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2. C ONTEXTE GENERAL , PROBLEMATIQUE ET ENJEUX

2.2. L’ INVESTISSEMENT EN FORMATION

Concernant, plus particulièrement les organisations, « la rapidité et la diversité des changements parvenus sur toutes les composantes de l’environnement … les ont

contraintes à revoir et à repenser leurs stratégies pour garantir leur pérennité » (Boudabbous, 2007, p. 115). Il apparaît alors qu’une gestion efficace des ressources humaines est l’élément de différenciation principale en matière de développement, de performance, de compétitivité et de pérennité entre les organisations (Boudabbous, 2007 ; Quoëx, 2016). C’est pourquoi, « l’entreprise devra, dans son intérêt, intégrer la formation dans sa stratégie. Elle doit l’intégrer dans un processus méthodique, organisé et permanent » (Boudabbous, 2007, p. 116). Cette gestion stratégique devrait permettre

« une mise à niveau permanente des structures et des ressources de l’entreprise et, en particulier, de sa ressource humaine qui constitue un capital-expérience et un capital inestimable » (ibid.). Or, il est établi que les pratiques de gestion de formation sont très hétérogènes au sein des organisations (Greenan et al., 2012). Dans son étude, Boudabbous (2007) affirme que seule la moitié des directions d’entreprises perçoivent la formation comme un investissement au service du développement, l’autre moitié la définissant comme une charge financière et temporelle. De surcroît, peu d’organisations établissent et fonctionnent, sur le long terme, avec des politiques et des stratégies relatives à la fonction formation et au développement de compétences. En matière de formation professionnelle continue, les pratiques des organisations semblent corrélées au management qu’elles exercent qui, actuellement, est résolument axé vers la performance (Emery, 2007). C’est pourquoi, les décisionnaires sélectionnent les formations et les salariés qui permettent, selon leurs perceptions, de leur fournir le meilleur retour sur investissement en visant l’acquisition de compétences utilisables immédiatement (Enlart & Jacquemet, 2014). C’est donc la productivité directe qui est visée malgré que les études démontrent, de manière générale, un gain en productivité et en stabilité dans l’emploi (Lhomme & Robert de Massy, 2011). Ainsi, les organisations ont majoritairement une vision fonctionnelle de la FPC à court terme qui implique un sous-développement des pratiques de gestion des ressources humaines et de la fonction formation. En conséquence, selon Emery (2007), la gestion des compétences

« n’offre guère de cadre référentiel permettant d’ancrer les actions de formation continue dans une logique de développement qui pourrait servir autant les intérêts de l’employeur que ceux de l’employé » (p. 85).

En Suisse, malgré l’existence de la Loi sur la formation continue (LFCo, 2014) et la Loi sur la formation professionnelle (LFPr, 2002), la FPC ne dispose pas d’un cadre légal qui puisse la définir précisément et de manière adaptée aux réalités vécues par les organisations et les travailleurs. En conséquence, les aspects liés à la formation (accès, financement, mobilité verticale et/ou horizontale, soutien, etc.) sont très variables et ce, indépendamment qu’il s’agisse du secteur privé ou publique (Emery, 2007). L’absence d’obligation légale d’investir en FPC ne semble pourtant pas impacter de manière

significative les décisions prises par les organisations suisses en comparaison aux pays de l’Union européenne (Hanhart, 2007). Cependant, les entreprises suisses sous-investissent comme en témoigne l’indice d’effort consenti par les organisations en matière de FPC, indice mesuré à l’aide d’un ratio établi entre les dépenses effectuées par les entreprises pour la FPC des collaborateurs et les « coûts totaux de personnel (salaires, contributions de l’employeur aux assurances sociales et à la prévoyance professionnelle, frais de formation) » (ibid., p. 72). Ce constat pourrait impacter ultérieurement le développement économique du pays. Quant à l’OFS (2016a), il estime que 77% des entreprises forment leurs employés.

L’indicateur “Entreprises formatrices – formation continue” est suivi car, comme expliqué en préambule, « la formation continue permet aux entreprises d’entretenir et de développer les compétences des personnes qu’elles emploient afin de maintenir leur compétitivité dans un environnement technologique en constante évolution ».

Toutefois, cet indicateur présente la part d’entreprises ayant fait bénéficier des employés d’un soutien direct (participation financière aux frais de formation) ou indirect (possibilité donnée à l’employé d’effectuer sa formation durant les heures de travail ou participation financière de l’employeur à des fonds de formation) à des formations (formelles et/ou informelles). Nous pouvons ainsi constater que le soutien des entreprises semble corrélé à leur taille, que la précision quant au soutien obtenu est manquante, que la “validité/valeur”

des formations est absente et que le nombre d’heures de formation par organisation ainsi que par individu n’est pas stipulé. Ainsi, il n’est ni possible de conclure si le niveau obtenu de l’indicateur tend à être rassurant ou non, ni d’en constater l’évolution. En effet, la mesure ne semble pas avoir été mise à jour depuis 2011.

En parallèle, concernant les individus, l’OFS mesure la participation de la population à la formation continue, tous types confondus.

A une époque où les progrès technologiques se font de plus en plus rapides, l’acquisition de nouvelles connaissances et leur constante mise à jour se révèlent toujours plus comme indispensables. L’importance de la formation continue pour le bien-être individuel et sociétal s'est donc fortement accrue. (2016b)

Ce taux de participation semble fortement varier en fonction des années de mesure, de la population étudiée et du type de formations recensées. En effet, en 1996 (OFS, 1998),

Figure 2: Les entreprises formatrices en Suisse, en 2011 Tiré de : OFS, 2016a

35% (contre 45% en Finlande) de la population suisse active ont réalisé une FPC tandis qu’en 2011 (OFS, 2016c), 77% de la population résidante permanente, âgées de 25 à 64 ans, ont suivi une formation. Ainsi, le trend est difficilement objectivable ce qui rend compliquée l’analyse des facteurs influençant potentiellement les résultats et les actions éventuellement menées. En outre, toujours selon l’OFS, en 1996, 36% des cours suivis l’ont été entièrement en dehors des heures de travail (1998) et « en 2011, environ 37% de la population souhaitait participer à une formation mais en a été empêché pour différentes raisons » (2016d). Ainsi, si la nécessité d’investir en FPC semble indéniable, il semble exister un delta entre les efforts consentis et les besoins réels. De plus, si les individus retirent certains bénéfices quant à leur engagement en formation, ils ne sont pas tous égaux face à cet accès. Le sexe de l’individu, son niveau de formation, la taille de l’entreprise, sa place dans celle-ci, la catégorie socio-professionnelle sont certaines des variables influençant les opportunités de formation pour les employés. Ainsi, « l’accès à la formation n’est pas lié à la seule volonté du salarié » (Fenouillet, 2011, p. 14) et on ne peut réduire la problématique de l’engagement en formation seulement sous l’angle de la motivation individuelle ou de l’appétence à la formation.