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CHAPITRE II : LE PARTI COMMUNISTE CHILIEN ET LA CONCURRENCE AU SEIN DU SYSTÈME DE PARTIS AU SEIN DU SYSTÈME DE PARTIS

A. L’habitus pacifique s’impose au PCCh

Depuis sa naissance en 1922, le PCCh s’est refusé jusqu’aux années quatre-vingt440 à co nsidérer la violence co mme un moyen valable pou r arriv er a u pouvoir,

440 Pendant la dictature du général Augusto Pinochet, le PCCh change violement de politique. Il lance la consigne « Toutes les formes de lutte » et organise un bras armé destiné à faire tomber le régime : le Front Patriotique Manuel Rodríguez (FPMR). Sur la politique armée du PCCh dans les années quatre-vingt, voir García Naranjo, F. Historias derrotadas. Opción y obstinación de la guerrilla chilena (1965-1988), México, Universidad Michoacana de San Nicolás de Hidalgo, 1994; Vidal, H. FPMR. El tabú del conflicto armado en Chile, Santiago, Mosquito Editores, s/d; Ljubetic, I. La crisis que comenzó en los años ochenta, Santiago, Latingráfica, 2002; Riquelme, A. Comunismo mundial y transición chilena, Thèse doctorale, Universitât de Valencia, 2003; Lira, E. et Loveman, B. Las ardientes cenizas del olvido (1832-1994), Santiago, LOM-DIBAM, 2000

particulièrement lorsqu’il s’agit de l’appliquer à l’expérience chilienne. Dans un premier temps, la participation é lectorale du PCCh et la dé fense des méthodes pac ifiques s ont demeurées des principes n aturels e t incontestables a u sein du parti. On constate c hez Recabarren un certain malaise face au sujet de la révolution, particulièrement à cause de ses conno tations violentes, a u point que le leader ref use d e donner au conce pt de révolution un caractère violent441. Si l’on reconnaît que, suite à la réussite de la révolution bolchevique l a position de Rec abarren s’ avère m oins critique face aux méthodes violentes, nous soutenons, contrairement à d’autres auteurs, que le caractère anti-violence de la pensée de Recabarren reste irréfutable442.

Néanmoins, cette position non viol ente se verra accom pagnée par la défense discursive de l’IC et de sa stratégie de l’époque, le Front unique prolétaire (FUP), lequel préconisait l’ab andon de l ’étape dém ocratico-bourgeoise et la mise en p lace de la révolution du prolétari at, c’ est-à-dire, la conqu ête du pouvoir politique par le prolétariat443. Cet te li gne st ratégique, dont la tâche immédiate est la lutte pou r le socialisme à pa rtir de la création des S oviets (et non par la pa rticipation é lectorale), plaide pour l e refus des i nstitutions bourgeoise s et pour l’ établissement d’alliances restreintes qui n’incluent que le prolétariat, la paysannerie et les PC.

Le PCCh exprime publiquement son intérêt à suivre les consignes de l’IC : il se dit prêt à mettre en place des Sov iets pour in staller le so cialisme et réa lise une campagne contre le s dé mocrates et socialistes qui en traîne l ’isolement du PCCh d ans la sphère politique444. Po urtant, m algré ce discours « ultragauchiste », les a ctions menées par le parti entre 1922 et les années trente révèlent son incapacité à mettre en place des actions conformes aux directives du FUP.

Le p arti n’ a pas orga nisé ni pa rticipé à d es actions vio lentes et les ra res ac tions consignées pa r la p resse ne semblent pas avoir fait parti e d’une politique global e organisée par le PCCh sinon de décisions particulières des militants locaux. C’est le cas de l’assaut du p oste de police à Copiapó, en déc embre 1 931, le quel, à cause de la mauvaise organi sation et de l’inexpérience des assaillants, f ut faci lement éc rasé et les assaillants massacrés, dont la plupart des militants communistes de Vallenar445. D’après l’histoire o fficielle publiée p ar l’arm ée en 1985, l’ assaut faisait p artie d’un p lan pou r

441 Pinto, J. « Socialismo y Salitre… p.346 Pinto se base notamment, sur le texte de Recabarren « El Socialismo. ¿Qué es y cómo se realizará? », de 1912

442 Parmi les auteurs qui soulignent le changement de la position de Recabarren, Harambour, A. Luis Emilio Recabarren: evolución o revolución socialista?, Santiago, 1997 Sur la position de Recabarren face à cette question, voir notre Chapitre 1

443 Voir Chapitre 1, pp.20-22

444 Voir Chapitre 1, pp.22-23

445 La veille de noël 1931, le régiment Esmeralda, à Copiapó, a été attaqué. Les policiers du commissariat le plus proche sont partis le défendre. L’affrontement a laissé des assaillants et des policiers morts et blessés. Quelques assaillants ont pris la fuite à Vallenar, où ils sont été massacrés –avec quelques paysans et ouvriers- par les gardes blanches qui opéraient dans la zone. Voir Pinto, F. Alessandrismo versus Ibañismo, Curicó, Ed. La Noria, 1995, pp.73-75 ; Lira, E. et Loveman, B. Las suaves cenizas del olvido (1814-1932) et Las ardientes cenizas…; Arrate, J. et Rojas, E. Op.citp.142 D’après le rapport du Fiscal en charge de l’investigation, les victimes ont été fusillées dans la banlieue de la ville en les faisant apparaître après comme « tombés sur le lieu de combat », où il n’y a eu que quatre morts. Hoy, 04.03.1932, p.14

s’emparer des armes dans le cadre d’un mouvement politique révolutionnaire dirigé par les communistes de la zone446. Pourtant, il semble que plusieurs secteurs et personnages étaient impliqués dans l’événement –y compris des soldats et des sous-officiers-, en plus des co mmunistes447. Quelques auteu rs vo ient plutôt dan s cet év énement un e « action typique d es affairements c onspiratifs qu i re lient l’alessandrisme a vec la gauche »448. Même les dirigeants du PCCh de l’époque ont qualifié cette action comme le résultat de la « mauvaise interprétation du p arti local de la stratégie de l’IC »449, ce qui était tout à fait possible pui sque les com munistes chilie ns restaient e ncore divisés en factions et branches lo cales qui agissaient indépendamment, de manière qu e ni le C C n i l ’IC ne pouvaient exercer un contrôle effectif sur eux450.

L’incompétence du PCCh dans la m ise en place de la politique du FUP se révèle incontestable, comme le montre la participation du parti aux trois mouvements de révolte les plus importants ayant lieu avant l’adoption de la tactique du Front populaire : la chute de la dictature du colonel Carlos Ib áñez, la mutinerie des marins e t le soul èvement de Ranquil.

En plus de représenter l’ordre à abattre –tel que le déterminait l’IC-, Ibáñez avait interdit l’existence du PCCh et p ersécuté et relégué ses militants depuis le début de sa dictature, en 1927. Ibáñez était donc la cible parfaite des actions ultragauchistes du FUP.

Nonobstant, le PCCh n’a pas joué un rôle important au sein du mouvement social qui a provoqué la chute de la dictature et l’exil d’Ibáñez451, contrairement à l’histoire officielle du par ti q ui assur e av oir « dirigé la lutte p our renverser la dictature en m obilisant les travailleurs et les étudiants »452.

Même l e rep résentant de l’IC au Ch ili à l’époque reconnaît l ’action de l a so ciété civile chil ienne san s la d irection n i la participation considérable du PCCh453. L e mouvement, en effet, est da ns les mains des pa rtis p olitiques et b ourgeois -quelques auteurs p arlent m ême d’une « fronde »454- et il est mené pa r de s étudiants et d es

446 Estado Mayor del Ejército. Historia del Ejército de Chile. La primera guerra mundial y su influencia en el Ejército 1914-1940, T. VIII, Santiago, 1985, pp.312-314

447 Voir Sagredo, R. (ed.) Crónicas políticas de Wilfredo Mayorga…pp.406-416 et Correa, S. et al.

Historia… p.107

448 Arrate, J. et Rojas, E. Op.cit. p.142

449 Elías Lafferte, le leader du PCCh officiel à l’époque, a assuré à Moscou –où il se trouvait au moment de l’assaut- qu’il ne connaissait pas cette action, qu’il n’avait aucune responsabilité dans les faits et que sûrement il s’agissait d’une provocation de la police. Lafferte, E. Cité par Clisold, S. Soviets Relations with Latin America. 1918 - 1968 a Documentary Survey,Londres, Oxford University Press for Royal Institute of International Affairs, 1970, p.63-64

450 Ibid. p.63-64

451 Le 26 juillet 1931 Ibáñez a démissionné et est parti en exile

452 Ramírez Necochea, H. Origen…p. 203

453 Le représentant de l’IC au Chili Arthur Ewert (membre du Secrétariat de l’IC sud-américain à

Montevideo) explique dans une lettre envoyée à Moscou que la chute d’Ibáñez est le fruit de « l’indignation populaire » et de l’action de la société civile. « Informe de Berger al Secretariado Latinoamericano » 03.08.1931, RTSJIDNI, 495.79.151, cité par Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria. Partido comunista de Chile y Comintern, 1931-1934 », dans Concheiro, E. et al. El Comunismo: otras miradas desde América Latina, México, UNAM, 2007, pp.277-322, p.282

454 Góngora, M. Ensayo histórico sobre la noción…p.241

professionnels à p artir d e grè ves et de manifestations. F ragilisé et dispersé p ar la persécution d ’Ibáñez, le PCCh se trouve en marge du m ouvement et il se remet en activité en juillet 1931 –juste avant le départ d’Ibáñez- avec la publication d’un Manifeste qui c ontient un lar ge a ppel a ux fo rces anti-ibañistes pour m ettre fi n à la d ictature d’Ibáñez455. « On voit ici le communisme désireux de participer à l’expérience politique anti-ibañiste qui précède la chute du régime », explique Ulianova, « mais sa présence – continue-t-elle- se li mite à l’ém ission de manifestes alors que d’autres forces sociales et politiques aboutissent à mobiliser d’importants secteurs de la société »456.

Ce genre de manifestes « larges » déconcerte un autre envoyé de l’IC au Chili, qui critique la dispo sition d’une pa rtie des l eaders hi storiques du PCCh à agi r de m anière conjointe avec le large mo uvement anti-ibáñiste. « Il m e sem ble qu’à San tiago on ne différencie pas bie n l es positions de nos ca marades [comm unistes] de celles du Front unique civil organisé par les alessandristes et le s monteristes », représentants des parti s

« traditionnels »457. L’envoyé de l’IC critique même les leaders historiques du PCCh, qui ne seraient pas « une garantie politique ». La tendance historique des leaders du PCCh vers la création d’alliances avec des forces « réformistes » ainsi que la valorisation de la démocratie re présentative –héritées d e son passé a utonome pre-KOMINTERM e t de l’expérience du P OS- sont perçues par les représentants de l’IC c omme étrangères à la ligne officielle de Moscou458.

Si le PCCh n ’a pas jo ué un r ôle im portant a u sein du m ouvement social q ui a provoqué la chute d’Ibáñez, la participation que le parti a eue au soulèvement des marins est complètement nulle, malgré l’énorme charge symbolique que l’événement offre à la gauche marxiste de l’époque459. En effet, le soulèvement rappelait pour certains l’action des marins ru sses d ans le cuirassé Potemkine au d ébut d e l a révolution de 1905460. Pourtant, l’action des marins n’est pas d ue à u ne conspiration de l’IC n i à l’action du PCCh461. C ’est l a v iolence a vec l aquelle le mouvement est reç u par les autori tés, qui

455 Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria…p.282 Ce manifeste est très similaire à celui lancé en 1928: « Plataforma de Reivindicaciones Inmediatas contra la dictadura militar fascista ». Très

contradictoire, le Manifeste utilise le terme de Front unique et à la fois propose un front large qui inclut même les secteurs moyens de la société. Publié dans Alerta, cité par Ramírez Necochea, H. Origen…p.

271. Pour Gómez cette différence avec la tactique du FU de l’IC s’explique par le caractère débutant du PCCh dans l’IC, Gómez, M.S. « Factores nacionales…p.67

456 Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria…, p.284

457 « Carta de Paulino González Alberdi a la Comisión Sindical Latinoamericana en Montevideo », 05.08.1931, cité par Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria…, p.287

458 Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria…, p.287

459 Décrite comme « un coup de tonnerre » qui éclate le 1er septembre, la révolte de la marine est « un événement jamais vu et qui ne se verra non plus après » Vial, G. « De la República Socialista al Frente Popular (1931-1938) », dans Historia de Chile, vol. V, Santiago, Zigzag, 2001 en Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria…, p.299

460 Pour beaucoup « le vieux cuirassé Almirante Latorre, qui était une relique desvencijada de notre marine de guerre et dans lequel fonctionnait le Comité directif de l’insurrection, revivait l’épopée du Potemkine russe ». Chamúdez, M. Chile, una advertencia americana, Santiago, Ed. PEC, 1972, p.74 Voir aussi Correa, S. et al. Historia del siglo XX… p.107

461 L’origine du mouvement se trouve dans la décision du ministère d’Hacienda de baisser les salaires du secteur public –et donc des marins- en 30 pour cent. Voir notamment les proclamations des rebelles

« Proclama de las tripulaciones de la Armada » et « Segundo Pliego de peticiones de la Marinería », dans

déclenche la radicalisation des demandes des marins et leur exigence de « changement de régime social »462. Tel que le reconnaît le dirigeant communiste Volodia Teitelboim, le soutien de la FOCh quelques jours après le début de l’action, « supposait l’appui du Parti communiste, qui, jusqu’à ce moment, n’avait pas eu de participation au mouvement »463. Les documents de l’IC examinés par Ulianova confirment cette thèse464. Après la défaite, l’IC rend responsable le PCCh de ne pas avoir développé un travail préalable au sein des marins ainsi que de n e pas avoir profité des conditions objectives favorables lorsque le mouvement a commencé465.

De p lus, toutes les tentatives l ancées p ar le PCCh pour créer des lien s avec les rebelles n’ont pas eu la réussite espérée466 et le PCCh se voit critiqué par l’IC à cause du mauvais usage de la consigne des Sov iets. L’installation d’un Soviet signifie, pour l’IC, l’aspiration à la prise immédiate du pouvoir et il ne doit êt re u tilisé, donc, que dans l’objectif de la lutte frontale pour le pouvoir. Étant donné que ceci n’est pas le cas du PCCh, le term e est m al utilisé d’après l’IC467. En effet , en croyant qu’i l mettait en pratique la ligne du F UP conseillée par Mo scou, l e PCCh avait app elé « Soviets » certaines instances d’autogestion communautaire que le parti avait tentées de mettre en place parmi les habitants au chômage dans quelques bidonvilles de Santiago468.

Le dernier événement marquant l’action des mouvements sociaux de cette période houleuse est le soulèvement paysan à Lonquimay en 193 4, l’un d es épi sodes l es plus tragiques de l’histoire sociale du monde rural chilien du XX siècle. La révolte paysanne aux dimensions i nédites fut su ivie d’un m assacre m assif et e lle est de venue, à pa rtir d’interprétations littéraires, un élément constitutif du mythe du communisme chilien et de

Correa et al. Documentos… pp.167-168 et 169 respectivement. Aussi, Góngora, M. Ensayo

histórico…pp.241-243 ; Arrate, J. et Rojas, E. Op.citpp.142-144; Teiltelboim, V. Un muchacho del siglo XX. Antes del olvido. T.II, Santiago, Sudamericana, 1998, pp.194-198

462 Voir notamment les déclarations du leader du mouvement Manuel Astica à Patricio Manns, La

Revolución de la Escuadra, Santiago, Ediciones B, 2001, cités en Arrate, J. et Rojas, E. Memoria…p.143

463 Teiltelboim, V. Un muchacho…p.197

464 Au même moment où la Escuadra capitulait à Coquimbo, le Bureau sud-américain de l’IC envoie une lettre instructive au PCCh qui n’aborde presque pas le mouvement des marins et d’après laquelle, le BSA ne semble pas avoir des informations de première main. « Carta del Buró sudamericano de la Comintern al Comité Central del Partido Comunista chileno », 07.09.1931, RTSJIDNI 495.106.25, cité par Ulianova, O.

« Crisis e ilusión revolucionaria…, p.296 et 298 Ensuite, l’émissaire de l’IC qui se trouve au Chili au moment du soulèvement, assume la responsabilité des erreurs supposées du PCCh dans la direction du mouvement et affirme avoir été informé de la préparation d’une insurrection une fois que le soulèvement avait déjà éclaté. « Carta del representante del Profintern desde Chile al Buró sudamericano », 09.09.1931, cité par Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria…, p.300-301

465 « Tesis del Buró sudamericano…, p.318

466 La grève générale organisée à Santiago n’a pas duré longtemps et ne s’est pas étendue aux régions, même si elle a obtenue la satisfaction de certaines revendications ; l’envoyé du PCCh au sud du pays pour établir des liens a relaté à la direction du parti que les marins « se portaban muy groseramente, qu’ils n’exigeaient pas la création des soviets d’ouvriers et de marins » : « les marins n’écoutaient pas nos camarades et ils ont permis aux officiers de descendre à terre au lieu de les arrêter » Les actions que le représentant de l’IC assure avoir vues dans la pratique du PCCh pour radicaliser le mouvement, n’ont pas eu des résultats importants. « Carta del representante del Profintern…pp.300-301, 303-304

467 « Tesis del Buró sudamericano de la Comintern sobre las grandes luchas revolucionarias del proletariado chileno », 04.12.1931, RTSJIDNI 495.106.26, cité dans Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria…, p.321

468 Ulianova, O. « Crisis e ilusión revolucionaria…, p.321

la g auche e n général469. Pourtant, la d irection –et m ême la p articipation du PCCh à l’événement-, restent à p rouver. La plupart des travaux littéraires et ac adémiques basés sur les informations existant au Chili confirment un m ouvement « spontané » ayant lieu

« depuis le bas » sans participation du PCCh470, mais des travaux récents incorporant des documents recueillis en c onsultant les archives de l’IC v eulent prou ver l e contraire471. Cependant, nous s outenons q ue le pr écieux tra vail d ’archive réa lisé par Ulia nova n e s’oppose pas aux thèses traditionnelles. Si la qualité de « remarquable fonctionnaire du PC » que la conclusion de Ulianova accorde au leader de la révolte est démesurée, c’est le caractère de la source sur laquelle Ulianova appuie son argument ce qui ne permet pas d’octroyer au PCCh le rôle d’organisateur du mouvement.

D’abord, il n’existe gu ère d ’éléments q ui permet tent d e con sidérer Juan Segundo Leiva Tapia (leader du mouvement) comme « fonctionnaire » du PCCh et moins encore comme « remarquable »472. Même Ulia nova c onclut qu’il n’est pa s « communiste de file » -comme un autre historien affirme473-, qu’il n’était pas un « cadre » de l’IC et que, d’ailleurs, il ne pourrait même p as être considéré com me m ilitant régulier. Il s’a girait plutôt d’un leader social en processus de rapproc hement de la sensibilité communiste et de l’assimilation du discours474. Ensuite, Ulianova base sa conclusion sur la participation du PCCh su r l e rapport que Carlos Contr eras Laba rca, secrétaire général du PCCh à l’époque, réal ise sur les év énements de L onquimay au Se crétariat La tino-américain de l’IC à Moscou en mars 1935475. Or, bien que l’on ne saurait nier les éléments intéressants qu’un te l ra pport supp ose, sa c rédibilité reste limit ée lo rsqu’il s’agit de la sou rce d’information. En effet , il n’existe point de documents qui révèlent l’action du PCCh à

469 Point de vue propagé principalement par le roman Ranquil Novela de la tierra, paru en 1941, de Reinaldo Lomboy, secrétaire à l’époque du secrétaire général du PCCh, Carlos Contreras Labarca. Le titre représente l’un des fundos impliqués dans le conflit; sur l’horreur du massacre Vitale, L. Interpretación marxista de la historia de Chile, T.VI, Santiago, LOM, 1998, 273-275

470 Notamment le travail de Germán Palacios, Ranquil. La Violencia en la Expansión de la Propiedad Agrícola, Santiago, Ediciones ICAL, 1992

471 Ulianova conclut que « l’omission de la présence (ou peut-être direction ?) communiste dans la description de ce soulèvement paysan, auquel participe un remarquable fonctionnaire du PC »

s’expliquerait par « le changement de la ligne de conduite du PC chilien » après le soulèvement. Ulianova, O. « Levantamiento campesino de Lonquimay y la Internacional Comunista », Estudios Públicos, 89 (verano 2003), pp. 173-223, p.176

472 Les liens avec le PCCh existent, tel que le laissent voir la radicalisation de son langage et le voyage qu’il réalise lors d’un événement de l’IC à Montevideo avec une commission du PCCh, dont le leader Elías Lafferte. Pourtant, son contact avec le PCCh serait bref, tel que le reconnaît Lafferte. Il commence en 1933 lors de son incorporation à la FOCh, juste un an avant le soulèvement, où la bonne impression produite sur les leaders du PCCh aurait entraîné l’invitation à Montevideo. En plus, la description que le propre Lafferte réalise de Leiva lors du voyage, montre celui-ci comme étranger aux codes communistes de socialisation.

Voir ses déclarations dans « Con el relegado de Melinka Don Juan Leiva Tapia », en El Comercio de Curacautín, 05.11. 1933, réproduites par Uliánova, O. « Levantamiento campesino…p.192-193 et Lafferte.

E. Vida de un Comunista…pp. 256-276

473 G. Vial, Historia de Chile…p. 372

474 Dans les documents de l’IC entre 1929 et 1933 le sujet est absent et le nom de Leiva Tapia n’est jamais

474 Dans les documents de l’IC entre 1929 et 1933 le sujet est absent et le nom de Leiva Tapia n’est jamais