une compétence sur les échanges internationaux, par exemple.

La rhétorique et la discipline forment alors le régime. Ce dernier représente un espace construit d’une formation sociale et économique, ainsi qu’un système de contrôle des tensions et tentatives d’ajustement à l’intérieur de l’espace. Le régime utilise au moins deux disciplines séquentiellement. La première utilisée est la pourvoyeuse de ressources pour la seconde, qui restera la discipline d’encastrement. Elle le sera jusqu’à la prochaine action de contrôle qui pourra alors être une dynamique de découplage et d’encastrement.

Le choix pour les identités de leur discours et de la construction de leur rhétorique détermine l’action de contrôle, dans leur assemblage en une seule identité de regroupement. Elle-même va dessiner les pourtours du mouvement de découplage pour lequel la définition des ajustements et du filtre est essentielle au processus suivant qu’est l’encastrement.

L’ensemble construit, initialement par une recherche d’appui individuel, définit l’action collective. Cette action est régie par des règles et des conventions qui permettent à la fois de définir le nouvel espace encastré, les limites de cet espace, les mesure de contrôle de l’incertitude et les actions. Il représente un espace structuré de relations économiques et sociales, dans lequel « néanmoins, le discours reste essentiel dans le régime de contrôle », (White, 2011, p. 291). Il a acquis à travers les relations et les liens une forme de réseau144

partageant des thèmes d'échange, un domaine. Il s’agit alors d’un ancrage qui exerce une

tentative de contrôle sur d’autres identités collectives ou non. La recherche de rationalité145, bien qu’importante dans le pilotage de leur activité, n’apparaît qu’en second plan face au contrôle de l’incertitude. Cette dynamique est bien une stratégie qui tente «de subsumer les tentatives de contrôle des autres identités sous ses propres tentatives de contrôle, soit en les anticipant, soit en y réagissant. », (White, Godart, & Corona, 2008, p. 16).

Ce mécanisme d’ « encastrement-découplage-encastrement » est fondé sur des identités exprimées à travers un discours stabilisé. Il est régi par des règles et des conventions. Ainsi, il

« contraint et permet l’échange marchand. », ( Le Velly, 2002, p. 9). Les acteurs, identités

143 Que l’on peut assimiler à une production de biens ou de services.

144 Nous reprendrons plus loin dans le détail la notion de réseau.

encastrées, espèrent donc qu’il comble tout ou partie de l’incomplétude de leur contrat et, par conséquent, qu’il limite l’incertitude au sein de l’espace d’échanges nouvellement encastré.