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le Mutation de récepteur RCPG quelconque Mesure par LASER

Chapitre 2 : La quantification par dilution isotopique de peptides peptides

I. Historique et fondements de la méthode SID

I.A. Les travaux pionniers en spectrométrie de masse par dilution isotopique (SID-MS)

Le développement de la technique de dilution isotopique a historiquement débuté avec la publication par Barr et al. de travaux qui traite de la première tentative de quantification de protéine par une méthodologie de type « bottom-up » faisant appel à la dilution isotopique en spectrométrie de masse.139 Le sujet de cette étude était la quantification de l’apolipoprotéine (apo)-A-1 en utilisant des peptides de références synthétisés suivant une stratégie Fmoc, ouvrant ainsi la voie au marquage chimique de biomolécules. Ces peptides étaient marqués par du 2H et par du 13C.140 Ces éléments ont été introduits grâce à la Leucine-[D3] et à l’alanine-[13C3] dans 3 peptides protéotypiques de

139 J. R. Barr, V. L. Maggio, D. G. Patterson, G. R. Cooper, L. O. Henderson, W. E. Turner, S. J. Smith, W. H. Hannon, L. L. Needham, E. J. Sampson, Clin. Chem. 1996, 42, 1676–1682.

140 Notation utilisée pour décrire un atome et ses isotopes ௓ܺ, où A est le nombre de nucléons et Z le nombre de protons. Généralement, seul le nombre de nucléon est indiqué à côté du symbole atomique ; le nombre de protons pouvant être facilement retrouvé grâce à la classification périodique des éléments chimiques.

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1. Ces peptides « protéotypiques » sont des peptides dont la séquence est caractéristique et unique à une protéine dans le contexte d’un protéome donné, ce qui permettra une détection efficace en MS.141 Afin de quantifier les 3 peptides de référence marqués par ces isotopes, l’équipe a procédé à une analyse de l’azote et des acides aminés des peptides. Expérimentalement, il s’agissait d’additionner deux peptides de référence avant digestion trypsique. Le premier peptide donnait une première estimation de la quantité d’apo-A-1 tandis que le second permettait de confirmer la quantité calculée. Le troisième peptide était, quant à lui, ajouté après digestion trypsique d’(apo)-A-1 et était utilisé pour obtenir une mesure absolue. Les résultats obtenus ont été d’une précision impressionnante avec des coefficients de variation de 4 % environ. L’objectif des expérimentations étaient alors de développer une alternative à la détection basée sur des méthodes immunochimiques de mesures d’épitopes pour la quantification de protéines. Un inconvénient de la méthode était, cependant, la nécessité de fournir du matériel en quantités importantes, parfaitement caractérisé et pur. En l’occurrence, il s’agissait de la protéine (apo)-A-1 purifiée et caractérisée à environ 1mg/mL et certifiée sans aucune dégradation ni modification. Compte-tenu du fait que les peptides quantifiés contenaient des acides aminés modifiables et de l’absence de contrôle du taux de digestion trypsique, la quantification par cette technique de traces d’(apo)-1-A dans un milieu biologique complexe est sujet à questionnements. Le fait est que 44 % de l’imprécision expérimentale était attribuable aux différences entre les divers échantillons issus de la digestion trypsique plutôt qu’à une erreur analytique.

En ce qui concerne les peptides, Stocklin et al. ont développés en 1997 une expérimentation par dilution isotopique pour déterminer les niveaux de pro-insuline, d’insuline et de peptide-C142

contenu dans du sérum de personnes en bonne santé et de patients diabétiques.143,144 Ils ont produits des analogues de ces trois polypeptides marqués par 15N et/ou 2H grâce à des bactéries E.

coli, ouvrant ainsi la voie du marquage métabolique. Ces analogues ont ensuite été utilisés comme

étalons internes dans des expériences de type « top-down » qui consistent en l’analyse par spectrométrie de masse des protéines intactes. La détection et la quantification de ces polypeptides ont pu être réalisées avec succès grâce à un enrichissement efficace des molécules cibles avant analyse par spectrométrie de masse. En revanche, la sensibilité des méthodes de type « top-down » en MS est limitée par l’importante distribution des états de charge des protéines ; ceci ayant pour conséquence le basculement vers une approche « bottom-up » pour la détection et la quantification des larges protéines de plus de 15 kDa (voir Figure 33 ci-dessous). Dans ce type de stratégie, les

141 P. Mallick, M. Schirle, S. S. Chen, M. R. Flory, H. Lee, D. Martin, J. Ranish, B. Raught, R. Schmitt, T. Werner, B. Kuster, R. Aebersold, Nat. Biotechnol. 2007, 25, 125–131

142 Peptide de connexion entre les chaînes A et B de l’insuline possédant également une bioactivité.

143 R. Stocklin, L. Vu, L. Vadas, F. Cerini, A. D. Kippen, R. E. Offord, K. Rose, Diabetes 1997, 46, 44–50

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analyses s’effectuent sur des peptides après digestion enzymatique de la(les) protéine(s) d’intérêt. Dans ce cas-là, les méthodes de quantification absolue, qui reposent sur la dilution isotopique, nécessitent une première d’analyse afin d’identifier, de façon expérimentale (de novo) ou prédictive (recherche de séquences peptidiques dans la séquence de la protéine), la signature peptidique de(s) la(les) protéine(s) considérée(s). Dans un second temps, un étalonnage interne est effectué avec un analogue d’un peptide protéotypique et marqué par un isotope stable. Celui-ci est alors introduit dans l’échantillon considéré en quantité définie et connue avant analyse par LC-MS. Ce type d’étalonnage permet ensuite de réduire les biais dû à la quantification et liés à des effets de matrice, d’efficacité d’ionisation et de réponse instrumentale.

Figure 33 : Représentation schématique des stratégies « bottom-up » (en bas), « middle-down » (au milieu) et « top-down » (en haut). En stratégie « bottom-up » les protéines sont digérées par une enzyme, le plus souvent avec de la trypsine, pour obtenir des peptides protéolytiques très courts, c’est-à-dire obtenus par la coupure enzymatique d’une protéine. L’approche « middle-down » se sert d’enzymes type Glu-C ou Asp-N qui mènent à des peptides protéolytiques de plus grande taille tandis que l’approche « top-down » se sert des protéines intactes

L’approche « top-down » consiste dans un premier temps à analyser par MS les protéines et leurs multiples états de charges après séparation chromatographique. Dans un second temps, celles-ci sont fragmentées en MS² de manière celles-ciblée pour obtenir un spectre de fragmentation qui sera comparé à des bases de données comme Uniprot flatfile.145 L’approche « bottom-up » permet, quant à elle, d’identifier une protéine en comparant la quantité de peptides protéotypiques à ce qui est présent dans la protéine entière et qui doit correspondre de façon stoechiométrique. Cela signifie que les quantités relatives de ces peptides doivent correspondre à leurs rapports au sein de la protéine étudiée. En général, les peptides issus de digestion trypsique (voir Figure 33 ci-dessus) sont idéals pour le séquençage par LC-MS/MS grâce à leur taille relativement petite et au positionnement en C-terminal d’un acide aminé basique. En effet, les résidus arginine et lysine étant bien représentées parmi les protéines, les coupures permettent d’obtenir des peptides de longueur

145 K. R. Durbin, L. Fornelli, R. T. Fellers, P. F. Doubleday, M. Narita, N. L. Kelleher, Journal of Proteome

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modérée. En ionisation positive, les ions obtenus sont alors généralement di voir trichargés avec des rapports m/z compris la plupart du temps entre 400 et 1 000 Th. De plus, grâce à la fragmentation par CID basse énergie, on voit apparaître de façon prédominante des fragments correspondant aux séries d’ions b et y.146 Au final, une protéine sera identifiée avec certitude lorsqu’un, et en général plusieurs, peptides protéotypiques seront caractérisés.147,148,149

A la suite de Stocklin, Oda et al. de l’équipe de Chait ont développé le concept avec un marquage uniforme de levures avec 15N : un groupe de levure était élevé avec l’isotope naturel de l’azote (14N à 99,6%) tandis que le second a crû dans un environnement enrichi en 15N (>96 %). Des souches de levures mutantes ont été utilisées ; elles exprimaient ou présentaient un défaut dans une protéine, la cycline G1 qui est impliquée dans la transition entre les phases G1 et S qui, respectivement, correspondent à une phase de croissance cellulaire et une phase de réplication de l’ADN.150 Grâce à cette technique de marquage, la comparaison des souches de levures a révélée des altérations dans le niveau d’expression de la protéine et également des différences de phosphorylation sur d’importantes protéines signal pour la vie cellulaire. Le fractionnement du gel n’aurait pas altéré les rapports entre protéines marquées et non marquées selon les auteurs étant donné que les protéines marquées par 15N étaient mélangées aux protéines non marquées avant traitement des échantillons ;151 un grand avantage de cette technique étant alors le contrôle obtenu par l’ajout de protéines marquées au début des étapes de préparation des échantillons.

Quelques années après la publication des travaux de Barr et al., l’équipe d’Aebersold a également eu recours à des stratégies de marquage isotopique pour quantifier des protéines exprimées dans des levures, mais de manière différente par quantification relative.152 Ainsi, Gygi et al. ont utilisés un marquage par affinité (ICAT pour « Isotope-Coded Affinity Tag ») pour marquer sélectivement des groupements thiols de protéines contenant des cystéines avec des réactifs deutérés (2H8) ou non. Le marquage de deux groupes de levures avec la technique ICAT a permis d’effectuer une quantification relative de protéines sur ces deux populations et ainsi de déterminer une différence d’expression protéique. En revanche, une limite de la technique et qui fait également sa spécificité étant le marquage des cystéines, seuls les peptides contenant les cystéines ont pu servir à l’analyse.

146 J. J. Coon, Anal. Chem. 2009, 81, 3208–3215

147 R. Aebersold, M. Mann, Nature 2003, 422, 198–207

148 N. L. Anderson, N. G. Anderson, T. W. Pearson, C. H. Borchers, A. G. Paulovich, S. D. Patterson, M. Gillette, R. Aebersold, S. A. Carr, Mol. Cell. Proteomics 2009, 8, 883–886

149 P. Mallick, M. Schirle, S. S. Chen, M. R. Flory, H. Lee, D. Martin, J. Ranish, B. Raught, R. Schmitt, T. Werner, B. Kuster, R. Aebersold, Nat. Biotechnol. 2007, 25, 125–131

150 J. Bartek, J. Lukas, FEBS Lett. 2001, 490, 117–122

151 Y. Oda, K. Huang, F. R. Cross, D. Cowburn, B. T. Chait, Proc. Natl. Acad. Sci. 1999, 96, 6591–6596

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En résumé, ces deux dernières publications (Oda et al. ; Gygi et al.) sont emblématiques des travaux de quantification de peptides et protéines par SID qui ont été développés par la suite et qui font appel à un marquage métabolique ou bien chimique en se servant du signal MS ou MS².