• Aucun résultat trouvé

Ability : les capacités individuelles comme variables d’action

Capacités, Motivation et Opportunités : détermination des antécédents

11. Ability : les capacités individuelles comme variables d’action

Le concept de « ability » peut être appréhendé comme la capacité naturelle ou acquise permettant à un individu de développer une tâche convenablement (Rothschild, 1999). Elle recouvre des attributs humains tels que les compétences, l’expérience, les attitudes et le savoir initial cohérents avec l’accomplissement de ces tâches.Bos-Nehles et al. (2013) précisent cette définition en l’appliquant au champ de la GRH. Les capacités sont les « compétences en lien avec la GRH et nécessaires pour mettre en place des pratiques de GRH de manière satisfaisante sur le champ opérationnel » (p. 864). L’approche présentée ici est plus restrictive puisqu’elle prend pour objet l’étude les connaissances en action à travers le concept de compétences. Dans leurs travaux, les auteurs étudient leur impact sur la performance au travail. Cette dernière est alors appréhendée comme le degré avec lequel les managers produisent les actions attendues dans le cadre de leurs attributions RH et sont satisfaits de ces actions produites.

Bos-Nehles et al. (2013) retiennent deux types de capacités fondamentalement en lien avec la mise en place du PFRH avec les managers :

- les connaissances et compétences relatives aux aspects légaux et pratiques de GRH ; - et les compétences concernant le management du personnel

Les différentes approches du concept de capacités font donc intervenir deux caractéristiques principales. La première relève du fait qu’il s’agit d’éléments intangibles directement liés au capital de savoirs détenus par l’individu et dont la mise en action lui permettrait d’agir en faveur d’un comportement visé. Les capacités sont donc envisagées comme des ressources permettant l’action. Le deuxième élément qu’il convient de retenir porte sur la nature des capacités qui peuvent être différentes et concerner des aspects spécifiques de la GRH, mais également du management d’équipe. Il semblerait effectivement que le partage de responsabilités RH avec les managers affecterait leur position en tant que responsables d’équipe et nécessiterait de réquisitionner les compétences en matière d’encadrement (Bos-Nehles et al., 2013).

Le développement de compétences en matière de GRH est rendu possible par différents moyens complémentaires. Deux d’entre eux sont particulièrement mis en évidence dans les travaux relatifs au PFRH. Le premier relève du processus de formation permettant l’acquisition de connaissances cibles et leur mise en action dans l’organisation du travail définie. Le second repose sur l’apprentissage par l’expérience et notamment par « l’approche partenariale » dans laquelle managers et spécialistes déploient conjointement certaines pratiques (Whittaker et Marchington, 2003, p. 255).

111. L’acquisition des capacités par la formation

D’un point de vue organisationnel, la formation constitue un facteur central de succès de PFRH. D’une part, les investissements réalisés par les organisations dans l’effort de formation seraient un indicateur de volonté de partage (Loubes, 1998). D’autre part, il apparait que les difficultés relatives au déploiement de la formation constitueraient le principal frein au PFRH dans ces entités (McGovern et al., 1997). Pour cause, les nouvelles attributions RH induisent un changement dans l’organisation du travail des managers et nécessitent un questionnement sur l’état des connaissances et des compétences à développer pour mener à bien leur nouveau mandat. Pour autant, ces nouvelles attributions seraient considérées par les responsables d’équipe comme tout à fait naturelles puisqu’elles constitueraient un prolongement logique de la fonction managériale (Cunningham et Hyman, 1999). Cette perception serait alors d’autant plus prégnante que ces derniers ont l’impression d’être de bons managers. L’auto-efficacité perçue dans le champ managérial et l’association mentale des attributions RH à ce dernier permettraient de neutraliser le sentiment de complexité des pratiques RH. La prise en main des nouvelles attributions serait alors facilitée par le fait que les compétences requises sont communes avec celles développées dans le cadre de la fonction d’encadrement. Dans une étude

de cas mobilisant le ressenti de 13 managers, Whittaker et Marchington (2003) confirment que les managers ont tendance à accepter facilement leurs nouvelles attributions RH et ne se sentent pas particulièrement en difficulté en ce qui concerne leur niveau de maîtrise des connaissances nécessaires.

Mais ce résultat doit toutefois être nuancé en deux points. Premièrement, il n’est pas valable pour l’ensemble des champs de GRH. Ceux qui demandent une expertise importante du fait de la prédominance d’aspects réglementaires ou d’une complexité formelle (e.g. la sécurité au travail, l’évaluation au travail, la gestion des contrats) ne sont pas maîtrisés. Pour cette raison, les managers refusent d’emblée de les accepter dans leur périmètre fonctionnel. En effet, dans une analyse coûts-bénéfices, ces deniers conçoivent leurs nouvelles attributions comme le moyen d’enrichir leur travail et de renforcer le lien avec leurs collaborateurs. Parallèlement, ils opèrent un choix sur les activités qui ne sont pas trop consommatrices de temps et d’efforts d’apprentissage. Il semblerait également que ces arbitrages en fonction du niveau d’expertise requis soient également fondés sur des éléments davantage politiques. Les managers ne veulent pas voir leur métier comportant une dimension technique et opérationnelle importante se diluer et faire d’eux des « consultants internes » (Whittaker et Marchington, 2003, p. 254). Ce résultat semble converger avec les développements précédents mettant en évidence les choix organisationnels comme facteur segmentant des pratiques selon leur nature. Ici, la segmentation semble davantage relever de perceptions individuelles sur la capacité à maîtriser certains types de pratiques.

Un deuxième point de vigilance à porter concernant ces observations tient aux caractéristiques structurelles de la population étudiée. Effectivement, la recherche de Whittaker et Marchington (2003) porte sur des managers expérimentés (senior managers) dont le temps passé au sein de l’organisation est une ressource leur permettant plus facilement d’accepter de nouveaux changements et leur a même permis de développer antérieurement ces compétences de GRH de manière informelle.

Mais la formation des individus constitue un enjeu stratégique tant sur le plan organisationnel qu’individuel. Ceci pourrait expliquer qu’elle soit abordée d’une manière contreproductive. L’impératif d’optimisation des ressources au niveau de l’organisation et la logique coûts- bénéfices intégrée par les managers amènent les parties à faire des arbitrages potentiellement décalés avec l’objectif de PFRH.

Au niveau des acteurs, McGovern et al. (1997) montrent que les différentes restructurations et la perception de changements continus poussent les managers à adopter des attitudes de résistance face au développement de nouvelles compétences. Celle-ci s’inscrit plus globalement dans un comportement de rejet de leurs nouvelles responsabilités. Dans ce cadre, les responsables d’équipe mettent en place des initiatives pour rediriger le contenu des formations en faveur de compétences qu’ils maîtrisent déjà, ou du moins qui en sont proches. Sur le plan organisationnel, les auteurs soulignent également l’existence de contraintes qui empêchent, de manière consciente ou involontaire, le processus de développement des compétences en faveur d’un PFRH. Deux sources de pressions sont alors identifiées. Premièrement, le renforcement institutionnel mène les organisations à être centrées sur l’objectif de performance productive. Les efforts de formations pour soutenir cette finalité pourraient alors être surreprésentés dans les choix de développement des compétences effectués. Deuxièmement, les auteurs évoquent les logiques temporelles concurrentes. Ils montrent que la focalisation sur des projets de court terme implique une faible incitation de l’organisation au développement RH. Cet effet structurel pourrait alors influencer le développement des compétences RH qui ne font pas partie des priorités. Cette concurrence des orientations a également été soulignée par Loubes (1998). Dans ses travaux, l’auteur montre que la formation constitue un véritable enjeu basé sur la gestion de la divergence entre les besoins stratégiques de l’organisation et les attentes opérationnelles des collaborateurs. La concurrence de fait qui existe entre les logiques stratégique et opérationnelle crée des configurations où le développement des compétences RH est rendu difficile. Cette observation est d’autant plus prégnante que les contenus et les modalités des formations sont intégrés dans des plans de formation. Ces documents centralisés au niveau des sommets décisionnels intègrent l’ensemble des besoins organisationnels et réalisent une hiérarchie des priorités.

112. L’acquisition des capacités par la relation partenariale

Le rôle des spécialistes RH a été mis en évidence comme un facteur central du partage effectif de la FRH (Whittaker et Marchington, 2003). La disponibilité et le support de ces derniers permettraient de rendre les responsables d’équipe autonomes sur les activités où ils agissent seuls. La définition des modalités d’intervention des spécialistes semble alors être un élément critique du PFRH puisqu’il réduirait le risque de dépendance de certains managers à l’appui de la DRH. L’incidence du soutien des gestionnaires RH a également été soulignée dans des travaux mettant en évidence le manque de confiance en soi ressenti les par managers concernant

problématique est un moyen de se protéger et de limiter les risques psychologiques liés aux erreurs potentielles. Ce constat est particulièrement saillant dans certains champs de la GRH tels que la gestion disciplinaire où le recours aux spécialistes RH permet à la fois de protéger la relation du manager avec son équipe, mais aussi de réduire les risques liés à de mauvaises prises de décisions (Hunter et Renwick, 2009). Cette façon d’agir aboutirait à transformer les managers en de véritables « clients internes » (p. 457). De cette manière, les managers se sentent plus confiants pour mettre en place les pratiques RH. Ils recourent alors massivement à la disponibilité et la flexibilité des spécialistes, profitant de ce que Trullen et al. (2016) désignent comme une « une politique de la porte ouverte » (p. 457). Plus particulièrement, la présence physique des spécialistes RH sur les sites de production permettrait aux managers de se former par les échanges et les questionnements, mais elle est aussi l’occasion de déployer, de manière plus sécuritaire, des pratiques qu’ils n’avaient pas pu ou voulu aborder auparavant. Le soutien des experts dans le processus de formation peut prendre d’autres formes dont la manière la plus basique est de fournir des supports matériels comme des manuels ou des boites à outils (Trullen et al., 2016). En général, ces supports fournissent une documentation technique et des indications sur la manière d’opérer. Il est également commun de mettre en place une formation avant le lancement d’une nouvelle pratique. La transmission des supports permettrait de constituer un élément tangible sur les enseignements techniques qui ont été dispensés, mais aussi, et surtout, ils permettent de matérialiser les interventions physiques et plus globalement le soutien apporté par les spécialistes. En ce sens, ces documents constitueraient un élément de preuve en cas de remise en cause de l’accompagnement proposé par le passé. Il convient toutefois de souligner que la mise à disposition de supports peut aboutir à des résultats contreproductifs dès lors qu’ils sont perçus comme inutilement complexes ou trop exhaustifs. La complexité perçue du support peut effectivement aboutir à l’idée que les documents sont distribués de manière instrumentale dans une optique de justification par les RH de leur intervention (Trullen et al., 2016). Cette perception, potentiellement néfaste sur l’attitude des managers en situation de PFRH, est d’autant plus forte que les échanges physiques avec les spécialistes RH sont limités. La mise en place des documents devrait également s’accompagner d’une intervention réelle par la DRH pour montrer que ces supports s’inscrivent dans une véritable politique de soutien aux agents du réseau opérationnel.

Les travaux présentés dans ces deux premiers points suggèrent finalement que la formation et la relation partenariale sont deux composantes intervenant dans le développement des capacités (figure 2-2).

Figure 2-2 : Synthèse des déterminants des capacités de partage de la FRH

Source : auteur de la thèse

12. Motivation : la motivation externe comme antécédent du partage de la

Outline

Documents relatifs