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Une approche basée sur la participation au pouvoir de décision

Le partage de la fonction ressources humaines : deux approches complémentaires

13. Une approche basée sur la participation au pouvoir de décision

Une partie des travaux portant sur le PFRH considère que cette pratique comporte une dimension décisionnelle. Dans cette optique, une nouvelle clarification a été faite pour fixer les frontières avec la décentralisation. Dans ses travaux, Chambrier (2000) étudie la décentralisation comme un processus de transfert des responsabilités vers l’encadrement opérationnel. Ce processus a lui-même deux dimensions :

- une décentralisation structurelle consistant au transfert des unités de décisions RH du pouvoir central à des centres de décisions intégrés dans la DRH, mais situés en périphérie. Elle permettrait de neutraliser les rigidités dans la prise de décisions ; - une décentralisation managériale qui consiste à partager les responsabilités et les

décisions avec des acteurs externes à la DRH. Dans ce processus, les managers recevraient une délégation de services fonctionnels ainsi que des pouvoirs de décision. La perspective offerte par Chambrier (2000) dans cette dernière approche comporte l’intérêt d’intégrer les activités et les pouvoirs décisionnels comme deux pendants de la décentralisation. La proposition faite par l’auteur montre une nuance importante. Alors que la décentralisation est axée sur le transfert de missions et de décisions d’une unité centrale vers une unité périphérique, le partage de la fonction est un processus s’établissant entre les experts et les non- experts. Hoogendoorn et Brewster (1992) précisent clairement ce point : « By decentralization we mean the allocation out to more local parts of the organization of tasks formerly undertaken centrally. By devolution we mean the allocation of tasks formerly undertaken by the personnel specialists to line managers. These are separate, though related, forms of organizational change » (p. 4). Cette précision met en évidence l’opposition entre la décentralisation axée sur le transfert d’une unité à une autre et la délégation dont le partage se fait entre acteurs de différentes fonctions.

Pour Loubes (1998), la délégation du pouvoir de décision est identifiée comme critère de réussite de l’implication des managers dans la GRH. Sur cette base, elle identifie deux modèles différenciés de GRH :

- une configuration où les décisions sont prises par le DRH dans le cadre d’un comité de direction avec une participation des managers ;

- une configuration où les décisions sont essentiellement prises par les managers de proximité, c’est-à-dire seuls ou presque seuls.

Dans cette approche qui pourrait être qualifiée de binaire, le degré de participation des managers

dans les décisions n’est pas proposé comme un continuum. Dans le premier modèle, le niveau

de participation des managers est très faible, voire inexistant, alors que dans le second modèle les managers agissent seuls. Il semble toutefois peu plausible que les organisations s’appuient sur l’un ou l’autre des modèles de manière exclusive. D’ailleurs, Loubes (1998) affirme que ces deux modèles sont étroitement imbriqués et solubles. Les structures pourraient emprunter aux deux configurations laissant émerger des niveaux d’implication des managers plus ou moins importants selon la nature des décisions. Toutefois, ses travaux mettent en évidence le rôle central de l’association des managers à la prise de décisions dans leur satisfaction à l’égard du PFRH. Plus les managers perçoivent une autonomie dans la prise de décisions et plus le partage de la GRH serait effectif. Cette approche pose la dimension décisionnelle comme la pierre angulaire de la mise en place effective du PFRH.

L’importance de l’association des managers dans la prise de décisions a également été soulignée dans un travail de Dany et al. (2008) mené auprès de 3442 entreprises. L’étude porte sur la capacité des acteurs à prendre des décisions à travers le concept d’« influence ». L’étude de la distribution des influences montre alors comment l’association des managers dans les décisions impacte le lien entre intégration stratégique de la GRH et la performance de l’organisation en contexte de PFRH. L’analyse de quatre configurations distinctes met en évidence des impacts significativement différents sur les liens causaux. Il apparait alors que l’intégration de l’avis des managers dans les décisions prises par les experts RH permettrait de créer des conditions plus favorables à l’efficacité de la GRH. L’implication des managers doit alors intervenir à différentes étapes de la GRH, de la formulation stratégique au déploiement des pratiques. De manière inattendue, les résultats de cette recherche montrent que l’attribution démesurée de pouvoirs décisionnels aux managers serait contreproductive et que la recherche d’un équilibre serait nécessaire pour permettre au potentiel de la GRH de se libérer.

En résumé, ces approches du PFRH laissent apparaitre deux dimensions fondamentales : la participation des managers dans les activités RH et leur association dans la prise de décisions. Alors que certaines approches tendent à négliger l’importance de l’association dans la prise de

décisions, d’autres soulignent sa centralité dans l’efficacité de la GRH. La prise en compte de ces deux dimensions est d’ailleurs identifiée comme une condition nécessaire à l’acceptation par les managers de leurs nouvelles responsabilités et la mise en place effective des activités RH (Hall et Torrington, 1998). Dans leur définition, Hoogendoorn et Brewster (1992) conçoivent le PFRH comme « le processus de redistribution ou le transfert de tâches ou activités personnelles traditionnellement assurées par les spécialistes aux managers de proximité »9 (p. 4). Reprise dans de nombreux travaux s’intéressant au phénomène de PFRH, cette définition semble revêtir un caractère prégnant pour décrire une partie du phénomène. Or, une autre frange de la littérature souligne l’importance de l’association des managers dans la prise de décisions. Pour ces raisons, une définition synthétique reprenant ces deux dimensions est proposée dans le cadre de cette recherche. Le PFRH sera donc appréhendé comme : « Le degré de redistribution, vers les managers opérationnels, d’influences, de tâches, et d’activités de gestion des ressources humaines initialement à la charge des spécialistes RH ». Cette définition met en perspective les deux dimensions du phénomène. Les influences sont alors considérées comme la capacité réelle des managers d’interférer dans les processus de décision des champs de GRH (Dany et al., 2008). Cette définition propose également une possibilité de mesure du processus par la notion de « degré » et met en évidence l’importance des acteurs dans le phénomène.

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