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Un environnement d’échange marchand peut être considéré comme un marché dés lors qu’une certaine spécialisation de l’échange est identifiable avant toute chose par les acteurs. Elle peut être accessoirement aussi reconnaissable par les observateurs pour la définition du marché. Ainsi les entités agissantes sont soumises à des repères, prix, jugements divers156, qui caractérisent un espace au sein duquel l’échange peut s’effectuer car toutes les conditions sont réunies pour que l’offre et la demande se rencontrent.

Ce marché est soumis aux perturbations propres à un environnement qui convoque une notion de performance en échange d’une rémunération, voire de la réalisation d’un profit. Ces perturbations sont provoquées par les acteurs au sein du marché ou dans les marchés périphériques. Les acteurs n’ont pas d’autres choix que d’échanger en tentant de maîtriser l’incertitude présente, de ce fait, dans les relations d’échange. Il en est ainsi car en faisant le choix d’échanger dans ce marché, ils ont abandonné une part de leur autonomie, chaque acteur étant dépendant des autres dans cet espace. Ils sont donc encastrés dans un marché défini par les règles de l’échange telles que le secteur d’activité, le prix, les caractéristiques du bien. L’encastrement peut donner une compréhension de la dépendance et du blocage des PSL dans un modèle logistique « Plug and Play ». Il ne semble pas que le « Plug and Play », à lui seul, fournisse une explication de ces deux impacts sur les prestataires.

Face à l’incertitude, l’alternative est de se séparer du milieu incertain et de se positionner dans un espace au sein duquel l’incertitude est moins présente ou mieux contrôlable. Les acteurs en se séparant, se découplent de leur marché initial pour, à nouveau s’encastrer dans un autre espace.

Généralement, l’encastrement se réalise dans un niveau inférieur du marché, que l’on peut assimiler à une spécialisation de l’échange. Le modèle « Plug and Play » pourrait semble-t-il à lui seul proposer une explication de la spécialisation. Néanmoins, la théorie de White apporte un éclairage intéressant car, par la spécialisation, nous pouvons comprendre un principe du découplage et de l’encastrement. En se découplant, ces acteurs cherchent un appui afin de ne pas être isolés dans un environnement marché tel que le « Plug and Play » de la Grande Distribution. Marché où le nombre de prestataires est essentiel afin que les acheteurs potentiels aient le choix et des opportunités. « Le découplage laisse de la place pour expérimenter des options de façon conjointe (ce qui est représenté dans le modèle par une

constante "historique" arbitraire). », (White, 2011, p. 270). Isolé, le prestataire logistique ne présente pas d’intérêt pour le modèle « Plug and Play », ni pour son donneur d’ordres ou alors seulement ponctuellement, ce qui ne lui permettrait pas d’assurer la pérennité de son entreprise.

Chaque acteur, de par son histoire, ses intentions, sa stratégie et ses attributs, a une identité qu’il rend audible par un discours. L’encastrement des acteurs découplés dans un nouvel espace a lieu lorsque les discours s’ajustent, et deviennent un discours global. Néanmoins, chacun garde son histoire et son discours initial mais c’est le discours global qui s’exprime. Le discours est la particularité de l’identité. Les acteurs se trouvent donc assemblés sous une même identité discernable par les autres acteurs et les observateurs. Ils sont encastrés dans un niveau inférieur. Cette dynamique a pour objectif une action de contrôle. C’est le cas du marché « Plug and Play » et de ses prestataires.

Dans cet espace encastré, le volume d’échange est soumis également à une compétitivité comme pour le marché de niveau supérieur, qui instaure tout autant une incertitude en son sein. Elle est en partie due à une perte d’autonomie croissante. « Les identités se construisent autour d'engagements, lesquels contraignent les identités qui les composent et sont en cela très dissemblables des réseaux qui, eux, se construisent à partir d'ensembles flexibles de

récits », (White, 2011).

Pour se protéger, les acteurs ont donc la possibilité de définir un niveau d’encastrement inférieur au précédent, c’est à dire un encastrement dans l’encastrement « Plug and Play ». Pour ce faire, les règles et les conventions de l’encastrement se muent en références qui ont pour propriétés d’être plus stables que les règles et conventions nécessaires à l’encastrement de premier niveau.

Le réseau, sous sa forme, ne répond alors plus à l’action de contrôle que les acteurs s’efforcent de mettre en œuvre. C’est le cercle qui peut prendre place en temps que nouvel espace d’encastrement. La spécialisation de l’échange s’accroit car le cercle impose de savoir qui est « en dehors ou en dedans ». Il implique une démarche dans laquelle les acteurs s’encastrent plus en profondeur et perdent encore plus d’autonomie. Ils précisent leurs discours qui « finissent par constituer un ensemble à partir duquel la mobilisation construit une description parcimonieuse, un discours qui invoque une valeur mais n'est pas en contradiction avec des projets de contrôle mis en avant de façon active. » (Merckle, 2011, p. 37).

Il est ici question « des conditions de possibilité de cette solidarité : notamment l’existence des frontières que le collectif se donne (avec toute la dimension stratégique de cette construction complexe basée sur des exclusions) et l’existence de règles que ses membres

doivent formuler et mettre en œuvre », (Favereau, & Lazega, 2002, p. 215)

Cette approche est importante dans le cadre d’études d’organisations complexes soumises, par définition, à un amalgame de liens de niveaux hiérarchiques différents. Ces niveaux où s’entrecroisent des relations de coopération et de compétition.

Ce chapitre, a abordé principalement la revue de littérature concernant la théorie du découplage et de l’encastrement selon White. Il a pour objectif de démontrer qu’une approche « socio-économique » peut être nécessaire pour un observateur souhaitant expliciter l’organisation complexe de notre objet de recherche. Cette théorie peut apporter des éléments de compréhension du « pourquoi » de cette organisation et de ses impacts sur les acteurs. Elle a la possibilité de nous éclairer sur le « comment » d’une réaction des actions au regard des impacts qu’ils subissent. Dans le premier chapitre, nous avons abordé deux « sous-questions »

afin de réduire la complexité de la question de recherche. Alors en quoi, la théorie de White

peut nous aider dans notre approche. Sous-question 1 :

Pourquoi les Prestataires de Services Logistiques semblent-ils dépendants et bloqués stratégiquement par le modèle « Plug and Play » imposé par l’enseigne de la Grande Distribution ?

Au-delà des approches théoriques réalisées dans le chapitre dédié au « Plug and Play » comme nous avons pu l’exposer, ut supra, l’approche hybride, appelle à interroger les théories économistes et les théories sociales. Ainsi, elles donnent un sens différent et permettent de prendre conscience de l’importance de l’histoire dans les relations de marché, et par conséquent, dans la construction sociale autour d’un axe économique. Ceci est encore plus prégnant lorsque l’espace d’échanges ne s’appuie pas sur un réseau mais est, en lui-même, un réseau, comme l’affirme Lazega. « En effet, sans une telle approche des interdépendances de ressources et des engagements (qui définissent les relations sociales), il est difficile de comprendre les « mécanismes sociaux » génériques [Hedström, Swedberg, 1998] qui

caractérisent toute forme d’action collective. », (2006, p. 214).

C’est en cela que la théorie du découplage et de l’encastrement apporte un éclairage supplémentaire et nécessaire. Le modèle « Plug and Play » est assimilé à une « entreprise

réseau ou une entreprise en réseau », (Fabbe-Costes, 2007) à la suite de Paché et Paraponaris (2006). Il est par conséquent « un réseau d’organisations connectées et interdépendantes

travaillant ensemble », (Aitken, 1998), dans lequel il s’avère nécessaire de stabiliser les

relations d’échange entre les différents acteurs, autrement dit réaliser la coordination »,

(Paché & Paraponaris, 2006, p. 11). Le modèle « Plug and Play » s’apparente alors à un réseau dans lequel différents acteurs interagissent afin d’échanger dans un espace stable. Dans ce cas, il faut étudier « l’action individuelle et collective et les méthodes d’étude des interdépendances relationnelles ne sont pas plus séparables que ne le sont Copernic et

Galilée. », (Lazega, 2006, p. 219).

Sous-question 2 :

Comment « Objectif CO2 » peut-il aider les Prestataires de Services Logistiques à retrouver une partie de liberté stratégique sans risque pour leurs relations et réduire une part d’incertitude dans le marché « Plug and Play » de l’enseigne ?

Ainsi, dans ce cadre le prestataire cherche un appui avec d’autres acteurs. Ils ajustent leurs intentions, leurs attributs et leurs stratégies dans le but de coïncider avec ceux des autres acteurs. Ils définissent alors un autre espace d’échanges basé sur des règles et des conventions sur lesquelles les acteurs s’accordent. L’approche sociale est, semble-t-il indissociable, d’une organisation telle que le « Plug and Play ». D’autant plus que la dépendance provient d’une distanciation entre le marché de la logistique dans le sens large du terme et celui du « Plug and Play ».

A cet endroit White apporte par sa théorie un éclairage, qui présente l’intérêt de ne pas nous éloigner d’une considération économique. « Le découplage est donc un processus subtil dans lequel un marché donné prend ses distances avec tous les liens particuliers d'autres

marchés. », (White, 2011, p. 269). A travers les travaux de l’auteur, l’explication de

l’encastrement du marché « Plug and Play » prend son sens « socio-économique ». Il nous fournit également, le principe identique, de cette mécanique de découplage et d’encastrement, qui peut libérer les prestataires d’une certaine dépendance, par le découplage. Mais le découplage implique un ré-encastrement. Ce mécanisme semble agir de façon perpétuelle. Un acteur encastré et par conséquent dépendant peut recouvrer une partie de sa liberté, pour peu qu’il puisse et qu’il sache, au-delà des principes économiques bâtir un avantage de son action.

Cette théorie peut nous offrir alors la possibilité de comprendre la subtilité stratégique qui consisterait à se différencier sans pour autant s’écarter de son contexte. Ici, les relations sociales et la perception sociale de ces relations ont une force explicative que l’on retrouve dans une mécanique complexe et sociale faite d’identité, de discours et du réseau au sein de réseau. Le découplage et l’encastrement semblent donc fournir une consistance sociale des relations économiques qui, vue dans son ensemble, apparaît comme cohérente et explicite.

« Pour le dire autrement, la différentiation des réseaux en types différents de liens est importante pour la reproduction stable d'ensembles hybrides, parce qu'elle maintient des logiques sociales multiples dans une tension synergétique plutôt que

Conclusion  des  Chapitre  1  et  2  –  Proposition  d’un  cadre  conceptuel