• Aucun résultat trouvé

Le Plan de déplacements urbains : une démarche vouée à la concertation

1.2.2 La concertation PDU : de l’incitation…

1.2.3.3 L’enquête publique : la réceptivité du projet

Calibrée par la loi Bouchardeau du 12 juillet 1983, l’enquête publique a « pour objet d’informer le public et de recueillir ses appréciations, suggestions et contre- propositions […] afin de permettre à l’autorité de disposer de tous les éléments

76

En effet, si au lancement de leur démarche PDU, toutes les AOTU tiennent un discours assez clair sur la voiture, les moyens le sont moins. Tous les PDU affichent la volonté de diminuer le trafic automobile et de développer les transports collectifs, néanmoins on ne sait jamais très bien si c’est en véhicules/kilomètre ; en part de marché ; sur des zones géographiques bien spécifiques… En d’autres termes, si dès le lancement de la démarche il est de bon ton d’afficher un discours en adéquation avec les tendances nationales et les attentes générales, il est tout aussi tentant de maintenir le plus longtemps possible un certain flou artistique quant aux objectifs précis et par voie de conséquences quant aux incidences précises du PDU.

nécessaires à son information »77. En d’autres termes, obligatoire, elle a officiellement pour mission d’aider l’autorité à prendre sa décision en cherchant un équilibre entre les préoccupations de l’administration et celles de la population.

Dans cette optique, c’est une transparence du processus décisionnel qui a été préconisée avec notamment :

- La conduite de l’enquête : informer le plus largement possible la population de l’existence d’une enquête publique, et organiser les permanences accessibles au public tout en lui facilitant l’accès à tous les éléments du dossier.

- Le rôle du commissaire enquêteur : il se doit de signaler les contre-propositions dont on lui a fait part et de justifier ses conclusions favorables ou non au projet.

En effet, selon l’article 6 de la loi, les conclusions d’une commission d’enquête peuvent remettre en question l’issue d’un projet. Pourtant, la pratique montre que l’application de cette clause de la loi reste compliquée et rare parce que soumise à de nombreuses conditions : le commissaire doit émettre un avis défavorable ; un requérant doit déposer un recours en annulation contre l’acte administratif et une demande de sursis à exécution ; enfin le tribunal administratif doit reconnaître le sérieux de la requête. Si toutes les conditions sont remplies, l’autorité administrative se doit alors de répondre à la demande de sursis à exécution, mais rien ne garantit l’annulation de la décision qui reste toujours du ressort discrétionnaire de l’autorité. Dès lors, si dans le cas d’un projet précis la remise en cause populaire apparaît difficile elle est encore plus hypothétique dans celui d’un PDU, dont les contours restent pour beaucoup encore flous : est-ce une carte, un programme formalisé avec une responsabilité arrêtée de financement et de maîtrise d’ouvrage, une charte d’intention ? Par ailleurs, sur les deux PDU qui ont été sanctionnés par un avis défavorable78 seulement une AOTU a accepté de revoir sa copie79.

77

Article 2 de la Loi du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques.

78

« Les projets de PDU d’Avignon et de Poitiers ont cristallisé les principales carences qu’ont

Derrière cette ambiguïté, l’enquête publique suppose néanmoins une forme d’intervention directe de ceux qui sont habituellement des représentés. Pourtant, encore une fois, sa principale caractéristique semble être de se dérouler sans public. Selon un commissaire enquêteur, « 85% des enquêtes feraient l’objet d’une carence totale ou partielle du public »80. Outre le fait, comme nous venons de le décrire, que la prise en compte des revendications citoyennes reste très aléatoire, si la participation vient à manquer dans la procédure d’enquête, c’est notamment parce qu’elle souffre d’un double défaut lié aux logiques qui régissent son déroulement. D’une part, elle ne concerne qu’un projet unique pour lequel des variantes n’existent pas, d’autre part, elle intervient une fois que le projet a été bouclé par le concepteur. Ces deux insuffisances ne permettent pas d’engendrer une réflexion collective, c’est le choix du « tout ou rien ». Aussi, comment inciter une population à participer lorsque le civisme demandé aux citoyens se résume soit à renoncer à leur intérêt individuel pour satisfaire l’intérêt général, soit à démontrer que des intérêts individuels surpassent un intérêt général que l’autorité elle-même ne parvient pas à définir ?

Par ailleurs, parce qu’elle réunit notamment un grand nombre d’acteurs déjà rencontrés précédemment (en l’occurrence à l’étape du diagnostic et du projet), nous pourrions tirer la métaphore jusqu’à la « voiture-balai » pour évoquer l’enquête publique. En effet, rares sont les PDU qui ont connu un engouement participatif beaucoup plus fort à l’enquête publique qu’au cours des étapes précédentes. A titre

périphériques, l’oubli pur et simple de certains thèmes de la loi sur l’air (transport et livraison de marchandises, encouragement des entreprises à favoriser le transport de leur personnel) et la quasi absence de réflexion autour de la sécurité. Mais alors qu’on a pu retrouver ces carences dans d’autres projets, les commissions d’enquête n’ont pas trouvé dans ces deux PDU d’atouts ou de points forts qui auraient pu leur permettre de recueillir un avis favorable. A Poitiers, le rapport d’enquête indique que le PDU se contente d’hypothèses de travail sans véritable choix, tandis que celui d’Avignon est dépourvu de programmation pluriannuelle et de prévisions de financement », in Certu, L’enquête publique des plans de déplacements urbains – Enquête publique et concertation : quelles recommandations, Rapport d’étude, Ministère de l’Equipement, 2002, 62 pages, p. 11.

79

« Le préfet a considéré ce PDU [Avignon] contraire aux objectifs de la LAURE et a sommé le

SITURA "d’élaborer un nouveau PDU", menaçant de déférer le document approuvé devant le tribunal administratif, avec tous les risques d’annulation que comporte une telle démarche. En réponse, le SITURA a décidé d’engager aussitôt, après l’approbation, la révision de son PDU, démarche longue nécessitant de reprendre la procédure à zéro, et constituant ainsi le premier cas en la matière », in

Certu, L’enquête publique des plans de déplacements urbains – Enquête publique et concertation :

quelles recommandations, Rapport d’étude, Ministère de l’Equipement, 2002, 62 pages, p. 12. 80

Blatrix Cécile, « Le maire, le commissaire enquêteur et leur “ public ” : la pratique politique de l’enquête publique », in La démocratie locale : Représentation, participation et espace public, Blondiaux Loïc, (et al), Lille, PUF, 1999, pp. 161-176.

d’exemple, l’AOTU niçoise qui ne s’est pas fait remarquer pour sa démarche concertée, a connu une enquête publique tout aussi peu participative, et des AOTU comme celles de Caen, de Nîmes ou de Mulhouse qui ont proposé une concertation organisée tout au long de l’élaboration du PDU ont essentiellement retrouvé les mêmes participants à l’enquête publique.

Pourtant, malgré ces différentes remises en cause, les avis récoltés lors de l’enquête publique peuvent constituer une source d’informations précises sur les attentes de la population qu’il est intéressant d’exploiter lors de la mise en œuvre du PDU. En effet, si à l’étape de l’enquête publique il n’est, a priori, plus temps de remettre en cause les grands objectifs du PDU, la riveraineté peut être traité plus finement et le projet technique affiné.

Le phasage procédural, révélé par les trois étapes que sont le diagnostic, le projet et l’enquête publique, met en exergue deux pratiques quant à la concertation PDU. Une première recommandée en amont (au cours du diagnostic et du projet) qui ouvre le débat sur un projet en devenir, et une seconde obligatoire en aval (au cours de l’enquête publique) qui ouvre le débat sur un projet finalisé. De plus, bien identifiée pour la dernière étape, la concertation ne suit aucune règle précise et, par voie de conséquence, ne peut se référer à aucun modèle pour les deux premières étapes. La multiplicité et la variété des dispositifs de concertation sont d’ailleurs caractéristiques de l’absence de modèle pratique en amont de l’enquête publique.

1.2.4 Du classique à l’innovant : une multiplicité d’outils et

Outline

Documents relatifs