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3- Chaque nouvelle forme d’action collective émerge d’un contexte d’actions collectives anciennes

2.4. LA FONCTIONNALITE D’UN PRODUIT D’ARTISANAT D’ART D’ART

2.5.2. L’expérience du client sous l’angle sociologique

Chaque homme qui passe par des interactions symboliques, avec soi ou avec d’autres acteurs au sein du monde de l’artisanat d’Art, vit ce que l’on peut appeler une expérience qui se manifeste sous la forme d’une action sociale. Nous avons voulu comprendre ce qu’est l’expérience de prime à bord, puis comment l’individu la vit en se basant sur la littérature sociologique105.

«Chaque monde est, le temps que dure notre attention, réel à sa manière,…»

(Goffman, 1991, p.11). Chaque activité qui est menée par le client et qui se transforme par la suite en expérience vécue reste unique. Cette expérience correspond à un instant donné, à une situation vécue par le client d’un produit d’artisanat d’Art, à un contexte d’interactions symboliques passé. Ainsi, nous pouvons assimiler le monde de l’artisanat d’Art à une «réalité» (James,1950).

Les différentes réalités représentent ce qui est vécu par les différents acteurs appartenant au monde de l’artisanat d’Art. Dans notre problématique, il s’agit de celles vécues par le client d’un produit d’artisanat d’Art. Ces réalités peuvent être vécues dans différents sous-mondes (Goffman, 1991), comme des «réalités multiples» (Schutz, 1962). Goffman (1991) parle d’un engagement de l’homme dans son quotidien et ainsi de l’existence d’un capital de savoir qui permet de se comporter au sein de son monde social. Ce comportement est nommé «…le style cognitif» (Goffman, 1991, p.13) et se rapporte, d’après l’auteur, aux activités sociales en cours chez des différents hommes. Elles peuvent être réelles ou fictives106. Ce qui correspond aux interactions symboliques entre le client et d’autres acteurs du

105 Il s’agit d’abord de comprendre comment un individu peut vivre son expérience au sein d’une société construite. C’est pourquoi nous nous sommes d’abord tournés vers cette approche sociologique. C’est seulement dans le chapitre suivant que nous débattrons des travaux effectués en Marketing et qui représentent plus un impact économique du point de vue de l’expérience qu’un véritable apport de compréhension approfondie concernant le fonctionnement du client.

106 Ibid.

monde de l’artisanat d’Art, mais aussi aux interactions interindividuelles qui peuvent être à leur tour aussi fictives.

Goffman (1991) évoque un cadre d’expérience qui correspond à une situation donnée qui met en œuvre des interactions symboliques entre le client et les autres. L’auteur le voit comme «… une étude de l’organisation de l’expérience»

(p.19). Le cadre étant considéré comme une société donnée au sein de laquelle l’homme s’engage. Ici, la société correspond au monde de l’artisanat dans lequel le client d’un produit d’artisanat interagit. Goffman (1991) distingue deux types de cadres: un de type naturel, l’autre de type social. Le premier permet d’observer des interventions des hommes sans intention, ni conscience de leur part. De leur côté, les cadres sociaux «…permettent de comprendre d’autres événements…»

(Goffman, 1991, p.30). Les hommes les ont voulus ainsi. Par conséquent, ce type de cadres est soumis aux normes. Ainsi, les actions sociales des acteurs du monde de l’artisanat d’Art sont soumises à un processus de validation sociale qui se basent sur les valeurs107 du monde de l’artisanat d’Art. Par conséquent, l’homme planifie en recourant aux interactions symboliques qui peuvent se traduire en actions sociales.

Ainsi, elles se réalisent et sont à considérer comme un cadre social. En revanche, d’autres interactions peuvent lui échapper, et nous avons alors affaire à un cadre naturel, d’après Goffman (1991). Or, ce cadre renvoie à quelque chose qui s’est réellement produit. Dans notre cas, il peut donc s’agir d’interactions symboliques qui ont eu lieu avec d’autres clients et/ou d’autres membres du monde de l’artisanat d’Art.

Goffman (1991) considère d’ailleurs ce qui est naturel – les activités sociales qui se produisent dans le cadre d’expérience dite «naturelle» – comme étranger à

«…toute intervention intelligente»108. La conduite de l’homme confronté à l’événement naturel lui échappe alors complètement. Dans le cadre social, les actions sont considérées comme intelligentes109. Elles s’inscrivent dans un ordre naturel parce qu’elles sont compréhensibles par l’homme qui appartient au même

107 Ibid.

108 Ibid, p.32.

109 Ibid.

cadre social. Un client qui appartient au monde de l’artisanat d’Art comprend donc ce cadre social et les actions intelligentes qui y sont à l’œuvre.

Il y a deux types de compréhension110. Il y a d’abord celle qui est relative au cadre naturel: le client dépend en quelque sorte de l’action sociale c’est-à-dire aux indications venant des autres acteurs du monde de l’artisanat d’Art et qui lui permettent de comprendre ce qu’est le produit. Dans l’autre cadre, en revanche, celui de nature sociale, l’homme est déjà initié à ce monde et connaît l’ordre établi.

Ainsi l’échange et donc les interactions symboliques entre les différents acteurs seront d’un autre d’ordre, car le client dispose déjà d’une base de connaissances qui est propre au monde de l’artisanat d’Art. Il dispose déjà d’une sorte de pré-connaissance d’une situation qu’il a déjà vécue et ainsi expérimentée. Rappelons-nous d’ailleurs que Becker (2010) nomme cette base de connaissances commune,

«les conventions». Elles sont compréhensibles par tous les acteurs relatifs au monde de l’artisanat d’Art. Ainsi, dans n’importe quel cadre d’expérience, il existe des règles (Goffman, 1991) qui sont propres au monde construit.

Lors de la phase exploratoire, j’avais observé comment les clients entraient en contact avec le produit. Certains s’arrêtaient devant une vitrine commerciale d’un artisan d’Art et y restait pendant un long moment. Ils regardaient vraiment le contenu de la vitrine. Alors que d’autres s’arrêtaient plus sur l’interpellation d’une personne qui les avait accompagnés. Et c’est en passant par des interactions symboliques que l’intérêt naissait et que le regard se posait alors sur le produit au sein de la vitrine. Enfin, il y avait ceux qui ignoraient complètement les vitrines commerciales. (Extrait de notes d’observation de terrain)

Cette réflexion par rapport à ces observations de terrain illustre le fait que, malgré une mise en scène commerciale qui peut attirer un client grâce à une décoration spécifique (Rieunier et Daucé, 2002), ce dernier ne s’arrête pas forcément. Car l’homme ne comprend pas forcément ce qui lui est proposé et qui est ainsi propre au monde de l’artisanat d’Art. Par conséquent, il ne peut pas comprendre le produit.

Nous posons alors la sous-question de recherche suivante:

Comment savoir dans quel type de cadre d’expérience (naturel ou social) le client d’un produit d’artisanat d’Art se situe?

110 Ibid.

Comment le type de cadre d’expérience identifié peut-il alors être attribué à la définition d’un produit d’artisanat d’Art?

Pour conclure, nous voyons ici que le client passe par la perception de différents cadres d’expériences, soit naturel, soit social (Goffman, 1991), pour comprendre ce qu’est le produit. L’élément principal des cadres primaires d’expériences111 du client et des autres acteurs du monde de l’artisanat d’Art relève alors de la culture112. C’est en passant par des processus d’interprétation du client que nous voyons apparaître «…des catégories de schèmes, puis leurs relations…»113.