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L’imbrication des différentes polices de l’environnement dans les politiques locales

CONCLUSION SECTION 1

SECTION 2 : L’ARTICULATION DES INTERVENTIONS DES COLLECTIVITES TERRITORIALES AVEC LES COLLECTIVITES TERRITORIALES AVEC LES

B- L’imbrication des différentes polices de l’environnement dans les politiques locales

Tel est l’exposé des pouvoirs du préfet en matière d’ICPE. Mais on remarque qu’il peut exister des interactions entre les pouvoirs de police du préfet dans la gestion de l’environnement et les autres polices de l’environnement. L’intérêt juridique qu’il englobe nous amène à y porter notre réflexion.

B- L’imbrication des différentes polices de l’environnement dans les politiques locales

L’imbrication des politiques locales de protection de l’environnement transparaît par ailleurs à travers la gestion de l’eau. Ainsi concourent les collectivités territoriales avec l’État à la protection de la ressource en eau, dans l’intérêt général. Les pouvoirs du préfet se sont trouvés renforcés avec la limitation de l’intervention du maire au seul cas de péril imminent, même si la commune assure la distribution

d’eau potable et l’assainissement328. La police spéciale de l’eau est réservée au

préfet qui peut prendre des arrêtés de suspension ou restriction provisoire des utilisations de l’eau, pour pallier à un danger lié à la pollution de l’eau ou aux effets

de sécheresse, d’inondations ou encore un risque de pénurie329.

Les mesures prises par le préfet en application de la police de l’eau prennent en

326 J.-M. ADRIEN, Les limites du pouvoir de police du maire face à la police spéciale, AJDA 2004, p. 2039.

327 CAA Nancy 10 juin 1993, n° 92NC00232, Ministre de l'Environnement c/ Sté de production de

gaz liquéfiés, Tables du Recueil Lebon

328 CE, 17 août 1945, De Kerouartz, Rec. CE 1945, p. 180. L’intervention du maire dans la police de l’eau rend sa décision illégale sauf en cas de péril imminent.

113 compte la nature de l’atteinte encourue par la ressource. C’est alors que le préfet est compétent pour prendre des décisions relatives à la gestion de l’eau, sans se borner à se substituer au maire en cas de carence. La mise en œuvre des politiques de gestion de l’environnement entreprises par les collectivités territoriales se trouve limitée par l’importance des pouvoirs que concentre le préfet. La lutte contre les pollutions des eaux ne peut être invoquée par les collectivités territoriales si la

police spéciale du préfet dans le domaine de l’eau est appelée à s’appliquer.330

Le préfet est seul compétent pour prescrire les conditions d’utilisation de la ressource par les installations de captage et de dérivation. C’est le préfet qui délimite les

périmètres de protection331 et lui seul est compétent pour organiser l’utilisation des

terres à proximité des espaces protégés soit en interdisant soit en limitant la culture dans le but de lutter contre la pollution des eaux.

Il importe de préciser que les installations qui n’apparaissent pas dans la

nomenclature des installations classées, « les ouvrages, travaux et activités réalisés

à des fins non domestiques par tout exploitant, et qui conduisent à des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, des changements du niveau ou du mode d'écoulement des eaux, à la destruction de frayères, de zones de croissance ou d'alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts, chroniques ou épisodiques, même non polluants332» sont soumis à autorisation ou à déclaration délivrée par le préfet.

Les collectivités territoriales assurant le service d’assainissement des eaux usées ne doivent pas méconnaître la réglementation du préfet relative à l’épandage de boue, produit du traitement des eaux usées placé sous le couvert de la police spéciale de

l’eau et des milieux aquatiques333

.

330 CAA Nancy, 2 août 2007, no 05NC01255, Gaec Varennes, RD rur. 2007, p. 62. Selon la jurisprudence, la décision du maire intervenant dans le champ de la police est entachée d’irrégularité dans la mesure ou elle n’est admise qu’en cas de péril imminent. En l’espèce la teneur de l’eau en nitrates destinée à la consommation n’est pas constitutive d’un péril imminent, condition d’exercice des pouvoirs de police générale. La décision du CE, 2 déc. 2009, no 309684, Cne de Rachecourt-sur-Marne parue à la revue française de droit administratif en 2010 à la page 231 indique l’augmentation constante de la teneur en nitrates sans réaction des services du préfet constitue un danger, un péril imminent.

331

P. LOGNA-PRAT, Les périmètres de protection patrimoniale et la décentralisation AJDA 2011, p. 1545

332 Article L214-1 du code de l’environnement.

Granges-la-114 Les moyens mis en œuvre par le préfet doivent conduire à une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau tel qu’elle apparaît à l’article L211-1 du code de l’environnement. La police de l’eau et des milieux aquatiques exercée par le préfet constitue un instrument juridique devant permettre la satisfaction des exigences de santé, de salubrité, de sécurité publique ainsi que les exigences de qualité de l’eau

potable. La police de l’eau doit tenir compte « la vie biologique du milieu

récepteur, et spécialement de la faune piscicole et conchylicole, la conservation et du libre écoulement des eaux et de la protection contre les inondations, l'agriculture, des pêches et des cultures marines, de la pêche en eau douce, de l'industrie, de la production d'énergie, en particulier pour assurer la sécurité du système électrique, des transports, du tourisme. Elle prend aussi en considération la protection des sites, des loisirs et des sports nautiques ainsi que toutes activités humaines334». Il faut noter qu’il existe une articulation entre la police de l’eau et celle des ICPE.

La jurisprudence veille à l’application du principe de l’indépendance des

législations sur la base d’une jurisprudence ancienne335

. En effet face à la pluralité des domaines qui composent l’environnement ainsi que leur réglementation spécifique, le juge veille à ce que chaque domaine bénéficie d’un traitement souverain sans risque de confusion. A titre d’exemple, l’entreprise de pisciculture respectant les exigences de protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques n’est pas pour autant réglementée par la police de l’eau, la police des ICPE s’applique aux activités de pisciculture puisqu’elle prend largement en compte les différents secteurs de l’environnement concernés qui pourraient subir d’atteintes.

L’articulation existant entre les actions locales de l’Etat et celle des collectivités territoriales s’apparente aussi à un concours de polices au niveau de la mise en

œuvre des politiques de gestion des nuisances notamment la gestion des déchets336

. Le représentant de l’Etat y joue un grand rôle notamment avec la police spéciale Ville. Selon la cour s’il l’épandage de boues dans la commune ne constitue pas un danger pour la santé publique, le maire ne peut être fondé à l’interdire sur le territoire de la commune.

334

Article L211-1-II du code de l’environnement.

335 CE, 23 févr. 1983, Parc, Rec. CE 1983, p. 79.

336 F. G. TREBULLE, Précision sur le pouvoir du préfet en matière de déchets des installations classées, RDI 2007, p. 126.

115 des déchets industriels. En toute logique, le représentant de l’Etat qui assure le contrôle et la surveillance de l’ICPE exerce dans le même sens la police des déchets produits par ladite ICPE. Mais la rédaction de l’article L 541-3 révèle une grande ambiguïté sur l’autorité de police compétente en matière des déchets des ICPE. Il n’y a en effet pas de précision sur l’autorité compétente.

La jurisprudence a toutefois apporté une réponse en faveur du préfet. Les pouvoirs de police générale du maire découlant de l’article L 2212-2 du CGCT sont alors exclus et le maire ne saurait ordonner l’élimination des déchets alors que le préfet

en garde le monopole. Lapolice spéciale du préfet en la matière interfère et bloque

toute intervention du maire dans le domaine des ICPE337. C’est d’ailleurs ce que

préconise le CE en affirmant que la règlementation relative aux déchets ne fait pas obstacle à l’application par le préfet, non seulement en cas de carence du maire, des pouvoirs de police qui lui sont conférés à cet effet afin de prévenir toute atteinte à l’environnement, mais aussi, dans la mesure ou les déchets sont issus de l’activité

d’une ICPE, d’exercer ses pouvoirs afin d’assurer la remise en bon état du site338

.

Certes, la police spéciale faisant obstacle à l’application de L2212-2, l’étude des politiques locales en matière de déchets industriels permet d’appréhender les interactions existantes avec la mise en œuvre de la police de circulation des véhicules. En effet, n’intervenant qu’exceptionnellement dans la gestion des déchets dangereux selon une jurisprudence constante, le maire peut réglementer la circulation et dans ce cas organiser la desserte des ICPE en fixant les heures de passage des véhicules, en limitant l’accès à certaines voies pour éviter la dégradation des routes s’il s’avère que leur poids serait de nature à en être l’origine.

Il faut remarquer que l’exclusion de la police du maire en matière de déchets industriels dépend de l’appréciation du juge en cas d’imprécision des textes, ce qui peut conduire à étendre les pouvoirs du maire dans certains cas d’élimination des

337 CE, 11 janv. 2007, no 287674, Ministre de l'Ecologie et du Développement Durable. Cette jurisprudence fut intégrée au code de l’environnement en son article R 541-12-16 par l’article 2 du décret n°2013-301 du 10 avril 2013 portant diverses dispositions relatives aux déchets, JORF n°0086 du 12 avril 2013 page 6019

338 CE, 11 janv. 2007, no 287674, Ministre de l'Ecologie et du Développement Durable c/ Société Barbazanges Tri Ouest, AJDA 2007, p. 166. Le juge répond à la question de savoir quels sont les pouvoirs de l’autorité de police générale en matière de déchets.

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déchets339. Le concours de polices transparaît avec le cas du maire obligé d’agir

face aux risques d’insalubrité et d’insécurité publique qui menacent l’environnement de ses administrés. Les articulations entre les pouvoirs du maire et ceux du préfet correspondent aux imbrications entre deux politiques locales qui s’entremêlent du fait de la mise en œuvre de la police des ICPE qu’exerce le préfet et celle de l’élimination des déchets qu’exerce le maire. En cas de carence du maire, il pèse sur le préfet une obligation de substitution afin de parer à toute

atteinte à l’environnement et à la santé publique340

. On note aussi de plus en plus un relatif élargissement des possibilités d’intervention du maire dans la gestion des

ICPE pour assurer le bon ordre public341.

La lutte contre les nuisances au niveau local fait intervenir le préfet qui, au-delà de ses pouvoirs de lutte contre les pollutions de l’air, du sol, de l’eau par le biais de la réglementation fondant l’exercice de la police spéciale des ICPE, met ainsi en œuvre dans les communes étatisées tous les moyens nécessaires pour assurer la

tranquillité publique342 en adoptant des mesures d’interdiction et de prévention

contre le bruit lié aux activités de transport. Les compétences du préfet en matière de lutte contre les nuisances sonores s’élargissent avec, le cas échéant, la substitution au maire lorsque celui-ci méconnaît l’obligation d’agir qui pèse sur lui pour prendre des mesures de limitation ou d’interdiction permettant aux

populations de jouir d’un environnement équilibré et respectueux de la santé343

. En outre les collectivités territoriales prennent en compte dans le cadre de l’élaboration

339 CE, 18 nov. 1998, no 161612, Jaeger. Dans le silence des textes, le juge estime que « l'autorité investie des pouvoirs de police municipale est fondée, alors même que le préfet est susceptible d'intervenir au titre des pouvoirs de police qu'il tient de la loi (...) du 19 juillet 1976 relative aux installations classées, à prendre les mesures d'élimination prévues à l'article 3 de la loi précitée »

340 CE, 23 nov. 2011, no 325334. Dans cette décision, le juge précise que « le détenteur de déchets de nature à porter atteinte à l'environnement a l'obligation d'en assurer l'élimination dans des conditions propres à éviter une telle atteinte ; que l'autorité investie des pouvoirs de police municipale doit prendre les mesures nécessaires pour assurer l'élimination des déchets dont l'abandon, le dépôt ou le traitement présentent des dangers pour l'environnement ; qu'en cas de carence de l'autorité municipale dans l'exercice des pouvoirs de police qui lui sont conférés au titre de la police des déchets, le préfet doit prendre sur le fondement de ces dispositions (…) les mesures propres à prévenir toute atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement ».

341 CAA Lyon, 20 Septembre 2011, no 09LY00514. Selon la cour, il pèse sur le maire une obligation d’agir en cas d’accident survenu dans une ICPE de nature à porter atteinte à la santé humaine. Le maire investi du pouvoir de police municipal peut prendre des mesures de sauvegarde.

342 Article L 2214-4 du code général des collectivités territoriales

117 des SCOT et des PLU les périmètres de protection délimités par le préfet autour des aérodromes par le plan d’exposition au bruit (PEB) dont le but est de protéger des riverains contre toute exposition.

Il apparaît à travers ce qui précède, que la gestion de l’environnement dans les politiques locales se présente comme une occasion de marquer la prédominance de l’autorité préfectorale face à ces partenaires locaux. Ces attributions de police place le préfet au centre des décisions environnementales dont la mise en œuvre appelle la collaboration des services déconcentrés de l’Etat.

.

II-Le concours des services déconcentrés de l’Etat en matière d’environnement

La gestion de l’environnement dans les politiques locales regroupe un ensemble de structures dont le fonctionnement met au premier rang les services déconcentrés de

l’Etat344. Ces derniers concourent avec les collectivités à la mise en œuvre des

actions de développement économique et social destinées à atteindre l’objectif de développement durable. On se pose des questions relatives à l’apport de ces

organes de l’Etat dans la prise en compte de l’environnement345

. On retient comme l’indique le code de l’environnement que le préfet, chef de tous les services déconcentrés de l’Etat bénéficie de l’assistance du corps des techniciens de l’environnement affectés dans les différents structures locales.

C’est le code de l’environnement qui détermine les organes qui participent à l’intégration de l’environnement dans les décisions publiques. C’est ainsi qu’ il est procédé à la consultation des services départementaux de l'équipement, de l'agriculture, de l'action sanitaire et sociale, de la sécurité civile, de la direction régionale de l'environnement, des services de l'inspection du travail ou encore des services qui ont la charge de la police des eaux, de l'architecte des Bâtiments de France, de l'Institut national de l'origine et de la qualité, de l'établissement public

344 A.-H. MESNARD, Les services déconcentrés de l’Etat : L’obligation générale de prise en compte de l’environnement, Encyclopédie des collectivités locales, chapitre 2 folio n° 5443.

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du parc national concerné ainsi que les services pouvant être concernés346. La

consultation de ces services constitue une démarche d’assemblage des données scientifiques et techniques dont l’utilisation garantit une meilleure protection de l’environnement. Ils jouent un rôle important dans la coordination des actions de gestion de l’environnement au niveau local et apparaît comme des partenaires incontournables dans la réussite de cette mission. Leurs expertises en matière d’environnement demeurent indiscutablement recherchées. On les retrouve au niveau régional des structures déconcentrées (A) sans négliger l’apport des organes départementaux dans la gestion locale de l’environnement (B).

A- Les structures déconcentrées de l’Etat dans la région pour

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