• Aucun résultat trouvé

L’alignement entre objectifs stratégiques et compétences développées

Le fit stratégique : étude du désalignement entre les objectifs stratégiques et les infrastructures organisationnelles

11. L’alignement entre objectifs stratégiques et compétences développées

Dans ce premier point, il s’agit d’aborder l’alignement entre les objectifs stratégiques du PFRH et les compétences et savoirs développés (figure 4-2).

Figure 4-2 : Étude de l’alignement vertical entre compétences et savoirs et objectifs stratégiques du PFRH

Source : auteur de la thèse

L’accompagnement du PFRH a fait l’objet d’un véritable dispositif tant sur le plan de la communication que sur celui de la formation. Les actions mises en place pour accompagner le PFRH ont essentiellement porté sur les aspects techniques de certaines pratiques en particulier. Sur le plan opérationnel, les dispositifs mis en place par l’organisation pour accompagner les managers sont reconnus.

Dans ce processus d’accompagnement en compétence, la DRH tente de mettre en place une analyse des besoins réels exprimés par le terrain pour répondre plus précisément aux attentes.

« Du coup, cette année, lorsqu’on a relancé les entretiens professionnels, on leur a fait la même offre de services que les autres territoires. Par contre, on a bien intégré qu’eux, ils avaient une longueur d’avance. Donc pour eux, on n’a pas déployé la même chose. On a déployé des ateliers plus courts, sur une demi-journée, spécifiquement pour les responsables d’équipe, pas pour les directeurs d’agence et on a traité spécifiquement l’entretien professionnel. On a donc fait plus court et ensuite, je leur ai proposé de travailler uniquement les points qui leur posaient question sur les EPA. Mais on voit bien que ce qu’on a fait l’année dernière avec eux, ça a généré tout un niveau d’acquis qu’on n’avait pas forcément sur les autres territoires, ce qui fait, que cette année, on n’a sans doute pu aller plus vite et plus loin », DR09-DRH.

La prise en compte par la DRH des besoins réels permet de rendre l’accompagnement plus efficace en développant les compétences RH de manière ciblée. Par ailleurs, cela contribue à renforcer son efficacité perçue auprès des managers.

La formation mise en place couvre un spectre large des compétences de managers. Les compétences plus globales ayant trait à la posture managériale et la manière dont les nouvelles responsabilités pouvaient les affecter ont également fait l’objet d’un accompagnement

« La plus-value qu’on pourrait avoir ? Alors les ateliers RH ça biaise ça, c’est-à-dire qu’on a sorti des EPA, on a enlevé les noms, on a fait des photocopies et on travaille sur un regard croisé : “qu’est-ce que vous pensez de cette EPA ?” ; “Ah bah il manque tel élément, je trouve que les rubriques sont redondantes ”. Enfin voilà, pour leur faire prendre conscience de, comment du quanti on passe au quali. C’est ce que j’ai fait lundi toute la journée. Je leur ai dit ce que c’était un EPA, comment il était complémentaire de l’EP… ils ont été très sages. 11 managers, 11 directeurs d’agence. Là, je voudrais quelques fois qu’ils soient un peu plus remontés », DR06-DRH.

La diversité des dispositifs mis en place et leur caractère interactif ont été mis en avant par les managers de proximité pour souligner l’intérêt de ces outils dans leur montée en compétences. Toutefois, malgré l’efficacité des dispositifs, ces derniers sont jugés comme étant ponctuels et spécifiques à un contexte bien particulier. Certains managers soulignent que l’absence d’une politique globale de développement et de renforcement des compétences managériales empêche la progression des managers et notamment ceux qui sont situés à des niveaux supérieurs tels que les directeurs territoriaux. Ces derniers semblent laissés pour compte des politiques de développement de compétences mises en place.

« Moi je me dis, souvent : “Mais c’est incroyable, on est dans une boutique où plus on grimpe dans le management et puis on se considère hors-champs de tout le système de contrôle et de développement”. C’est une connerie. Une connerie monumentale. Imaginez que tous mes RE progressent, tous mes responsables d’équipe progressent fond et forme, que tous les directeurs progressent fond et forme et que moi je reste toujours au même stade. Alors peut-être que j’étais en avance sur eux il y a deux trois ans, et que je pouvais me permettre de leur donner des leçons puis maintenant ça se trouve je suis complètement à la ramasse. Donc moi j’étais demandeur que ce même travail soit réalisé par les RH en analysant 3, 4 entretiens de chefs de territoire. Il y a des moments aussi, on besoin de réinterroger nos pratiques. Moi j’entends des personnes qui nous disent la même chose depuis 10 ans tout le temps. Pourtant les choses ont évolué ont bougé, mais ils ne se réinterrogent jamais, ils ne se questionnent pas, ils ne se remettent pas en cause. En management, il faut avoir des certitudes, mais des certitudes éclairées par une remise en cause préalable quoi », DT05-Direction territoriale.

De plus, sur le champ de la GRH, des singularités émergent et font tout de même état d’un accompagnement incomplet. Pour des champs nouveaux ou particulièrement sensibles, la formation des managers est un élément central du processus de partage. C’est le cas pour l’entretien professionnel dont l’objectif est d’aborder l’orientation professionnelle des collaborateurs et qui est une mission nouvellement partagée avec les managers.

« Est-ce que nous sommes accompagnés sur l’entretien professionnel annuel et l’entretien professionnel ? Oui. Après peut-être pas assez en profondeur, sur l’entretien professionnel notamment. Parce qu’on touche au conseil en évolution professionnelle, donc là on ne s’estime pas assez outillés », MA018-Manager de proximité.

La friction qui émerge de la perspective de ces deux résultats peut trouver des explications diverses : une hétérogénéité dans l’accompagnement proposé aux différents managers, des problématiques plus globales et qui empêchent l’instauration de relations interpersonnelles saines. Quoi que puissent être les causes de ce décalage, la mise en place d’une évaluation a posteriori des effets des dispositifs d’accompagnement serait susceptible d’en limiter l’ampleur.

Le dispositif d’accompagnement du groupe ABC prévoit la mise en place d’interlocuteurs sur le terrain afin de favoriser le transfert d’informations, tant ascendantes que descendantes, entre la base opérationnelle et la DRH. Cette fonction d’intermédiation n’est pas clairement identifiée dans l’organigramme de l’organisation. Soit elle prend la forme d’une ressource à part entière à travers la fonction de correspondant RH, soit elle est incluse parmi d’autres responsabilités du chargé de mission. Ces deux types d’interlocuteurs ont pour principale mission d’assurer le relai pour désengorger les services de la DRH et de fournir un premier support aux managers. Or, cette mission est entravée par l’accès insuffisant à l’information RH nécessaire et le manque de professionnalisation des personnes.

« Les grandes orientations RH d’ABC actuellement, c’est très vaste comme question… Moi je vois plus par le petit bout de la lorgnette. C’est vrai que les grandes orientations maintenant ça me passe un peu à côté. Autant, quand j’étais directeur d’agence, ce sont des choses que j’intégrais, maintenant, il y a une énorme différence au niveau de l’accès à l’information. C’est-à-dire que quand on est manager, on a accès à l’espace manager de l’intranet et quand on ne l’est pas, et bien, on ne l’a pas ; y compris sur la fonction RH. Il y a des trucs dont j’aurais besoin, si c’est dans l’espace manager je n’ai pas. Donc les grandes orientations tout ça j’avoue que je ne m’y intéresse plus trop. Je vous ai dit, maintenant je suis sur des trucs très opérationnels, très concrets. Les orientations n’ont aucune incidence sur mon

travail. Du coup, je m’y intéresse moyen. Donc les orientations RH je ne les connais pas vraiment. Ça ne m’intéresse pas parce que je ne peux rien en faire », DT007-Correspondant RH.

L’absence de correspondance entre les besoins métiers de ces correspondants RH et leurs missions RH crée des situations où ils ne sont pas en mesure de développer leur rôle. Bien conscients de cette dissonance, les collaborateurs, frustrés, viennent à se désintéresser de leurs activités et limitent leur implication. Le groupe se retrouve alors à employer des collaborateurs qui ne peuvent assurer leurs missions. Cette situation, bien que spécifique à la position du correspondant RH, montre comment un désalignement entre objectifs et moyens mis en œuvre peut créer des conséquences en matière de motivation, mais aussi des implications directes sur les retours sur investissements. Les correspondants RH et les chargés de mission sont déployés pour accompagner les managers dans leurs responsabilités RH, mais dans les faits ces derniers sont amenés à recourir directement à l’appui des RH pour avoir un soutien fiable.

Ces résultats mettent donc en évidence des besoins de compétences qui sont partiellement satisfaits. Il apparait que le niveau de formation et d’accompagnement mis en place participe au développement de capacités de GRH. Certains éléments mènent toutefois à la conclusion que le développement des compétences ne semble pas s’effectuer de manière efficace au vu de l’objectif de participation universelle des managers dans les activités RH. D’une part, une analyse géographique montre des disparités sur l’appropriation des savoirs en matière de GRH. Ce résultat s’explique d’abord par le fait que les formations tendent à être proposées d’une manière homogène par la DRH, ce qui exclut la prise en compte des besoins individuels ou géographiques dans la montée en compétences. De plus, l’existence d’une structure décentralisée d’accompagnement par la mise en place de chargés de mission ou de correspondants RH s’accompagne souvent par une fuite de contrôle sur le soutien apporté aux managers. D’autre part, il apparait que certains champs sont particulièrement sensibles et pourraient demander un renforcement des compétences ou une approche d’accompagnement différenciée. C’est le cas de l’entretien individuel qui est un champ nouveau. Son déploiement dans le cadre des responsabilités des managers nécessite la maîtrise de compétences spécifiques liées à l’analyse du projet professionnel et au conseil en orientation professionnelle. Les difficultés rencontrées par les managers concernent tant le processus de participation aux activités (par le déploiement de pratiques jugées correctes du point de vue de l’organisation) que la sphère de la prise de décisions. Effectivement, certains champs sont assortis de contraintes qui les rendent particulièrement techniques et nécessitent un niveau de connaissance rarement détenu par les managers. C’est le cas des champs de la promotion et de

la gestion des temps qui demandent une connaissance des lois et textes réglementaires statutaires des deux populations. Le développement incomplet de leurs connaissances sur cet aspect les amène à ajourner leurs décisions ou à solliciter l’avis de pairs et spécialistes RH pour éviter les décisions problématiques.

Ces observations mettent en évidence que la prise en compte approximative des besoins réels des managers mène la DRH à développer des pratiques d’accompagnement qui ne leur permettent de ne répondre que partiellement à l’objectif de PFRH. Ceci aboutit alors à une difficulté pour les managers de participer aux champs RH prévus dans le cadre de leur mandat. Il faut toutefois noter que ces dysfonctionnements en matière de développement de compétences semblent générer des effets amoindris sur la participation effective des managers sur certains champs. Une explication pourrait alors être avancée : le développement de pratiques permettant de compenser ces lacunes. À ce titre, il est possible de mentionner le soutien des experts RH qui comblent les difficultés rencontrées par les managers en proposant un service d’assistance réactif. Cela pourrait alors constituer un effet de compensation de l’alignement stratégique par lequel l’organisation comblerait des lacunes par la mise en place de pratiques correctives. Les désalignements entre les compétences et savoirs et les objectifs de PFRH semblent alors affecter les capacités. Ces résultats sont présentés dans le tableau 4-1.

Tableau 4-1 : Agrégation des résultats d’alignement entre les compétences et savoirs et les objectifs du PFRH Domaine interne Domaine externe Niveau de

désalignement Effet sur l’AMO

Compétences et savoirs

Transfert de

responsabilités Fort

Le manque de prise en compte des besoins spécifiques des champs et des individus rend le niveau de capacités hétérogènes (Capacités) Compétences et savoirs Prise de décisions Médian Le manque d’accompagnement

influence les capacités de prises de décision sur les champs promotion et gestion des temps (Capacités)

12. L’alignement stratégique entre objectifs stratégiques et infrastructures

Outline

Documents relatifs