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2. LE CADRE CONCEPTUEL D’UN PRODUIT D’ARTISANAT D’ART D’ARTISANAT D’ART

2.2. Le regard de l’homme sur le produit d’un métier d’artisanat d’Art

2.2.2. Définition de l’école de pensée de l’interactionnisme symbolique symbolique

Par interactionnisme, nous entendons l’attribution de sens à un objet par des hommes qui s’expriment en actions sociales en passant par des relations interindividuelles (Becker, 2010) au sein d’une structure sociale donnée. Le processus d’interaction même est à considérer comme «un échange de significations» (Breton, 2008) mais aussi comme symbolique (Blumer, 1998). Le symbolisme dans l’échange se traduit en comportement compréhensif parmi les différents individus faisant partie du même réseau social (Becker, 2010), ici le monde de l’artisanat d’Art.

Les acteurs de ce monde ciblé représentent en fait toute une chaîne d’acteurs. Nous avons les artisans d’Art qui conceptualisent, créent, produisent et proposent à l’achat un produit, les exposants qui offrent le produit à la vente, les clients du produit qui vont à la rencontre dudit produit, l’achètent; ou le commandent auprès de l’artisan et l’acquièrent par la suite, enfin, les critiques professionnels ou pas, donc formels ou pas, qui s’expriment à travers un avis critique sur le produit exposé à la vente.

Les auteurs suivants, par leurs idées théoriques, sont à considérer comme des précurseurs de l’interactionnisme symbolique (Denzin, 1992). Ils représentent certainement la base de cette école de pensée. Citons la considération de l’individu en opposition avec la société (Cooley,1963) - l’homme passe par une phase d’autoévaluation suite aux réactions des autres -; la mise en évidence de termes comme la conscience, le soi et la réalité, ainsi que la centralisation du «je» dans le débat autour de la prise de conscience par l’homme (James, 1950); le refus de

considérer l’individu comme un simple organisme «réactif» aux stimuli externes (Dewey, 1915/2008, p.1979) mais plutôt comme un organisme actif et réceptif qui fait face aux différentes situations et procède ainsi à une adaptation continue au sein de l’environnement18; et, finalement, le concept de la société vue comme un construit de la communication (Park, cité dans Park et Burgess, 1931/1969). Tous ces travaux ont contribué à la construction d’un processus qui permet des interactions symboliques venant de points de vue différents de la part des hommes, voire des interactions interindividuelles à l’intérieur de l’homme. Ces dernières, les interactions symboliques donc, sont discutées sous le concept du «soi» (Park et Burgess, 1931, 1969; Thomas et Mead, 1973; Strauss, 1978 et 1984; Blumer, 1998) au sein de la littérature. D’ailleurs, nous approfondirons davantage le débat du «soi» (Park et Burgess, 1931, 1969; Thomas et Mead, 1973) au cours des chapitres suivants.

Mead (1973) et Blumer (1998) sont considérés comme des auteurs incontournables faisant aussi partie du début de l’interactionnisme symbolique (Denzin, 1992). Alors que, Mead (1973) s’interrogea sur des liens possibles entre les différents éléments en se basant sur les travaux de Cooley et James (Denzin, 1992).

D’après lui, la construction du lien entre la société, le soi et l’identité passe par des processus d’interactions symboliques entre les hommes. Ainsi, l’auteur s’éloigne de l’approche interprétative et phénoménologique poursuivie par les courants de pensée de Cooley et James (Denzin, 1992). Blumer (1998) poursuit les pensées de Mead (Denzin, 1992), en élargissant l’acte social (Mead, 1973) en une action collective (Blumer, 1998). Ce qui implique des interactions interindividuelles avec le soi, mais aussi avec d’autres hommes pour construire ensemble des actes sociaux.

Cette école de pensée est née dans le courant de recherche de «l’Ecole de Chicago» au début du XXe siècle (Coulon, 2007). Sans retracer tout l’historique de cette école, voici quelques explications concernant l’origine de ce courant. L’école de Chicago a été fondée en 1892 au sein d’une ville qui était, à une période historique, prête à accueillir en masse des immigrants ruraux19. Au début du XXe siècle, il y vivait plus de 50% d’étrangers20. Dans un contexte d’industrialisation, d’évolution du

18 Ibid.

19 Ibid.

20 Ibid.

commerce et des finances, Chicago représenta un terrain d’excellence pour développer le premier pôle de recherche en sociologie au monde21. C’est ainsi que les méthodes qualitatives et quantitatives ont été appliquées sur le terrain aux problématiques de la vie urbaine et de ses déviances au travail et plus tard aux mondes de l’Art et de la Culture (Coulon, 2007). D’ailleurs, la méthode d’observation participante émerge par exemple de ce courant empirique.

Cette école de Chicago trouve ses racines dans le pragmatisme. Les interactions symboliques viennent directement du terrain, et elles sont empiriques (Blumer, 1998; Becker et McCall, 1990). L’approche théorique se trouve alors en lien direct avec des expériences concrètes22. Selon le début de courant de pensée, il existe trois dimensions de base, la biologie, la psychologie et l’éthique (Coulon, 2007), qui encadreraient à l’origine l’activité humaine.

Les normes et les règles (Mead, 1973) appartenant à un monde social construit ont été traitées. Elles permettent de comprendre le point de vue d’un acteur23 en le voyant les adopter ou pas; de s’exprimer depuis sa perspective personnelle, en intégrant celle de l’autre. Ces «récurrences… observées…» (Becker, 2010, p.10) sont des règles et des normes qui découlent des activités qui sont menées de manière collective au sein du monde de l’artisanat d’Art. Becker (2010) les appellent les conventions. Elles ont été étudiées au sein du monde de l’Art24, en passant par toute la chaîne des acteurs correspondants. Il s’agit d’un savoir-faire qui est spécifique au monde de l’Art, de connaissances qui sont connues par tous les acteurs. L’utilisation de ce tronc commun de connaissances au sein du monde de l’Art se construit dans le temps et se manifeste en actions collectives25. Pour pouvoir se comprendre, il faut alors passer par des processus d’interprétation qui sont communs à ceux de l’artisanat d’Art, en d’autres termes, par des

21 http://fr.wikipedia.org/wiki/École_de_Chicago_(sociologie), consulté le 4 février 2011.

22 Ibid.

23 Ibid.

24 Ibid.

25 Ibid.

connaissances qui sont propres au monde de l’artisanat d’Art et qui sont ainsi compréhensibles par toute la chaîne d’acteurs.

Ces différentes interprétations collectives se traduisent en significations symboliques26 (Becker, 2010) et dynamiques27. Dynamiques parce qu’elles sont en évolution constante dans le temps. Les règles et les normes établies à un moment donné par les différents acteurs de l’artisanat d’Art sont renégociées en continu entre eux. C’est donc en passant par le vécu réel des individus que ces règles et ces normes sociales s’appliquent et se modifient dans le temps.

L’interactionnisme symbolique représente une forme de la sociologique compréhensive (Breton, 2008). La compréhension se voit ici dans les «échanges entre acteurs qui ne pourraient interagir sans se comprendre mutuellement» (p.3).

Elle peut donc s’appliquer à toutes les échelles, du plus petit monde social à un niveau local au plus global (Strauss, 1978). Ceci est notamment possible grâce à des intersections entre différents mondes.

Mettons également ici en évidence la construction du processus des actes sociaux (Mead, 1973; Shibutani, 1961; Strauss, 1978 et 1984; Blumer, 1998; Becker, 2010) qui se trouve au centre de l’étude du monde de l’artisanat d’Art. La création, la compréhension, la construction en soi: toute interaction passe par le processus d'interprétation de la part de l’homme face à une action sociale de l’autre.

Nous nous focalisons sur la problématique de la définition d’un produit d’artisanat d’Art à travers le regard de l’homme qui se situe dans le présent, donc aujourd’hui. L’analyse ne se porte pas sur la définition du produit par ceux qui l’ont créé dans le passé. Or, certaines interactions interindividuelles permettent un raisonnement qui se base aussi sur le passé, notamment sur l’expérience vécue du client. Elle fait partie de son identité sociale. Nous nous interrogeons sur le fait que le client d’un produit d’artisanat d’Art écarte ou pas son expérience dans ses interactions interindividuelles pour comprendre le produit.

Ainsi, notre question de recherche principale évolue:

26 Ibid.

27 Ibid.

Comment définir l’objet d’un métier d’artisanat d’Art à travers ses représentations sociales vues par l’homme?

Nous voulons ainsi savoir quelle est la définition d’un produit d’artisanat d’Art en passant par le regard du client au sein du monde de l’artisanat d’Art. L’objet est donc ici le produit d’artisanat d’Art. Le monde de l’artisanat d’Art est à comprendre comme un monde social construit au sens de l’interactionnisme symbolique.

Pour conclure, le monde de l’artisanat d’Art peut être vu comme un construit des activités collectives (Becker, 2010) ayant un ordre social qui garantit une certaine stabilité28 dans les actions sociales. En considérant le monde de l’artisanat d’Art comme un monde social construit, nous intégrons toute une chaîne d’acteurs29 qui lui appartiennent. Les différentes interactions symboliques qui ont lieu au sein de ce monde social sont à considérer comme une chaîne de coopération30 entre les membres. Ils se comprennent car une culture propre à ce monde existe. Celle-ci intègre alors ses propres conventions31 qui se traduisent en règles et normes. Par contre, nous ignorons si la culture du monde de l’artisanat d’Art ressemble à celle du métier (Schneider et Barsoux, 2003).