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Le partage de la fonction ressources humaines : une étude par les théories de l’alignement stratégique et de l'AMO

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-03066312

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Submitted on 15 Dec 2020

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l’AMO

Youssef Souak

To cite this version:

Youssef Souak. Le partage de la fonction ressources humaines : une étude par les théories de l’alignement stratégique et de l’AMO. Gestion et management. Université de Bordeaux, 2020. Français. �NNT : 2020BORD0109�. �tel-03066312�

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THÈSE PRESENTÉE POUR OBTENIR LE GRADE DE

DOCTEUR DE

L’UNIVERSITÉ DE BORDEAUX

ÉCOLE DOCTORALE ENTREPRISE, ÉCONOMIE, SOCIÉTÉ (ED 42) SPÉCIALITÉ SCIENCES DE GESTION

Par Youssef SOUAK

LE PARTAGE DE LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES :

UNE ÉTUDE PAR LES THÉORIES DE L’ALIGNEMENT

STRATÉGIQUE ET DE L’AMO

Sous la direction de M. Olivier HERRBACH, Professeur à l’Université de Bordeaux

Soutenue le : 17 septembre 2020

Membres du jury : M. Julien CUSIN

Professeur des Universités, Université de Bordeaux - Président

Mme Anne LOUBES

Professeure des Universités, Université de Montpellier- Rapporteur

M. Marc VALAX

Professeur des Universités, Université de Lyon - Rapporteur

M. Olivier HERRBACH

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stratégique et de l’AMO

Résumé : La gestion des ressources humaines a connu des changements importants au cours des trois

dernières décennies. Cantonnée jusqu’à lors à des activités administratives, elle évolue progressivement en mettant au centre de ses priorités le développement et la gestion des individus alors considérés comme une ressource pour l’organisation. Ce nouvel agenda aboutit à la mutation du périmètre de la fonction ressources humaines (FRH) avec, notamment, l’intégration des managers comme acteurs à part entière. En se mobilisant sur les aspects opérationnels de la fonction, ils permettent aux spécialistes RH de se focaliser sur des activités stratégiques. Pour aborder ces enjeux, l’organisation s’appuie sur l’usage des systèmes d’information (SI). Leur développement a justifié l’apparition de nouvelles formes de travail telles que le partage de la FRH. Cette orientation stratégique implique la mise en place de profondes mutations qui se soldent parfois par des échecs que certains attribuent à la cohérence des choix organisationnels. Basée sur l’étude d’un cas, cette recherche mobilise l’alignement stratégique comme cadre explicatif du PFRH. Les résultats montrent que la cohérence des choix organisationnels joue un double effet sur la position des managers en contexte de PFRH. D’une part, elle influence leurs capacités matérielles et immatérielles d’agir par un effet direct le niveau de compétences et l’accès aux tâches. D’autre part, les résultats montrent que la cohérence des choix organisationnels agit par un effet d’amplification sur la motivation des managers. Nos réflexions aboutissent à la formulation d’un modèle conceptuel et à la proposition d’un outil de pilotage des projets organisationnels basé sur l’alignement stratégique.

Mots clés : Partage de fonction – Usages des SI – Ressources Humaines – AMO – Alignement

stratégique

Title : The human resources function sharing : a study through strategic alignment and AMO theories. Abstract : The end of the twenty-first century has been filled by great changes in the human resources

function (HRF). This new agenda, lead to the integration of operational managers as new main actors. Focusing on the operational side of the function, they permit HR specialists to focus on more strategic roles. Sharing the HRF has needed the thinking of new infrastructure and particularly required human the use of human resources information systems. These tools have introduced new capacities of information manipulation, treatment and sharing. Their diffusion in management both has been reinforced and has justified the new need for collaboration between departments. But the HRF sharing is a strategic orientation which may result in failure. This acknowledgement questions companies about how they coordinate their choices and how they fit them with their strategic goals. Based on a case study, this research explores the way organizational infrastructure is deployed and the consequences of that on the managers’ position. The aim of this work is to understand how the consistency of organizational choices can explain the success of the HRF sharing. Results show that the consistency may generate two effects. On the one hand, it influences their material and immaterial capacities to implement their HR roles by a direct effect on their skills and on their access to HR tasks. In another hand, results show that the alignment of organizational choices acts indirectly on the managers’ position by an impact on their motivation. Our work results in formulation of a conceptual framework including our research inputs.

Keywords : Function sharing – Human resources – IS use – AMO – Strategic alignment

Unité de recherche

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Dédicaces

À mon père

À mes deux petits amours Aya et Maryam

À mon épouse pour son soutien indéfectible

À mes tantes, mes amis et ma famille qui m’ont soutenu dans ce voyage

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Remerciements

À l’issue de ce travail, je tiens à exprimer mes remerciements et ma gratitude à l’ensemble des acteurs qui sont intervenus d’une manière ou d’une autre dans mon parcours. Alors que la thèse se veut être un exercice solitaire, il faut reconnaitre que dans les faits, nombreux sont les acteurs qui apportent de précieuses contributions à sa réalisation.

Mes remerciements vont tout d’abord à mon directeur de recherche, le Professeur Olivier HERRBACH pour son suivi, son expertise et son accompagnement dans l’accès à un terrain d’étude riche en informations. Je tiens également à remercier mesdames Dhiba LHAJJI et Laïla BENRAÏSS-NOAILLES pour leur disponibilité, leurs précieux conseils et leur accompagnement durant ce parcours. Le soutien et la bienveillance dont j’ai pu bénéficier de la part de mon équipe de recherche ont participé à faciliter mon expérience doctorale et ont considérablement renforcé mon appétence pour l’enseignement et la recherche.

Je souhaite également adresser mes remerciements aux Professeurs Anne LOUBES et Marc VALAX qui ont accepté d’être rapporteurs de cette thèse et qui ont, de ce fait, manifesté un intérêt particulier au présent travail. Je remercie également le Professeur Julien CUSIN qui a accepté de participer au jury de cette thèse.

Je tiens également à remercier le département de l’IUT Techniques de Commercialisation de Bordeaux qui a soutenu le déroulement de mes activités de recherche en me proposant un contrat d’ATER. Mes pensées vont particulièrement à Monsieur Bernard ANDRUCCIOLI pour son accueil, sa bienveillance et sa passion de l’enseignement. Je souhaite aussi évoquer le rôle de Christine GEORGET qui a participé à nourrir ma réflexion à de multiples occasions et qui a toujours manifesté un grand intérêt pour ce travail. Je remercie également toutes les personnes de l’entreprise ABC, qui ont accepté de m’accorder leur temps et qui m’ont permis de collecter des informations riches et utiles à mon travail.

Je souhaiterais également souligner la contribution incontournable de ceux qui ont su appuyer mon travail par leurs conseils ou leurs relectures. Je tiens particulièrement à remercier Mariyam LAKHAL, Razika DAUT, Khalil AÏT-SAÏD, Laure BERTHELET, Anne LUCAS, Elodie CHABROUX, Fédérica ANTONAGLIA, Linda GONZALES-LAFAYSSE, Lionel CHAMBRIER et Abdé RCHOUK.

Cette aventure a également été l’occasion de créer ou renforcer de précieux liens d’amitié au sein du laboratoire de recherche. Mes pensées vont à mes camarades Chafik, Salma, Warda, Karen, Claudia, Médéssè, Hayat et Alvaro pour leur présence lors de ce cheminement.

Enfin, j’adresse mes derniers mots à ma famille pour tous ces sacrifices consentis. Je remercie mon épouse Leyla pour son soutien moral et ses encouragements. Je remercie mes petites filles qui, malgré elles, ont été une source intarissable d’espoir. Enfin, je remercie mon père, mes tantes, mes proches pour leur aide et leur soutien.

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SOMMAIRE

LISTEDESABRÉVIATIONS,DESSIGLESETDESACRONYMES ... II LISTEDESTABLEAUX ... III LISTEDESFIGURES ... V LISTEDESANNEXES ... VII

INTRODUCTION GÉNÉRALE ... 1

CONCLUSION GÉNÉRALE ... ERREUR ! SIGNET NON DEFINI.

BIBLIOGRAPHIE ... 283

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LISTE DES ABRÉVIATIONS, DES SIGLES ET DES ACRONYMES

BPR : Business process reengineering DRH : Direction des ressources humaines

DG : Direction générale

DR : Direction régionale

DT : Direction territoriale

EP : Entretien professionnel

EPA : Entretien professionnel annuel ERP : Enterprise resource planning

FRH : Fonction ressources humaines

GRH : Gestion des ressources humaines

HR : Human resources

RH : Ressources humaines

PFRH Partage de la fonction ressources humaines

SI : Systèmes d’information

SIRH : Système d’information ressources humaines

TI : Technologie de l’information

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 0-1 : Plan schématique de la thèse... 17

Tableau 1-1 : Synthèse des approches de la fonction ressources humaines ... 21

Tableau 1-2 : Usages du SIRH et effets sur les processus organisationnels ... 49

Tableau 3-1 :Justification de l’étude de cas ... 128

Tableau 3-2 : Composition des domaines stratégiques ... 146

Tableau 3-3 : Grille d’analyse du fit stratégique ... 147

Tableau 3-4 : Design de la recherche ... 152

Tableau 3-5 : Processus de formation ... 172

Tableau 4-1 : Agrégation des résultats d’alignement entre les compétences et savoirs et les objectifs du PFRH ... 187

Tableau 4-2 : Effets du désalignement entre niveau de formalisation et objectifs stratégiques sur l’AMO ... 191

Tableau 4-3 : Effets du désalignement entre les conditions matérielles et la participation aux activités RH sur l’AMO ... 195

Tableau 4-4 : Effets du désalignement entre valorisation du PFRH et objectifs stratégiques du PFRH sur l’AMO ... 198

Tableau 4-5 : Synthèse des résultats de l’alignement des infrastructures organisationnelles ... 199

Tableau 4-6 : Agrégation des résultats d’alignement entre les infrastructures organisationnelles et les objectifs du PFRH ... 200

Tableau 4-7 : Effet du désalignement entre le niveau de préparation du contexte RH et des objectifs stratégiques sur l’AMO ... 205

Tableau 4-8 : Effets du désalignement entre les rôles des spécialistes RH et les objectifs stratégiques sur l’AMO ... 210

Tableau 4-9 : Effets du désalignement entre la centralisation des procédures et les objectifs stratégiques sur l’AMO ... 214

Tableau 4-10 : Agrégation des résultats d’alignement entre les processus de travail et les objectifs du PFRH ... 215

Tableau 4-11 : Synthèse des effets des dysfonctionnements sur la facilité d’usage et l’utilité perçues ... 225

Tableau 4-12 : Effets du désalignement entre les infrastructures organisationnelles et les processus SI ... 229

Tableau 4-13 : Objectifs du partage de la FRH ... 231

Tableau 4-14 : Effets du désalignement entre les infrastructures organisationnelles et celles des systèmes d’information ... 237

Tableau 4-15 : Effets du désalignement entre les infrastructures et processus organisationnels et les compétences SI ... 242

Tableau 4-16 : Synthèse des alignements entre les composantes du domaine stratégique et du domaine des infrastructures organisationnelles ... 245

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Tableau 4-17 : Synthèse des alignements entre les infrastructures organisationnelles et les infrastructures du système d’information ... 247 Tableau 4-18 : Synthèse des éléments de succès de partage de la FRH ... 253 Tableau 4-19 : Disparité de perceptions du partage de la fonction ressources humaines entre managers stratégiques et managers de proximité ... 257

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LISTE DES FIGURES

Figure 0-1 : Modèle d’alignement stratégique ... 11

Figure 0-2 : Contribution principale de la recherche ... 14

Figure 1-1 : Matrice des rôles des responsables RH de Storey (1992) ... 32

Figure 1-2 : Matrice des rôles de la fonction RH de Ulrich (1998) ... 34

Figure 1-3 : Les stades de l’usage des systèmes d’information ... 47

Figure 1-4 : Effet de la qualité du système et de l’information sur la satisfaction et l’utilisation des systèmes d’information ... 52

Figure 1-5 : Évaluation du succès de partage de la FRH par le GAP ... 64

Figure 2-1 : L’effet indirect des pratiques de GRH sur la performance productive ... 69

Figure 2-2 : Synthèse des déterminants des capacités de partage de la FRH ... 75

Figure 2-3 : Synthèse des déterminants de la motivation de partage de la FRH ... 78

Figure 2-4 : Effet de la distribution de l’influence sur le lien intégration-performance ... 86

Figure 2-5 : Synthèse des déterminants de l’opportunité de partage de la FRH ... 87

Figure 2-6 : Les domaines stratégiques de l’organisation ... 94

Figure 2-7 : Composition des domaines stratégiques externes ... 96

Figure 2-8 : Composition des domaines stratégiques internes ... 98

Figure 2-9 : Modèle de l’alignement stratégique d’Henderson et Venkatraman (1993) ... 99

Figure 2-10 : Les perspectives d’alignement stratégique ... 101

Figure 2-11 : Représentation des objectifs stratégiques du partage de la FRH ... 113

Figure 2-12 : Composition des infrastructures et processus organisationnels ... 114

Figure 2-13 : Proposition d’étude de l’alignement des domaines du partage de la FRH ... 115

Figure 2-14 : Impact des choix organisationnels sur l’implémentation des pratiques RH ... 116

Figure 2-15 : Impact de l’alignement des choix organisationnels sur le PFRH ... 116

Figure 3-1 : Processus de codage et de production d’une grille d’analyse mixte ... 143

Figure 3-2 : Domaines et alignements explorés dans le cadre de la recherche ... 146

Figure 3-3 : Organisation du département ressources humaines d'ABC ... 154

Figure 3-4 : Chaine de communication entre les acteurs du projet SIRH ... 161

Figure 3-5 : Acteurs du déploiement opérationnel de l’outil ... 162

Figure 3-6 : Composition du système d'information ressources humaines ... 165

Figure 3-7 : Représentation des modules du progiciel intégré au sein d’ABC ... 166

Figure 4-1 : Étude du fit stratégique ... 182

Figure 4-2 : Étude de l’alignement vertical entre compétences et savoirs et objectifs stratégiques du PFRH ... 183

Figure 4-3 : Étude de l’alignement vertical entre infrastructures organisationnelles et objectifs stratégiques du PFRH ... 188

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Figure 4-5 : Étude de l’intégration stratégique ... 216 Figure 4-6 : Étude de l’alignement horizontal entre les infrastructures et processus organisationnel et les infrastructures des SI ... 216 Figure 4-7 : Étude de l’alignement entre les infrastructures et processus organisationnels et les

processus des SI ... 230 Figure 4-8 : Étude de l’alignement entre les infrastructures et processus organisationnels et les

compétences SI ... 237 Figure 4-9 : Modèle de la recherche ... 271 Figure 4-10 : Outil de diagnostic et de rétroaction de l’alignement stratégique organisationnel ... 277

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LISTE DES ANNEXES

Annexe 1 : Guide d’entretien fonctions support ... 299

Annexe 2 : Guide d’entretien manager ... 303

Annexe 3 : Liaisons fonctionnelles du système d’information global ... 306

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

S’il y a des choses que l’on partage volontiers, il est des acquis que l’on souhaiterait bien garder. À ce sujet, un des illustres ministres de la République française a tenté la démonstration d’une assertion éprouvée par l’expérience d’une vie : « le pouvoir ne se partage pas »1.

Actualité et intérêt du sujet

La gestion du personnel, pièce maîtresse de la coordination du travail dans l’organisation, semble avoir toujours fait partie intégrante du management d’équipe. Elle a toutefois pris des formes et une importance différentes selon les contextes géographiques et temporels. Tyson (1987) propose de s’intéresser aux bouleversements économiques, sociaux et politiques qui ont atteint les entités productives et de pointer leurs conséquences sur les rapports de travail et sur la fonction ressources humaines (FRH).

Le 18e siècle a tout d’abord été marqué par une industrialisation croissante des économies, qui s’est accompagnée du développement des entreprises et du recours à une main d’œuvre peu qualifiée. À partir du début du 20e siècle, l’obsolescence du capital technique, induite par un manque d’investissement dans les capacités productives, a entrainé une perte d’efficacité dans la plupart des industries occidentales. Cela s’est traduit par l’augmentation drastique du chômage et par la modification de la structure du travail entre emplois qualifiés et non qualifiés. Sur le plan productif, l’intensification de la rivalité concurrentielle souligne l’importance de la relation établie avec le client. Le positionnement par rapport à la valeur de l’argent évolue, et ce, même dans le secteur public qui cherche à rééquilibrer ses comptes par l’amélioration de son efficacité productive. Cette nouvelle manière de voir l’entreprise a participé au renforcement d’une logique financière de gestion. Cette dernière serait alors caractérisée par une insécurité professionnelle croissante, des prises de risques disproportionnés et une flexibilisation accrue de la masse salariale (Tyson, 1987).

En matière de gestion des ressources humaines (GRH), les différentes problématiques économiques rencontrées par les organisations dans la fin des années 1970 ont justifié une intensification de la formulation stratégique et un regain d’intérêt pour les politiques du

1Dans un ouvrage paru aux éditions Fayrard en 2009, Edouard Balladur décrit la période délicate où il était

Premier ministre de François Mitterrand. Dans ce récit, il montre l’opposition tenace, mais passive, des deux hommes politiques. Celle-ci a marqué leur relation durant tout le mandat présidentiel. Ce rapport de force a

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personnel. Selon Tyson (1987), les changements dans le paysage économique et industriel se sont accompagnés d’un basculement des modèles de GRH mis en place. On passe d’une logique de gestion des forces de travail à une logique de développement du capital humain justifiant la redéfinition des objectifs et des moyens d’action de la GRH. Cette dernière occupe une place de plus en plus importante dans les fonctions de gestion de l’organisation.

Ces évolutions ont finalement contribué à actionner deux mécanismes institutionnels simultanés : l’intégration stratégique de la GRH et le partage de la fonction ressources humaines (Chambrier, 2000 ; Loubes, 1998).

L’intégration stratégique désigne le processus d’association d’un ou plusieurs membres de la DRH dans les décisions organisationnelles. Il s’agit d’une dynamique de déplacement de la GRH à un niveau plus stratégique qui est justifié par des principes de rationalisation économique. La masse salariale et les objectifs de productivité étant devenus de véritables enjeux de performance, l’intégration de la GRH au sein des activités stratégiques s’est imposée comme une priorité de l’agenda organisationnel. D’un autre côté, même si les responsables des ressources humaines souhaitent orienter un peu plus leur fonction vers une finalité de conseil stratégique, la tâche s’avère difficile, car ils conservent une certaine dépendance fonctionnelle rendant cette mission illusoire. La position des spécialistes RH a toujours été identifiée comme ambigüe, ces derniers étant prostrés entre la nécessité de servir loyalement les objectifs organisationnels et celle de répondre aux attentes managériales (Tyson, 1987).

Le partage de la fonction ressources humaines (PFRH) favorise l’intégration de nouveaux acteurs, qu’ils soient à l’extérieur de l’organisation ou en son sein. Ce dernier cas, particulièrement intéressant dans le cadre de ce travail, a trait au redéploiement du champ en interne et implique les managers dans la GRH de l’organisation. Cette extension de la fonction concourt initialement à une meilleure connaissance de la gestion locale des effectifs et à une plus grande anticipation des tendances économiques et sociales. Mais ses finalités basculent rapidement vers la nécessité de rationaliser les moyens de production (Loubes, 1998).

Le repositionnement progressif de la DRH et l’intégration de nouveaux acteurs au sein de sa fonction ont permis aux managers de proximité de prendre de plus en plus de responsabilités dans la GRH. Que ce soit sur le plan académique ou empirique, l’intérêt porté au phénomène de PFRH se développe à partir des années 2000. Pourtant, Schuler proposait déjà en 1990 de voir la GRH autrement. Il incitait à la considérer comme une activité de coordination et de

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canalisation des attributions des managers par le travail conjoint de ces derniers avec les spécialistes RH. La collaboration entre les deux parties permettrait, effectivement, de faire émerger des effets de complémentarité bénéfiques pour l’organisation.

Mais partager la FRH constitue également un enjeu du point de vue managérial. Dans les années 1980, plusieurs rapports voient le jour dans le cadre du mouvement de la décentralisation et encouragent l’enrichissement des tâches du manager qui devient responsable de son unité et de ses RH. Ces nouvelles attributions permettraient alors au manager de proximité de renforcer ses leviers d’action et de devenir l’acteur le plus pertinent pour relever ces nouveaux défis organisationnels.

Valéau (2013) définit la FRH comme « l’ensemble des activités destinées à fournir à l’organisation les ressources humaines nécessaires à son développement » (p. 78). Cette définition propose une approche globale axée sur l’atteinte de l’objectif de développement de l’organisation. La FRH est alors un outil permettant d’assurer le lien entre l’entité et sa force de travail. Dans la littérature, la diversité des définitions proposées pour caractériser le PFRH montre que cette pratique traduit une réalité plurielle. Certaines recherches étudient une forme de partage fonctionnel à travers la notion de « décentralisation » (Azémar de Fabrègues, 1992 ; Chambrier, 2000 ; Loubes, 1998). Celle-ci renvoie au processus par lequel les centres de commandements sont délocalisés à des agents ou entités situés à une échelle plus locale. Le phénomène est alors empreint à une tension issue de la volonté de rendre plus rapide la prise de décisions d’une part, et d’autre part, la crainte des décisionnaires de subir une fuite de pouvoirs. Hall et Torrington (1998) évoquent une certaine confusion entre le PFRH et la décentralisation. Ils tiennent alors à souligner que cette dernière recouvre un processus de transfert d’une fonction centralisée vers des experts situés à des niveaux plus bas dans l’organisation. Le PFRH, est quant à lui, évoqué comme un processus qui aboutit à l’implication de nouveaux acteurs, potentiellement novices, et qui sont rattachés à une autre fonction principale. L’importance de la distinction entre les deux notions est justifiée par les implications et réalités qui en découlent. Comme ces objets sont proches et sont souvent utilisés de manière interchangeable (Chambrier, 2000), il conviendra dans le corps des développements d’en éclaircir les contours et d’en lever l’ambiguïté définitionnelle.

Les définitions concernant le PFRH sont rares et les travaux prenant cette pratique comme objet y font davantage référence de manière implicite. Dans une des recherches incontournables sur

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le sujet, Heraty et Morley (1995) définissent le PFRH comme « le degré avec lequel les pratiques de développement RH impliquent et donnent des responsabilités aux managers de proximité davantage qu’aux spécialistes » (p. 31). Cette définition propose d’appréhender le phénomène comme le lieu d’exercice d’un rapport de force. Pour qu’il y ait partage, il faudrait que la GRH relève davantage de la responsabilité des managers que de celle des spécialistes. Une définition moins restrictive vise à appréhender le PFRH comme « l’allocation, a des parties de l’organisation plus localisées, de tâches précédemment à la charge de spécialistes du personnel » (Hoogendoorn et Brewster, 1992, p. 4). Il s’agirait donc de transférer un certain nombre de tâches RH aux managers. Dans cette approche, la nécessité de renversement du rapport de force s’efface. Les définitions proposées du partage en font à la fois une orientation stratégique et en dictent les implications opérationnelles. Mais il apparait qu’une partie d’entre elles occulte largement le transfert de pouvoir et réduit le partage à un transfert de tâches à réaliser. Or, dans le sens commun, « partager » possède à la fois une acception liée à l’inclusion (partager avec d’autres), et un sens faisant intervenir la répartition et la division d’un ensemble en sous-ensembles plus petits (céder à d’autres)2. Négliger cette deuxième approche revient à occulter une réalité non des moindres : la dépossession. Appliquée à l’étude du PFRH, cette dernière approche a trait à un phénomène d’ampleur. Il s’agit de la perception, par certains acteurs, de l’amputation de leurs pouvoirs par l’inclusion d’un plus grand nombre (Loubes, 1998) et pourrait aboutir au développement de rapports interindividuels conflictuels (Chambrier, 2000). C’est pourquoi Loubes (1998) axe son approche du partage sur la délégation du pouvoir de décision et en fait le levier de mobilisation des managers : « le partage de la GRH repose essentiellement sur le partage des décisions visant à impliquer les responsables opérationnels » (p. 67).

Cette approche souligne l’importance particulière de la dimension décisionnelle dans le phénomène. Elle en fait non seulement partie, mais elle permet surtout d’impliquer les managers dans le champ de la GRH. La prise en compte de ces deux dimensions (le transfert de responsabilités et le pouvoir de décision) est d’ailleurs identifiée comme une condition sine qua non à l’acceptation par les managers de leurs nouvelles responsabilités et à la mise en place effective des activités RH (Hall et Torrington, 1998).

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Problématique

Depuis les années 1990, une littérature importante a émergé pour expliquer la genèse du PFRH avec les managers (e.g. Brewster, Larsen et Trompenaars, 1992 ; Colling et Ferner, 1992 ; Hoogendoorn et Brewster, 1992, 1992). Ces recherches visent à montrer les fondements de cette nouvelle orientation stratégique de la GRH, proposent des études descriptives comparatives entre les pays et les secteurs d’activités et tentent de mettre en lumière les facteurs qui en facilitent ou en freinent la mise en place.

Il en résulte que la GRH implique un plus grand nombre d’acteurs et voit le périmètre de sa fonction s’élargir et se transformer. Les professionnels RH officiant au sein de l’organisation et dont le cœur de métier consiste à fournir une expertise en la matière ont longtemps été considérés comme les uniques protagonistes de la FRH. Mais ils n’officient plus seuls et doivent accepter et intégrer la mutation de leur fonction. Ils seront désignés dans cette recherche comme les « spécialistes RH » ou les « experts RH ». Le détachement de ces derniers de certaines opérations pour les affecter au niveau de la gestion opérationnelle souligne le rôle central des managers de proximité dans ce nouveau chainage de la GRH. Il participerait, effectivement, à la transformation des politiques RH en « théories en action » (Thornhill et Saunders, 1998, pp. 462-463). Dans ce cadre, les résistances que pourraient manifester les responsables d’équipe à l’encontre de l’organisation pourraient aboutir à diluer, si ce n’est à anéantir, les tentatives de traduction des politiques définies en pratiques réelles. Par sa dimension stratégique et l’ensemble des implications opérationnelles qu’il peut générer, le PFRH est identifié comme une caractéristique clé du management stratégique des RH (Tabassum Azmi, 2010).

En tout état de cause, le PFRH s’est imposé comme une orientation ancrée dans les mutations économiques, mais surtout technologiques du contexte organisationnel. Il va sans dire qu’il induit une plus grande transversalité dans le travail, nécessitant la mise en place d’outils permettant la collaboration au sein et entre les équipes. Depuis les années 1990, le PFRH a été facilité, si ce n’est propulsé, par le développement massif des technologies de l’information et de la communication (TIC). En retour, ces nouvelles réorganisations du travail, basées sur la collaboration et l’échange, ont également justifié la conception de systèmes d’information puissants. Des dispositifs sont alors créés pour faciliter le transfert d’informations au sein de l’organisation. Dans le champ de la GRH, ces nouvelles interactions sont étudiées à travers la notion de « e-HRM » pour « electronic human resources management » (Grant et Newell,

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champ le système d’information ressources humaines (SIRH) qui est défini comme un « système utilisé pour acquérir, stocker, manipuler, analyser, retraiter et distribuer de l’information pertinente au sujet des ressources humaines d’une organisation »3 (Tannenbaum, 1990, p. 260).

Participant à la modernisation et à l’optimisation de la GRH, les SIRH sont aussi élaborés dans une finalité collaborative. Partant de ce constat, Grant et Newell (2013) les définissent comme des objets permettant « de mettre en place l’automatisation et la délégation de nombreuses routines administratives traditionnellement assurées par les départements RH » (p. 187). Dans ce cadre, l’intégration du SIRH dans la gestion du personnel est devenue un moyen de modernisation et d’optimisation de la GRH. L’usage de ces systèmes par les managers peut même faire partie des buts de PFRH. Cette approche du SIRH laisse émerger un double objectif particulièrement intéressant dans le cadre de la présente recherche. D’une part, elle pose les finalités du système qui sont articulées autour des processus facilitant la manipulation de l’information. D’autre part, elle met en évidence le véritable rôle d’outil au service du projet de partage fonctionnel.

Ces constatations ont naturellement mené les chercheurs du champ à s’intéresser aux facteurs favorisant la réussite des projets liés aux SI. Longtemps focalisée sur les dimensions techniques de ces outils, la recherche dans ce champ a progressivement évolué depuis le début des années 2000, pour intégrer les dimensions sociale et organisationnelle dans son spectre d’analyse. Ces préoccupations ont notamment été abordées à travers l’étude de l’usage des SI. Pour DeSanctis et Poole (1994), par exemple, la mise en place d’un SI consiste à définir les caractéristiques fonctionnelles ou techniques, mais aussi son « esprit ». L’usage est appréhendé comme la manière dont une technologie est utilisée. L’introduction de cette notion d’usage des SI permet d’intégrer des dimensions sociales et humaines absentes jusqu’à lors dans les travaux. Mais ce basculement s’inscrit dans un changement paradigmatique plus profond. Les recherches se détachent d’une perspective purement technique pour épouser un courant sociotechnique propulsé par les travaux d’Orlikowski (1992). Les SI y sont considérés comme des dispositifs sociotechniques servant de supports à la réalisation des tâches et des processus dans les organisations. Ils font évoluer et évoluent eux-mêmes avec la sphère sociale. On ne se demande

3 Traduction Personnelle : « In its most basic form HRIS is a system used to acquire, store, manipulate, analyze,

retrieve and distribute pertinent information about an organization’s human resources. It is often regarded as a service provided to an organization in the form of information ».

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alors plus « comment fonctionnent-ils ? », mais « comment sont-ils utilisés ? ». Ce changement épistémique se base sur le postulat que les usages des SI sont fondamentalement influencés par le contexte technologique et social de l’entité.

Ces interactions entre les dimensions techniques et sociales du développement de projets SI ont largement été discutées dans les travaux épistémiques relatifs aux systèmes d’information. Sur le plan organisationnel, les questions se cristallisent sur la propension de ces technologies et de ses applications à structurer l’espace de travail et les relations entre les individus et à créer des rigidités non prévues. Implémentées dans un contexte de changement stratégique, ces nouvelles technologies peuvent alors contribuer à renforcer les difficultés d’appropriation des enjeux directement liés à la production.

D’un point de vue stratégique, les échecs de projets SI sont nombreux alors que les investissements sont importants. Orlikowski (1992) évoque un paradoxe de la productivité des TIC pour souligner l’absence ou la faible corrélation positive entre les investissements et les résultats de performance. Les retours sur investissement attendus en matière de qualité ou de productivité du travail, de suppression des tâches fastidieuses et répétitives ou même d’accès plus rapide à l’information sont parfois bien en deçà des espérances. Cela provoquerait alors déceptions et interrogations des décideurs quant à la pertinence des choix technologiques effectués.

Parallèlement à cela, certaines observations du PFRH intriguent les chercheurs. Alors que des auteurs concluent à des effets positifs de l’association des responsables d’équipe, tels que le renforcement des leviers managériaux (e.g. Currie et Procter, 2001 ; Heraty et Morley, 1995 ; Ryu et Kim, 2013), une frange importante de la littérature met en évidence des problématiques dans la mise en place effective d’une fonction partagée (e.g. Cascón-Pereira, Valverde et Ryan, 2006 ; Colling et Ferner, 1992 ; Harris, Doughty et Kirk, 2002). Les résultats mettent en cause la pertinence des choix stratégiques et organisationnels sur la capacité des managers à assurer sereinement les responsabilités proposées, ce qui aboutit à des situations de décalages entre les objectifs initiaux et les configurations finales (Bos-Nehles, Van Riemsdijk et Kees Looise, 2013 ; Dietrich, 2009). Les mutations des rôles des managers proviennent alors de changements imposés par de nouveaux modèles de management. Ces changements ne sont pas souhaités ni même négociés avec les acteurs, ce qui participe à remettre en cause le partage effectif de la FRH (Fenton-O’Creevy, 2001).

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Ces problématiques de partage sont encore éminemment d’actualité. En juillet 2019, un rapport de l’Observatoire de l’Engagement4 pointait le « paradoxe du manager de proximité ». Alors que le manager semble constituer le maillon essentiel dans la poursuite des nouveaux enjeux de la GRH, le manque de moyens et d’importance accordés à l’orientation du PFRH tend à en freiner le développement. La gestion critiquable de la nouvelle posture des responsables d’équipe par l’organisation laisse émerger des problématiques profondes de tensions de rôle et altère leur engagement dans l’organisation. Les auteurs du rapport mettent en cause l’incapacité des organisations à faire du rôle RH des managers une priorité. Il apparait alors que, dans les faits, la prise en main de leur nouvelle fonction reste limitée, rendant ces nouvelles organisations figées au stade de la théorie. Les conclusions de ce rapport sont donc un pied de nez fait au travail de Peretti (2012) qui exhortait dans son bien connu ouvrage « Tous DRH » l’inévitable et universelle conversion des managers aux métiers de la gestion des ressources humaines.

Or, l’implémentation effective de cette orientation est considérée comme une condition nécessaire à l’efficacité de la GRH (Grant et Newell, 2013). Les recherches se sont alors focalisées sur les facteurs qui déterminent le succès du partage. Ce dernier est étudié dans la littérature à travers la notion d’implémentation de la FRH par les managers. Trullen, Stirpe, Bonach et Valverde (2016) le définissent ainsi : « l’implémentation efficace est le chevauchement idéal entre les pratiques attendues et celles réellement mises en place. Inversement, une implémentation inefficace a lieu lorsque les pratiques RH sont partiellement mises en place, introduites d’une manière incohérente avec l’objectif initial, ou ne sont pas du tout mises en place »5 (p. 451). Dans cette approche, le succès peut s’évaluer à travers l’écart entre le projet initial de partage et la configuration réellement observée sur le terrain. Les auteurs ayant traité ce sujet se sont alors questionnés sur les causes de tels décalages dont certains entravent la réussite du projet. Dans les faits, les mutations dans la fonction managériale se sont également accompagnées de tensions entre les logiques de GRH et de production. Hall et Torrington (1998), par exemple, montrent que les spécialistes RH développent une attitude dissonante. Malgré leur conviction de la contribution du partage du champ à la performance de

4 L’observatoire de l’engagement (2019), Managers de proximité et dynamiques d’engagement : discours et

réalité des pratiques, Université Paris Dauphine, http://observatoire-engagement.org/wp-content/uploads/2019/07/Etude-Managers-de-proximit%C3%A9-2019.pdf

5 Traduction personnelle : « An HRP is effectively implemented when there is an ideal overlap between intended

and actual practices. Conversely, ineffective implementation occurs when the HRPs are only partially implemented, introduced in ways that are inconsistent with their initial intent, or not implemented at all ».

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leur fonction, ils développent des mécanismes de résistance lorsqu’il faut se détacher de certaines activités opérationnelles. L’attrait pour ces responsabilités ou la peur de dilution de l’approche RH seraient avancés pour justifier les craintes quant à cette nouvelle forme d’organisation. Ces facteurs agissent sur la capacité de l’organisation à impliquer les managers dans le PFRH tant et si bien que les situations résultantes relèvent davantage d’une relation transactionnelle que d’une réelle délégation des responsabilités (Currie et Procter, 2001). Ainsi, il apparait de nombreux décalages entre les objectifs stratégiques du PFRH et les choix faits par l’organisation pour accompagner cette orientation. Ces écarts créent des situations où les managers ne se sentent pas en mesure cognitive d’atteindre les objectifs, n’en ont pas les moyens matériels et/ou ne sont pas dans des conditions les incitant à le faire. Par exemple, certains d’entre eux reprochaient aux spécialistes RH de ne pas être eux-mêmes prêts pour les changements que cette réorganisation implique (Davis et Luiz, 2005). Ces experts représentent pourtant l’organisation et sont censés défendre les changements qu’elle porte. Le manque de connaissance et la déconnexion vis-à-vis des réalités productives, ou encore la mise en place de barrières à l’autonomie managériale sont évoqués pour illustrer l’incohérence entre les ambitions posées par le projet de PFRH et les infrastructures en place pour les supporter (Whittaker et Marchington, 2003). Ces résultats suggèrent alors que des choix organisationnels peuvent être inadaptés aux finalités poursuivies. Or, le PFRH est un processus qui implique des changements importants, tant pour les spécialistes RH que pour les managers. En tant qu’orientation stratégique, il implique des modifications profondes dans l’identité de la FRH, nécessite un accompagnement des acteurs (Hall et Torrington, 1998) et un déploiement de moyens suffisants pour soutenir ces changements (Dietrich, 2009).

Des travaux s’intéressant à cette problématique suggèrent que le partage effectif de la FRH pourrait être affecté par la capacité de l’organisation à assurer le développement des compétences des managers, à intégrer des incitations motivantes et enfin, à mettre en place des espaces suffisants pour le faire (Bos-Nehles et al., 2013 ; Gilbert, De Winne et Sels, 2015 ; Trullen et al., 2016). De ces constats, se développe un cadre théorique visant à étudier le succès de mise en place du PFRH. Dans le prolongement de la théorie des attentes de Vroom (1964), puis du travail fondateur d’Appelbaum (2000), la communauté de l’AMO (Ability, Motivation, Opportunity) met effectivement en évidence l’impact des choix organisationnels sur le comportement des collaborateurs dans une situation d’action. Plus précisément, ces travaux montrent que les décisions de l’organisation affectent le comportement individuel en impactant

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les capacités (Ability), la motivation (Motivation) et les opportunités (Opportunity) qu’ont les managers d’agir. Bien que cette approche théorique soit largement éprouvée dans le champ de la gestion des organisations, ses applications en GRH et plus particulièrement à l’étude du PFRH soulèvent encore de vifs questionnements (voir Bos-Nehles et al., 2013 ; Gilbert, De Winne et Sels, 2015 ; Trullen et al., 2016).

Aussi, les réflexions en amont ont mis en évidence l’intérêt académique et pratique pour les SIRH, et particulièrement en contexte de partage fonctionnel. Le recours croissant aux SIRH dans les organisations soutient le développement du phénomène de PFRH sur les plans stratégique et opérationnel. Cependant, de nombreux travaux montrent que la mise en place d’un SIRH fait également émerger des questionnements liés à la technicité de l’outil, mais aussi à ses influences organisationnelles plus générales. Lorsqu’elles sont insuffisamment maîtrisées, les contraintes liées aux SI favorisent une déviation des usages (De Vaujany, 2006) et potentiellement un échec de collaboration (Oueslati, 2011). De manière paradoxale, certains travaux montrent que la mise en place de SI aboutit parfois au développement de conflits verticaux et d’une centralisation accrue des processus organisationnels, alors même que leur vocation était de décentraliser la structure et de favoriser la collaboration (Besson, 1999). Comment expliquer alors, qu’au-delà de manquer l’objectif initial, une organisation soit amenée à produire des résultats contraires à ceux qui étaient attendus ? Des travaux portant sur la question mettent en évidence le rôle de la cohérence des choix organisationnels dans les problématiques constatées.

En 1989 puis en 1993, Henderson et Venkatraman réalisent des travaux majeurs visant à établir un lien entre la cohérence des choix de l’organisation et la performance de cette dernière. Ils proposent le modèle de l’alignement stratégique pour expliquer l’efficacité des investissements réalisés en matière de technologies de l’information. Le travail des deux auteurs est guidé par une question insoluble : « Pourquoi les dépenses en technologies de l’information et de la communication ne produisent-elles que de faibles résultats, alors même que les investissements initiaux sont conséquents ? ». L’observation de plusieurs entreprises américaines les mène à mettre en avant une problématique d’alignement stratégique. Les unités qui montrent le plus de cohérence dans leurs choix seraient les plus productives. La performance pourrait alors s’expliquer par un double mécanisme (figure 0-1) :

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- Un alignement horizontal des choix stratégiques : entre la stratégie générique (business) et celle des technologies de l’information (TI) d’une part, et d’autre part, entre les infrastructures business et celles des TI ;

- Un alignement vertical des choix stratégiques : d’une part entre les choix de stratégie générique avec les choix d’infrastructures génériques, et d’autre part, entre les choix de stratégie des TI et leurs infrastructures respectives.

Figure 0-1 : Modèle d’alignement stratégique

Source : Modèle adapté d’Henderson et Venkatraman (1989)

Initialement cantonné à l’analyse du champ des nouvelles technologies, ce cadre théorique sera, par la suite, utilisé dans des disciplines variées pour étudier les effets de la cohérence des choix stratégiques. Le manque d’alignement, aussi désigné comme un « désalignement » est alors mis en cause pour expliquer les échecs de projets organisationnels (Bergeron, Raymond et Rivard, 2004 ; Chan et al., 1997 ; Walsh, Renaud et Kalika, 2013).

Ainsi, de nombreuses recherches tentent de fournir une explication à la manière dont l’alignement stratégique permet de rendre optimale l’atteinte des objectifs initialement fixés. Certaines d’entre elles s’intéressent à la manière dont la cohérence entre les infrastructures organisationnelles et celles propres aux SI permettrait d’accroître les résultats (Avison et al., 2004 ; Bergeron et al., 2004 ; Chan et al., 1997). Or, le recensement des travaux faits en la

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matière ne permet pas d’établir que le modèle d’alignement stratégique a été mobilisé dans le champ de la GRH ni pour analyser le cas d’un projet SIRH.

En matière de PFRH, les travaux recensés montrent qu’il s’agit d’un corpus relativement récent avec des contributions essentiellement descriptives. De nombreux travaux recourent à des études comparatives pour analyser les disparités de partage en Europe (e.g. Brewster et Larsen, 2000 ; Harris, Doughty et Kirk, 2002 ; Larsen et Brewster, 2003) ou pour s’intéresser à l’incidence de la nature des pratiques RH sur leur propension à être partagées (Bond et Wise, 2003 ; Harris et al., 2002). Des auteurs se sont intéressés à l’effet des choix organisationnels sur l’attitude et le comportement des acteurs (Fenton-O’Creevy, 1998, 2001 ; Hall et Torrington, 1998), mais aussi à l’étude du niveau optimal de partage des activités et du pouvoir de décision (Dany, Guedri et Hatt, 2008). Cependant, il semblerait qu’aucune contribution académique ne traite de la question du PFRH dans un contexte d’évolution du SIRH. De même, notre revue de littérature montre que les travaux s’inscrivant dans le corpus de l’alignement stratégique n’abordent pas la question de la cohérence des choix organisationnels entre les objectifs du PFRH et la mise en place d’un SIRH.

Par ailleurs, de nombreuses recherches inscrites dans le courant théorique de l’AMO mettent en évidence le lien entre choix organisationnels et succès de mise en place du PFRH. Ce cadre théorique est largement mobilisé en matière de GRH, car il permet d’identifier l’impact des choix organisationnels sur les capacités, la motivation et les opportunités des managers. Cependant, aucune contribution n’explore la manière dont ces mécanismes opèrent lors de la mise en place d’un SIRH, ce que nous proposons de faire dans le cadre de cette recherche. Enfin, dans la littérature sur le PFRH, aucune recherche n’a encore tenté d’articuler les cadres théoriques de l’alignement stratégique et de l’AMO pour expliquer la mise en place des activités RH des managers. Or, nous avons montré dans les développements précédents que s’intéresser à la cohérence des choix, davantage qu’au choix en eux-mêmes, pourrait fournir un matériau analytique pertinent. Dans la présente recherche, notre principale contribution consiste à proposer un modèle théorique articulant ces deux approches. L’intérêt de ce travail est d’étudier la manière dont une organisation peut se trouver dans une situation de désalignement stratégique et de voir comment ce déséquilibre pourrait impacter la disposition de cette dernière à fournir aux managers les capacités, motivations et opportunités nécessaires à la mise en place d’un PFRH.

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Question de recherche

Il ressort des apports de la littérature que l’étude des choix organisationnels et de leur alignement semble constituer un cadre d’analyse pertinent du partage de la FRH. La problématique globale de ce travail est de comprendre l’incidence des choix

organisationnels, et notamment ceux impliquant les systèmes d’information, sur le succès de partage de la FRH avec les managers.

La présente étude sera alors guidée par la question de recherche suivante :

- Comment le désalignement stratégique contribue-t-il au faible développement des

capacités, des motivations et des opportunités des managers de mettre en place le partage de la fonction ressources humaines ?

Cette question principale de recherche peut se décliner en trois questions sous-jacentes : - Quels facteurs organisationnels peuvent expliquer le développement de freins et de

moteurs de l’alignement stratégique ?

- Quelle est l’incidence des usages des SI dans le partage de la fonction ressources humaines ?

- Comment l’alignement stratégique contribue-t-il au développement des usages des SI attendus ?

Notre recherche vise alors un double objectif. Sur le plan théorique, elle propose deux contributions. La première consiste à enrichir la littérature, encore sommaire, de l’alignement stratégique dans le champ de la GRH. Elle permet ainsi d’étudier comment l’alignement stratégique explique la performance, entendue ici comme le partage effectif de la FRH. La seconde revient à combiner de manière inédite les deux approches conceptuelles que sont l’alignement stratégique et l’AMO pour fournir un modèle unique englobant les deux grilles d’analyse. Afin de clarifier cet élément, la contribution principale de la recherche est schématisée dans la figure 0-2 suivante.

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Figure 0-2 : Contribution principale de la recherche

Source : auteur de la thèse

Sur le plan pratique, nous cherchons à montrer la manière dont la fixation des choix organisationnels peut aboutir à des situations de désalignement entre les objectifs stratégiques de l’organisation et les processus mis en place. De plus, cette recherche tend à souligner l’impact des désalignements stratégiques sur la capacité, le désir et la possibilité des managers à partager la FRH avec les spécialistes. Enfin, elle vise à fournir une réflexion sur les dispositifs permettant l’opérationnalisation d’outils d’alignement stratégique.

Méthodologie de recherche

Pour mener à bien cette démarche, la méthode par étude de cas a été retenue. Ce choix est justifié par le caractère exploratoire conféré par la question de recherche. L’étude de cas est une méthode d’investigation permettant l’explication d’un phénomène par la richesse informationnelle et par le processus de contextualisation consécutif. Elle facilitera donc l’obtention du matériau nécessaire pour aborder les questionnements proposés. L’objectif fixé dans la présente thèse consiste à décrire et analyser les modalités et les facteurs de succès d’implémentation d’une orientation stratégique. Il apparait alors que seule une démarche qualitative pourrait servir ce projet.

Le choix d’un cas unique s’est avéré également pertinent du fait de la spécificité de la question de recherche et de l’intérêt particulier du cas. Le groupe ABC est né, en 2009, de la fusion de deux entités : une entité A spécialisée dans l’accompagnement à l’emploi et gérant des salariés

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de droit privé ; une entité B officiant dans le traitement et l’attribution d’indemnisations à ses bénéficiaires. Cette fusion est particulièrement intéressante par les nombreuses implications qu’elle comporte. Des salariés de statuts, de métiers et de cultures différents et dont les infrastructures et les orientations stratégiques imposées par la nouvelle organisation peuvent être perçues comme sensiblement particulières. Ces spécificités qui ont imprégné le contexte organisationnel ont constitué autant de contraintes qui se sont imposées à ABC dans la mise en place de leur nouveau SIRH et de leur FRH partagée. Afin de mettre en évidence la nature des choix organisationnels stratégiques et opérationnels et l’incidence de la cohérence entre ces derniers sur la position des managers, les données ont été collectées selon trois procédés. Une période d’immersion de 6 mois durant l’année 2015 a permis d’observer directement le contexte réel du personnel en situation de travail. Elle a également facilité la mise en place d’entretiens avec les managers et les spécialistes RH. Sur la base d’un guide d’entretien, les répondants se sont exprimés sur des thèmes ouverts en lien avec la question de recherche. L’accès facilité à un terrain riche en informations nous a permis de rencontrer 55 répondants composés de 43 managers et de 12 spécialistes RH. Les managers sollicités dans cette recherche ont été sélectionnés sur la base du critère d’encadrement d’équipe. Cette population intègre donc des managers de proximité, des managers intermédiaires (responsables d’agence) et des managers supérieurs (directeurs de territoires). La diversité des répondants (géographique, fonctionnelle, hiérarchique) a facilité l’obtention d’une information diverse et la mise en évidence de résultats à la fois complémentaires et divergents. Cela constitue une richesse qui a permis de stimuler la qualité de l’analyse. Enfin, la collecte d’une documentation riche auprès des membres de l’organisation nous a permis la constitution de données secondaires en complément de l’information obtenue par l’intermédiaire des entretiens et des observations. Afin de garantir l’anonymat du cas, les annexes ne comportent que peu de documents relatifs à l’organisation étudiée.

Notre protocole de recherche, incluant les phases d’élaboration théorique, de collecte et d’analyse des données, a été établi dans le cadre d’une méthodologie abductive. Ainsi, la recherche se fonde sur des phases itératives d’exploration de la littérature et d’analyse des résultats empiriques. L’étude des données a été réalisée en recourant au logiciel de traitement NVivo 12. Une analyse heuristique par unités de sens a permis, dans un premier temps, d’identifier les thèmes issus d’un codage ouvert. Par la suite, une analyse thématique a permis d’identifier les désalignements organisationnels et leurs impacts sur les différentes dimensions

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de l’AMO. La combinaison des deux niveaux d’analyse a mis en exergue les facteurs expliquant les désalignements observés et leur influence sur le PFRH via les différentes dimensions de l’AMO.

Plusieurs implications découlent de ce travail. Sur le plan théorique, il aboutit à la production d’un modèle conceptuel ancré dans les théories de l’alignement stratégique (Henderson et Venkatraman, 1989a) et de l’AMO (Appelbaum et al., 2000 ; Bos-Nehles et al., 2013 ; Gilbert et al., 2015). Ce cadre conceptuel assoit l’intérêt de l’étude de la cohérence des choix et de leurs impacts sur les capacités, la motivation et les opportunités de mise en place d’une orientation stratégique. De plus, en étudiant le PFRH à travers l’usage des SI, ce travail mobilise deux littératures très peu abordées conjointement. Sur un plan managérial, cette recherche aborde la question de la reconfiguration des processus organisationnels (reingineering) et souligne son importance dans une perspective d’alignement des champs décisionnels. Cette activité constitue effectivement une ressource supplémentaire dans la mise en cohérence des infrastructures, et notamment dans un contexte de résistance des acteurs au changement. Enfin, cette recherche propose un outil de pilotage global basé sur l’alignement stratégique et suggère d’intégrer la cohérence des choix dans les tableaux de bord de suivi des projets organisationnels.

Afin d’aborder le sujet et les questionnements formulés, ce travail sera structuré selon le plan suivant (voir tableau 0-1). Dans une première partie consacrée à l’état de l’art, nous proposons d’étudier la littérature du PFRH et nous évoquerons, particulièrement, les travaux mobilisant l’AMO dans l’étude du succès de mise en place (Chapitre 1). Par la suite, la notion de cohérence des choix organisationnels sera abordée par le recensement des travaux mobilisant l’alignement stratégique (Chapitre 2). La deuxième partie du présent document sera axée sur la dimension empirique de notre travail de recherche. Elle sera l’occasion de présenter les fondements de l’étude de cas et de présenter le groupe ABC (Chapitre 3). Enfin, ce travail débouchera sur une discussion des résultats obtenus et la proposition d’un modèle de recherche (Chapitre 4).

(29)

Tableau 0-1 : Plan schématique de la thèse

Première partie : Revue de littérature

Fondements et apports théoriques dans le champ d’étude du partage de la FRH

Chapitre 1

Le partage de la FRH : une explication de la mise en place par la théorie de l’AMO

Chapitre 2

Le partage de la FRH : effet de l’alignement stratégique des choix organisationnels sur

l’AMO

Deuxième partie : Cadre méthodologique et épistémologique de la recherche

Présentation du cas et discussion des résultats de la recherche

Chapitre 3

Le cadre opératoire : l’étude de cas unique en recherche qualitative

Chapitre 4

Mode opératoire de l’alignement stratégique dans le partage de la FRH

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Première partie

ÉTUDE DES DÉTERMINANTS DU PARTAGE DE LA

FONCTION RESSOURCES HUMAINES :

UNE EXPLICATION DU SUCCÈS PAR LA THÉORIE DE

L’ALIGNEMENT STRATÉGIQUE ET LA THÉORIE DES

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Le partage de la fonction ressources humaines : une explication

du succès par la théorie de l’AMO

Section 1 - Partage de la fonction ressources humaines : définitions,

typologies et mesures

Le partage de la FRH est un champ de la littérature de la GRH qui a émergé avec la mutation des formes organisationnelles. L’industrialisation et l’impératif de rationalisation des ressources ont abouti à considérer l’individu comme un actif source de valeur ajoutée. Ce dernier est appréhendé comme une véritable ressource humaine à la fois dans le champ académique et dans la sphère de l’organisation. Deux phénomènes se sont alors opérés de manière simultanée (Chambrier, 2000) : d’une part, la récupération par la DRH de certaines activités en lien avec le renforcement d’un rôle plus stratégique ; et d’autre part, la décentralisation structurelle par la relocalisation des pouvoirs dans les établissements. Ce dernier processus, particulièrement, s’est accompagné de la décentralisation des responsabilités RH avec des personnes extérieures au service. Elle s’est traduite par l’implication croissante et progressive des managers de proximité dans la GRH. La littérature aborde le PFRH comme une orientation stratégique reposant sur un double objectif : la participation des managers dans les activités RH et leur association dans les décisions RH. L’implication des managers dans le périmètre de la FRH a suscité une modification substantielle de leurs rôles, mais également de ceux des spécialistes RH dont le repositionnement a été identifié comme un facteur clé de succès du projet.

Ce partage fonctionnel est particulièrement favorisé par la mise en place des SIRH dont l’usage à des fins transformationnelles participe à modifier l’organisation du travail. Ce chapitre sera donc l’occasion de mettre en évidence les déterminants du PFRH, d’aborder le rôle particulier des SIRH dans le phénomène, et enfin de montrer comment le succès de partage de la FRH a été abordé dans la littérature.

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Le partage de la fonction ressources humaines : deux approches

complémentaires

11. Le partage de la fonction ressources humaines : une orientation en lien avec des traditions de gestion

La FRH peut être appréhendée comme « l’ensemble des activités destinées à fournir à l’organisation des ressources humaines nécessaires à son développement » (Valéau, 2013, p. 78) et est étudiée dans la littérature anglo-saxonne à travers les notions de « personnel function » et « HR function » (Currie et Procter, 2001, p. 53). Legge (1999) identifie quatre approches pour définir la FRH : une approche normative, une approche fonctionnelle descriptive, une approche évaluative et une approche comportementaliste.

- La conception normative est axée sur ce que la fonction devrait être. Elle consiste à définir les ressources et les moyens qui permettent à l’organisation d’atteindre ses buts principaux ;

- L’approche fonctionnelle porte sur des dimensions de régulation des relations de travail. Elle met en évidence le rôle prédominant des activités de contrôle et de négociation pour pallier les conflits d’intérêts entre employeurs et employés ;

- L’approche évaluative critique pose le postulat de l’exploitation des employés par l’employeur et envisage la FRH comme l’ensemble des activités qui permettent à l’organisation de s’assurer que le personnel poursuit les objectifs ;

- L’approche « comportementale » est basée sur l’étude des comportements des spécialistes et sur leurs effets sur l’attitude du personnel.

Ces différentes approches résumées dans le tableau 1-1 fondent des paradigmes tantôt distincts tantôt entremêlés et influenceraient la manière dont les organisations appréhendent les rapports en leur sein et par voie de conséquence, la manière dont les politiques et les pratiques RH seraient définies. De même, ces approches donnent des acceptions différentes de la FRH et impactent la manière dont elle sera étudiée dans les travaux académiques (Legge, 1999).

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Tableau 1-1 : Synthèse des approches de la fonction ressources humaines

Approches de la fonction RH

Normative Fonctionnelle Évaluative

critique Évaluative du comportement Principaux processus organisationnels Définition des ressources et objectifs Régulation des relations Contrôle des objectifs Maîtrise des comportements

Source : synthèse des travaux de Legge (1999)

D’une manière plus globale, la FRH concerne un ensemble de processus permettant « l’utilisation optimale de ressources humaines dans la poursuite des objectifs de l’organisation » (Legge, 1995, p. 3). Ces approches mettent en évidence la centralité des ressources comme canal de l’efficacité de la GRH et de l’organisation. La FRH a également été étudiée comme un ensemble de pratiques permettant de répondre aux objectifs de l’activité globale de la GRH dont les principales sont le recrutement, les relations interpersonnelles, la gestion administrative et de la rémunération, la gestion de la rétribution et de la performance, la formation et le développement et la gestion des talents (Davis et Luiz, 2015). Ces pratiques peuvent être regroupées en cycles tels que la sélection, la performance, l’évaluation, la rétribution et le développement (Storey, 1992).

Cette FRH a longtemps été développée et déployée par les spécialistes RH, acteurs évoluant exclusivement au sein d’un service RH physiquement intégré à l’organisation. Mais tout comme le contenu de ses pratiques, la manière dont la FRH opère au sein de l’entité productive a connu des mutations et particulièrement par l’inclusion d’acteurs non spécialisés dans son périmètre. L’évolution de l’environnement concurrentiel des organisations a mené ces dernières à considérer leurs RH comme une variable d’ajustement financière à travers la gestion de la masse salariale, mais aussi comme un actif dont le développement permettrait d’être plus efficace sur la scène de marché. Dans ce contexte, les rôles des experts RH seraient amenés à évoluer conformément à l’analyse de Storey (1992). L’extension de la FRH aux différents niveaux de management de l’organisation, et plus particulièrement aux responsables d’équipe, apparait alors comme une orientation stratégique incontournable. La FRH contribue alors à la coordination et à la canalisation des activités des managers par le travail conjoint entre ces derniers et les experts RH. La collaboration entre les deux parties permettrait de faire émerger

(34)

des effets de complémentarité. Le PFRH constitue en ce point une priorité inscrite dans l’agenda des organisations (Schuler, 1990).

Historiquement, la littérature sur le PFRH connait ses premières contributions dans le début des années 1990 avec des analyses descriptives sur les spécificités géographiques en Europe et Amérique du Nord (e.g. Brewster et Larsen, 2000 ; Hoogendoorn et Brewster, 1992 ; Larsen et Brewster, 2003) et l’étude des modalités de partage sur la performance de l’organisation (e.g. Cascón-Pereira et al., 2006 ; Cunningham et Hyman, 1995, 1999 ; Hall et Torrington, 1998 ; Valverde et al., 2006). Par la suite, et surtout dans le début les années 2000, les travaux se sont davantage focalisés sur l’impact des choix organisationnels en matière de partage sur la performance et les variables attitudinales des managers et experts RH (e.g. Alves, 2009 ; Hunter et Renwick, 2009 ; Perry et Kulik, 2008 ; Whittaker et Marchington, 2003). La diversité des pratiques observées dans les différentes entités ne permet que difficilement aux chercheurs de trouver un consensus sur ce que représente concrètement le PFRH. Les travaux font état d’un clivage entre ceux qui la considèrent comme un processus nécessitant un transfert de responsabilités et ceux qui se focalisent sur le transfert de pouvoirs de décision vers les responsables d’équipe.

12. Une approche axée sur la participation aux activités de gestion des ressources humaines

Dans la littérature anglo-saxonne, les travaux reprennent le concept de partage de la fonction en s’intéressant à la manière dont les managers sont associés à différentes activités RH. Le partage y est étudié sous les termes de « devolution », ou « devolvement » (Cascón-Pereira et al., 2006 ; Cunningham et Hyman, 1999 ; Davis et Luiz, 2015 ; Hall et Torrington, 1998 ; Harris et al., 2002 ; Heraty et Morley, 1995 ; Hoogendoorn et Brewster, 1992 ; Perry et Kulik, 2008 ; Whittaker et Marchington, 2003) qui peuvent être traduits par « décentralisation » et « délégation »6, de « distribution of HRM responsibilities » (Valverde et al., 2006), ou bien encore « involvement in HRM » (Hunter et Renwick, 2009 ; Renwick, 2003). Dans la littérature francophone, les rares travaux qui s’intéressent au phénomène l’étudient uniquement à travers la notion de « partage de la FRH » (Alves, 2009 ; Dany et Hatt, 2009 ; Dietrich, 2009 ; Loubes, 1998).

Figure

Figure 0-1 : Modèle d’alignement stratégique
Figure 0-2 : Contribution principale de la recherche
Tableau 0-1 : Plan schématique de la thèse  Première partie : Revue de littérature
Figure 1-2 : Matrice des rôles de la fonction RH de Ulrich (1998)       Future / Strategic Focus
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