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Formes méromorphes et champs de vecteurs

Dans le document Uniformisation des surfaces de Riemann (Page 120-125)

Encadré III.1 : Rotationnel et divergence

III.1.2. Formes méromorphes et champs de vecteurs

Supposons maintenant le champv~irrotationnel. La 1-forme dualeαest donc fermée. Elle est alors localement exacte. Il existe donc, au voisinage de chaque point deS, une fonctionu telle qued u =〈v~,·〉. Autrement dit,v~est le gradient de la fonctionu :v~=gradu. On dit souvent que la fonctionu est unpotentieldont dérivev~.

Siv~est à la fois incompressible et irrotationnel, alors le potentielu est unefonction harmonique. C’est une conséquence de la relation

u :=div gradu

(noter que, même si la définition du Laplacien dépend de la métrique, la notion de fonction harmonique ne dépend que de la structure conforme associée). En particulier, la fonctionu et le champv~sont automatique-ment analytiques. Réciproqueautomatique-ment, toute fonction harmonique définit viason gradient un flot incompressible et irrotationnel.

Considérons maintenant le champ∗~v. On a les égalités rot(∗~v) =divv~ et div(∗~v) =−rotv~.

Ainsi, siv~est de divergence nulle (resp. irrotationnel), alors∗~v est irro-tationnel (resp. de divergence nulle). Supposons donc que le champv~ soit incompressible et irrotationnel. Le champ∗~v jouit également de ces deux propriétés ; en particulier, il dérive d’un potentielu. Commeu, la fonctionu n’est définie que localement et à une constante près. La 1-formeη=d u+i d uà valeurs complexes est elle bien définie sur toute la surfaceS.

Lemme III.1.2. — La 1-formeηest holomorphe.

Démonstration. — Plaçons-nous sur un ouvertUsur lequel le champv~ ne s’annule pas. Les gradients deu etuétant orthogonaux et de même norme, l’applicationu+i u:U→Cest holomorphe. Remarquons que, puisque cette application est un difféomorphisme local, les fonctionsu etu fournissent des coordonnées locales conformes surU. Une autre manière de formuler ce fait est de dire que la 1-formeηest holomorphe surSprivée des zéros dev~. Comme elle est, par ailleurs, définie surSen entier (et que les zéros dev~sont isolés),ηest une 1-forme holomorphe surS.

Réciproquement, étant donnée une 1-forme holomorpheη, le champ dual de la partie réelle deη, autrement dit le champv~défini par

Reη=〈v,~ ·〉,

est irrotationnel et de divergence nulle. Ceci permet de comprendre les propriétés locales des points critiques des champs de vecteurs irrota-tionnels de divergence nulle. Au voisinage d’un tel point, écrivonsη=d ff est une fonction holomorphe. Il existe alors une coordonnée holo-morphe localez et un entiern tels que l’on ait : f(z) =zn. Nous obte-nons doncη=n zn−1d z, puis〈v~,·〉=Re(n zn−1d z). Les lignes de champ correspondant au cas oùn=3 sont représentées sur la figure III.1.

FIGUREIII.1. Figure extraite du livre de Klein : voisinage d’un point critique

Dans son cours, Klein considère également le cas où la formeηa des pôles. Le champv~ est alors défini sur la surface privée des pôles deη. Ceux-ci sont en nombre fini. Nous allons maintenant décrire qualitati-vement l’allure des lignes de champ dev~au voisinage de ceux-ci. En un pôle deη, on peut toujours trouver (voir l’encadré III.2) une coordonnée holomorphe localew pour laquelle

η= λ

w + 1 wν

d w, avecλ∈C.

Le champ v~ dual de la forme réelle Reη se décompose donc en la superposition des champ duaux aux formesλd w/w etd w/wν. Consi-dérons d’abord le cas oùν =1. Alorsηs’écritµd w/w, avecµ=λ+1.

Décomposons de nouveau le champ dual à Re(µd w/w)en la super-position d’un champ avecµ réel et d’un autre avec µimaginaire pur.

Lorsqueµest réel, on trouve que le potentiel dev~est à une constante additive près la fonctionu =µlogr, oùw =r eiθ. Les lignes de champ sont alors perpendiculaires aux cercles concentriques autour du point w=0 ; ce sont dessourcespositives ou négatives (puits), suivant le signe deµ(voir figure III.2).

FIGUREIII.2. Figure extraite du livre de Klein : puits/source et tourbillon

Lorsqueµest imaginaire pur, le potentiel est à une constante additive près la fonctionu=−µθ, et les lignes de champ sont cette fois les cercles concentriques autour dew=0, parcourus à vitesseµ. On est en présence d’untourbillon(voir figure III.2).

Le cas du champ dual à la 1-formed w/w2s’obtient en remarquant que

1 2"

d w

w"d w w+"

−−→"→0

d w w2.

Lorsque"est réel, cela revient à superposer une source « de débit"» et un puits « de débit−"» placés en des pointsp etp0situés à distance 2"

l’un de l’autre : on obtient un dipôle. Lorsque" est imaginaire pur, cela revient à superposer deux tourbillons « de sens opposés » placés en des pointspetp0situés à distance 2"l’un de l’autre (voir figure III.3).

Le même procédé peut également être utilisé pour étudier les champs duaux aux formes Re(d w/wν), pour tout entier ν ¾ 2. On fait alors tendre vers une même limite,νpoints qui sont des sources, des puits ou des tourbillons.

FIGUREIII.3. Figure extraite du livre de Klein : le dipôle

Nous allons maintenant voir comment interpréter les périodes de la 1-forme holomorpheηen termes du champ de vecteursv~. Fixons une classe d’homologieaH1(S,Z). La partie réelle de la période deηsur la classea est par définition

[Reη](a):=Re Z

γ

η

! ,

γest une (multi-)courbe orientée qui représentea. Comme dans l’en-cadré III.1, on note~t le vecteur unitaire tangent à cette courbe etn~ le vecteur normal « sortant » tel que(~t,n~)est une base indirecte. Notonsv~ le champ dual à Reη : il vérifie Reη = 〈~v,·〉. On remarque alors que

〈~v,~t〉=−〈∗~v,n~〉. On en déduit l’égalité (oùd l est l’élément de longueur surγ)

[Reη](a) = Z

γ

〈−(∗~v),n~d l.

La période[Reη](a)est donc égale au flux du champ−(∗~v)à travers la courbeγ.

De plus, à l’aide de la première des relations (III.13, page 118), nous pouvons réécrire l’égalité Reη=〈v,~ ·〉sous la forme Reη=−vol(∗~v,·). Ainsi on obtient

[Reη](a) =− Z

γ

vol(∗v,~ ·).

La période[Reη](a)est donc également l’aire infinitésimale du cylindre obtenu en déplaçant la courbeγpar le flot du champ−(∗~v).

Encadré III.2 : Forme normale locale d’une forme méromorphe Considérons une forme méromorpheηau voisinage de l’un de ses pôles.

Nous expliquons ici comment trouver une coordonnée localew au voisinage du pôle dans laquelleηs’écrit sous la forme normale ηλ

w+w1ν

Šd w.

Fixons une coordonnée holomorphe locale z quelconque. À l’aide de celle-ci,ηs’écrit en 0 etν¾2 est un entier. Nous cherchons un changement de coor-donnée de la formew(z) =z·u(z)oùuest holomorphe etu(0) =1, Cette équation est équivalente à l’équation

d w

NotonsΦ(u,z)le membre de gauche de cette dernière équation. Au voisinage du point(1, 0), la fonctionΦ(u,z)est une fonction holo-morphe des deux variablesu etz. La dérivée deΦpar rapport àu au point(u,z) = (1, 0)vaut 1, ce qui permet d’appliquer la version holomorphe du théorème des fonctions implicites. On trouve une fonction holomorphe localeu(z)qui permet de construire le chan-gement de variablew(z) =z·u(z).

Les considérations ci-dessus permettent donc de traduire le théo-rème II.2.5 d’existence de formes méromorphes en termes de champs de vecteurs (ou, d’un point de vue plus physique, « d’écoulement »).

Trouver une 1-forme méromorpheηà pôles prescrits équivaut à trouver un champ de vecteurs v~ de divergence nulle et irrotationnel tel que chaque pôle deηcorrespond à une singularité de v~ (puits, source ou tourbillon). De même, fixer les périodes revient à fixer les flux à travers des courbes représentant une base de l’homologie.

Dans le document Uniformisation des surfaces de Riemann (Page 120-125)