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Les associations gaies françaises semblent dès le début du projet déchirées entre plusieurs stratégies. Politiquement on trouve d’un côté la mouvance gauchiste révolutionnaire qui aimerait abolir le mariage, de l’autre la mouvance intégrationiste qui aimerait voir les mouvements gais disparaître par l’acceptation et l’assimilation. Mais, à l’inverse du COC10 néerlandais, stéréotype d’une organisation coincée dans une idéologie dépassée, la plupart des organisations françaises semblent adhérer à l’idée que la possibilité d’un arrangement légal pour les couples gais soit une cause progressiste et juste.

Le vrai problème de la mobilisation gaie française pour le PaCS ne tient donc pas à des divisions idéologiques, mais à une absence de légitimité politique. Les grandes organisations gaies, à savoir le CGL, Act Up et Aides, sont court-circuitées au gouvernement et dans la presse par des groupements alternatifs, pas forcément représentatifs.

PREMIER REPRÉSENTANT DE CHOIX : FRÉDÉRIC MARTEL

Le premier représentant officiel et acceptable est Frédéric Martel, auteur du très débattu Le rose et le noir (1996). Ce livre a déclenché les foudres de l’élite gaie française pour plusieurs raisons dont la principale est la critique du manque de clairvoyance des organisations gaies lors de l’arrivée du sida. Le fait que beaucoup de gais n’aient pas vu venir l’épidémie et aient pensé que ce qui était alors appelé “cancer gay” était avant tout une création du corps médical pour fermer les lieux de convivialité gaie avait déjà été montré par certains chercheurs, comme Michel Pollack11, donc il n’y avait rien d’absolument révolutionnaire dans ces propos.

En fait, le vrai débat n’a pas eu lieu là, contrairement à ce que la presse ou Esprit ont voulu croire, mais autour de la rhétorique République/Communautarisme. Le débat à propos du livre de Martel n’est pas notre principal sujet de préoccupation, mais l’utilisation de certains termes et concepts est révélateur des lignes de fractures qui sont intervenues lors des discussions entourant le PaCS.

La première ligne de fracture est de considérer qu’il y a deux pôles essentiels dans la question gaie française: d’un côté les républicains qui ne veulent pas entendre parler d’identités, de

10 Organisation principale d’émancipation gaie aux Bas, voir plus loin la partie sur les Pays-Bas.11 Fillieule & Duyvendak 1999 : 195.

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l’autre les communautaristes qui rêvent d’un système de ghettos à l’américaine. On trouve d’un côté dans la présentation du débat les “républicains modérés” qui admettent les discriminations au nom du bien commun, mais seulement dans la limite du raisonnable, et dans l’autre les associations gaies qui sont certes “modérées” elles aussi (sauf Act Up, bien sûr), mais dont les demandes sont fondées tout de même sur un modèle communautariste, donc intrinsèquement incompatibles avec la République. Cette façon de présenter les choses n’est pas neutre puisqu’on y trouve d’un côté ceux dont le combat est fondé sur des idéaux républicains, par ailleurs tolérants et modernes (les “républicains modérés”), et de l’autre des associations dont le fondement même est intolérable, mais qui sont tolérées grâce à leur travail sur le sida (Aides et dans une moindre mesure le CGL). Cette présentation des choses pare au contraire les “républicains modérés” de toutes les vertus et enlève toute légitimité aux associations, puisqu’avant tout débat elles sont présentées comme communautaristes.

Le fait que le journal Le Monde du 14 et 15 avril 1996 consacre une page entière au livre et reprenne cette division pré-formatée du débat avec pour titre “De l’outrance des “Gazolines”

à la Gay Pride de juin 1995” est loin d’être neutre: les manifestations gaies sont présentées comme outrancières, effaçant ainsi les revendications politiques qu’elles pourraient porter en leur sein. L’Evénement du Jeudi du 11 avril 1996 titre ainsi son dossier

« Le débat entre le communautarisme et le modèle républicain divise le mouvement gay français: (en gros) Quels droits pour les couples homosexuels?

La polémique sur la demande de légalisation du concubinage est relancée par le livre de Frédéric Martel “le Rose et le Noir”, qui dénonce les dérives du mouvement homosexuel. »

Suit un débat Martel/Lestrade, dans lequel Didier Lestrade tient le rôle du communautariste, affirmant que le ghetto est une réponse à l’incapacité de l’État à protéger et reconnaître les droits des gais, alors que Martel utilise des termes rassembleurs qui font chaud au cœur des lecteurs: « Le droit à la différence conduit à la différence des droits: Être forts, ensemble, avec les autres. »

La question n’est pas de savoir si l’un a raison et l’autre pas, mais de voir comment est articulé le discours. Lestrade exprime une réalité qui s’est vérifiée, en particulier aux Etats-Unis, et se fait piéger par Martel qui parle comme un politique et agite des menaces communautaristes (“il faut refuser une conception de l’État comme une juxtaposition de communautés” comme chapeau d’article). Le paradoxe est qu’ils demandent l’un comme l’autre la fin des discriminations et un statut pour le couple, mais en incluant des analyses (par ailleurs fort intéressantes) influencées par l’expérience américaine. Didier Lestrade permet à Martel, qui utilise pleinement la rhétorique politicienne de l’unité française menacée par les communautés à l’américaine12, de s’imposer comme un interlocuteur privilégié et légitime pour les politiques. Lestrade est érudit, connaît très bien les situations françaises et américaines, a beaucoup d’idées, mais il a permis à Frédéric Martel de s’attirer les bonnes grâces des média et des autorités en le laissant s’accaparer la position du “pédé républicain”, la seule qui donne une légitimité dans le débat. Lestrade est catalogué communautariste, donc infréquentable, Martel est “républicain modéré” donc très fréquentable.

Les articles qui entourent ce débat ne font qu’illustrer ce mouvement de décrédibilisation de Lestrade et d’Act Up. Jean-François Revel, dans Le Point du 15 juin 1996 s’exprime ainsi:

« “Sidaction”: le pas de trop.

(…) Toute maladie, toute mort sont de trop. Mais la dérive d’Act Up est manifeste quand son président professe que dans le combat contre le virus VIH se concentrent tous les combats pour les droits de l’homme.

12 C’est-à-dire telles qu’elles sont pensées en France. Le thème de la déformation et l’utilisation des Etats-Unis comme contre-modèle est présenté par Eric Fassin (1998 et 1999), mais aussi par Denis Lacorne (1997).

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(…) Le président d’Act Up exige que l’on s’abstienne de reconduire à la frontière les étrangers sans papiers quand ils sont séropositifs. Pourquoi pas, d’ailleurs, s’ils sont diabétiques, asthmatiques, gastralgiques? Fort bien , sauf qu’Act Up n’a aucun mandat pour gouverner la France. Si son président veut modifier les lois de la république, qu’il fasse élire des députés, lesquels déposeront des propositions de lois nouvelles. En attendant, avoir une grande gueule et avoir le pouvoir législatif sont deux choses distinctes, qu’il veuille bien s’en souvenir.

Cette dérive communautariste trahit l’esprit de nos lois, Frédéric Martel la dénonce dans une formule de Montesquieu: “le droit à la différence peut conduire à la différence des droits”. Laquelle serait, selon le préambule de notre Constitution, la négation même de la démocratie. »

Ce coup de colère de Revel est un bijou du genre. Analysons… Il reproche, d’un côté, à Didier Lestrade son manque de légitimité démocratique car il n’a pas été élu. Il l’enjoint donc, s’il souhaite être entendu, de former un groupe politique Act Up, et d’avoir des élus qui feront des propositions de lois. Donc Lestrade se doit de créer un groupe politique différentialiste (sous-entendu: homosexuel) car c’est la seule façon d’être entendu en démocratie: pas d’élus qui défendent certaines revendications, pas de voix.

De l’autre, il appelle à ne pas baser ses revendications sur des différences, car cela serait contraire à la constitution, rien de moins. Lestrade ne peut donc pas agir en politique en agitant sa différence, car cela serait inconstitutionnel. S’il veut se faire entendre, il doit monter un groupe politique pour avoir des élus estampillés Act Up (donc des élus gais, Act Up étant une des rares formations à se définir dès le début comme homosexuelle). Cela lui est impossible car s’il fonde sa motivation politique sur une différence, il met son mouvement dans l’inconstitutionnalité.

Il semble que la passion ait poussé Jean-François Revel à se laisser aller. Peut-être par homophobie (c’est à lui seul de pouvoir le dire), peut-être aussi par conservatisme, très certainement par réflexe républicain. En effet, Lestrade ayant été catalogué

“communautariste”, quoiqu’il dise est illégitime avant d’avoir été dit, et tout républicain, progressiste et intellectuel de surcroît, se doit de défendre l’unité nationale en danger.

La deuxième ligne de fracture concerne l’évaluation de ce qui relève du complexe de persécution, comme Martel le dit lui-même :

On m’a opposé à Didier Eribon. Mais Eribon fait du terrorisme intellectuel en empêchant Joffrin ou Jean Daniel de donner leur avis sur la question. Je peux lui répondre, car moi aussi je suis homosexuel. Il flatte le communautarisme homo, c’est assez facile (il cite Annah Arendt à ce propos). Il n’existe que dans un microcosme intello grâce au pouvoir du Nouvel Observateur. 13

Frédéric Martel s’est en effet présenté comme victime du terrorisme d’Act Up parce qu’il avait critiqué l’aveuglement des élites gaies au début de l’épidémie de sida, alors qu’en fait Act Up avait dès le début souligné que c’était son discours d’exclusion, en particulier au nom de son engagement républicain, qui était le plus gênant. Il a ainsi cherché à montrer que les associations gaies sont plus préoccupées par des intérêts mercantiles que militants.

Malgré ce qui est écrit dans la presse généraliste, cette mise en scène du débat permet de présenter Frédéric Martel comme la victime du complot communautariste et d’occulter des questions plus importantes sur ce qu’il représente vraiment. Il est ainsi devenu un spécialiste du “problème gai” (cité entre autres dans Le Monde, Libération et Esprit), proche du Parti Socialiste, appelé par Michel Rocard pour son “expertise” sur le sida. C’est à ce titre qu’il se retrouve dans les services ministériels de Jack Lang tout d’abord, puis de Martine Aubry, lorsque le débat sur le PaCS se fait jour. Caroline Fourest résume un peu crûment la situation:

13 Martel 1999*.

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Martel fait de l’anti-ghetto alors qu’il est dans le ghetto à mort (…) [sa]

présence au PS est la preuve que le PS est homophobe14.

DEUXIÈME REPRÉSENTANT DE CHOIX : JAN-PAUL POULIQUEN

Le second personnage hors-associations qui a une grande légitimité politique et médiatique est Jan-Paul Pouliquen. Il est un des rares à avoir accumulé autant de haine de la part des associations gaies. Il est vrai que son caractère un peu particulier est assez déroutant, et que son égocentrisme légendaire a pu en énerver plus d’un. Mais c’est son attitude vis-à-vis des politiques et des journalistes qui a mis le feu aux poudres. Il s’est en effet imposé comme interlocuteur en usurpant une représentativité associative qu’il n’a jamais eue. Il a ainsi copié le nom et la présentation d’un rapport du Collectif des Usagers du PaCS (regroupant de nombreuses associations, dont Aides, le CGL et Act Up), reprenant leur maquette, mais en en changeant le contenu et l’appelant Le Collectif pour le Contrat d’Union Sociale et le Pacte Civil de Solidarité, par ailleurs domicilié à son adresse personnelle dans le XIème arrondissement de Paris. Il a ainsi (comiquement?) agrafé un papier disant “attention, document inédit, méfiez-vous des contrefaçons” sur la couverture de cette fameuse enquête, envoyée à tous les députés. A la fin figure une liste impressionnante des associations sensées le soutenir, alors qu’interrogées, celles-ci affirment effectivement soutenir le Collectif des Usagers, et non pas Pouliquen.

On lui reproche ce plagiat, mais surtout son usurpation de légitimité, ce qui lui permet de passer pour un associatif représentatif, alors qu’il ne semble représenter que lui-même. Il est aussi réputé proche du Mouvements Des Citoyens (MDC) de Jean-Pierre Chevènement.

Le rôle de Pouliquen est fondamental car il est chargé d’étouffer la parole associative. (…) Si c’est lui et Martel qui représentent les associations, ce n’est pas un hasard, loin de là. 15

Jusqu’en juin 1999, Pouliquen est régulièrement consulté par des nombreux journalistes. Il est un indicateur difficile à éviter car il a fait un travail de fourmi auprès de Jean-Pierre Michel et est le premier à offrir ses services, en particulier ses dossiers de presse. Comme l’explique Blandine Grosjean16, pour les journalistes qui n’ont pas leurs entrées dans les ministères, il est une précieuse source d’information, et qu’il soit légitime ou pas n’est pas le genre de question que se posent des journalistes à la recherche de la moindre information. Seules Blandine Grosjean (Libération) ou Clarisse Fabre (du Monde), qui suivent le dossier au jour le jour, ont pu se permettre de se passer rapidement de cet informateur encombrant grâce aux réseaux d’informateurs qu’elles se sont constitués. Les autres journalistes, moins proches du dossier, doivent se contenter de ce qu’ils trouvent, et donc de l’aide de Pouliquen.

Après la mini-tragédie du 17 octobre17, Pouliquen essaie de se mettre à la tête de la manifestation organisée par le Collectif des Usagers qui se voulait apolitique, sans élu, et il en est chassé par les différentes associations, passablement agacées. Pouliquen est appelé par certains “l’alibi associatif”: il ne représente pas grand monde mais a réussi à s’imposer au culot comme un interlocuteur incontournable.

On ne peut pas empêcher Martel et Pouliquen d’apparaître dans ce dossier, car ils sont là depuis longtemps et sont devenus légitimes. Pouliquen est à l’origine du PaCS et Martel a sorti ce livre. Ils sont cons mais respectables: ils se trompent mais sont dans leur idée. Les politiques veulent des homos propres et pas radicaux, alors qu’à Act Up, comme le dit Mangeot “on voulait être infréquentable”. 18

14 1999*.

15 Fourest 1999*.

16 2000-2*.

17 Le manque de mobilisation de la majorité permet à l’opposition de droite de réussir à faire voter une exception d’irrecevabilité sur le projet.

18 Lestrade 2000*.

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Le pouvoir politique et les média se sont donc choisis deux interlocuteurs taillés sur mesure, qui leur permettent de légitimer leurs prises de positions tout en évitant de se retrouver devant d’éventuelles revendications publiques gênantes de la part du réseau d’associations gaies regroupées ensuite au sein du Collectif des utilisateurs du PaCS. Frédéric Martel en est la caution “intellectuelle” républicaine, et Jan-Paul Pouliquen la caution associative, “créateur”

du PaCS, cependant bien plus proche du MDC que du Collectif des Utilisateurs, qu’il utilise pourtant abusivement.

UNE DIVISION APPARENTE DU MOUVEMENT ASSOCIATIF

Les associations gaies françaises peuvent être regroupées grossièrement en trois groupes. Le premier est composé de Aides et de toutes ses antennes régionales, et regroupe plusieurs milliers de bénévoles à travers la France. Dès l’origine cette association cherche à ne s’occuper que du Sida, en essayant d’être le plus apolitique possible, gommant même une éventuelle identité gaie, pourtant largement présente. En son sein de nombreux groupes de travail et des cercles de paroles s’intéressent très tôt à ce qui deviendra le PaCS. En effet, de nombreux couples gais sont victimes de discriminations lorsque le sida survient: visites interdites à l’hôpital, expulsion du logement commun, héritage allant à la famille du défunt, etc. Au sein du groupe de travail se trouvent de nombreux intellectuels, mais généralement le besoin de rassembler des fonds pour lutter contre le sida a tendance à calmer les éventuelles tentatives de politisation.

Fillieule et Duyvendak19 expliquent très clairement cette pression pécuniaire:

The administration constantly pushed to obtain subsidies and integration with government bodies for managing the epidemic, such as the Agence Nationale de la Recherche sur le Sida (ANRS) and the Association Française de Lutte contre le Sida (AFSL). This desire to integrate into the decision-making structures of the state and the diversification of the groups of people under its charge had several effects. First, homosexual groups, inside and outside these associations, started to feel a sense of depossession, as much from the growing degaying within the associations as from the fact that people with aids had been deprived of a direct voice of deference to professionals speaking on their behalf (one start to speak of an “aids establishment” and of the “aids business”). Second, the methods of managing the aids problem through associations go hand in hand with a political neutrality, which prevented the adoption of any critical stance vis-à-vis the numerous and obvious deficiencies of governmental politics, especially in terms of prevention.

Le deuxième groupe rassemble de nombreuses associations gaies, la plupart regroupées au sein du Centre Gay et Lesbien (CGL): il s’agit d’associations religieuses, culturelles, de jeunes, de séropositifs, de femmes, associations régionales ou nationales. Leur réunion au sein du CGL leur permet d’offrir une façade visible pour les pouvoirs publics, qui pourtant font souvent la sourde oreille, en particulier à Paris20, la province étant parfois bien mieux lotie (Nantes, Rennes, Strasbourg, Lille ou Toulouse).

Enfin, le troisième groupe est composé d’Act Up et de ses groupes régionaux, dont Paris est le plus puissant. Le concept est importé des Etats-Unis par Didier Lestrade, Pascal Loubet et Luc Coulavin en 1989, avec une technique de gestion démocratique inédite, une esthétique particulière (le noir, le rose et le blanc et un graphisme simple et régulier), et un profil politique assez agressif et médiatique. Les activistes d’Act Up sont en grande majorité des hommes homosexuels (76% d’hommes à Act Up contre 57% pour Aides, à 68% homosexuels

19 1999 : 197.

20 Le maire Jean Tibéri (RPR) leur refuse les subventions, alors que la mairie sait se montrer très généreuse envers d’autres associations, en particulier les associations chrétiennes.

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à Act Up contre 44% pour Aides), comme le montrent Fillieule et Duyvendak21, ce qui explique aussi ce profil gai assez dur. A la différence d’Aides qui dépend en grande partie des pouvoirs publics, Act Up ne vit que de dons (particuliers et mécènes célèbres comme Yves Saint-Laurent), ce qui le rend beaucoup plus indépendant.

A l’origine Act Up n’est que très peu intéressé par le PaCS, soit parce que jusqu’alors le sida et l’aspect médical de sa lutte semble largement prioritaire, soit parce que l’égalité totale (donc l’accès au mariage) est demandée. Le succès des multi-thérapies permet à Act Up de se concentrer sur des sujets moins médicaux, et très vite le retard (sur Aides, en particulier) est rattrapé:

Act Up a soudain eu honte d’être en retard sur Aides. Très vite une commission mariage et un observatoire sont créés. L’influence de Caroline Fourest est sur ce point indéniable. Elle a éduqué Act Up sur le sujet.22

Vis-à-vis du PaCS, Act Up se profile alors sur un terrain inédit en France, celui de l’usager politique (repris par la suite par les autres associations). Ce profil est très sévèrement critiqué par les “républicains modérés” comme Patrick Bloche et Frédéric Martel, essentiellement parce qu’il rompt avec la vision traditionnelle du citoyen abstrait qui ne raisonne que pour le bien commun. Act Up, au contraire, cherche à voir le politique d’un point de vue personnel, en tant que “consommateur” politique. La subjectivité revendiquée d’Act Up prend sa source dans la prise en charge par les séropositifs de leur santé, aux dépends du pouvoir médical traditionnel. Transférée en politique, cette subjectivité implique la remise en cause des légitimités traditionnelles des experts reconnus:

A priori, je trouve très bien le recours aux experts. Nous aussi nous faisons

A priori, je trouve très bien le recours aux experts. Nous aussi nous faisons