• Aucun résultat trouvé

le Mutation de récepteur RCPG quelconque Mesure par LASER

Chapitre 2 : La quantification par dilution isotopique de peptides peptides

III. B. Les approches par étude thermodynamique : SUPREX et PLIMSTEX

Les techniques SUPREX et PLIMSTEX sont deux techniques particulièrement adaptées à la spectrométrie de masse étant donné qu’elles permettent un suivi de variations de masse en fonction de la charge en deutérium d’une protéine donnée. Ces études ont été menées en MALDI-MS et d’un point de vue thermodynamique. Ces deux techniques détaillées dans ce paragraphe, contrairement aux méthodologies décrites au chapitre 2 p.61, permettent d’évaluer la stabilité des protéines in vitro et in vivo ainsi que des constantes de dissociation de complexes protéines-ligand.474 Pour parvenir à cela, elles utilisent les propriétés de l’échange H/D et une analyse par spectrométrie de masse. En effet, l’échange H/D est plus ou moins rapide selon l’acidité plus ou moins prononcée d’un proton

187

considéré. Ainsi un proton amide s’échangera beaucoup plus rapidement qu’un proton porté par un carbone aliphatique sans hétéroélément électronégatif proche. Généralement les échanges H/D pour les approches SUPREX et PLIMSTEX se font dans différents tampons d’échange deutérés.

La première technique à avoir été développée est l’approche SUPREX par Powell et al. en 2002,475 illustrant la sensibilité et la spécificité de la spectrométrie de masse en recherche vis-à-vis des protéines. Cette approche permet en premier lieu d’éviter certaines limitations des traditionnelles techniques de calorimétrie et de spectroscopie comme la quantité importante de protéine nécessaire ou l’impossibilité d’effectuer des mesures de criblage à haut débit ni même l’analyse de complexes en mélange.476,477,478,479 L’équipe a étudié quatre modèles protéines-ligands dont un complexe formé entre une protéine G et un anticorps de mammifère,480,481 un complexe formé entre deux protéines identiques,482,483,484,485 un complexe tertiaire d’ADN486,487 et un complexe protéase-inhibiteur.488 Pour chacun de ces complexes l’échange H/D a été rendu possible grâce à des tampons d’échange deutérés contenant également des dénaturants à différentes concentrations et la proportion de deutérium déterminée par MALDI-MS. Ainsi, la différence de masse observée après dénaturation en fonction de la concentration en dénaturant permet d’accéder via une équation thermodynamique à l’enthalpie libre de repliement (« folding » en Anglais). Par la suite, l’étude des variations de ces énergies, traduisant une variation dans la stabilité du complexe protéine-ligand, a permis à l’équipe de remonter jusqu’aux constantes de dissociation des complexes.

Equation 7 : Relation thermodynamique reliant l’enthalpie libre d’un complexe protéine-ligand à la concentration en agent dénaturant correspondant au point d’inflexion de la courbe représentant la différence de masse en fonction de la concentration en agent dénaturant utilisée

െοܩൌ ݉ܥௌ௎௉ோா௑ଵȀଶ ൅ ܴܶ ቎Žሺ൏ ݇ ௜௡௧ ൐ ݐ െ ͲǤ͸ͻ͵ െ ͳ ܰ ʹଵ௡ିଵሾܲሿ௡ିଵ

475 K. D. Powell, S. Ghaemmaghami, M. Z. Wang, L. Ma, T. G. Oas, M. C. Fitzgerald, J. Am. Chem. Soc. 2002,

124, 10256–10257

476 J. A. Schellman, Biopolymers 1975, 14, 999–1018

477 C. N. Pace, T. McGrath, J. Biol. Chem. 1980, 255, 3862–3865

478 J. F. Brandts, L. N. Lin, Biochemistry (Mosc.) 1990, 29, 6927–6940

479 B. W. Sigurskjold, Anal. Biochem. 2000, 277, 260–266

480 T. Gallagher, P. Alexander, P. Bryan, G. L. Gilliland, Biochemistry (Mosc.) 1994, 33, 4721–4729

481 D. J. Sloan, H. W. Hellinga, Protein Sci. 1999, 8, 1643–1648

482 F. M. Richards, P. J. Vithayathil, J. Biol. Chem. 1959, 234, 1459–1465

483 J. M. Sturtevant, R. P. Hearn, F. M. Richards, G. D. Watt, Biochemistry (Mosc.) 1971, 10, 806–817

484 A. A. Schreier, R. L. Baldwin, J. Mol. Biol. 1976, 105, 409–426

485 J. M. Goldberg, R. L. Baldwin, Biochemistry (Mosc.) 1998, 37, 2546–2555

486 J. J. He, K. S. Matthews, J. Biol. Chem. 1990, 265, 731–737

487 V. LeTilly, C. A. Royer, Biochemistry (Mosc.) 1993, 32, 7753–7758

488 T. Lee, G. S. Laco, B. E. Torbett, H. S. Fox, D. L. Lerner, J. H. Elder, C. H. Wong, Proc. Natl. Acad. Sci. U.

188 Avec :

· m, la variation infinitésimale d’enthalpie libre en fonction de la concentration en dénaturant ߜοΤߜሾ݀±݊ܽݐݑݎܽ݊ݐሿ.

· ܥௌ௎௉ோா௑ଵȀଶ , la concentration de dénaturant pour laquelle une inversion de courbe de type sigmoïde est observée.

· R, la constante des gaz parfaits. · T, la température en K.

· ൏ ݇௜௡௧ ൐, le taux d’échange moyen intrinsèque d’un proton amidique. · t, le temps d’échange H/D utilisé.

· n, le nombre de sous-unités dans la protéine.

· [P], la concentration en protéine exprimée en équivalents N-mères.

Une seconde étude proposée par la même équipe a démontré la justesse et la précision de la technique par des mesures de constantes de dissociations de complexes formés à partir de deux protéines (abl SH3 et la protéine S) et de différents ligands peptidiques.489 Les résultats obtenus sont en majorité en bonne corrélation avec les données tirées de la littérature (e.g : 28 ± 8 µM versus 28,8 µM pour le complexe abl SH3 – peptide 2) malgré certaines valeurs clairement différentes (e.g : 400 ± 70 nM versus 41 nM pour le complexe S-protein – peptide 8).

Equation 8 : Relation thermodynamique pour le calcul des constantes de dissociation par la méthode SUPREX

οοܩൌ െܴ݈݊ܶ݊ሾͳ ൅ ሺሾܮሿ ܭΤ ሻሿ Avec :

· n, le nombre de sites de liaison indépendants. · R, la constante des gaz parfaits.

· [L], la concentration en ligand libre. · T, la température en K.

Ces travaux ont permis de montrer que l’approche SUPREX est tout à fait applicable à l’analyse thermodynamique de complexes protéines-ligands y compris des complexes formés avec des petites molécules et des peptides. Cette approche permet notamment de prédire des constantes de dissociation de tels systèmes avec une bonne justesse (valeurs comprises dans un intervalle de facteur 2 à 3). Elle offre également quelques avantages non négligeables comme la capacité à effectuer des mesures pour du criblage à haut débit et de manière automatisée, la capacité à analyser de très faibles quantités de matériel biologique (de l’ordre de la picomole), et enfin la

189

possiblité d’analyser aussi bien des complexes protéines-ligands purs ou en mélange in vivo et in

vitro.

L’approche PLIMSTEX (pour « Protein-Ligand Interactions in solution by MS Titration and H/D EXchange ») a été développée après la technique SUPREX en 2003 par Zhu et al.490 Elle est peu sujette aux limitations sus-citées à propos des techniques calorimétriques et spectroscopiques et ne requiert pas l’utilisation de dénaturant, à l’inverse de SUPREX. En outre, cette technique est capable de suivre non seulement des complexes protéine-ligand mais également des états intermédiaires sans interférence de la part de variations de protéines, de ligand, de tampon, de concentrations de sels, de pH ni même de température. L’essence de la technique repose sur l’apparition d’un changement dans l’échange H/D au cours du titrage et sur un déplacement spectral (ΔDi) plutôt que sur une variation d’amplitude spectrale comme c’est le cas pour la mesure d’absorbances.

Figure 114 : Courbe PLIMSTEX obtenue avec la protéine I-FABP « wild-type » (pour « Intestinal Fatty Acid Binding Protein ») à 0,3 µM titrée avec l’oléate de potassium dans un tampon contenant 95 % de D2O après 3 h d’échange H/D. La courbe en trait plein correspond à la modélisation mathématique avec une interaction à 2 éléments (protéine et ligand) dans un rapport 1:1 et un modèle à 3 paramètres : une constante d’équilibre (K1), une valeur de masse (D0) pour la protéine nue et une différence de masse (ΔD1) correspondant à la charge en deutérium

Le principe est d’équilibrer la protéine d’intérêt avec différentes concentrations d’un ligand choisi dans un tampon aqueux avant d’initier l’échange H/D par ajout de D2O. Après avoir atteint un état d’équilibre, l’échange est stoppé puis les sites non amidiques de la protéine immobilisée sont rétro échangés par dessalage sur Zip-Tip greffé en C18. Cette étape a pour conséquence majeure la dissociation du ligand qui va ainsi libérer la protéine chargée en deutérium pour pouvoir être mesurée par LC-MS. Cela permet de tracer la différence de masse observée entre la protéine deutérée et non deutérée, autrement dit la charge en deutérium, en fonction de la concentration

190

totale en ligand pour obtenir une courbe PLIMSTEX (voir Figure 114 p.189). Un modèle mathématique d’équations différentielles reliant les concentrations en ligand, les concentrations en protéines et les constantes d’équilibre pour chaque site de liaison de la protéine est utilisé et résolu pour correspondre à l’évolution des valeurs de la courbe PLIMSTEX et en extraire les différentes constantes de dissociation. Un intérêt particulier de la méthode PLIMSTEX réside dans le signe attribué à la grandeur ΔDi : si celle-ci est positive, cela indique que la liaison de « i » ligands aboutit à une sorte de fermeture de la protéine et donc à une charge en deutérium moins importante que pour sa forme nue ; si le déplacement spectral est négatif, cela signifie au contraire que la protéine adopte une structure plus ouverte ; enfin, si la valeur est proche de zéro, cela signifie peu de changements dus à l’interaction avec le ligand.

La méthode a été appliquée sur quatre modèles protéine-ligand incluant des protéines et des métaux et ne requiert que quelques picomoles de matériel biologique. De plus, avec quelques ajustements sur le procédé en fonction des systèmes étudiés, la technique peut tout à fait être automatisée et adaptée pour le criblage à haut débit.

Au final, ces deux techniques, SUPREX et son évolution PLIMSTEX, sont deux méthodes très intéressantes pour la mesure d’interactions protéine-ligand dans la mesure où elles ne requièrent que très peu de matériel biologique ainsi qu’un nombre de composés limité (une solution de deutérium, la protéine cible, son ligand et un tampon) pour le bon déroulement des analyses. De plus, elles permettent l’accès à la fois aux constantes de dissociation, mais également à des grandeurs thermodynamiques pour caractériser les différentes interactions. Leur procédé peut également être automatisable notamment la partie concernant le traitement informatique de résolution des équations grâce à des modèles qui peuvent être mis au point et développés au sein de bases de données à inclure dans des solutions logicielles typiquement. A ce stade, un terminal informatique relié directement à l’appareil effectuant les mesures d’incréments de masse permettrait un traitement efficace, rapide et routinier des analyses.

Conclusion

L’ionisation MALDI est une technique moderne d’ionisation largement utilisée pour de la caractérisation de biomolécules qui arrive à un niveau de développement et de compréhension fondamental poussé. Voici une proposition de schéma pour conclure sur les modèles qui décrivent l’ionisation MALDI et qui, bien qu’en apparence s’opposent, pourraient gagner à se rassembler.

192

Du point de vue de la quantification, l’utilisation du MALDI-ToF-MS reste limitée à la mesure d’abondances relatives de petites molécules et commence à être appliqué à la mesure de protéines via leurs peptides protéolytiques marqués (ICPL). En outre, deux techniques (SUPREX / PLIMSTEX) se révèlent très riches pour la mesure d’interactions protéine-ligand en requérant peu de matériel biologique, un nombre limité de composés tout en permettant l’accès à des constantes cinétiques de dissociation et aux grandeurs thermodynamiques associées. Autre point fort : la possibilité d’automatiser le procédé et notamment le traitement informatique de résolution des équations.

Après avoir traité l’ionisation MALDI sur le plan fondamental et l’aspect quantification basé sur celle-ci il sera question dans le chapitre suivant du sujet d’application, à savoir les peptides et leur synthèse depuis les premiers pas de ce domaine de la chimie organique jusqu’aux technologies modernes.

193

Chapitre 4 : La synthèse peptidique en quatre points : principe,

stratégies, agents de couplages et choix pour les peptides

synthétisés

Dans ce chapitre nous allons aborder la synthèse peptidique sous un aspect historique et fondamental avant de se focaliser sur les stratégies de synthèse et les récentes protections mises en place pour la synthèse peptidique puis sur les différentes avancées en termes d’agents de couplage développés.

Approche historique de la synthèse peptidique

Historiquement, le premier à avoir synthétisé un peptide est Théodore Curtius dans les années 1880 pendant ses études de doctorat avec H. Kolbe.491 Il a réussi à obtenir le premier dipeptide avec protection en N-ter (benzoylglycylglycine) en faisant réagir un sel d’argent de glycine avec du chlorure de benzoyle (voir Schéma réactionnel 1 ci-dessous).492 Quelques années après cela, le premier papier scientifique faisant état de la synthèse d’un dipeptide a été publié en 1901 par Emile Fischer en collaboration avec Ernest Fourneau.493 L’idée développée a été de préparer la glycylglycine par hydrolyse acide de dicétopipérazine (voir Schéma réactionnel 1 ci-dessous). Cela marquât le début de la chimie des peptides.494,495

Schéma réactionnel 1 : Premières synthèses de dipeptides par T. Curtius suivit par E. Fischer en 1901

Les problèmes majeurs des méthodes développées par T. Curtius et E. Fischer étaient l’obtention des acides aminés de série L énantiomériquement purs sans oublier l’absence de groupes protecteurs d’amines. Une partie du problème a été résolu par M. Bergmann (un étudiant d’E. Fischer) et L. Zervas qui ont introduit le groupement carbobenzoxy (Cbz, également connu sous le nom « benzyloxycarbonyle », Boc) en 1932.496,497,498 Ce groupement a par la suite été désigné par la

491 T. Kimmerlin, D. Seebach, The Journal of Peptide Research 2008, 65, 229–260

492 T. Curtius, Journal für Praktische Chemie 1882, 26, 145–208

493 E. Fischer, E. Fourneau, Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft 1901, 34, 2868–2877

494 T. Curtius, Journal für Praktische Chemie 1904, 70, 57–72

495 E. Fischer, Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft 1905, 38, 605–619

496 M. Bergmann, L. Zervas, Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft (A and B Series) 1932, 65, 1192– 1201

194

lettre « Z » en hommage à son inventeur, L. Zervas. Ils ont montré que ce groupement protecteur empêchait l’épimérisation pendant la formation de la liaison peptidique contrairement aux protections de type N-acyle et N-benzoyle. Par la suite, cette stabilité a été démontrée pour toutes les protections de type uréthane comme propriété de ces dernières. L’utilisation de ces protections a marqué le départ de la synthèse peptidique alors florissante par des petites molécules comme le glutathion et la carnosine et son point d’orgue, 20 ans plus tard, avec la synthèse d’une hormone active l’oxytocine (octapeptide) par V. du Vigneaud en 1953 qui obtint le prix nobel de chimie 2 ans plus tard pour ces travaux (voir Figure 115 ci-dessous).499

Figure 115 : Structures des peptides parmi les premiers à avoir été synthétisés et ayant une activité biologique, dont l’oxytocine qui présente une structure proche de celle de l’AVP