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16 D’après carnet de terrain n° 5.

CHAPITRE 1 F ABRIQUE DU PARTI VERT ET GÉNÉRATIONS PARTISANES

L’histoire des Verts n’a jamais été écrite que par le haut. Ouvrages scientifiques et militants s’accordent pour la livrer, classiquement, à partir de trois points de vue : l’histoire des courants de pensée qui irriguent l’écologie politique, l’histoire des luttes dans lesquelles se sont impliqués les militants écologistes, et l’histoire des différentes organisations qui revendiquent et se disputent, selon les époques, la représentation de l’écologie dans le champ politique. Ils diffèrent néanmoins quant au registre. Descriptifs et désincarnés, les récits académiques proposent une histoire séquentielle et électorale des organisations écologistes et de l’évolution de leurs rapports de force dans la compétition politique. Téléologiques et personnifiés, les récits de militants mettent l’accent sur les modalités et les finalités des engagements des écologistes, et proposent une histoire événementielle des conflits inter et intra organisations, en occultant bien souvent la part qu’ils prennent eux- mêmes dans ces conflits et qui influence leurs récits.

Notre enquête nous a permis de nous rendre compte de la distance à la fois intellectuelle et émotionnelle qui sépare ces mises en récits du vécu et des perceptions des militants. Lorsqu’il s’agit d’évoquer, en entretien, les œuvres ou les personnalités qui ont sensibilisé les enquêtés à l’écologie politique, rares sont ceux qui énumèrent la liste des « pionniers » et « précurseurs » généralement mentionnés dans les ouvrages1 pour

présenter – et légitimer ? – la richesse et la diversité de la pensée verte2. En dehors des

intellectuels3, peu de militants connaissent les travaux des naturalistes Robert Hainard et

Bernard Charbonneau, respectivement inspirateur des sociétés de protection de la nature et chroniqueur à La Gueule Ouverte, des environnementalistes Rachel Carson ou René Dubos qui ont alerté sur les problématiques de pollutions dès les années 1960, des économistes

1 On en trouvera un aperçu dans EcoRev’, « Figures de l’écologie politique », n° 21, 2005.

2 Ces mentions ne disent rien, par ailleurs, de la lecture effective de ses œuvres et des types de réception auxquelles elles donnent lieu, et dont il est, en réalité, bien difficile d’évaluer l’impact, notamment sur la supposée « prise de conscience » ou l’engagement concret des militants.

3 Il s’agit des militants qui s’inscrivent dans le champ académique à titre professionnel ou qui entendent intervenir dans les débats partisans au titre de leur(s) formation(s) et diplôme(s). C’est une définition restreinte et adaptée de celle proposée par Gisèle Sapiro pour qui ce terme « renvoie […] tantôt à l’ensemble des producteurs culturels, tantôt à ceux d’entre eux qui interviennent dans l’espace public en tant que tels ». Voir Gisèle SAPIRO, « Modèles d’intervention politique des intellectuels », Actes de la recherche en sciences

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Karl Polanyi et François Partant, ou encore de penseurs tels Bertrand de Jouvenel, premier à employer le terme d’« écologie politique », Hans Jonas, Paul Virilio, Michel Serres, Jean Baudrillard, Paul Ricœur, Théodore Monod, Félix Guattari, Henry David Thoreau, Jacques Ellul, Ivan Illich, Serge Latouche ou André Gorz. L’immense majorité des militants verts que nous avons pu interroger ne cite que René Dumont, agronome et premier candidat écologiste à l’élection présidentielle en 1974, réputé avoir « fait la parfaite synthèse entre les sources de l’écologie [puisqu’] il est à la fois socialiste, libertaire, personnaliste, autogestionnaire, alternatif, régionaliste… »4. Les luttes environnementales et sociales dans

lesquelles se sont forgés les mots d’ordre et les répertoires d’action5 écologistes sont elles,

relativement connues, à défaut d’avoir toujours été vécues : Mai 68, les luttes antinucléaires, le Larzac et les manifestations antimilitaristes, les mobilisations pour la défense de sites naturels et contre les pollutions, les combats pour les droits des femmes ou les luttes économiques et sociales… Mais rares sont les militants d’aujourd’hui capables d’en citer très exactement les dates ou de se souvenir des associations et organisations diverses qui ont concrètement participé à ces moments supposés fondateurs.

Quant aux fusions et recompositions organisationnelles qui émaillent la vie de l’écologie politique française, elles sont si nombreuses et complexes que la plupart des auteurs n’en rendent compte qu’à titre anecdotique, se contentant de tracer de manière relativement floue les contours de ce qu’ils qualifient, faute de mieux, de « mouvance » écologiste. Seul Guillaume Sainteny a produit il y a quelques années un schéma chronologique permettant de visualiser les différentes fusions ou scissions qui précèdent la création des Verts et les travaillent encore dix ans plus tard6. Mais cet ouvrage, pas plus que

les autres, ne permet de savoir qui était réellement présent, dans telle organisation, à telle date, et ce qu’il y faisait. L’histoire précise, à défaut d’être objective, des trajectoires individuelles et des structures qui forment les réseaux militants dans lesquels les verts se sont engagés reste, à ce jour, largement méconnue. Au-delà des reconstructions et des imprécisions sur lesquelles nous devrons revenir, émerge de tous ces travaux une trame commune, un récit concordant. Autour de séquences temporelles identiques se déploie ce que l’on pourrait qualifier de roman des origines vertes. Il conte ad libitum la « longue marche des écologistes vers l’unité » organisationnelle, réalisée en 1984, sur fond de batailles entre les « pro » et les « anti » parti politique. Puis l’« ère Waechter », qualifiée de

4 Yves FRÉMION, Histoire de la révolution écologiste, Paris, Hoëbeke, 2007, p. 78.

5 Forgé par Charles Tilly, il peut être simplement défini comme un stock limité de moyens d’action à la disposition des groupes contestataires, à chaque époque et dans chaque lieu. Les limites et intérêts de l’usage de cette notion ont été développés dans Michel OFFERLÉ, « Retour critique sur les répertoires de l’action collective (XVIIIe-XXIe siècles) », Politix, vol. 1, n° 81, 2008, p. 181-202.

période du « ni droite ni gauche ». Décrite sur fond de dissensions stratégiques et de fluctuation des scores électoraux, elle court jusqu’à la mi 1993. L’Assemblée générale de Lille de novembre 1993 inaugure en effet une troisième étape, marquée par la prise de pouvoir de Dominique Voynet et de ses proches. L’alliance qui les lie préférentiellement au Parti socialiste est diversement appréciée par les auteurs, mais chacun note que « le tournant à gauche » des écologistes leur permet de s’inscrire dans le champ politique national en obtenant quelques parlementaires, et de participer à de nombreux exécutifs locaux. L’« ère Voynet » se termine généralement en 2001, et sa succession ouvre une période de recomposition interne. Elle permet à la ligne de « l’autonomie à gauche » de s’affirmer et à une nouvelle génération de cadres et dirigeants d’émerger, dont Cécile Duflot. Cette quatrième période, dont seuls les ouvrages les plus récents rendent compte, se clôt avec le lancement, en 2009, des listes européennes Europe écologie et du processus de rénovation du parti qui aboutit formellement, le 13 novembre 2010, lors des Assises constituante de Lyon, à la création d’EELV. Ce récit, ainsi que la plupart des événements qui le composent, se retrouvent au-delà des histoires officielles. Sorte de « fil vert »7, il est en effet approprié par

les militants qui, mêlant l’histoire du parti et leur histoire propre, participent de la construction d’une sociodicée verte cohérente dans laquelle leur engagement prend tout son sens.

Sans contester les usages et les fonctions partisanes de ces récits, nous souhaitons rompre avec la vision en surplomb qu’ils engagent. Les longs moments que nous avons passés à écouter les militants auprès desquels nous enquêtions et à comparer les différents récits qu’ils nous livraient d’un même événement ou d’une même « époque » invitent, au contraire, à faire une histoire par le bas, attentive aux trajectoires des militants et aux contextes de leurs engagements, ainsi qu’aux « petits » événements qui, bien qu’ignorés par les récits officiels, influencent la « fabrique partisane »8 et ses évolutions.

Écrire ce type d’histoire n’est pas chose aisée. Cela nécessite de disposer d’un ensemble de données quantitatives et qualitatives sur un nombre significatif de militants présents au moment de la construction du parti – et qui n’en sont pas nécessairement devenus les dirigeants – et de pouvoir retracer pour chacun les circonstances et les modalités de leur passage au politique et de leur action au sein du parti. Or, des acteurs, de leurs capitaux, des relations qu’ils entretenaient ou des conflits qu’ils ont traversés et qui

7 En référence à Marie-Claire LAVABRE, Le Fil rouge. Sociologie de la mémoire communiste, Paris, Presses de la Fondation nationale des Sciences politiques, 1994.

109 ont, à n’en pas douter, largement structuré la « primo genèse du parti »9 ainsi que sa mise en forme, il ne reste que peu de traces. En l’absence d’archives réellement disponibles – celles du parti sont parcellaires et à l’état de premier inventaire – nous n’avons pas pu constituer de base de données prenant en compte la totalité des individus présents au moment de la création du parti en 1984. La plupart ne militent d’ailleurs plus chez les Verts et leur trace est très difficile à retrouver. Il ne reste donc, de cette époque, que les témoignages des acteurs. Ils sont de deux sortes : des « simples » militants, qui peinent le plus souvent à se souvenir clairement de celles et ceux qui étaient présents ou non avec eux à tel moment précis, dans telle organisation ou telle mobilisation, et dont la mémoire organisationnelle se résume à la période de leur adhésion, qui a parfois été très courte ; des militants devenus dirigeants ou cadres du parti (Dominique Voynet, Yves Cochet, Brice Lalonde ou Antoine Waechter par exemple), dont les biographies sont si reconstruites et travaillées qu’elles n’informent plus sur les réalités et sur le rôle qu’ils ont joué à l’époque. Faute de pouvoir vérifier à l’aide de documents historiques précis des récits qui ne concordent pas toujours, la généalogie des Verts, ainsi que les enjeux qui ont présidé à leur création nous échappent en partie. Quant aux périodes plus récentes, elles ne sont pas nécessairement plus aisées à reconstituer. La structure régionalisée du parti vert et la mauvaise tenue des fichiers d’adhérents – lorsqu’ils existent –, ainsi que la réticence des militants à « se faire ficher », rendent impossible toute analyse précise par cohortes. Chez les Verts, on ne peut savoir ni qui a (ré)adhéré quand, ni connaître ne serait-ce que l’âge ou la profession de tel adhérent. Par ailleurs, s’appuyer sur les témoignages reste toujours malaisé puisque le turn-over militant, ces dernières années, a oscillé entre 10 et 30 % par an, et a pu atteindre, d’après les estimations internes, jusqu’à 50 % en fonction des périodes et des régions. Fragilité et imprécision des sources font ainsi pleinement partie de l’objet vert, et il a bien fallu faire avec. Partant de là, nous avons fait le choix d’utiliser l’ensemble des sources dont nous disposions (récits officiels publiés, ouvrages scientifiques, sources journalistiques, archives du parti et personnelles, témoignages d’acteurs) et de composer l’histoire du parti vert à partir des informations qui, une fois recoupées, nous semblaient les plus vraisemblables. Les récits de nos enquêtés nous ont également été fort utiles pour tenter de reconstituer les réseaux d’interconnaissance et pour saisir, au-delà des récits officiels, les enjeux les plus occultés des luttes entre les acteurs. Cette manière de procéder nous a inévitablement

9 Myriam AÏT-AOUDIA et Alexandre DEZÉ, « Contribution à une approche sociologique de la genèse partisane. Une analyse du Front national, du Movimiento sociale italiano et du Front islamique de salut », Revue française

conduite à définir des séquences10 historiques différentes des récits officiels, à réévaluer le

rôle des acteurs et le poids de certains événements.

C’est sur cette toile de fond parfois imprécise, que nous avons placé les trajectoires de nos enquêtés, utilisant cette fois leurs récits, non plus pour reconstituer l’histoire du parti, mais pour comprendre celle de leur propre engagement. Nous focalisant dans un premier temps sur les militants qui ont formellement adhéré au parti, nous avons introduit dans cette histoire des Verts, les quarante enquêtés de notre terrain « Commission nationale Économie et social », avec lesquels nous avons réalisé des entretiens biographiques approfondis, et dont nous avons retracé et suivi l’évolution de la trajectoire, soit en les réinterrogeant à intervalles réguliers pendant toute la durée de notre enquête, soit à l’aide des informations diffusées dans et par le parti. Nous avons analysé leur engagement chez les Verts à partir de leur date d’adhésion, mais également envisagé plus largement la période politique dans laquelle elle a été formalisée. Tout d’abord parce que la mémoire des individus, à quelques mois près, n’est pas infaillible. Ensuite parce qu’en raison de la complexité de la procédure, le délai entre la déclaration de volonté d’adhésion d’un individu et l’acceptation formelle de celle-ci est parfois très long chez les Verts11. Nous avons

considéré leur date de sortie de la même manière, en prenant en compte les discours de justification des militants et leurs contextes d’énonciation, et ce d’autant qu’elle procède, nous le verrons dans ce travail, plus souvent d’un non renouvellement de cotisation annuelle que d’un acte formel et public signifiant le refus de poursuivre l’engagement.

Nous avons également tenu compte, au-delà des temporalités individuelles, des contextes historiques et politiques dans lesquels les trajectoires de nos enquêtés s’inscrivent. Manière de faire droit à l’histoire et au collectif, cette démarche oblige à prendre en compte l’histoire longue des mobilisations politiques. Nous les avons envisagées comme des moments de (re)politisation12 qui pèsent sur les trajectoires individuelles des

différentes générations partisanes13. Si la deuxième guerre mondiale et la guerre d’Algérie

sont parfois évoquées par nos enquêtés, les événements de mai-juin 68 tiennent une place prépondérante dans la plupart des trajectoires. Se revendiquant « enfants de Mai 68 », de

10 Nous les entendons comme des moments arbitrairement découpés dans la continuité de l’histoire qui permettent de mettre en valeur des réalités observées et de leur donner un sens vraisemblable, c’est-à-dire conforme à l’interprétation que nous pouvons faire des récits de nos enquêtés et de propres observations. 11 Nous reviendrons sur cette procédure d’adhésion au chapitre 3.

12 Entendue ici au sens de Olivier IHL, « Socialisation et événements politiques », Revue française de science

politique, vol. 52, n° 2-3, 2002, p. 125-144 en ce qu’elle est élaborée « dans la succession des relations

d’interdépendances [que l’individu] a nouées mais aussi dans l’ombre portée d’un passé représenté, voire célébré, qui en oriente la signification ».

13 Pour rappel, les groupes d’individus qui entrent et militent dans le parti au même moment, et qui, de ce fait, vont partager une histoire organisationnelle et des pratiques militantes communes.

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nombreux militants verts lient leur engagement à cette époque et à l’intérêt qu’ils affirment, plus ou moins concomitamment, pour l’écologie politique. Nous avons pris cette filiation au sérieux et avons rendu compte de la variété des modes sur lesquels Mai 68 a été vécu par chacun d’eux et de la pluralité des dé/re classements auxquels cet engagement a donné lieu. Nous avons ainsi pu déconstruire la part naturalisée des récits d’enquêtés pour lesquels, « avoir fait Mai 68 » et adhérer aux Verts, vont souvent de pair, et finalement de soi. Nous avons également tenté de resituer ces trajectoires dans l’histoire des générations partisanes, en nous appuyant sur les quelques études sociographiques existantes et les fragments de fichiers locaux dont nous pouvions disposer.

Prétendre à une analyse des trajectoires nécessite, enfin, de porter une attention centrale aux familles des enquêtés. Lieux privilégiés de la socialisation et de la reproduction sociale, elles pèsent en effet sur les trajectoires des individus pour qui elles sont une « fiction sociale » autant qu’un « groupe réel »14. Nous les avons, dans notre enquête, considérées au sens large, en allant, quand c’était possible, au-delà du noyau parental. Les grands-parents, oncles, tantes, et frères et sœurs de nos enquêtés ont ainsi été pris en compte. Il s’agissait en effet, grâce à cette approche généalogique, de saisir plus concrètement le rôle des familles et de la socialisation primaire, mais aussi de le relativiser, les frères et sœurs d’une même famille n’ayant pas nécessairement le même destin militant. Ceci nous a également permis de constater que les parents au sens strict ne sont pas les seules instances de socialisation, et que si l’engagement politique, comme le capital culturel, s’hérite en partie, il est parfois transmis par une génération lointaine ou un membre éloigné de la famille, et reconstruit à l’occasion de la transmission15. Nous avons également analysé les parcours scolaires et, plus

largement, de formation, des enquêtés. Instances de socialisation secondaire, les institutions scolaires et les diverses organisations de jeunesse avec lesquelles les individus sont en contact ont de puissants effets socialisateurs sur les individus, qui viennent poursuivre, ou plus ou moins contrarier, leur trajectoire première16. Enfin, les parcours professionnels ont

été pris en compte, ainsi que les éléments biographiques qui jalonnent généralement les vies d’adultes. Toujours dans une logique de saisie globale, il s’est ainsi agi de caractériser les

14 Pierre BOURDIEU, « La famille : une catégorie réalisée », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 100, 1993, p. 32-36.

15 Voir sur l’analogie avec le capital culturel et les phénomènes de distorsions, adaptations et réinterprétations à l’occasion des transmissions Bernard LAHIRE, L’Homme pluriel. Les ressorts de l’action,

op. cit.

16 Ce qui relativise de fait la conception balistique qui pourrait, en première intention, être attachée à la notion de trajectoire, comme nous l’avons déjà vu.

individus à partir de l’ensemble de leurs activités sociales, qu’elles soient politiques, associatives, syndicales, professionnelles, ou relèvent de l’« à côté »17.

Nous avons ainsi pu construire trois trajectoires types qui favorisent l’adhésion au parti vert : celle des « spécialistes », celle des « altruistes » et celle des « insoumis ». Fondées sur les récits de vie des enquêtés, et ré-historicisées18, ces trajectoires se distinguent en

fonction des caractéristiques sociales et des socialisations primaires et secondaires des enquêtés, mais également selon les types d’engagements (associatifs, syndicaux, politiques) avant leur entrée chez les Verts. Elles nous permettent de montrer que, contrairement à ce que laissent croire les récits officiels, les Verts se composent, depuis toujours, de militants aguerris majoritairement ancrés à gauche, porteurs d’un projet dont le caractère politique – et électoral – s’est affirmé dès le départ.

S

ECTION

1 :

L

ES FONDATEURS DES VERTS

,

DES MILITANTS POLITIQUES

(1974-

1984)

La naissance des Verts est généralement présentée comme l’aboutissement d’une dynamique enclenchée au soir de l’élection présidentielle de 1974, où René Dumont représentait pour la première fois les écologistes. Elle est le fruit d’un processus d’unification – relative – à la fois long et laborieux. Pierre Serne, normalien et agrégé d’histoire, militant vert depuis 199719, résume assez bien, dans son livre écrit pour les vingt

ans du parti, cette vision de « la lente marche vers la création des Verts » :

Après la création de six organisations nationales, de plusieurs organisations électorales ponctuelles, de centaines d’heures de débats, un parti unique (et qui aura jusqu’en 1990 et la création de Génération Écologie le quasi monopole de l’écologie politique en France) existe enfin. Certes son nom montre que l’unité est complexe, que la forme parti laisse encore sceptiques certains. Mais les Verts existent20.

Selon ce type de récit, de 1974 à 1984, l’histoire de l’écologie politique n’aurait été qu’une succession d’affrontements et de (re)compositions entre différents réseaux et