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développement de l’habitat groupé

1. L E CHOIX DES ATTITUDES , LES CONNAISSANCES ET LA

1.2. La comparaison internationale et contextes nationau

Nous avons réalisé une comparaison internationale des résultats de ces expériences. Nous émettons l’hypothèse que les attitudes qui ont été sélectionnées sont appréciées différemment entre les pays. Les acteurs provenant de différents contextes adoptent des attitudes et valeurs différentes (Healey, 1998). Pour ce faire, nous avons décidé de réaliser l’expérience dans six pays européens : Belgique, Norvège, Angleterre, Pays-Bas, France, Norvège et Allemagne.

Nous avons décidé de réaliser cette comparaison internationale essentiellement pour deux raisons.

Premièrement, nous avons choisi des pays proches culturellement ainsi que des pays moins proches. Cette sélection permettra d’évaluer l’importance de l’environnement social (voir section 3.1) dans les prises de décisions et de voir si des pays plus proches culturellement de la Belgique ont des résultats similaires. Si l’on se réfère à la cartographie d’Inglehart et Welzel (Figure 8), la Belgique et la France sont relativement proches sur le plan des valeurs traditionnelles et d’auto-expression. L’Allemagne, les Pays-Bas et la Norvège possèdent une culture similaire et, enfin, la Grande-Bretagne se caractérise par une culture anglo-saxonne. En choisissant ces six pays, nous disposons des principales tendances de l’Europe occidentale.

En outre, nous avons voulu comparer des pays où les pratiques et le contexte institutionnel pour l’habitat groupé sont différents. Les habitats groupés peuvent prendre des formes très variées et les pratiques, d’un pays à l’autre, sont très différentes. En la matière, les expériences d’Europe du nord constituent des références dans le monde de l’architecture et de l’urbanisme (Bresson & Tummers, 2014).

Pour rappel, en Belgique francophone, on compte environ 300 exemples d’habitats groupés (avec une définition assez large40). Il n’y a pas de législation ou de statut

juridique propre à l’habitat groupé et les aides du secteur public sont très limitées. En Allemagne, le développement de l’habitat groupé est assez important. Il « se joue surtout à l’échelle de la ville et repose d’abord sur la capacité des groupes d’habitants à s’imposer comme maîtres d’ouvrage collectifs mais aussi sur la volonté des élus municipaux à privilégier, voire "utiliser", les baugruppen dans des opérations de renouvellement urbain » (Bresson & Tummers, 2014, p. 15). L’Allemagne présente quelques exemples emblématiques de réhabilitation de friches militaires avec des quartiers d’habitats groupés, notamment à Fribourg-en-Brisgau ou à Tübingen. En Allemagne, on retrouve deux types de développement dans les habitats groupés : d’une part les groupes d’habitats groupés sont des partenaires respectés de la production

185 urbaine, mais ne bénéficient pas nécessairement de soutiens institutionnels et doivent entrer en compétition avec les promoteurs "classiques", d’autre part des concours exclusivement réservés au « baugruppen » (comme à Fribourg ou à Tübingen) (Bresson & Tummers, 2014).

Les pays nordiques sont régulièrement repris comme exemples et ils sont aussi le lieu où se sont développés les premiers habitats groupés (Williams, 2005). Cependant, contrairement à la Suède et au Danemark, l’habitat groupé en Norvège est plutôt rare (Egerö, 2014). En 2012, il n’y avait toujours pas d’organisation nationale ou locale poursuivant la promotion de l’habitat groupé. Pour autant, la pratique est ancienne et, actuellement, il y a un grand intérêt pour ce type de logement (Egerö, 2014).

Aux Pays-Bas, les premiers habitats groupés sont apparus en même temps que dans les pays pionniers comme le Danemark et la Suède (Tummers, 2016). L’habitat groupé a largement été mis en place par le secteur du logement social au moyen de processus top- down. L’objectif était d'améliorer les relations sociales et d'accroître le sentiment d'appartenance à la communauté (Williams, 2008). En 2000, le gouvernement, sur demande du parlement, a adopté une loi pour encourager l’auto-promotion individuelle et collective, en rendant le foncier plus accessible aux ménages désireux de réaliser leur propre logement (Bresson & Tummers, 2014). Il existe aujourd'hui de multiples initiatives d’habitats groupés mais aussi de nouveaux types de professionnels tels que les accompagnateurs d’habitat groupé (Tummers, 2016). La culture de l’habitat groupé s'est développée à la fois par le biais d'initiatives ascendantes et d'incitations descendantes (Tummers, 2016). La municipalité d’Almere est maintenant souvent citée comme exemple dans la promotion de ce type de logement. Les habitants, en groupe ou de manière isolée, candidatent pour l’acquisition d’un terrain qu’ils peuvent acheter à condition de respecter un contrat leur spécifiant quelques directives minimales de construction, mais leur laissant toute latitude dans leur projet (Bresson & Tummers, 2014).

Au Royaume-Uni, il y a un grand intérêt pour le développement d’habitats groupés (Fogele, 2016), mais ce type de logement reste marginal. Selon le réseau d’habitat groupé du Royaume–Uni (UK Cohousing Network), il y a 19 projets existants, 38 sont en développement et 5 groupes sont en cours de réflexion pour se lancer dans la démarche (Wang et al., 2017). De plus en plus de compagnies, de décideurs et d’autorités locales consacrent du temps pour favoriser leur développement. Cependant, le niveau de développement reste faible (Fogele, 2016).

En France, selon Alain Jund, président du Réseau national des collectivités pour l'habitat participatif, on compte environ 500 habitats groupés en 2016. Depuis 2014 et la loi ALUR (Accès au Logement et Urbanisme Rénové), il existe un cadre juridique pour les coopératives d'habitants et les sociétés d'autopromotion. La France est donc

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caractéristique d’un passage de l’expérimentation à l’institutionnalisation (Devaux, 2012). Cependant, le développement demeure très dépendant du tissu associatif et militant. « Les groupes d’habitants, selon les territoires observés, trouvent plus ou moins de relais auprès des collectivités, mais le fait de mobiliser les exemples allemands ou néerlandais ne laisse généralement pas les décideurs publics indifférents » (Bresson & Tummers, 2014, p. 13). Il y a une grande disparité sur le territoire et les exemples se situent dans les régions de Grenoble, de Lille, de Lyon, Strasbourg, en Bretagne ou en Île- de-France. Trois outils sont mis en place par les autorités publiques françaises pour favoriser l’émergence d’habitats groupés (Bresson & Tummers, 2014) :

 les appels à projets qui facilitent l’accès au foncier et qui accompagnent les groupes de citadins dans leurs démarches administratives ;

 l’inscription de l’habitat participatif dans des projets d’aménagements (ZAC) qui permet aux communes de développer des opérations d’habitat participatif de plus grande ampleur et dans une cohérence urbaine plus globale (écoquartier) ;

 la prise en compte de l’habitat participatif dans les documents d’urbanisme (notamment dans les programmes locaux de l’habitat) qui garantit une réserve foncière pour les projets portés par les citadins ;

Les contextes institutionnels formels et informels sont donc fort différents d’un pays à l’autre. En choisissant ce panel de six pays, nous avons choisi différents contextes présents en Europe sans pour autant constituer un panel représentatif.