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Gheorghe Gheorghiu Dej

La promotion des femmes dans la Roumanie communiste – Une politique d’état?

6.1. Au commencement était la Parole

6.1.2. Gheorghe Gheorghiu Dej

L’apparition de l’organisation féminine de masse unique fut le signal que l’évolution du statut politique de la femme allait être dicté par le Parti Communiste, la qualité et la nature de l’acte politique étant données par la manière dont la population féminine allait se plier au cadre préétabli des intérêts et des priorités de l’État communiste. La différence au niveau du discours utilisé par rapport au « problème de la femme » montre le changement du statut. « Les droits de la femme » existant avant le moment novembre 1946 se sont transformés en pas plus de trois mois dans « les obligations de la femme », perspective qui est restée inchangée jusqu’à la fin du régime communiste.

L’élément de continuité qui lie la période d’illégalité à celle où le Parti Communiste

Roumain a détenu le contrôle politique a été le travail. Comme on le verra de façon explicite

dans le cas du régime Nicolae Ceauşescu, la qualité d’acteur politique dépendra tout d’abord de la participation à la vie active, en tant que salariée du système socialiste. Pour entrer dans le parti ou pour proposer sa candidature dans les différentes instances de l’État, au niveau

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8 Gabriela Deleanu, Femeia şi dreptul de vot, Bucarest, 1946, p. 10-11.!

9 Comisia Centrală Pentru Pregătirea Organizaţiei Unice de Femei, Platforma Uniunii Femeilor Democrate din România, Bucarest, 1947, p. 6, (subl. ns.).!

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local ou central, le facteur qui faisait la différence, à part l’attachement à la démocratie populaire, étaient les résultats méritoires dans un certain domaine d’activité, vu que l’on avait tracé des tâches à chaque catégorie sociale et professionnelle en fonction des priorités

momentanées de l’État. Au Ier Congres du Parti des Travailleurs Roumains, Gheorghe

Gheorghiu Dej, en faisant référence aux dispositions qu’on allait soumettre au vote, disait :

« Enfin, notre Constitution doit proclamer la parfaite égalité en droits entre tour les citoyens de la République Populaire Roumaine, sans tenir compte de sexe, de nationalité, de race, de religion, de degré de culture ou de situation matérielle.[…] pour mettre une fin à l’inégalité en droits entre hommes et femmes, nous allons consacrer par la constitution la parfaite égalité politique, économique, sociale, juridique dont réjouit la femme dans notre Etat démocrate et nous allons assurer une protection spéciale à la femme mère, à la femme enceinte et à l’enfant »10.

En présentant le projet de statut du Parti, Lothar Rădăceanu faisait référence directe à la présence des femmes en tant que membres à pleins droits :

« Le projet de statut prévoit que membre du Parti des Travailleurs roumains peut être n’importe qui, quel que soient son sexe, sa nationalité, sa race […] Par la présente le statut du Parti des Travailleurs Roumains consacre le haut principe de parfaite égalité entre les différentes nationalités, le principe du droit égal pour qui que ce soit, homme ou femme, qui se montre digne de faire partie du détachement d’avant-garde de la classe des travailleurs. C’est notamment ces hauts principes qui nous ont permis d’attirer dans la lutte, à côté du peuple roumain, toutes les nationalités cohabitantes, les larges masses de femmes et de jeunes »11.

Dans les années 1950, le discours officiel concernant la présence de la femme en tant qu’acteur politique n’existait pratiquement pas. La disparition d’Ana Pauker de la scène politique, corroborée avec la dissolution temporaire de l’organisation féminine de masse ont mené à la diminution de la représentation féminine aux positions de direction, absence plus visible encore dans le cadre des organismes dirigeants du PMR. Au Congrès du parti de 1955,

les représentantes des femmes disparaissent du Bureau Politique ainsi que du Secrétariat12. La

préoccupation officielle pour une plus nombreuse représentation féminine dans les rangs du parti et de ses organes de direction centrales et territoriales s’est toutefois maintenue. Il faut remarquer que ce n’étaient plus les importantes figures politiques qui abordaient ce problème dans leur discours, cette responsabilité revenant exclusivement aux représentantes de

l’organisation féminine13 auprès des comités régionaux du parti.

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10 Congresul I al POR, Bucarest : Editura Partidului Muncitoresc Român, 1948, p. 75.!

11 Ibid., pp. 182-183.!

12 Congresul II-lea al POR, Bucarest, Editura de Stat pentru Literatură Politică, 1956, pp.892-893.!

13 Aritina Momuleţ, la déléguée de l’organisation régionale de parti de Craiova, lors du IIème Congres du Parti des Travailleurs Roumains, dans son discours, après la présentation de la totalité des transformations en industrie et en agriculture, touche au problème de la faible présence des femmes en tant que membres de parti dans le cadre du Parti des Travailleurs Roumains: « Le rapport du Comité Central montre que les organisations de parti, les comités exécutifs des Assemblées populaires, les syndicats, L’Union des Jeunes Travailleurs

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Gheorghe Gheorghiu Dej ne parlait plus en public de l’implication des femmes dans la vie politique, ses références à la population féminine du pays, lors des congrès POR, étant d’habitude des informations ponctuelles concernant le chiffre des femmes encadrées dans la

production et l’évolution de ce phénomène pour l’intervalle suivant14. Le même type de

discours fut présenté à l’occasion des Conférences nationales de l’organisation féminine. Le 8 mars 1958, lors de la Conférence qui consentait à la réinstauration de l’organisation de masse des femmes, le discours de Dej a été construit autour de trois idées principales : les bienfaisances apportées par le mouvement communiste dans la vie des toutes les femme de Roumanie, l’appréciation de l’effort investi par la population féminine dans la réalisation des projets économiques et les tâches qui leur revenaient dans l’avenir. L’égalité des chances entre femmes et hommes est mentionnée uniquement de point de vue professionnel, sans faire référence au recrutement et à la présence des femmes parmi les membres de parti :

« Promues avec courage dans des métiers avec responsabilité en économie, dans les institutions et dans les organisations populaires, en fonction de leur formation et de leur aptitudes, les femmes vont apporter une contribution significative au continuel renforcement et au développement de notre régime démocrate-populaire »15.

Deux nouveaux éléments apparaissent dans le discours officiel. L’existence de certaines « aptitudes féminines » qui allaient être transférées de la sphère domestique dans la sphère publique et le devoir de la femme d’être mère :

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manifestent en général une préoccupation totalement insuffisante envers les problèmes spécifiques du travail politique parmi les femmes et promeuvent avec trop de timidité les femmes dans des postes de direction. Cela se manifeste aussi dans notre région. Ainsi, dans la région Craiova on n’a aucune femme présidente d’association agricole collective, le taux des femmes brigadier dans les associations agricoles est de 2%, les femmes président d’assemblée de camarades, il n’y en a que 5, dans les conseils de direction des coopératives il n’y a que 1% femmes. A cette situation contribue aussi le fait que les femmes ne sont pas aidées à améliorer leur formation professionnelle, à suivre certains cours et certaines écoles […] Cette situation est une conséquence du fait que certaines organisations de base ne se préoccupent pas de la promotion des femmes dans des fonctions de responsabilité et de la hausse du niveau politique et culturel. Dans les écoles de parti il persiste encore un petit nombre de femmes. Parmi les membres des bureaux des organisations de base il n’y a que 9,7 femmes. Afin d’éliminer ces carences et d’accomplir les tâches les plus importantes que le parti met devant nous, nous devrons faire de la sorte que l’expérience positive de certains organes de parti dans ce sens devienne un bien de toutes les organisations de parti. Nous devons apprendre à toutes les organisations de parti comment elles doivent mener leur le travail politique auprès des femmes. […] fonction de leur capacité et de leur formation professionnelle, que plus de femmes soient promues dans des métiers de responsabilité. », Ibidem, pp.295-297.!

14 « L’une des plus importantes réalisations du régime démocrate-populaire est la participation de la femme à droits égaux aux hommes, à l’activité d’état, économique et culturelle. Pendant premier quinquennal, plus de 300.000 femmes sont entrées dans la production. Elles accomplissent aujourd’hui un rôle important dans la construction économique et culturelle, en tant que travailleurs, contremaîtres, ingénieurs, médecins, institutrices, professeurs et créatrices dans le domaine de la recherche scientifique, des beaux arts et de la littérature. En 1938 – d’après les données du ministère du travail de l’époque– les salaires des femmes étaient de 50% plus petites que ceux des hommes. Aujourd’hui, les femmes reçoivent des salaires égaux pour un travail égal à celui des hommes et contribuent à l’augmentation des revenus de la famille. », Ibidem, p. 75.

15 « Salutul CC al POR adresat Conferinţei de către tovarăşul Gheorghe Gheorghiu Dej » in Femeia, 1958, XIe année, no.4, p. 1. (subl. ns.) .!

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« Les femmes ont la noble mission d’élever et d’éduquer les enfants dans l’esprit de l’amour envers la patrie, de l’appréciation des grandioses conquêtes révolutionnaires de notre peuple, de l’amour pour le travail »16.

Assurément des telles références n’ont jamais quitté les écrits de propagande mais jusqu’à ce moment-là les discours des leaders politiques mettaient en avant surtout la création d’un climat d’égalité entre femmes et hommes, en estompant les spécificités féminines qui auraient pu constituer une cause du déséquilibre.

En 1962, dans un discours occasionnée toujours par une Conférence Nationale des Femmes, Dej n’a pas opéré des modifications dans le contenu du message adressé, parlant de « millions de femmes ouvrières, paysannes, intellectuelles, qui travaillent à domicile, qui ont apporté une grande contribution à toutes les victoires obtenues par notre peuple sur le chemin de la construction socialiste », en mentionnant en même temps « le rôle particulier »

que celles-ci avaient à accomplir : « dans la lutte pour le développement de l’économie

nationale, pour la mise en œuvre grand programme tracé par le IIIe Congrès du parti ».17 Apres avoir passé en revue les tâches qui revenaient à l’organisation féminine, en tant que représentante et responsable pour toute la population féminine, Gheorghe Gheorghiu-Dej finit

son discours avec « Vive les femmes ouvrières de notre pays, participantes actives à l’œuvre

d’accomplissement de la construction socialiste, à la lutte pour la paix et l’amitié entre les peuples !»18.