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2| Pour une étude géographique de l’associatif migrant

2.1. L’associatif migrant : une histoire culturelle ?

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! Il est certain - du moins partagera-t-on cette opinion - que les individus sont en quête de sens. Aussi cherchent-ils à donner sens à leur vie, à leur trajectoire sociale faisant d’eux des êtres rationnels. Les individus pensent leur rôle et cherchent à valoriser leur(s) expérience(s) au bénéfice de la société ou du groupe social auquel ils s’identifient. On peut alors penser que la géographie culturelle nous apporterait les clés de lecture de cette dynamique collective qui anime les actions et les représentations individuelles. En effet, la géographie culturelle s’intéresse à l’expérience du lieu, à l’origine de l’espace vécu, ainsi qu'à la communication comme processus indispensable à la compréhension du rôle pris par les représentations. Paul Claval classifie alors ces communications selon plusieurs angles d’analyses : les transmissions intergénérationnelles, le conditionnement des structures de l’autorité du groupe par les moyens de communication mis en œuvre, l’affranchissement des horizons terrestres par la communication et enfin la spatialité de l’autorité permise par les moyens de communication [Claval, 1999]. Mais alors la géographie culturelle s’ancre dans une approche enracinée du lieu, le « sens » étant envisagé par les cinq sens de l’individu21F

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Dès lors, l’expérience humaine n’est pas tant envisagée par le sens que l’Homme donne à son existence, à entendre en termes de rationalité et de stratégies, mais plutôt par une prise de conscience « de ce qu’il est à travers les lieux où il vit ». C’est la réflexivité seule qui est prise en compte. Or, on ne cherche pas dans l'étude des espaces de l'associatif migrant un territoire guidé par les souvenirs de senteurs particulières ou de paysages.

Mais puisque l'on s’engage sur la voie des sociétés nationales, puisqu’il nous aura fallu procéder à l’identification des structures associatives à partir du critère « national », la géographie culturelle nous incite à questionner le processus de construction des identités, dans la mesure où l’identité nationale pourrait sous-tendre la construction de liens de types transnationaux ou diasporiques.

Cette idée, qui sera rediscutée dans les sections résultats, doit cependant trouver sa place ici. Il s'agit de reconnaître le premier biais de cette étude doctorale. En effet, l’identification de réseaux d’acteurs implique nécessairement, de par la méthodologie de recherche engagée sur Internet, d’introduire un biais « national » :

− soit on s’engage dans une recherche par mots clés,

− soit (ce qui peut également venir compléter la première méthode), on s’engage à réaliser une recherche sur le site des ambassades et/ou consulats. On peut éventuellement mobiliser les sites institutionnels européens dans lesquels on trouve un recensement des associations mais les résultats restent très mauvais. Aussi, la recherche empirique nous pousse à biaiser les résultats par le critère de la nationalité comme critère de recherche. Si dans les pays non hispanophones il est possible de modérer ce biais, il est en revanche impossible de s’en défaire dans le cas de l'Espagne. Les raisons en sont simples :

- Des structures associatives de professionnels espagnols existent déjà et peuvent avoir une dénomination proche de celles recherchées ;

- Dans les autres pays européens non hispanophones, une recherche en Espagnol apportera beaucoup plus facilement de résultats valables sans même avoir à spécifier l’origine géographique des migrants.

Aussi s’est-il avéré impératif de spécifier l’origine nationale dans la recherche de structures associatives. Pourtant, nous ne prétendons pas que seule l’identité nationale puisse être source de sociabilités. C’est d’avantage la condition professionnelle et donc « l’identité

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professionnelle » qui nous intéresse. On suppose que la condition professionnelle pourrait induire des échelles identitaires originales, qui ne suivraient pas le modèle des organisations de villageois que l'on peut observer traditionnellement dans les travaux sur les pratiques transnationales. On suppose donc les sociabilités en jeu moins locales mais plus régionales, nationales voire internationales.

Par conséquent, c’est une révision de l’imbrication État, nation et territoire [Ciattoni et Veyret, 2007] à laquelle on s’attache. Car l’idée d’un État-nation territorial ne peut être en accord avec le travail ici présenté. En reconnaissant le rôle possiblement joué par l’identité nationale dans la construction de solidarités transnationales ou diasporiques, on reconnaît la rupture d’une coïncidence territoriale entre l’État et la nation au sens où elle a été envisagée jusqu'à maintenant [Badie, 1995]. Aussi, la géographie culturelle nous incite à prendre en compte les identités telles qu’elles sont vécues et mobilisées par les acteurs. En revanche, il convient de se préserver de toute réification du lien social, dans le sens où ce sont des sociabilités multi-localisées et transnationales que l’on cherche à mettre en évidence.

Dans ses écrits, alors qu’il envisage la culture comme un « ensemble d’outils et d’artefacts qui permet à l’homme d’agir sur le monde extérieur », Paul Claval livre sa définition de diaspora :

« Un groupe qui vit loin de ses racines culturelles et mêlé à des populations différentes et plus nombreuses survit d’autant plus facilement que les relations qu’il entretien avec elles font l’objet d’un contrôle rigoureux et sont limitées à certains aspects de l’existence – échange de biens, prestations de certains services, emprunt de techniques et de savoir faire qui n’ont pas d’incidence directe sur l’identité collective. L’endogamie contient les contacts dans un cadre étroit et évite d’avoir à accepter les règles que l’on condamne. Elle conduit souvent à aller chercher le conjoint dans une autre communauté de la diaspora, qu’elle maintient ainsi soudée. » [Claval, 2003 :108]

Notre travail se construit, contrairement, sur une vision plus polymorphique de la diaspora, dans la mesure où elle doit savoir incorporer des collectifs nationaux différents pour savoir répondre à ses besoins. Le deuxième chapitre permettra de mieux en apprécier la définition.

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