• Aucun résultat trouvé

Le choix d’un outil fonctionnellement rigide pour une organisation en mutation

Le système d’information ressources humaines : impacts des caractéristiques fonctionnelles sur l’état des processus réels

21. Le choix d’un outil fonctionnellement rigide pour une organisation en mutation

211. Le choix du progiciel

Avant 2009, les entités A et B, détenaient leur propre SIRH. Celui de l’entité A sera délaissé au profit de celui de l’entité B qui est jugé plus en accord avec les changements stratégiques induits par la fusion : l’évolution vers une population essentiellement composée de collaborateurs de droit privé. Le progiciel de l’entité A se compose alors de la solution « HR Access », largement utilisée pour la gestion des ressources humaines. L’entité B, quant à elle, utilise la solution People Soft version 8.8. Ce progiciel est pensé et configuré pour une utilisation par le département RH et non pour une cible de managers. Il a pour objectif de permettre la communication entre les cellules qui composent la DRH.

À l’issue de l’année 2009, le choix a été fait de garder People Soft pour la gestion du personnel d’ABC. La justification du choix de ce logiciel réside essentiellement dans son adaptation préalable pour la gestion de salariés de droit privé. La mise en place de l’outil est utilisée pour affirmer la naissance de la nouvelle entité ABC.

En 2012, une montée en version est entreprise afin d’opérer une homogénéisation de la saisie des informations ressources humaines. L’outil est développé en plusieurs lots : la paie et la gestion administrative, puis la formation et enfin le développement des compétences. L’utilisation de People Soft est marginale au sein d’ABC. Les unités fonctionnelles étant indépendantes, seules celles qui le souhaitent en font usage. Progressivement, une formation des managers est mise en place afin de développer son utilisation par cette population.

La mise à jour s’accompagne dans le même temps, d’une réflexion sur la refonte de certains processus de ressources humaines. La direction assoit People Soft comme le seul outil de saisie des informations ressources humaines en l’établissant comme socle du pilotage national. Cet outil est articulé à différents modules par la mise en place de liaisons fonctionnelles permettant l’intégration des informations entre les champs administratifs et de la paie.

212. L’organisation de l’équipe projet et le choix de l’ERP

Le progiciel People Soft est la propriété d’Oracle, éditeur américain de solutions informatiques. Le processus d’intégration est, quant à lui, réalisé par ADP, un prestataire externe d’Oracle. ADP se charge donc de la mise en place ainsi que de la maintenance et de l’assistance a posteriori. La collaboration avec un prestataire disposant de l’expertise technique implique une dépendance en cas de rupture de la continuité de service.

Au sein d’ABC, la définition du cahier des charges est déléguée à une équipe projet composée essentiellement de professionnels de la DRH, mais aussi de celui des systèmes d’information. Cependant, la gestion du budget de développement est confiée à la direction des systèmes d’information (DSI). Ainsi, comme le présente la figure 3-4, les décisions et requêtes effectuées par l’équipe projet, doivent passer par la DSI afin d’être validées. Par la suite, les requêtes sont envoyées à ADP qui les traitent directement ou sollicite Oracle si nécessaire. De manière parallèle, lorsque des informations doivent être transmises à l’équipe projet, elles passent nécessairement par la DSI. Cette dernière occupe un véritable rôle de donneur d’ordre.

La maîtrise d’ouvrage est donc composée de deux niveaux directement sous contrôle de la direction générale : l’équipe projet à dominante RH et la DSI en commanditaire. En 16 mois, le contact direct du prestataire ADP par l’équipe projet n’a lieu qu’à deux reprises. L’accompagnement et la résolution des problématiques sont directement opérés par la sollicitation de la DSI.

Figure 3-4 : Chaine de communication entre les acteurs du projet SIRH

Source : auteur de la thèse

213. Le déploiement de People Soft

Sur la base des orientations de la DSI, l’outil est utilisé selon une stratégie dite « Big Bang ». Cette stratégie se caractérise par la mise en place à un instant précis, de la totalité ou la quasi- totalité des modules composant la solution. Ce choix peut s’expliquer par les difficultés techniques et organisationnelles auxquelles aboutissait l’ancienne version et donc, par la nécessité d’avoir un système rapidement opérationnel. Ainsi, l’ensemble des modules est déployé de manière uniforme sur tous les sites au mois de septembre 2013, sauf les modules Libre-Service Employés et Libre-Service Managers qui sont les deux briques soutenant la gestion opérationnelle des activités. Ce décalage temporel s’explique par la volonté de vouloir assurer un fonctionnement correct des fonctionnalités de base avant d’ouvrir l’accès du progiciel à l’ensemble des salariés. Pendant cette période de tests, de nombreux dysfonctionnements techniques sont recensés dont une partie reste inexpliquée. Les deux modules sont finalement intégrés un mois après le début du déploiement.

Le déploiement et l’accompagnement sont opérés de manière pyramidale. Dans un premier temps, les membres des fonctions supports sont formés à l’outil afin de les sensibiliser aux fonctionnalités et vocations de cette nouvelle version. La communication s’axe alors sur l’utilité des modules qui dépassent le périmètre historique de la gestion administrative et de la paie. Des interlocuteurs sont identifiés à des niveaux fonctionnels et identifiés comme des relais. Ils ont pour principale fonction de s’assurer de l’appropriation des innovations et de faire remonter les problématiques constatées. Ainsi, trois niveaux émergent de cette organisation (figure 3-5) :

l’équipe projet, les directions régionales et les agences où sont présents une grande partie des utilisateurs finaux.

Figure 3-5 : Acteurs du déploiement opérationnel de l’outil

Source : auteur de la thèse

Afin d’accompagner la mise en place du progiciel, des ateliers d’animation sont mis en place au niveau de l’équipe de pilotage afin d’assurer la coordination et la montée en compétences de ses membres. Ces échanges sont suivis par l’ensemble des interlocuteurs de la direction régionale qui réalisent des vidéos afin de rappeler le cadre stratégique dans lequel s’inscrit le SIRH. Ensuite, des formations physiques au sein des DRH régionales sont proposées afin de permettre à ses membres de prendre en main l’outil et de s’approprier les particularités techniques. Par la suite, ces derniers déploient l’outil au niveau opérationnel. Pour ce faire, les correspondants RH sont des relais de communication formés et chargés de la transmission des éléments techniques relatifs à l’outil et la remontée des problématiques rencontrées sur le terrain.

L’outil a été amené comme une solution permettant aux managers de trouver plus rapidement et de manière autonome les informations utiles dans le cadre de leur management.

Accompagnement des utilisateurs à People Soft

Les régions ont déployé des sessions de formation en groupes pour l’accompagnement théorique et pratique des managers. Ces espaces d’échanges ont pour vocation de transmettre

les particularités techniques de la nouvelle version, mais également de faire le lien entre les fonctionnalités ouvertes et les processus métiers correspondants.

Afin de permettre d’identifier et de suivre les difficultés de prise en main de l’outil, divers indicateurs sont créés par l’équipe projet. Ils permettent de mesurer le niveau d’urgence et d’importance de ces dysfonctionnements et de les remonter avec précision à la DSI. En complément de cela, une réunion mensuelle est organisée au sein de la direction générale afin de réunir l’ensemble des acteurs du déploiement pour évoquer les points critiques de la mise en place du progiciel.

Lorsqu’un utilisateur est confronté à une difficulté lors de la manipulation du progiciel, il peut consulter le guide qui lui a été communiqué. Ce document décline l’utilisation de l’ensemble des fonctionnalités ouvertes dans People Soft. Par ailleurs, le département RH se positionne en appui pour répondre aux difficultés de prise en main.

214. La définition du cahier des charges

Lors de la fusion des deux entités en 2009, la version 8.8 du progiciel People Soft est déployée. Elle s’inspire largement du progiciel de gestion en place dans l’entité A, celle employant essentiellement des salariés contractuels. Ce choix est justifié par l’anticipation de l’accroissement de cette catégorie de personnel dans le futur.

De mai 2012 à septembre 2013, une nouvelle adaptation de l’outil est opérée dans le cadre du « Plan Stratégique 2015 ». La mise en place de la version 9.1 s’inscrit dans le cadre du chantier de déconcentration de la fonction ressources humaines et dans une optique de simplification des actes métiers des salariés. People Soft est décrit comme un support du changement. Tel qu’il a été présenté, il doit permettre la digitalisation de l’offre de services RH afin de rendre les utilisateurs acteurs de leur environnement professionnel.

Le choix d’intégration d’une nouvelle version est motivé par l’amélioration technique de l’interface, mais aussi par la volonté de refondre les processus RH. Lors de cette étape, une étude du fonctionnement de l’activité est faite pour voir comment les adaptations à l’outil peuvent s’opérer. Une documentation est produite afin de représenter l’évolution souhaitée des processus. D’autre part, la DSI définit le cahier des charges afin que l’outil proposé intègre les spécificités permettant une cohérence par rapport à l’organisation. Lors de la définition du cahier des charges, le respect du budget constitue la contrainte principale.

Par ailleurs, la DSI prend la décision de privilégier l’intégration fonctionnelle des modules en interne et donc de n’en externaliser aucun. L’ERP est personnalisé de façon à répondre aux besoins fonctionnels de l’organisation. Par rapport au produit proposé initialement par le développeur, plus de 20 % de l’architecture globale du système est modifiée.

Lors de la définition du cahier des charges ABC demande l’intégration de l’historique personnel de l’ensemble des salariés. Cette commande est partiellement satisfaite. Alors que les informations des employés issus de l’entité B sont disponibles, celles des agents de l’entité A son inaccessibles, et pour cause, leur entité historique d’appartenance n’utilisait pas de SIRH informatisé. ABC doit donc accepter de n’avoir dans sa nouvelle version de People Soft que les informations qui ont pu être récupérées oralement ou par l’intermédiaire de documents écrits. Cette carence informationnelle est amenée à disparaitre naturellement avec le départ progressif des collaborateurs concernés. Ce sont essentiellement les données relatives à la formation individuelle et à la pénibilité du travail qui n’ont pas pu être retracées. Dans ce cadre, des employés du département de gestion administrative sont chargés de reconstituer ces informations.

En ce qui concerne les habilitations et l’ergonomie, l’outil ne peut pas être personnalisé localement. L’ensemble de ces éléments sont définis au niveau national et seule la DSI détient la capacité de faire évoluer le système. Ces évolutions ont lieu sur demande des prescripteurs (DRH), des référents métiers ou des prescripteurs de la stratégie globale de l’entreprise. Lorsqu’un besoin d’évolution s’exprime, il doit être communiqué à la direction régionale qui, ensuite, transmet une requête à la direction métiers pour validation de la demande. Les habilitations sont définies de manière restreinte selon le profil de l’utilisateur. Cette caractéristique est fondée sur la volonté de sécuriser l’accès à l’information et d’en limiter les risques d’utilisation inappropriée. Initialement, l’organisation souhaitait opérer une correspondance entre les habilitations informatiques et les niveaux hiérarchiques. Comme les managers n’avaient pas accès aux informations nécessaires dans le cadre de leur fonction, une nouvelle définition des habilitations est mise en place en mai 2015. Une nouvelle configuration permettant de déterminer les accès en fonction des besoins opérationnels a vu le jour.

215. La composition du SIRH

Le produit People Soft est un produit américain initialement configuré pour la gestion de la paie américaine. Comme il s’est avéré impossible d’adapter la solution aux spécificités françaises, un module de gestion administrative et de la paie (Zadig) est greffé à l’infrastructure du

progiciel. Par la suite, des connexions sont créées entre les modules initiaux de People Soft et le celui de la paie développé par ADP. Parallèlement à ces deux solutions, ABC utilise un progiciel spécifique pour la gestion de la paie : Horoquartz. Tous les 7 du mois, les informations validées dans cette dernière solution sont transférées dans Zadig afin de permettre la mise en paiement des salaires.

Enfin, en aval, le progiciel est lié à RHi un Buisness Object permettant d’effectuer des requêtes et d’éditer des états à partir des données présentes dans les différents progiciels (voir figure 3-6).

Figure 3-6 : Composition du système d'information ressources humaines

Source : auteur de la thèse

Les gestionnaires sont également amenés à utiliser des outils directement accessibles sur l’intranet dans certaines situations telles que le traitement des arrêts maladie, les déclarations annuelles de salaires et de cotisations sociales.

Composition de People Soft

Sur l’ensemble des 15 briques que comporte le progiciel, seules 5 sont utilisées au niveau opérationnel par les managers. Ces modules sont regroupés dans l’ensemble fonctionnel « Libre-Service Manager » (figure 3-7).

Figure 3-7 : Représentation des modules du progiciel intégré au sein d’ABC

Source : auteur de la thèse

Le progiciel est configuré selon deux profils : un profil salarié et un profil manager accessible uniquement pour les responsables d’équipe.

- Référentiel métier : ce module comporte les métiers chez ABC. Les managers y trouvent les fiches métiers comportant l’intitulé du poste, le périmètre des missions et la position dans la classification des métiers.

- Rémunération : comporte l’historique des rémunérations théoriques versées aux collaborateurs. Il s’agit uniquement d’un accès consultatif et non de saisie.

- Formation et gestion des carrières : ce module comporte les informations personnelles relatives à la carrière et l’historique des stages effectués, ainsi qu’un accès pour inscrire les collaborateurs aux sessions de formation. Lorsqu’un agent en réalise une et que celle-ci est saisie dans Peple Soft par son manager, les compétences sont automatiquement mises à jour dans le profil de l’agent. Toutes les informations relatives aux compétences et aux responsabilités sont liées au code activité. Alors qu’il est central dans le département RH pour identifier le périmètre d’action et les compétences des agents, ce code n’est pas considéré comme tel par les salariés pour qui il reste un élément abstrait.

- Gestion EPA : ce module permet la saisie des échanges ayant lieu pendant les entretiens professionnels annuels. Quatre étapes sont identifiées pour ce processus. Notification et saisie des EPA par le manager, envoi à l’agent pour rectification et validation, validation par le manager, transmission à la DRH. Cette dernière peut demander un complément d’information et le dossier retourne alors à la première étape.

- Bourse des emplois : ce module est l’outil utilisé pour la gestion des recrutements. Il permet de consulter les offres d’emploi pour lesquelles le manager est identifié comme initiateur par la direction RH, consulter les candidatures envoyées par cette dernière, présélectionner les candidats, planifier les entretiens, saisir les synthèses d’entretiens et émettre un avis pour transmission à la DRH.

Correction des erreurs

Les informations présentes dans People Soft sont en grande partie issues des saisies faites par le service administratif. Depuis la mise en place de l’outil, les opérations de fiabilisation sont rares, voire inexistantes. La mise à jour des informations a lieu de manière impromptue lors de l’observation d’une incohérence à l’occasion d’une saisie ou de la production d’états. Lorsqu’une erreur est identifiée par un utilisateur, elle est remontée directement au service administratif pour correction.

22. La contribution du système d’information aux champs de la gestion des

Outline

Documents relatifs