• Aucun résultat trouvé

La création du premier Conseil National des femmes

Le Conseil National des Femmes 1957-1989

3.2. La création du premier Conseil National des femmes

En vue de l’élection des nouveaux comités de femmes au niveau régional, de district et

urbain et bien sûr du Conseil National des femmes, entre le 12 novembre – 10 décembre 1957, ont été créés, au niveau des régions, des districts et des villes, des comités d’organisation des femmes formés de 21-35 membres. À la constitution de ces comités ont participé les commissions de femmes près des conseils populaires régionaux, de district et urbains, les représentants des organisations de masse, et bien sûr des femmes qui ne faisaient pas partie de

cette organisation mais qui allaient être intégrées dans le comité respectif12. Pareillement à la

forme antérieure d’organisation, les élections, déroulées entre le 1 décembre 1957 et le 31 janvier 1958, ont commencé à la périphérie, avec les comités villageois, communaux, urbains (31-41), de district (41-51), pour que la dernière étape soit l’élection de la commission régionale (53-65

membres) par les membres des conseils de district et des villes subordonnées à ces districts13.

Les comités urbains, de districts et régionaux des femmes ont élu leurs bureaux formés de 5-7 membres, dans le cas des villes subordonnées aux districts, 7-9 membres pour les comités de district et 9-11 dans le cas des comités régionaux. À la direction de tous les comités ont été élues une présidente et des secrétaires. Pour les comités des villes subordonnées aux districts, les comités de district et les comités régionaux, on a élu également deux vice-présidentes. La désignation des déléguées, dans le cas des villages et des communes, a été réalisée par le présidium de l’assemblée. Au niveau des villes, des districts et des communes on a organisé des

commissions de propositions formées de 5-7 membres14.

L’analyse des documents rédigés au niveau régional et de district montre que toute l’action d’élection des déléguées a représenté une nouvelle occasion de renouvellement de l’activité dans les organisations de femmes. La pression est venue du centre par l’intermédiaire des instructions concernant la préparation et l’organisation des élections pour le Congrès

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

11 Ibid., ff. 10-13.

12 SJAN – Bihor, fonds du Comité régional du POR concernant “Le travail avec les femmes”, dossier 46/1958, ff. 2-5 ; dossier 6/192-58, ff. 1-8 ; SJAN –Vaslui, fonds du Comité de district des femmes Vaslui, dossier 8/192-58, ff. 8-12.

13 Ibid.

66

National des Femmes de Bucarest. Dans ces instructions on précisait l’intervalle dans lequel on devait organiser les élections et l’ordre du jour des réunions. Obligatoirement, le premier point était le compte-rendu du comité d’organisation, suivi de l’élection du comité de femmes de la circonscription respective et, à la fin, de l’adoption du plan de mesures. Le compte-rendu, surtout au niveau régional, représentait l’énumération des différentes mesures entreprises au niveau

communal et urbain15. Pendant l’hiver 1957-1958, les principales actions qui figuraient dans

l’agenda des comités et des commissions de femmes concernaient la manière de convaincre le plus grand nombre de familles d’entrer dans le système collectif de travailler la terre, la croissance de la production dans l’industrie, aussi bien qu’en agriculture, les priorités établies à

l’occasion de l’élection du Congrès des Femmes Démocrates16. Les plans d’activité marquaient

déjà le changement prévu par la décision du Comité Central du POR. À présent, l’accent était mis sur la promotion des femmes dans diverses branches de la production, spécialement dans ces domaines industriels où la proportion des femmes n’était pas trop élevée, « la hausse du niveau culturel des femmes » en organisant des cercles de lecture, des conférences sur des thèmes de l’agriculture, de la zootechnie etc. Le travail en but d’« d’éclairer les femmes » devait être ininterrompu ; il devait se dérouler partout, au champ, pendant les pauses, par la lecture des

brochures à caractère de propagande17.

La recréation de l’organisation de masse des femmes sous la dénomination du Conseil National des Femmes a été officiellement marquée par la tenue d’une Conférence Nationale de l’association. Conformément aux méthodes de travail déjà éprouvées, la préparation de la conférence avait en soi une importance plus grande que l’événement proprement dit. Le parti souhaitait entraîner une partie plus significative de la population féminine dans l’activité de l’organisation de masse par l’élection des candidates au niveau régional. Conformément aux statistiques, 400.000 femmes ont été élues en tant que représentantes des comités et des commissions de femmes, chiffre qui, à l’avis des dirigeants du parti, montrait le potentiel de

l’organisation féminine d’élargir la base de ses adhérentes, en vue de former et de développer la

conscience socialiste des femmes18.

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

15 SJAN – Bihor, fonds du Comité régional du POR concernant “Le travail avec les femmes”, dossier 46/1958, ff. 18-22.

16 Ibid.

17 Ibid.

18 « Le salut du CC du POR (Parti Ouvrier Roumain) adressé à la Conférence par le camarade Gheorghe Gheorghiu-Dej » in Femeia, XIe année, n°. 4, avril 1958, p. 3

67

Les travaux commencent le 8 mars 1958 avec le salut de Gheorghe Gheorghiu-Dej adressé à la Conférence. Après un passage en revue préalable de tous les progrès enregistrés dans la condition de la femme depuis la prise du pouvoir par le Parti Communiste Roumain et l’énumération des ressources assignées pour le développement de l’infrastructure sanitaire et de

celle des soins accordés aux enfants, la population féminine du pays était appelée à « intensifier

la lutte pour le progrès et l’épanouissement de notre chère patrie, pour le bonheur du peuple, pour la vie et l’avenir lumineux des enfants, pour la victoire complète du socialisme dans la République Populaire Roumaine »19.

Parmi les 522 déléguées présentes à la Conférence Nationale, 155 étaient ouvrières dans l’industrie, 126 paysannes travailleuses, 125 intellectuelles, le reste de 116 places étaient partagées entre fonctionnaires, femmes au foyer, femmes travaillant dans les coopératives et dans la coopération de consommation. Pareillement au programme des réunions du territoire, pendant les trois jours de la Conférence a été présenté le rapport élargi d’activité pour l’intervalle 1953-1958, les changements enregistrés dans la situation politique et professionnelle des femmes, aussi bien que le plan d’activité pour les prochains quatre ans, selon les prévisions de la décision

du CC qui marquait la création du Conseil National des Femmes20.

Le gouvernement communiste se trouvant alors à la moitié du second plan quinquennal, il souhaitait transmettre par ce biais un nouveau signal pour encourager les femmes à entrer en grand nombre dans une forme d’activité salariée, de préférence dans l’industrie. Par ailleurs, les fonctions de direction au sein de l’organisation de femmes étaient habituellement attribuées seulement aux membres du parti. Ainsi s’explique la proportion significative détenue par les intellectuelles dans l’ensemble des déléguées. Pour la première fois, les documents ne précisent plus de manière spécifique la présence importante des femmes au foyer dans le cadre du mouvement, celles-ci étant incorporées dans une catégorie plus large, comprenant aussi les

fonctionnaires et les ouvrières de la coopération de consommation.

Le Conseil élu est formé de 115 membres, parmi lesquelles les ouvrières et les paysannes

occupaient la même proportion, 35% tandis que les intellectuelles occupaient 23%. Les fonctionnaires ne dépassaient pas 3%, tandis que les femmes au foyer étaient présentes en proportion de 7%, ce qui confirmait l’intention du parti d’encourager encore une fois le statut de

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

19 Ibid.

68

la femme salariée21. Du point de vue de la composition politique, les candidates membres de

parti étaient en légère minorité, représentant 45% du total des élues.

Comme présidente a été élue Maria Rosetti qui se trouvait à la direction de l’Organisation des femmes dès 1946. En qualité de vice-présidentes ont été élues : Gabriela Bernachi, Lucia Demetrius, Suzana Gâdea, Ileana Răceanu, Emilia Radu, Ana Rohrich. Secrétaires du Conseil ont été désignées Ioana Boga Celea, Maria Groza, Elena Livezeanu, Alexandrina Mihalcea, Maria Petrilă, Elena Vîlcoci. Du Comité Exécutif faisaient aussi partie 10 membres: Dobriţa Dima, Stela Enescu, Maria Mironescu, Raluca Ripan, Elena Stoia, Alice Săvulescu, Marioara

Şeitan, Iren Szabo, Margareta Takacs22.

Le premier changement significatif dans la direction de l’organisation a eu lieu au début

de l’année 1963, après la mort de Maria Rosetti26. Au mois de mars de la même année, la séance

Plénière du Conseil National des Femmes élit une autre présidente, Suzana Gâdea, à ce moment-là vice-recteur de l’Institut Polytechnique de Bucarest.

3.2.1. Quel modèle pour le CNF ?

La structure adoptée par le Conseil National des Femmes en Roumanie n’avait pas réellement de correspondance avec les organisations similaires des autres États communistes, mais plutôt avec l’Union des Femmes Françaises (UFF), l’organisation féminine du Parti Communiste Français. Sans bénéficier du support d’un « parti-mère » gouvernemental, ou, encore plus, d’un parti unique, l’UFF crée une structure qui favorise la proximité, le rapprochement par rapport au public-cible. À partir de ces considérations, l’union renonce à la forme complexe et lourde des comités locaux, trop nombreux, pour une variante plus souple, basée sur des organisations de quartier mais aussi d’entreprise, qui discutent avec les femmes sur les problèmes d’intérêt commun de la petite communauté locale : l’ouverture des écoles, la

construction de logements etc.27. La différence majeure par rapport à l’organisation similaire de

Roumanie était la manière d’organiser les campagnes d’action. Les militantes de l’UFF organisaient et entraînaient les femmes pour qu’elles demandent et obtiennent certains bénéfices

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

21 ANHC, fonds du CC du PCR-section Chancellerie, dossier 47/ 1957, f. 5

22 Ibid.

26 « Funeraliile Mariei Rosetti », in Femeia, XVe année, n°. 1, janvier 1963.

27 Sandra Fayolle, l’Union des Femmes Françaises. : Une organisation de masse du parti communiste français, 1945-1965, thèse de doctorat sous la coordination de Philippe Braud, Université Paris I-Panthéon Sorbonne, octobre 2005, p. 69.

69

dans la communauté locale. L’initiative partait de la base, de la population, vers les représentants politiques, ayant un caractère militant.

Dans le cas roumain, de l’UFDR et ensuite du Conseil National des Femmes, les membres de l’organisation féminine communiste de masse ne cherchaient pas à savoir quelles étaient les priorités des différentes catégories socioprofessionnelles dont elles s’occupaient. Au contraire, la population devait être convaincue que les mesures prises par l’État communiste à leur égard étaient les meilleures. Entre les deux partenaires, la population féminine et le pouvoir politique, l’organisation féminine exerçait donc une médiation bilatérale en France et unilatérale en Roumanie.

En France, en tant qu’organisation féminine de masse d’un parti communiste qui est toujours resté en opposition, l’UFF a toujours maintenu ses campagnes mobilisatrices sur une ligne d’action que l’on pourrait plutôt comparer à celle de l’Union des Femmes Antifascistes de Roumanie. La filiation avec le Parti Communiste Français n’était pas synonyme avec la subordination totale à celui-ci. L’apparition d’une section dans le cadre du PCF concernant les femmes a été considérée comme une atteinte à l’indépendance de l’organisation féminine. On a durement critiqué le fait que le parti avait imposé ses propres militantes à la direction de l’UFF, les membres considérant que l’emploi de ces méthodes étrangères à l’organisation équivalait à la

disparition de la démocratie28.

En Roumanie, L’UFAR et ensuite la FDFR ont gardé, elles aussi, une autonomie simulée. Mais avec l’unification du mouvement en 1948, on ne peut plus parler d’autonomie dans l’UFDR, l’organisation de masse devenant en réalité plutôt une section du POR (Le Parti Ouvrier Roumain) pour l’activité avec les femmes.