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scientifique et dans les documents normatifs du contrôle épidémique.

Chapitre 4 : Haïti ou le grand retour de la production de l’ignorance sur le

2. L’ouverture technique

Afin de guider leur enquête, les panélistes vont se baser sur les principales hypothèses existantes sur l’origine de l’épidémie.

Les deux premières hypothèses qu’ils relèvent sont issues de l’hypothèse environnementale : « La première hypothèse soutien qu’une souche environnementale de Vibrio cholerae qui habite normalement le golfe du Mexique est arrivée en Haïti de manière naturelle par le biais de courants océaniques en raison du tremblement de terre du 12 janvier 2010 et que cela a causé l’épidémie en cours. La seconde hypothèse soutient qu’une souche locale, non toxigénique de Vibrio cholerae, endémique à l’environnement naturel de Haïti a muté

naturellement en une souche virulente qui s’est rapidement propagée à la population haïtienne. »58

Cravioto (2011) Enfin, la troisième et dernière hypothèse retenue par le panel appartient à la conception de la contamination interhumaine :

« La troisième hypothèse soutient que la source de la flambée était un humain contaminé et porteur d’une souche pathogénique de Vibrio cholerae qui serait arrivé en Haïti en provenance d’une région où elle est endémique, en dehors du pays. »59

Cravioto (2011) Le 11 mai 2011, le panel rend son rapport (Cravioto et al., 2011) dans lequel il conclut que « les preuves ne favorisent pas les hypothèses qui suggèrent que l’épidémie provient d’une source environnementale. La flambée n’est pas due à la souche de Vibrio cholerae du golfe du Mexique, ni à la mutation génétique d’une souche provenant de l’environnement haïtien. » 60

Les deux premières hypothèses, variantes du réservoir environnemental, hors de cause, le panel se prononce sur la troisième, concernant l’importation humaine : « les preuves suggèrent fortement la conclusion selon laquelle la source de l’épidémie de choléra en Haïti est due à la contamination de la rivière Meye, tributaire du fleuve Artibonite avec une souche pathogénique d’un type de Vibrio cholerae Sud asiatique actuel, en conséquence d’activités humaines.» 61 

58 “The first hypothesis holds that an environmental strain of Vibrio cholerae that normally inhabits the Gulf of Mexico

travelled to Haiti naturally via ocean currents as a consequence of the January 12th, 2010 earthquake and caused the present cholera epidemic. The second hypothesis holds that a local, non-toxigenic Vibrio cholerae strain endemic to the Haitian environment naturally mutated into a virulent pathogenic strain, which quickly spread throughout the human population of Haiti.”

59 “The third hypothesis holds that the source of the outbreak was an infected human who carried a pathogenic strain

of Vibrio cholerae into Haiti from a cholera endemic region outside the country.”

60 The evidence does not support the hypotheses suggesting that the current outbreak is of a natural environmental

source. the outbreak is not due to the Gulf of Mexico strain of Vibrio cholerae, nor is it due to a pathogenic mutation of a strain indigenously originating from the Haitian environment.” Craviato et al 2011 p. 29

61 Instead, the evidence overwhelmingly supports the conclusion that the source of the Haiti cholera outbreak was due

to contamination of the Meye Tributary of the Artibonite River with a pathogenic strain of current South Asian type Vibrio cholerae as a result of human activity. Ibid P. 29

Cependant dans ses conclusions le panel ne se résout pas à indiquer les troupes onusiennes : « Le panel indépendant conclut que l’épidémie de choléra de Haïti a été causée par la confluence de circonstances mentionnées plus haut et n’était pas la faute ou l’action délibérée d’un groupe ou d’un individu .» 62

Les militants des droits de l’homme furent découragés par les résultats de l’enquête, ainsi que de nombreux intervenants en santé, tels que le Pr Piarroux ou le Pr Frerichs. Comme l’explique ce dernier alors qu’il commente les décisions du panel, la déception n’est pas simplement liée au manque d’identification de la source chez les Casques bleus. Les tenants de la théorie interhumaine craignent que ce désaveu de l’hypothèse environnementale ne soit que partiel. En effet, s’il est vrai que les panélistes concluent que l’environnement n’a pu être à l’origine de l’épidémie, ils semblent suggérer (comme d’autres experts hors du panel) qu’à présent que le choléra circule dans la rivière Artibonite, il pourrait y « proliférer » (Frerichs, 2016). Pour le Pr Piarroux, la suspicion tient à ce mot de « prolifération » qui indique en microbiologie la multiplication des organismes et son emploi suggère que les panélistes estiment que si bien le Vibrio ne provenait pas d’un réservoir environnemental, il était à présent capable d’en constituer un et que la persistance de la maladie sur le territoire haïtien pourrait s’entendre par le biais de l’hypothèse environnementale. En d’autres termes si l’hypothèse environnementale était écartée pour le démarrage épidémique, elle redevenait l’hypothèse principale de la continuation de l’épidémie sur l’île (Ibid).

Ce qui était en jeu sur Haïti et l’était depuis de nombreuses années pour d’autres épidémies du choléra n’était pas un simple débat entre communautés épistémiques, ou même la responsabilité des Nations Unies, mais plus largement le champ des possibles dans le contrôle du choléra. Si celui-ci avait été introduit au cours d’un événement isolé, la focalisation des ressources sur des activités en eau et assainissement dans une perspective de court à moyen terme, était la meilleure stratégie. L’île serait ainsi libre de choléra (comme elle l’avait été pendant près d’un siècle) jusqu’à une potentielle réintroduction par un malade. Cette conception de la maladie permettait de garder un espoir sur la possibilité de son contrôle. Si, au contraire, le choléra émergeait « naturellement » de l’environnement haïtien, soit au cours de la première épidémie, soit y compris après une

62 “The Independent Panel concludes that the Haiti cholera outbreak was caused by the confluence of circumstances

première introduction humaine par « prolifération », rien ne pourrait l’empêcher de revenir, interprétation qui laissait présager une prophétie autoréalisatrice :

« Quand on démarre un plan de lutte contre le choléra en disant qu’on ne pourra pas s’en débarrasser — et c’est exactement ce qui est écrit dans le plan d’élimination du choléra d’Haïti — c’est évident qu’on n’a pas toutes les forces avec nous pour le faire. »

Pr George, entretien, Paris, juillet 2018 Différentes publications allaient graduellement confirmer l’origine népalaise de l’épidémie et la faible probabilité d’une origine environnementale (Orata, Keim, & Boucher, 2014). Déjà avant la formation du panel des Nations Unies, une analyse du CDC avait pointé une ressemblance entre la souche haïtienne et certaines souches en action en Asie. Cependant, vu la technique employée, la PGFE ne pouvait prétendre à une sensibilité importante (CDC, 2010).

Le rapport de l’investigation épidémiologique du Pr Piarroux, qui relevait le cas-index et de nombreux cas successifs dans les villages bordant le camp de la MINUSTAH, constituait dès la fin 2010 une sérieuse indication de l’importation interhumaine (Piarroux et al., 2011).

La première étude employant le séquençage complet du génome a été publiée en janvier 2011 par Chin et al (2011). Elle établit qu’à l’échelle génomique la souche présente en Haïti était affiliée aux souches circulant alors activement au Bangladesh, et qu’à l’inverse, la souche haïtienne était éloignée de souches qui avaient circulé sur le continent américain dans les années 199063.

Deux autres études majeures utilisant le séquençage du génome complet du Vibrio furent publiées en 2011. L’une comparant les souches haïtiennes avec des souches népalaises, et trouvant qu’elles étaient pratiquement identiques (Hendriksen et al., 2011). La deuxième ne concernait Haïti et le Népal qu’indirectement, mais concluait qu’une origine environnementale était très improbable en Haïti, cette même publication établit par la même occasion que la flambée péruvienne, de vingt ans antérieure provenait d’une importation humaine par l’Angola, et non pas de l’environnement (Mutreja et al., 2011). Cette conclusion constituait en elle-même une défaite empirique majeure

63 Ce qui infirmait la possibilité, avancée par certains, que le souche active en Haïti était une descendante

pour l’hypothèse environnementale64 qui, jusque-là, avait fait de la flambée péruvienne son cas

d’école.

La position qui, sur la base de l’hypothèse d’une émergence environnementale, soutenait que la MINUSTAH n’avait pas eu d’implication dans le démarrage de l’épidémie devenait de plus en plus précaire. Début 2012, deux des quatre membres du panel déclarèrent publiquement qu’ils avaient changé d’opinion au sujet de la source de l’épidémie, l’un d’eux déclarant à la chaine de télévision Al Jazeera que « le scénario le plus probable est que quelqu’un associé avec l’UN/MINUSTAH ai été responsable ». 65C’est alors qu’un changement profond se fit sentir dans la presse internationale.

Le New York Times, qui auparavant avait blâmé la volonté d’une enquête sur l’origine épidémique, publiait une longue enquête sur la responsabilité des Nations Unies dans sa survenue66. Vint ensuite

un article sur les demandes des victimes haïtiennes, lequel sera suivi par une dizaine d’autres pour suivre le déroulement de l’affaire jusqu’à ce jour (Frerichs 2016).

L’épisode le plus médiatique de la controverse sur l’hypothèse d’un réservoir environnemental du choléra était sur le point de se clore à l’avantage des partisans de la transmission interhumaine et par conséquent, de l’implication des Nations Unies dans l’émergence épidémique. C’est à ce moment que Colwell, la championne de l’hypothèse du réservoir environnemental, décide de faire un retour remarqué dans la controverse, avec la publication d’un article dans le prestigieux journal de la National Academy of Sciences of the United States of America (PNAS). Frerichs (2016) explique qu’en tant que membre de l’académie des sciences, Colwell a usé de son influence pour publier son article grâce a un mécanisme spécifique au journal qui, au lieu de passer par un comité de lecture, permettait d’associer les relecteurs en tant que co-auteurs. 67

L’article d’Hasan et de Colwell se basait sur l’analyse d’échantillons environnementaux et de selles prélevés auprès de malades haïtiens au cours des deuxième et troisième mois de l’épidémie entre

64 Comme l’avait déjà souligné le Pr George, voir le Chapitre 3.

65 “Un Likely to blame for Haiti cholera outbreak” https://www.youtube.com/watch?v=Pmw1b-tV09U , consulté le 12

décembre 2018.

66 https://www.nytimes.com/2013/10/09/world/americas/rights-advocates-suing-un-over-the-spread-of-cholera-in-

haiti.html, consulté le 12 décembre 2018.

67 Un procédé propre au PNAS qui n’est pas sans soulever des controverses étant donné qu’il va à l’encontre des

procédés habituels de publication des articles scientifiques, exemptant ceux qui y ont accès de l’évaluation de leurs pairs.

novembre et décembre 2010. Plutôt que de réfuter frontalement que la souche épidémique avait été importée par un individu malade, les auteurs ont rapporté que, parmi les malades de choléra, ils avaient isolé des vibrios 01, mais également des Non 01/139 dans respectivement 47 %, 21 % et 7 % des malades. D’après les auteurs, le rôle des Non 01 ne peut donc être ignoré, en conséquence de quoi, « l’attribution d’une cause [pour l’épidémie] demeure donc controversée 68» (Hasan et al.,

2015)

Deux groupes de chercheurs distincts vont répondre par des lettres à l’éditeur. Le premier, mené par les Pr Frerichs et Piarroux, réfute les conclusions de Hasan et al, en indiquant que les preuves irréfutables de l’origine de l’épidémie avaient été livrées par la combinaison des études phylogénétiques et d’épidémiologie de terrain (Frerichs, Boncy, Barrais, Keim, & Piarroux, 2012). Le Pr Piarroux notera ailleurs que Colwell procédait à imposer des standards impossibles quand elle demandait la mise en place d’une base de données comprenant des échantillons représentatifs à l’échelle de la planète de Vibrio cholerae cliniques et environnementaux comme préalable à la prise en compte sérieuse de l’importation humaine par une souche lointaine (Frerichs, 2016). Un deuxième groupe, conduit par Mekalalanos (2012)69, fait part de son « choc » à la lecture des

conclusions de l’article et rappelle que les données disponibles pointaient sans ambiguïté vers l’importation du choléra par le contingent militaire provenant du Népal. Dans le dernier paragraphe de sa lettre, Mekalanos rejette l’énoncé de Hasan et al (2015) selon lequel « le rôle des souches non- 01 dans l’épidémie ne peut être écarté », car « de tels énoncés obscurcissent la véritable origine de l’épidémie de choléra en Haïti de 2010 » (Mekalanos et al. 2012, gras ajouté par l'auteur). Il apparaît que Colwell et ses collègues n’étaient plus en position de réfuter frontalement l’importation de la souche épidémique et donc la défaite de leur hypothèse, dans le cadre haïtien. A ce stade ils pouvaient seulement essayer de garder une partie du poids de l’épidémie pour leurs propres candidats, les Vibrios environnementaux non 01 ni 139. Leurs énoncés ne changeaient pas la donne du tout au tout, mais ils empêchaient la partie adverse de remporter la discussion, en instillant un doute, permettant à la boîte noire de l’origine épidémique de perdurer sur Haïti comme dans d’autres terrains épidémiques.

68 “assignment of attribution remains controversial.”

69 Un généticien renommé et collègue de Paul Farmer à Harvard, il est l’un des auteurs les plus cités sur le thème du

L’instillation de doute comme stratégie face à un adversaire ayant accumulé une quantité d’arguments probants est une caractéristique centrale de l’agnotologie. 70

La pratique consistant à « obscurcir » le phénomène étudié ou la mise en place de « standards impossibles » était motivée par des intérêts plus larges, ceux d’une communauté épistémique qui avait passé des décennies à construire un monde dans lequel le choléra était dans l’environnement et dans lequel leurs outils étaient les mieux adaptés à en comprendre les mécanismes. Ils étaient les premiers experts vers lesquels les médias internationaux s’étaient tournés pour interpréter l’épidémie haïtienne. Ils n’entendaient pas perdre le crédit qu’ils détenaient sur le sujet, ce qui est compréhensible. Si la bataille haïtienne sur l’origine de l’épidémie ne pouvait être gagnée, ils ne permettraient pas pour autant au camp adverse de remporter une victoire totale et ainsi potentiellement mettre en péril les travaux engagés sous d’autres cieux.

L’épidémie d’Haïti donne donc à voir deux courants de production d’ignorance fortement liés. La première est celle qui en utilisant cette hypothèse vise à dédouaner les Nations Unies de tout soupçon. Elle se combine à différentes techniques qui avaient pour but de rendre la question « Est- ce que les Nations Unies sont impliquées dans l’épidémie de choléra ? » non pertinente, inutile, dangereuse ou encore immorale. La motivation était alors partagée par un nombre d’acteurs très large et diversifié. Si les experts convaincus de l’existence de réservoirs environnementaux ne peuvent être taxés de mauvaise foi, il apparait clairement que leur idées ont été utilisées par des acteurs tierces pour créer ce que Mc Goey (2012) appelle des « inconnus stratégiques » [strategic unknowns] c’est-à-dire des formes d’agnotologie active.

70 Frederick Seitz, un autre ancien directeur de la National Science Foundation, est ainsi devenu le précurseur de la

production de doute lorsqu’il travaillait comme conseiller principal pour la R.J. Reynolds Tobbaco Company. Plus tard, accompagné de ses successeurs au Marshal Insititute, ils vont s’engager en tant que fers de lance de l’opposition à la théorie du réchauffement climatique. Dans les deux cas, la stratégie était claire, ne pas s’opposer frontalement à la corrélation entre le fait de fumer et le cancer du poumon, ou encore l’impact de la production humaine de gaz à effet de serre sur le changement climatique. Il s’agissait plutôt d’insister continuellement par le biais de publications scientifiques et de publications « grand public » que les preuves scientifiques existantes étaient au mieux « incomplètes » et que la « science savait vraiment très peu » à ces sujets. Il fallait donc toujours plus de recherche avant de tirer une quelconque conclusion (Oreskes and Conway 2008). Bien sûr, les scientifiques engagés dans la défense de l’hypothèse environnementale la considéraient comme étant toujours pertinente et ne peuvent être comparés sur un plan moral aux consultants employés à défendre les industries du tabac ou des énergies fossiles.

Le deuxième temps d’agnotologie intervient à un moment où la controverse sur l’origine du choléra semble se clore, auprès d’un public plus resserré, celui des experts du choléra, dans laquelle, acculés sur le tard, les partisans de l’hypothèse environnementale, désavoués par les résultats d’épidémiologie de terrain et les dernières avancées des techniques moléculaires qu’ils choyaient, tenteront en dernier recours d’instiller un doute sur un rôle subsidiaire de souches potentiellement environnementales dans l’épidémie. Ce, de manière à empêcher la discussion sur les causes possibles de l’épidémie haïtienne de se refermer.

En 2011, sur la base des rapports scientifiques, journalistiques et des témoignages des habitants des villages mitoyens au camp de la MINUSTAH, des savoirs constitués en dépit des contraintes, des activistes américains et haïtiens vont épauler des victimes haïtiennes du choléra et déposer 5 000 plaintes et demandes de réparation et de dédommagement auprès des Nations Unies (Katz 2013). En 2013, le Conseil Légal des Nations Unies notifie au président haïtien que ces plaintes ne sont pas recevables en vertu de la convention sur les Privilèges et Immunités des Nations Unies, tout en assurant du soutien de l’ONU dans les efforts de contrôle de l’épidémie71 (Manilla Arroyo,

2014).

En 2016, soit trois ans plus tard et 6 ans après le démarrage de l’épidémie, les Nations Unies font parvenir par le biais de l’AFP une annonce alambiquée dans laquelle ils avouent à demi-mot la responsabilité de l’épidémie : « au cours de la dernière année, l’ONU a acquis la conviction qu’elle doit faire beaucoup plus en ce qui concerne sa propre participation dans la flambée initiale et la souffrance de ceux affectés par le choléra »72 à la fin de cette même année 2016, Ban Ki Moon,

pour son dernier discours à l’assemblée générale des Nations Unies, allait présenter ses excuses au nom de Nations Unies, sans toutefois aborder explicitement la source de l’épidémie.73

71 O’Brien 2013, “Letter from the United Nations Legal Counsel to Cholera Victims

Lawyers”, http://www.ijdh.org/wp-content/uploads/2013/07/20130705164515.pdf , consulté le 15 décembre 2018.

72 NYT 2016, “U.N. Admits Role in Cholera Epidemic in Haiti”,

https://www.nytimes.com/2016/08/18/world/americas/united-nations-haiti-cholera.html, consulté le 15 décembre 2018. Texte original: “over the past year, the U.N. has become convinced that it needs to do much more regarding its own involvement in the initial outbreak and the suffering of those affected by cholera”.

73 NYT 2016, U.N. Apologizes for Role in Haiti’s 2010 Cholera Outbreak

https://www.nytimes.com/2016/12/01/world/americas/united-nations-apology-haiti-cholera.html , consulté le 15 décembre 2018.

Sans doute la motivation de la « campagne d’obscurcissement », n’était pas seulement de préserver un mécanisme économique de sécurisation de l’île par les Nations Unies. Elle visait probablement également à éviter de révéler au monde la balance inégale des rapports entre certains acteurs de l’aide humanitaire et les bénéficiaires de l’aide.

Quel impact la controverse d’Haïti va-t-elle avoir sur le champ épistémique du choléra global ? Le champ de la recherche et de la lutte contre le choléra a-t-il engagé à sa suite une réflexion sur la possibilité des réservoirs ? Ou encore sur les enjeux politiques capables d’influer sur la capacité de produire du savoir lors de démarrages épidémiques ? L’épidémiologie de terrain aurait-elle été restaurée dans la pyramide des connaissances de la médecine des preuves ? Force est de constater que l’expérience de la controverse aura eu, au final, un effet minime sur les pratiques de création de savoir dans le champ de la recherche et de la lutte contre le choléra.

Dans une lettre récente écrite à l’éditeur, Stanislas Rebaudet (2017), dont le Pr Piarroux a dirigé la