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III. A VANTAGE ET IMPORTANCE DU BARREMENT DES CHEQUES

2.2. De l’importance du barrement des chèques en France et dans l’UEMOA

En France, par contre, théoriquement, le barrement est facultatif, mais en pratique, il est rendu obligatoire par le biais de la délivrance systématique et gratuite de formules prébarrées de chèque à l’ouverture du compte chèque et durant tout son fonctionnement. En revanche, la délivrance des formules soumise à taxe, permise par la loi à certaines conditions bien précises, est très encadrée par loi. Ce qui explique pourquoi actuellement en France tous les chèques sont quasiment des chèques barrés. Généralement, ils sont alors prébarrés à l’impression. Les chèques prébarrés sont nés d’une idée du législateur232, qui « pour faciliter le contrôle fiscal », va non seulement imposer aux banques d’apposer sur les formules de chèques délivrés à leurs clients, la mention « non endossable, sauf à un banquier », mention qui veut dire que le chèque ne peut être payé qu’entre les mains d’une banque. Ainsi, en vertu du CMF, art. L.131-71, al.3,

[i[l peut être délivré des formules de chèques barrées d'avance et rendues, par une mention expresse du banquier, non transmissibles par voie d'endossement, sauf au profit d'un établissement de crédit, d'un établissement assimilé ou d'un établissement de paiement. L’administration des impôts peut obtenir à tout moment, sur sa demande, communication de l'identité des personnes auxquelles sont délivrées des formules [pleinement endossables] ainsi que les numéros de ces formules.

Dans l’UEMOA, le législateur va, comme en France, imposer la gratuité des formules chèques prébarrées233. La raison est que le législateur perçoit le chèque barré comme un excellent moyen pour favoriser l'interbancarité et la bancarisation de la population. De ce fait la gratuité des formules prébarrées va être une mesure incitative visant à encourager les titulaires de compte à privilégier le chèque comme moyen de paiement, dans leurs transactions financières. Pour ce faire, la loi va, par une politique dissuasive d’une utilisation intempestive de formules non barrées de chèque, soumettre la délivrance de ces formules à un droit de timbre de 25 FCFA par formule (art. 45 al.3 RU). Malgré l’application de cette politique visant à dévaloriser l’utilisation des chèques non-barrés on note qu’à cause du faible taux de bancarisation de la population, le chèque non barré reste très prisé dans l’Union. Eu égard à ce qui précède, le constat que nous faisons de l’analyse des textes lois régissant le chèque barré dans les pays ciblés par notre étude est que, au Canada particulièrement, il y a au sujet des chèques barrés, une incohérence ou disparité entre la loi et la pratique bancaire canadienne. Cette

232 L. fin. n° 83-1179, 20 déc. 1983, art. 12, III, actuellement CGI, art. 916 A.

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inadéquation peut-elle être perçue comme une zone d’ombre, une lacune ou un vide juridique, puisque la pratique d’encaissement des chèques ne suit pas celle prévue par la loi? Si oui, est-ce à dire qu’il s’agit là d’une indication de ce que la Loi sur les lettres de change gagnerait à être rafraîchie? En gros serait-ce tout simplement opportun pour le législateur de proposer aux institutions financières le retour du chèque barré, en mettant en exergue sa sécurité, laquelle provient du fait qu’il n’est pas transférable (pas de double endossement) et qu’il est payable directement à la banque négociatrice ? D’aucuns pourraient s’étonner de la pertinence d’une telle réforme, en alléguant qu’il s’agit d’aspects somme toute secondaires du régime juridique des chèques et que personne n’a, jusque-là, souffert de cette incohérence juridique. Pour notre part, même si l’examen des pratiques actuelles en matière de paiement indique de toute manière que ces aspects essentiels du régime juridique des chèques correspondent de moins en moins aux pratiques et aux besoins actuels des banquiers et des consommateurs, nous estimons toutefois qu’une telle réforme a toute sa pertinence234. Car jusqu’à preuve du contraire, ce sont ces dispositions qui tiennent lieu de loi au Canada en matière de paiement par chèque. Aussi, serait-il judicieux, vu leur inefficacité pratique, que le législateur fédéral les revisite pour tenir compte du contexte dans lequel évoluent actuellement les paiements par chèque au Canada. Conséquemment, des réformes législatives s’imposent en la matière, car nonobstant le fait que la loi le prévoit, on note en pratique que la technique du paiement par chèque barré est inusitée au Canada. Toutefois, la confrontation des aspects théoriques de cette technique (tels que stipulé par le législateur canadien) aux aspects pratiques du paiement par chèque via le système de compensation canadien (tel que conçu par la pratique bancaire en cours au Canada), nous permettra de démontrer, dans les développements suivants, qu’il est possible – nonobstant ce que dit la loi – de payer un chèque via un système de compensation interbancaire, et ce, sans qu’il soit utile pour le tireur d’utiliser à l’émission un chèque barré. C’est ce qu’illustre bien la pratique bancaire canadienne. L’on ne peut en dire autant en France, ni dans l’UEMOA où la loi et la pratique sont en parfaite cohésion, car, comme prévu par la loi, sans chèque barré, il ne peut y avoir de paiement par chèque via le système de compensation en France. Cette analyse à la fois juridique et théorique du chèque barré nous permettra de mettre en lumière cet aspect important de notre sujet de recherche – la forme de chèque reçu en paiement via un système de paiement – afin d’en donner une meilleure compréhension.

§

§33..DDEESSCCOONNDDIITTIIOONNSSDDUURREECCOOUURRSSAAUUCCHHEEQQUUEECCOOMMMMEEMMOOYYEENNDDEEPPAAIIEEMMEENNTTSSCCRRIIPPTTUURRAALL

Par l’effet de la modernisation des services bancaires et notamment de l’automatisation des paiements, le règlement des transactions commerciales entre agents économiques va se faire de plus en plus en

234 En fait la nécessité de réviser cette loi a été discutée. Mais aux dire de certains auteurs, il semble que ce ne soit pas une préoccupation du législateur. Lire dans ce sens, Benjamin GEVA, « Réflexions on the Needs to Revise the Bills of Exchange

Act – Some Doctrinal Aspect » (1981-1982) 6 C.B.L J 344. Or le législateur gagnerait à notre sens à adapter cette loi à la pratique bancaire actuelle.

monnaie scripturale, c’est-à-dire électroniquement de compte à compte. Ce qui contraint le consommateur, quel que soit son pays de résidence, à disposer d'au moins un compte bancaire s’il désire payer en monnaie scripturale, en l’occurrence un compte chèque (1). Et à respecter les conditions d’émission du chèque imposées tant par la loi que par la pratique bancaire (2). Une fois émis, le chèque ne pourra être introduit dans le système de compensation interbancaire (5) que si et seulement s’il est accepté par le bénéficiaire (3) et présenté au paiement dans les délais légaux (4). C’est à l’issue du respect de ces conditions que le chèque pourra être payé par la banque (6).

I.L’OUVERTURE D’UN COMPTE BANCAIRE : LE COMPTE CHEQUE

1. Généralités sur le compte bancaire

Après avoir défini ce qu’on entend par « compte bancaire », nous en démontrerons son importance pour la société et conclurons notre propos par l’énumération des différentes catégories de compte bancaire qui existent au Canada.

1.1. Définition de la notion du compte bancaire

Dans le langage courant, le compte bancaire signifie le support matériel via lequel se déroulent les transactions bancaires, c’est-à-dire, l’outil qui permet à toute personne de déposer de l’argent en toute sécurité dans une banque soit pour épargner soit pour effectuer les opérations bancaires courantes tels le paiement de facture ou l’encaissement de chèque.

En matière comptable, la gestion du compte bancaire se confond à la tenue d’un livre journal en ce sens que, tout comme le comptable, la banque tient un livre journal au jour le jour, opération par opération. D’où l’expression « tenue des comptes » pour désigner la gestion ou le fonctionnement du compte bancaire. En effet, pour chaque opération bancaire, la banque indique dans son livre journal la date, l'origine, l'objet, l'imputation, le numéro de la pièce justificative et le mode de paiement, puis elle calcule le solde par la différence entre les dépôts et les retraits. Conséquemment ceux sont les règles d’écriture comptable ou de tenue de livres qui s’appliquent au fonctionnement du compte bancaire c’est-à-dire à chaque entrée (dépôt) et sortie (retrait). C’est pourquoi on qualifie le compte bancaire, de document comptable.

D’un point de vue juridique, il est difficile de dégager une définition claire et précise de la notion de compte bancaire, à cause de la complexité de sa nature, qui en fait une notion assez ambivalente. Au regard de cette ambivalence, bon nombre de juristes235 vont s’accorder pour retenir une définition mixte selon laquelle le compte bancaire serait un tableau de dettes et créances réciproques entre deux

235 GAVALDA et STOUFFLET, Droit bancaire : institutions, comptes, opérations, services, supra, note 122, p. 103; Philippe NEAU- LEDUC, Droit bancaire, Paris, Dalloz, 2005, p. 122; René RODIERE et Jean-Louis RIVES-LANGE, Droit bancaire, Paris, Dalloz,

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personnes (le banquier et son client) qui entraine des conséquences juridiques dans les rapports entre le titulaire du compte et la banque dans laquelle le compte a été ouvert. Ces conséquences juridiques vont inciter le législateur à exiger que le compte bancaire soit – pour être valablement ouvert – adossé à un contrat : le contrat bancaire dénommé dans le jargon bancaire « convention de compte ».

En somme, la validité du compte bancaire est juridiquement assujettie à la conclusion d’un contrat bancaire. Nous n’épiloguerons pas sur cette notion de contrat bancaire, mais plutôt sur la question de savoir quelle importance la détention du compte bancaire, en l’occurrence le compte chèque, revêt dans la vie de toute personne vivant dans les pays ciblés par notre étude?