• Aucun résultat trouvé

Plus tard dans la matinée, Éric est debout, au-dessus d’un comptoir, en train de répertorier les scolytes récoltés dans les pièges. Son cellulaire, reposant sur une table non loin de là, se met à SONNER. Il se dépêche à enlever ses gants, puis va répondre :

75 ÉRIC

Allô ?

(il reste silencieux un moment, subjugué) Quoi ? Mais pourquoi vous allez pas la déprendre ?

(il fronce les sourcils tout en essayant de comprendre) Bon, touchez à rien, j’m’en viens. Non, appelez pas la police, c’est pas nécessaire. Bye.

Il ferme son cellulaire, tout décontenancé. 98. EXT. TERRITOIRE DE L’ORME Ŕ JOUR

Nous sommes rendus à la fin de l’après-midi. Le soleil est sorti et la forêt demeure encore humide à cause de la tempête de la veille. Les mouches ont commencé à sortir, et c’est pourquoi on voit Lionel et Éric vêtus en long malgré la chaleur et portant aussi des filets sur leur tête. Les deux hommes descendent du quatre-roues de Lionel; ils observent tous les deux le grand orme au loin.

ÉRIC

Qu’est-ce que c’est qu’ça ? C’t’un rêve, ou quoi ?

Il se tourne vers Lionel, qui baisse ses yeux en hochant la tête, découragé. Les larmes le prennent et le paralysent; il ne sait pas quoi dire ou quoi faire. Éric s’avance alors vers l’orme, en hâtant le pas :

ÉRIC Mélina ! Mélina !

Arrivé sous l’orme, il se met à grimper sur son tronc et atteint la canopée, où Mélina est prisonnière. Cette dernière est couchée de manière fœtale, enserrée dans l’amas de branches et de feuilles de l’orme tout entortillés. Troublé par ce phénomène étrange et hallucinant, Éric observe Mélina à travers les ouvertures de l’amas et parvient à y passer sa main pour la toucher. La peau de Mélina est toute blanche, la faisant ainsi ressembler à une morte.

ÉRIC

(tournant sa tête vers Lionel) Elle respire encore…

Éric redescend ensuite de l’arbre pour aller rejoindre Lionel qui s’était un peu plus approché de la scène. Lionel suit Éric qui se dirige vers le quatre-roues, tout en retournant son regard vers l’orme :

LIONEL

Les vieilles du village ont dit qu’i’ est souvent arrivé des choses bizarres icitte… que c’est une forêt hantée, surtout pendant les soirs de pleine lune.

Ils arrivent devant le quatre-roues, où Éric prend une hache et des lunettes de protection, en plus d’une couverture isolée (style sac de couchage) pour Mélina. En le voyant faire, Lionel se met à avoir les yeux pleins d’eau :

LIONEL

Tu peux-tu ben m’dire qu’est-ce qu’la nature me veut, pour me voler ma femme, pis ma fille ? Qu’est-ce que j’ai ben pu faire au bon Dieu, moi ?

ÉRIC

J’sais pas c’qui s’passe, mais Mélina avait un genre de don avec les arbres. Peut-être que c’est elle qui a monté tout ça…

Lionel retient Éric par le bras, pour exprimer sa détresse et son inquiétude. ÉRIC

Craignez pas, j’y f’rai pas mal… j’sais c’que j’fais.

Éric retourne vers l’orme, décidé, mais aussi quelque peu effrayé. Arrivé devant l’arbre, il enlève le filet qu’il avait sur la tête, pose par terre la couverture, met des lunettes protectrices et attache la hache à sa ceinture.

Éric se remet à escalader l’arbre pour accéder aux grosses branches. Tout en s’approchant de Mélina, il ressent de plus en plus d’émotions. Il passe sa main à travers une ouverture dans l’amas de branches et de feuilles et pose ses doigts sur le cou de Mélina pour sentir les pulsations de son corps (SONS DE BATTEMENTS DE CŒUR). [La MUSIQUE reprend]. 99. EXT. / INT. BAR (RUE SAINT-JEAN) Ŕ NUIT

[RETOUR AUX FLASH-BACKS DE MÉLINA] : Mélina marche dans la rue en se tenant les bras pour garder sa chaleur. Elle observe des fêtards qui fument dehors, à moitié saouls, puis lève les yeux vers le ciel, dont on ne voit pas les étoiles.

Mélina entre finalement dans un bar où sont présents les amis de Hugues. Ils la saluent chaleureusement après l’avoir remarquée. Mélina marche encore un peu et voit Hugues en train de vider un shooter d’alcool en compagnie d’une fille. Ils s’embrassent ensuite. En les voyant, Mélina sort immédiatement du bar et s’enfuit en courant dans la rue.

Hugues, l’ayant remarquée du coin de l’œil, sort sur le trottoir situé en face du bar, voit Mélina fuir et ne sait trop quoi faire. Ses amis, qui sont sortis eux aussi, sont mal à l’aise et n’osent rien dire.

100. EXT. PLAINES D’ABRAHAM Ŕ NUIT

77 101. INT. SALON DE MÉLINA Ŕ JOUR

[SUITE] : Hugues, avec son sac à dos, est sur le point de partir en voyage. Il vient donner un dernier baiser à Mélina, assise par terre et toute en larmes. Un peu après qu’il a fermé la porte, elle se lève vers la fenêtre pour le regarder marcher dans la rue. Il tourne la tête en direction de la fenêtre, mais Mélina se dépêche aussitôt à fermer le rideau de la fenêtre pour voiler la vision.

MÉLINA (V.O. EN ÉCHO) Reste-moi, Nature, reste-moi.

102. EXT. TERRITOIRE DE L’ORME Ŕ JOUR

[RETOUR À LA RÉALITÉ] : En voyant ainsi Mélina, Éric éprouve des frissons tellement il ressent des émotions pour elle. Il devient de plus très furieux en voyant l’arbre enlacer sa pauvre copine. Il prend alors sa hache qui pendait à sa ceinture et se met à COGNER sur l’une des grosses branches autour de Mélina, mais l’écorce est si rigide qu’il n’arrive pas à la percer. À travers les ouvertures du cocon, on voit Mélina, toujours en train de dormir, bouger sous les COUPS DE HACHE d’Éric; elle émet quelques gémissements et des SONS DE SOUFFRANCE.

Épris à la fois d’horreur et d’un désir très violent, Éric continue de BÛCHER TOUJOURS PLUS FORT. Il devient tout rouge, se met à suer, et son CŒUR se met à BATTRE TRÈS FORT. Il entend des SONS DE VOIX DE FEMMES TRAGIQUES sortir de l’arbre. Après avoir réussi à percer l’écorce de la grosse branche, Éric devient tout étourdi, des coulisses de sang sortent de ses oreilles. Il porte ses mains à ses tempes, tellement les VOIX DEVIENNENT FORTES ET AIGUËS, et la souffrance insupportable. Il perd finalement connaissance et se met à dévaler l’arbre tout en laissant tomber la hache par terre.

Lionel, ayant suivi la scène non loin de là, s’approche d’Éric en courant : LIONEL

Éric !

Lionel se penche vers lui et, le voyant inconscient, lève son regard vers l’orme, apeuré, dont l’image en contre-jour dans le soleil lui donne une allure imposante, fantastique. Lionel finit par reprendre ses esprits et s’en va en traînant Éric vers le quatre-roues.

Immobile et inconsciente dans l’arbre, Mélina laisse couler des larmes (de ses yeux fermés), qui dévalent ses joues. On entend les GÉMISSEMENTS DE MÉLINA EN V.O., ACCENTUÉS PAR L’EFFET D’ÉCHO.

103. EXT. ENTRÉE Ŕ MAISON DE SOPHIA (HAUT DE LA BOUTIQUE) Ŕ NUIT [RETOUR AUX FLASH-BACKS DE MÉLINA] : En pleine nuit, dans la pluie, Mélina cogne à la porte de Sophia. Cette dernière ouvre et Mélina lui saute aussitôt dans les bras. Sophia tente de la calmer, tout en arborant un sourire douteux.

104. INT. SOUS-SOL DE SOPHIA Ŕ NUIT

[SUITE] : Sophia est debout devant la table où est assise Mélina. Les deux femmes sont face à face. Après avoir médité un certain temps les yeux fermés, Sophia tend un breuvage fumant à Mélina. La jeune femme est toute blême et cernée, et tremble en regardant le breuvage obscur, dont la vapeur et les odeurs enveloppent son visage. Elle relève ensuite le regard vers Sophia, qui l’observe gravement avec ses yeux noirs. On voit les yeux de Mélina de plus près, tout rouges et criants de détresse. [La MUSIQUE prend fin].

105. EXT. TERRITOIRE DE L’ORME Ŕ JOUR / NUIT / JOUR / …

[RETOUR À LA RÉALITÉ] : Quelques semaines ont passé : nous sommes maintenant en plein cœur de l’été, début juillet. Partout, la nature resplendit, les SONS DE LA FORÊT sont vivifiants, le temps est chaud, doux et ensoleillé. L’orme est toujours comme il était, mais tranquillement, on entend des SONS DE CRAQUEMENTS DE BRANCHES ET DES FEUILLES QUI SE FONT SECOUER : les branches de l’arbre se RELÂCHENT ensuite rapidement vers le ciel pour permettre à l’arbre de reprendre sa forme de parasol et d’arborer ses feuilles et ses fruits.

Mélina, encore toute pâle et inconsciente, se laisse glisser tout au long des branches et du tronc de l’orme. Elle aboutit par terre en roulant un peu sur elle-même et en atterrissant sur la couverture qu’Éric avait laissée au pied de l’arbre. Elle reste immobile pendant un certain temps sur le sol, couchée sur le ventre. Puis, Mélina relève lentement sa tête tout en clignant souvent des yeux; elle semble encore endormie et aussi illuminée par la lumière du jour. Elle est si engourdie qu’elle ne porte pas attention au nuage de moustiques qui l’enveloppe.

Tout en essayant de se relever, elle a une VISION de Luce devant elle. Mélina ouvre grand les yeux, se lève pour aller lui tendre les bras, mais une fois arrivée près de la vision, celle-ci s’évanouit et Mélina perd l’équilibre; elle trébuche par terre. Trop faible et abattue par la fatigue, elle reste couchée sur le dos à absorber la légère pluie chaude qui se met à tomber. Quelques PLANS [ELLIPSES] montrent Mélina dormir pendant trois jours :

[MÊME PLAN, PLUS TARD] : Il fait maintenant nuit et un brouillard enveloppe le corps de la jeune femme qui est couchée de la même façon sur le sol. Elle se retourne sur le côté en frissonnant, ses bras tirant la couverture qui était restée près d’elle, et dont le revêtement imperméable fait en sorte qu’elle reste chaude malgré la pluie.

[MÊMES PLANS, PLUS TARD] : Le soleil doré se lève et éclaire le visage de Mélina qui, dans le plan suivant, est remplacé par la pleine lune argentée.

[MÊME PLAN, PLUS TARD] : Le lendemain, Mélina se retourne sur le ventre, toujours prise dans un profond sommeil; un vent chaud vient bercer ses cheveux.

[MÊME PLAN, PLUS TARD] : La dernière nuit prend fin et le lever du soleil pointe dans le ciel. Mélina est maintenant couchée sur le dos, les bras étendus chaque côté de son corps, la couverture recouvrant à moitié le corps de la jeune femme en ce temps caniculaire.

79 Tout autour de Mélina, des plantes se mettent à bouger et à la toucher, des insectes rampent tout au long de ses bras et dans ses cheveux.

Enfin, on entend le CHANT DU GRAND PIC qui approche et effraie la petite faune, ainsi que les plantes qui redeviennent aussitôt immobiles. Le pic atterrit sur le torse de Mélina et, de son bec, pousse sur la joue de la jeune femme pour la réveiller. Cette dernière tourne la tête et ouvre les yeux en sursautant : devant elle, le pic n’est plus là, ni les autres créatures enchantées qu’elle sentait dans son sommeil.

Mélina se ressaisit, se frotte les yeux; elle semble à la fois étourdie et aveuglée par le soleil, que les branches des arbres laissent traverser. Peu à peu, en reprenant ses esprits, la jeune femme remarque toute la beauté de la forêt dans son plus beau jour d’été. Elle se relève tout en regardant autour d’elle, les yeux pleins d’admiration et d’émotion. Elle sourit.

106. EXT. RUISSEAU (DANS LA SAPINIÈRE) Ŕ JOUR

On voit le visage de Mélina dans l’eau du petit bassin. Elle semble hypnotisée par son reflet. [AUTRE PLAN] : On voit maintenant Mélina à partir de la rivière, sous l’eau : elle avance ses mains pour prendre de l’eau, ce qui défait soudainement l’image de la jeune femme.

[PLAN DE MÉLINA AU-DESSUS DE L’EAU] : elle porte ses mains à sa bouche pour boire, en fermant les yeux. La jeune femme savoure la fraîcheur de cette eau et fixe pendant un moment le vide devant elle avec un air décidé. Son regard se pose ensuite sur son torse, que le col de son gilet, légèrement entrouvert, découvre légèrement; elle pose alors sa main sur sa poitrine en fermant les yeux et en souriant; sa maladie de peau semble guérie.

Mélina quitte les lieux avec son sac et la couverture sur le dos en direction du sentier, gourde remplie en mains dont elle tente de refermer le couvercle.

107. EXT. SAPINIÈRE Ŕ JOUR

Mélina, portant un filet sur la tête pour se protéger des mouches, se promène dans les bois; le temps est doux et nuageux. Elle marche lentement, vu la lourdeur de son équipement, et pour observer la nature chancelante qui s’épanouit autour d’elle. Sa jambe gauche semble un peu blessée, ce qui la ralentit aussi. Parfois, elle s’arrête pour se reposer, pour frôler les feuilles des arbres avec ses bras dénudés, pour cueillir quelques plantes et sentir leur arôme, ou des fruits qu’elle déguste.

Le temps se rafraîchit et une douce brume s’installe progressivement. Mélina retire le filet de sa tête et continue de marcher tout en observant le brouillard voiler la forêt; cela ne l’apeure pas et elle continue sa route, comme si elle entrait une fois de plus dans un rêve...

108. EXT. CÉDRIÈRE Ŕ JOUR

Mélina aboutit finalement dans la cédrière appartenant à son père, dont on distingue les longs troncs bruns des arbres dans le brouillard, surplombant des îlots de mousse et des trous d’eau noirâtres. On entend alors DES BRUITS DE HACHE fendre du bois, un peu plus au loin, et qui résonnent comme en écho dans tout le boisé.

Au fur et à mesure que Mélina se rapproche des sons, elle se met à ressentir un certain vertige; sa vision se brouille; elle ralentit le pas et tente de demeurer plus attentive aux SONS qui deviennent DE PLUS EN PLUS FORTS, LOURDS, comme s’ils venaient heurter son corps, sa tête… Le brouillard se dissipe peu à peu pour laisser paraître tout près une silhouette masculine et familière. L’homme est de dos, torse nu, en train de couper du bois, dont les SONS, maintenant PLUS CLAIRS, RÉSONNENT MOINS EN ÉCHO.

Mélina perd de plus en plus l’équilibre et s’appuie sur un gros cèdre. Ayant entendu du bruit, l’homme abaisse sa hache et se retourne : c’est Éric. Aussitôt, son visage exprime à la fois le trouble et l’émerveillement, face à cette inexplicable surprise. Ils restent pendant un moment à se regarder, ébahis, enchantés; Mélina émet un sourire, ses yeux se remplissent d’eau et restent fixés sur Éric alors que son sac dévale ses bras et son dos pour tomber par terre.

MÉLINA Éric…

Mélina s’empresse de se rapprocher de lui, mais ce dernier recule un peu. ÉRIC

On s’connaît ?

Mélina s’immobilise aussitôt et le regarde avec des yeux troublés. ÉRIC

D’où c’est qu’tu viens ?… t’es…

[FLASH-BACK] : Entre-temps, on voit les mains d’Éric toucher le visage blême et inconscient de Mélina, emprisonnée dans les branches de l’orme. Dans un autre plan, on voit aussi Lionel, les larmes aux yeux, en train de CRIER en direction de l’arbre.

ÉRIC

(il porte sa main à la tête, qui lui fait mal) …t’es la fille que j’vois tout l’temps dans mes cauchemars !

Éric s’approche d’elle, alors qu’elle avait baissé son regard, ne comprenant plus rien. Éric lui prend les épaules; Mélina le regarde profondément dans les yeux :

ÉRIC

(il sourit légèrement) Mais… t’es vivante !

Mélina lui sourit elle aussi et acquiesce de la tête, émue. Il la prend dans ses bras, lui caresse le dos, avant de fermer ses yeux pour tenter de se remémorer le souvenir de cette mystérieuse et séduisante femme : son odeur, la couleur de ses cheveux... Cependant, épuisée et prise par tant d’émotions, Mélina sent ses paupières s’alourdir et son corps perdre des forces; elle tombe endormie et son corps devient tout mou. Éric sort aussitôt de sa bulle contemplative et se dépêche à la ranimer.

81 ÉRIC

Eh, non ! Youhou, réveille-toi ! Réveille-toi !

Mélina reste sans connaissance, mais semble dormir profondément. Il la prend pour la transporter dans ses bras.

ÉRIC (désemparé) Merde…!

109. EXT. CAMP D’ÉRIC (PETITE ÎLE) Ŕ SOIR

Assis au coin du feu, Éric mange son souper dans une casserole; il observe Mélina en train de dormir, étendue sur un petit matelas et enveloppée d’une couverture. Il la trouve belle. Peu après, Éric tend le bras pour attraper la bouilloire qui chauffe au-dessus du feu. Alors qu’il est en train de verser l’eau dans une tasse, Mélina émet quelques petits sons. Éric devient un peu agité, pose ses affaires par terre et se dirige vers la jeune femme. Cette dernière ouvre les yeux et sursaute en voyant le visage du jeune homme près du sien, en train de l’observer lui aussi.

ÉRIC Ça va ?

Elle hoche lentement la tête et, tout en se redressant, observe devant elle le lac et les arbres qui lui sont familiers, et le campement d’Éric : son petit camp en bois rond, ses billots de bois, ses bagages, ses outils.

MÉLINA J’suis au lac à mon père ? !

ÉRIC Hein ! C’est toi, la fille du fermier ?

Ils se regardent quelques instants et Mélina, un peu étourdie, se passe la main sur la tête. MÉLINA

Est-ce que t’as d’l’eau ? J’ai tellement soif… Éric va chercher la gourde de Mélina et lui tend.

ÉRIC

Tiens… moi, i’ m’reste p’us d’eau, j’vas r’tourner en chercher à source demain matin. Sinon, i’ a toujours l’eau du lac, mais c’est mieux d’la faire bouillir avant…

MÉLINA Pis toi, qu’est-ce tu fais ici ?

ÉRIC

J’fais d’l’aménagement pour ton père. J’ai eu un gros accident i’ a que’qu’ s’maines; j’suis tombé d’un arbre pis j’ai perdu connaissance. C’est ton père qui m’a r’trouvé.

Mélina lui tend sa gourde.

ÉRIC Merci.

(il boit)

Depuis c’temps-là, j’ai des gros maux de tête pis j’perds souvent la mémoire. J’ai même dû laisser ma job à Québec… pis j’sais même pas si j’vas pouvoir continuer mes études…

Mélina se lève pour aller s’asseoir près d’Éric, les yeux grands ouverts de stupéfaction et d’inquiétude.

MÉLINA Est-ce que tu vas pouvoir guérir ?

ÉRIC

(il sourit en détournant le regard, gêné)

Ben, i’ paraît qu’avant, j’avais une blonde herboriste… peut-être qu’e’ va pouvoir m’aider..?

Mélina prend le visage d’Éric dans ses mains et l’observe avec amour et en lui souriant, pour lui confirmer que son intuition était bonne, à savoir que Mélina avait bien été sa copine jadis. Il pose à son tour ses mains sur le visage de Mélina, qu’il laisse ensuite dévaler sur les épaules de la jeune femme, puis sur ses bras. Il observe bien tout son corps et finit par lui prendre les mains et par la serrer contre lui. Mélina ferme les yeux et se laisse bercer par toute cette tendresse nouvelle, si ouverte, si spontanée.

Éric se détache ensuite et s’empare de la gamelle qu’il avait mise sur le feu plus tôt pour réchauffer de la nourriture. Il la tend à Mélina, qui s’empresse aussitôt de manger.

ÉRIC

L’docteur a dit que j’devrais r’trouver la mémoire progressivement… mais pour ça, j’dois prendre du repos. Quand j’me sens en forme, j’suis quand même capable de faire