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3. Les approches « chaînes globales » : un nouveau paradigme pour appréhender les questions contemporaines du développement ?

3.2. L’apport des courants « chaînes globales » à l’analyse du développement

C’est Gereffi & Korzeniewicz (1994) qui, dans leur introduction à l’ouvrage « Commodity

chains and global capitalism » présentaient l’approche « chaînes globales » comme celle

permettant de poser des questions sur les problèmes contemporains du développement qui ne sont pas aisément appréhendées dans les paradigmes précédents . Par paradigme précédent, ils entendaient évidemment la vision duale développée autour de l’approche centre- périphérie et dont la fragmentation du processus productif semblait rendre inopérantes les analyses et les préconisations (ISE, cartellisation, pouvoir de monopole), face au sous-développement et à la persistante question de l’inégale répartition des gains à l’échange Nord-Sud. Or si cette même question restait le cœur de l’approche « chaînes globales », le construit analytique et la méthodologie développée témoignaient d’un véritable changement de paradigme. L’intérêt de l’approche résidait tant dans la pertinence de son cadre analytique (synthétisée ci-après) que dans les prescriptions en vue de promouvoir l’industrialisation et le développement des pays du Sud.

a) Un construit analytique actualisé.

Sur le plan analytique, le renouveau incarné par le courant « chaînes globales » a consisté en premier lieu à associer principalement la puissance économique à la capacité de coordination du système productif, plutôt qu’à la propriété des ressources productives et à leur concentration en un lieu donné (Gibbon, 2001). Il découle de cela que l’organisation du système économique mondial doit être pensée plus en termes de réseaux que sous forme de continuité d’espaces géographiques ordonnés selon une hiérarchie régulière et à partir d’un centre (Cattan, 2006). Par sa focalisation sur l’activité des entreprises et particulièrement sur celle des « firmes pilotes » qui jouent un rôle leader dans la construction et la gestion des réseaux internationaux de production, ce courant va en second lieu leur donner plus de poids en tant qu’agents organisateurs du capitalisme que ne le ferait une approche plus orthodoxe (Bair, 2010). Ce sont alors ces « firmes pilotes » qui dans leurs stratégies d’externalisation coordonnent des chaînes séquentielles ou des réseaux complexes, d’envergure mondiale ou

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régionale, au sein desquelles elles définissent la division du travail ainsi que les conditions dans lesquelles d’autres acteurs peuvent y participer. Mais ainsi que le soulignent Gibbon & Ponte (2005), les firmes, malgré le rôle qui leur est conféré n’opèrent pas dans un vide juridique et institutionnel. Il y a une articulation entre la configuration géographique des chaînes et l’environnement socio-culturel et politico-économique dans lequel elles opèrent. Le cadre socio-institutionnel, tel que défini par Gereffi (1994) comprend particulièrement les négociations, les accords internationaux et les normes de qualité. La question centrale que pose l’analyse « chaînes globales » concerne ainsi le rôle joué par les règlementations nationales et internationales dans l’émergence de certaines formes de gouvernance de réseaux et partant de là, des conséquences théoriques et pratiques que posent ces formes.

b) Une approche méthodologique nouvelle

La mobilisation par l’analyse « chaîne globale » de quatre dimensions complémentaires a constitué une réelle avancée et cela d’autant plus le paradigme précédant ne reposait pas sur une approche méthodologie précise. C’est cette même grille multidimensionnelle, qui en conférant à l’approche « chaînes globale » son caractère multidisciplinaire (économie, gestion, sociologie, sciences politiques), en a fait la renommée.

• Les dimensions de la territorialité et de la structure input/output permettaient par

exemple une bien meilleure analyse descriptive des flux transfrontaliers et processus de production et d’échange de biens intermédiaires qui pouvaient être dissimulés par les statistiques se référant uniquement au commerce des produits finaux. Dans les travaux empiriques portant sur la mesure des gains à l’échange, les problèmes de

double comptabilisation48 mis en évidence par ce biais ont notamment conduit à

opérer un basculement décisif. Plutôt qu’une évaluation sur la base des seuls rapports de prix, la mesure des gains économiques effectifs tirés du commerce va de plus en plus se faire en termes de part de valeur ajoutée susceptible d’être captée. Le traitement sur le plan empirique de la question des termes de l’échange (centrale dans les thèses structuralistes) prend-t-elle alors au travers de cette approche une nature autre que la simple comparaison des prix de biens finaux importés et exportés.

• Il reste que, à travers la dimension de la gouvernance qui permet de décrire le

processus par lequel certaines « firmes pilotes » s’approprient ou distribuent la valeur

48 La principale caractéristique du mode de production segmenté réside en effet dans le fait qu’avant l’élaboration du produit (manufacturier) finale, matière première et produits en cours de fabrication peuvent traverser plusieurs fois les mêmes frontières. De ce fait, les biens intermédiaires peuvent se retrouver comptabilisés plusieurs fois dans les exportations mondiales, quand ils ne devraient l’être qu’une seule fois au titre de la valeur ajoutée.

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créée le long des chaînes globales, l’approche décrypte des effets de domination dans la droite ligne des thèses dépendantistes. La prise en compte concomitante du

contexte socio-institutionnel qui permet de situer les responsabilités d’institutions ou

de pays du Nord49 depuis lesquels les chaînes sont généralement pilotées peut

également apparaître comme une légitimation des actions visant à faire évoluer les

règles de fonctionnement du système économique vers plus d’équité50(lecture

politique et institutionnelle). Cramer (1999), rappelant cet héritage en était d’ailleurs arrivé à ranger l’approche « chaînes globales » dans ce qu’il appelle la catégorie des analyses essentiellement pessimistes reprochant aux firmes/économies du Nord (centre), d’empêcher la montée en gamme dans la chaîne industrielle, pour des PED exportateurs de produits de base. Mais Gibbon (2001) répondant à cette attaque avait argumenté que l’intérêt porté à l’approche par la recherche sur le développement tenait bien au contraire au fait que tout en dénonçant l’exploitation sociale au sein des chaînes, elle identifiait les opportunités offertes pour s’en sortir.

En effet, si la méthodologie de construction analytique proposée par l’approche « chaînes

globales » consistait avant tout à « retracer les flux matériels de transformation des matières

premières jusqu’à la commercialisation du produit, de façon à caractériser la séquence input-output tout en identifiant les arrangements organisationnels en matière de spécialisation et de coordination inter-firme, la géographie des chaînes et leur encastrement

socio-institutionnel (Palpacuer & Balas, 2010 p. 92) ; elle offrait aussi la possibilité

d’anticiper les évolutions stratégiques. Il s’agissait ainsi selon Gibbon (2001)d’un dispositif

heuristique relativement cohérent, permettant de réunir, au cas par cas51, les conditions

propices à l’entrée des PED dans les systèmes mondialisés de production. D’où l’attrait qu’il exerça particulièrement auprès des chercheurs dans le domaine du développement.

c) Une réhabilitation partielle du rôle de l’État

Bair (2010) croit savoir que l’accueil favorable réservé dès le milieu des années 1990 au cadre d’analyse « chaînes globales » dans les cercles académique et politique tient beaucoup au parcours de Gary Gereffi. Ses premiers travaux, sur l’industrie pharmaceutique mexicaine

49 Dans le cas du secteur textile habillement qui est de loin le plus étudié s’agissant d’illustrer la formation et la dynamique des chaînes globales, Gibbon (2003) a par exemple montré à quel point les règles fixées par les Accords Multi-Fibres avaient influées sur les stratégies d’externalisation…

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Mais le combat n’est alors plus vraiment le fait d’État du Sud, mais surtout celui d’organisation de la société civile (ONG, OP…) agissant aux échelles nationale et supranationale pour faire face au système d’exploitation sociale et environnementale promu à grande échelle au sein des chaînes globales.

51 Étant entendu qu’il n’y a pas de stratégie unique d'industrialisation sur la base de la transformation des produits primaires qui soit applicable avec succès pour tous les produits de base et dans tous les pays en développement.

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notamment, portaient en effet sur des dynamiques de développement dépendant (voir Gereffi, 1983), avant que ceux-ci prennent progressivement la forme d’études comparées des trajectoires des économies de l’Asie de l’Est et de l’Amérique latine (Gereffi & Wyman, 1990). Il en résulte que dans le contexte de globalisation, le cadre CGC qu’il proposera par la suite apparaîtra comme une sorte de synthèse permettant non seulement de rendre compte et d’analyser les effets de domination éventuels (via des firmes pilotes notamment) ; mais aussi d’accompagner suivant un schéma inspiré des expériences Est-asiatique, l’entrée des PED dans les systèmes mondialisés de production.

Rappelons à cet effet qu’alors que les théories de la dépendance avaient été élaborées à partir des expériences Sud-Américaines (CEPAL) d’industrialisation autocentrée et pilotée par un État hyper interventionniste, on a assisté, suite à l’échec des stratégies d’ISE au milieu des années 1980, à une adoption massive (sous la pression des IFI) de politiques

d’industrialisation orientées à l’exportation (ISE) dans les PED52. L’analyse proposée par

Gereffi n’oppose pas ces deux stratégies d’industrialisations. Elle interprète simplement ce basculement comme résultant du passage au milieu des années 1980 d’un système économique capitaliste de type Fordiste (production/consommation de masse et produits uniformes) vers un système post-Fordiste (marchés de niches, produits différenciés et à haute valeur ajoutée) ; système auquel les PED doivent s’adapter. Gereffi établit également un parallèle entre ce basculement dans les stratégies d’industrialisation et la transition s’opérant dans les formes de gouvernance des firmes ; des chaînes type CPP (finalité de l’ISE) laissant de plus en plus place à des chaînes de type CPA (plus compatible avec la logique de l’ISE).

Pour les PED, le principal risque de l’adoption des modèles d’ISE restait cependant celui de se retrouver enferré dans les segments à faible valeur ajoutée des chaînes de production. Tant qu’à emprunter cette voie, l’approche pragmatique développée par le courant « chaînes globales » consistait alors à offrir les outils permettant d’éclairer ces politiques et leurs conséquences. Contrairement à la logique qui a prévalu durant la mise en œuvre des P.A.S, celle prônée par l’approche « chaînes globales » va toutefois s’articuler autour d’une réhabilitation (au moins partielle) de l’État dans un rôle d’interventionnisme sélectif au

service de stratégies industrielles de long terme53. Suivant ces perspectives, une entrée réussie

52 Ce sont Taïwan et la Corée du Sud qui, les premières, ont adopté cette stratégie de croissance, au milieu des années 1960.Les succès remportés par Taïwan et la Corée du Sud convainquirent la Banque mondiale que l’ISE représentait une stratégie plus prometteuse que l’ISI (voir encadré 3.1) pour plus de détails ces stratégies). C’est ainsi qu’au milieu des années 1970, Robert McNamara, qui était alors président de la Banque mondiale, éleva cette stratégie au rang de doctrine.

53 On retrouve là une des idées forte défendue aussi par les courants néo-structuralistes dans leur

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des PED dans les systèmes mondialisés de production passe par une étude détaillée de la structure des chaînes globales et par la création d’un environnement permettant de mettre au service du développement, celle pour lesquelles on a identifié le plus grand potentiel. Il s’agit alors dans la plupart des cas, de s’insérer dans des chaînes existantes ; étant entendu que rares sont les PED capables d’opérationnaliser des chaînes de valeur axées sur leurs marchés intérieurs.

Encadré 3.1 : Les stratégies d'industrialisation.

La littérature économique distingue généralement trois types de stratégies d'industrialisation :

L'industrialisation par substitution des importations (ISI)

Cette stratégie d'industrialisation est la solution proposée par les structuralistes pour accélérer le développement des pays du Sud. L’argument : l'intégration dans un système de libre échange ne favorise pas le développement des jeunes nations car il suppose l'égalité de la puissance contractuelle des coéchangistes. Or dans le cas d'une asymétrie de développement, le libre-échange favorise la nation la plus évoluée et annihile tout effort de développement industriel à l'intérieur de la nation la plus faible. De ce fait, l'adoption d'un protectionnisme éducateur se justifie tout au moins durant la période de croissance de l'économie conduisant à ce que List définit comme l'état normal. L'objectif est d'orienter la demande intérieure vers la production nationale afin de favoriser la confédération des forces productives. L'économie nationale autocentrée peut par la suite, s'intégrer sans danger au marché mondial. Selon F. List, le protectionnisme éducateur se présente comme une thérapeutique partielle et temporaire, elle ne concerne que le secteur industriel et prend fin lorsque celui-ci atteint sa maturité.

L'industrialisation par les industries industrialisantes (III)

Cette stratégie est le fruit des théories les plus radicales du sous-développement (théorie dépendantiste). En effet, elle est censée réduire rapidement la dépendance vis à vis des pays du Nord et conduire à l'indépendance économique, financière et technologique du pays, compléments nécessaires de l'indépendance politique. C’est De Bernis qui, prolongeant les travaux de François Perroux tout en renouant avec la tradition marxiste, proposa ce concept d'industrie industrialisante. Il s’agit d’un modèle de planification d'industrialisation accélérée (privilégiant les industries lourdes d'amont) largement inspiré de l’expérience de l'URSS à l'époque de Staline. Il repose sur l'idée que pour maximiser son taux de croissance, une économie doit non seulement épargner davantage, mais produire elle-même les biens d'investissement nécessaires. L'investissement apparaît donc privilégié par rapport à la consommation. En effet, plus l'investissement dans les industries de biens de production sera important, plus la production de biens de consommation pourra être élevée dans le futur. Il s'agit en fait de sacrifier la consommation à court terme pour obtenir un taux de croissance plus élevé. L'idée de De Bernis est d'accorder la priorité au développement des industries ayant des effets d'entraînement sur les autres et d'aboutir, à terme, à l'autonomie du pays. Ces industries " industrialisantes " sont " celles qui sont capables dans un environnement daté, d'entraîner un noircissement systématique de la matrice interindustrielle et la mise à disposition de l’économie d'ensembles nouveaux de machines qui accroissent la productivité "

L'industrialisation par la substitution aux exportations (ISE)

Cette stratégie, encore appelée industrialisation par promotion des exportations, est prônée par les néoclassiques. Il s'agit de remplacer les exportations traditionnelles par de nouvelles en profitant de la dynamique des avantages comparatifs (faibles coûts de main d'œuvre, exploitation et valorisation progressive des matières premières…). Ainsi, dans un premier temps, le pays met à profit sa main d'œuvre à bon marché et docile pour produire et exporter des produits à faible valeur ajoutée (textile…). Par la suite, il entreprend une diversification par branche et une remontée de filière vers la production de biens à plus forte valeur ajoutée (biens de consommation durables, biens intermédiaires, biens d'équipement…). Selon ses

de recherches conduites par des économistes hétérodoxes (Lall, 1990 ; Wade, 2004) ceux-ci avaient en effet démontré la présence dans des pays comme la Corée du Sud et Taiwan de politiques étatiques actives et sélectives, ce que la Banque Mondiale (1993) a fini par admettre tout en émettant des doutes quant à leur impact réel et à la possibilité de les reproduire ailleurs.

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promoteurs, l'ISE présente de nombreux avantages par rapport à l'ISI : " une production à moindre coût par rapport à une industrie protégée ; " des gains en devises supérieurs à ceux procurés par la réduction des importations ; " des produits importés à moindre coût, " un accès au marché mondial permet l'extension de la production nationale et génère des économies d'échelle, des effets d'apprentissage et une compétitivité accrue ; " ce contexte favorable renforce les flux d'investissements directs étrangers (IDE) dont les effets sont favorables à la croissance. La mise en œuvre de cette stratégie suppose des politiques d'accompagnement : la libéralisation du commerce extérieur ; un système tarifaire neutre ; un code des investissements attractif pour les firmes étrangères ; une politique de change " active ".

d) Un optimisme porté par des promesses de mise à niveau (upgrading) industriel

Les travaux portant sur les prescriptions en vue de promouvoir l’industrialisation et le développement des pays du « Sud » examinent généralement les implications de la structure de gouvernance des chaînes, du point de vue des barrières à l’entrée et des possibilités de « mise à niveau » (ou de valorisation) offertes aux maillons, puis des perspectives de développement en découlant pour leurs régions d’implantation (Gibbon, 2001 ; Schrank, 2004 ; Daviron & Ponte, 2007). Mais la notion de « mise à niveau » n’est alors plus strictement entendue au sens traditionnel du terme, c’est-à-dire, comme un processus national de séquençage hiérarchique, lent, par lequel un pays parvient, par accumulation de capital physique et technologique, à faire évoluer l’ensemble de son système productif. Dans la littérature sur les « chaînes globales », le processus de mise à niveau est plus examiné sous le prisme des facilités de diffusion de l’information et des connaissances le long d’une chaîne (un secteur) spécifique (Gereffi 1999). Dans un tel contexte, la mise à niveau porte alors sur les nouvelles capacités et sur les nouveaux segments de marchés auxquels il est possible d’accéder en participant à des chaînes particulières. Elle est non seulement examinée comme pouvant survenir sous différents formes, mais surtout comme pouvant résulter à la fois d’effets d’apprentissage verticaux (via la firme pilote) et horizontaux (interactions dans les clusters). Gereffi (1999) distingue à ce sujet plusieurs stades de mise à niveau : les échelles firmes, inter-firmes, locales ou nationales et régionales. Quant aux travaux d’Humphrey & Schmitz (2002) ils conduiront à définir quatre modes de valorisation possible au sein des chaînes globales : la valorisation du processus (qui assure une transformation plus efficace des matières premières en produits finis grâce à la réorganisation des activités de production), la valorisation du produit (qui consiste à élaborer des produits plus sophistiqués dont la valeur unitaire est supérieure), la valorisation fonctionnelle (acquisition de nouvelles fonctions ou abandon d’anciennes afin d’accroître la spécialisation des activités) et la valorisation intersectorielle (application des compétences acquises au sein d’une chaîne vers une autre). Mais ainsi que le souligne Gibbon & Ponte (2005), l’accent est plus souvent mis sur la notion

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d’ « upgrading » fonctionnel qui dépend fortement de la forme de gouvernance ; d’où l’importance accordée à cette dimension dans la littérature. Quels sont les principaux acteurs des chaînes, quelles formes prennent leurs structures de gouvernance et quelles sont les opportunités de création de valeur ajoutée eu égard au positionnement au sein des chaînes ? Telles sont alors les principales questions auxquelles cette littérature s’efforce de répondre.

À partir de la distinction établie par Gereffi (1994) entre chaînes pilotées par les producteurs (CPP) et par les acheteurs (CPA) il est par exemple apparu que les barrières à l’entrée pour les entreprises des pays les moins avancés étaient plus élevées dans les CPP ; alors que les secteurs intensifs en main-d’œuvre et peu capitalistiques (CPA) constituaient une voie d’industrialisation plus accessible. Dans ces secteurs, un noyau dur de fournisseurs de premier rang, très contrôlé par le donneur d’ordre (firme pilote), prenait en charge les activités relativement rémunératrices tandis que les fournisseurs de second rang assurant les activités à plus faible valeur ajoutée étaient moins stablement insérés dans la chaîne (Palpacuer, 2000).

Suite aux critiques portées contre la distinction CPP, CPA, Gereffi & al. (2005) ont proposé la

nouvelle grille distinguant cinq formes de gouvernance qui, comme nous l’avons déjà mentionné, a également été critiquée. Or si à chaque forme de gouvernance correspond des implications de mise à niveau particulière (Humphrey & Schmitz, 2002), il est primordiale de les caractériser. L’analyse proposée à ce propos par Fold & Larsen (2008) à la suite de Fold (2002), Gibbon (2001, 2003) puis Gibbon & Ponte (2005) nous semble alors particulièrement intéressante. Elle consiste à partir de l’idée que la tendance est à la généralisation des formes de coordination de type CPA ; tout en introduisant des nuances dans la notion d’ « Acheteurs ». Dans le cadre CGC traditionnel la notion a été utilisée comme une désignation commune pour les détaillants, les distributeurs et les enseignes de grande marque qui sont positionnés juste en face du marché de la consommation. Les auteurs précités considéreront toutefois que des logiques d’ « Acheteurs » peuvent aussi se développer à différents segments des chaînes globales ; à l’initiative d’entreprises qui de ce fait deviennent très influentes au sein des chaînes dans lesquelles elles sont impliquées. Il est alors possible de voir émerger des structures de gouvernance de forme multipolaire avec deux types (voir