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5 Ibid. 6 Une version de ce programme, dont il nous avait précisé de manière confidentielle qu’il en avait rédigé seul « au moins 70 % », est à paraître pour la semaine suivante : Pascal CANFIN, L’Économie verte expliquée à ceux qui n’y croient pas, Paris, Les Petits matins, 2007.

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journaliste à Alternatives économiques, apporte à la commission en contacts et en visibilité7.

Il rappelle, enfin, que des Conventions nationales thématiques ont été tenues, et notamment une sur l’économie sociale et solidaire que Jean-Philippe Magnen, conseiller communautaire à Nantes et co-auteur avec lui-même d’un projet de loi-cadre de l’économie sociale et solidaire, a animé. Après une courte pause, les participants procèdent à la réélection des membres du bureau, et à la composition d’une nouvelle équipe d’animation, intégrant les plus récentes « bonnes volontés » individuelles. La totalité des adhérents qui se représentaient est élue, à l’unanimité des voix, sans débat sur le mode de scrutin – une liste bloquée – et sans animosité visible. Les « groupes projets »8 trouvent leurs pilotes parmi les

présents : si Pascal Canfin reste chargé des tâches qui concernent l’élection présidentielle, Carine et Patrick Dieuaide viennent le soutenir en travaillant au chiffrage du programme ; Jean-Philippe Magnen et Éva Sas prennent en charge le projet municipal pour 2008 et les relations avec les élus locaux, et lancent un sous-groupe « Économie sociale et solidaire » ; Dominique accepte d’assurer l’animation du groupe projet sur les indicateurs, en s’appuyant sur le travail déjà réalisé par Bernard Guibert ; Patrick Dieuaide et Pascal Canfin animent ensemble le groupe dédié à l’Europe, tandis que Thibaut et Benoit continuent à alimenter et faire vivre le site web. Un sous-groupe « Fiscalité », évoqué en cours de discussion, reste en suspens.

Après un déjeuner rapide et convivial à la Cité universitaire toute proche, les membres se retrouvent pour un après-midi d’échanges avec Martine Billard et Francine Bavay. La première, députée de Paris depuis 2002 et candidate à sa réélection aux élections législatives de cette année, intervient pour présenter son travail de parlementaire en charge des questions sociales et son bilan. La seconde, qui vient d’être élue déléguée en charge des questions économiques et sociales dans le nouveau Collège exécutif (CE) des Verts dont Cécile Duflot est la Secrétaire nationale depuis l’Assemblée générale du 16 décembre 2006, vient se présenter et convenir avec les membres de la commission d’une méthode de travail pour la durée de son mandat interne. Vice-présidente au Conseil régional d’Île-de-France en

7 Une réunion sur « Le développement économique local » en présence de Jean-François Caron, vice-président au Conseil régional Nord-Pas-de-Calais ; un atelier « Intérêts et limites de la décroissance » avec Guillaume Duval (Alternatives Économiques) ; une réunion militante de formation au programme économique des Verts ; un atelier « Économie plurielle » avec notamment l’ancien secrétaire d’État à l’Économie solidaire, Guy Hascoët, et Jean-Philippe Magnen, conseiller communautaire ; un atelier « Que faire après des restructurations sur un territoire ? » avec Nairi Nahapétian (Alternatives Économiques) et Jean-François Caron ; un atelier « Patriotisme économique » ; une réunion plénière « Précarités » avec notamment Martine Billard, députée de Paris, et des représentants de l'UNEF, de la CGT, et de Fac Verte ; et un forum « L'environnement n'est pas l'ennemi de l'emploi » avec notamment Éva Sas, un représentant de la CGT, et un de Negawatt.

8 « Élection présidentielle 2007 », « Chiffrage du programme 2007 et Loi organique relative aux lois de finances LOLF », « Élections municipales 2008 », « Nouveaux indicateurs de richesse », « Économie sociale et solidaire », et « Europe et parti vert européen ».

charge, depuis 2004, de l’économie sociale et solidaire9, elle parle également de son action

en la matière. Les échanges confortent l’ensemble des participants dans l’idée que les Verts ne sont pas encore « crédibles » sur les questions économiques et sociales et manquent de relais dans la société civile, notamment auprès des représentants syndicaux. Tous s’accordent sur le point que l’un des enjeux des prochaines campagnes électorales est de peaufiner les propositions programmatiques et de les valoriser, afin d’installer sur les scènes politique et médiatique la crédibilité de « l’économie verte ».

Aux réunions de la commission L’assemblée générale se termine à 17h. Tout au long de cette journée, la fluidité et la politesse des échanges ont été frappantes. Ici, pas d’agressivité apparente dans les propos, pas de main levée, ni d’inscription nominative pour de classiques « tours de parole ». Pas de demande de « tac au tac » non plus, manière verte de surseoir à l’ordonnancement des interventions et de placer sa remarque ou son bon mot quand l’envie s’en fait sentir. Et à part quelques fumeurs, personne n’a quitté la réunion avant qu’elle ne soit terminée ou ne l’a interrompue en animant quelque discussion en marge de l’ordre de jour officiel10.

C’est dans la même convivialité que les membres du groupe local11 que nous avons

également observé semblaient s’accorder lorsqu’ils se sont réunis, le 2 décembre 2007, pour préparer la campagne municipale de 2008. Installés dans la salle commune du rez-de-jardin de leur immeuble d’habitat groupé12 que quelques-uns d’entre eux ont conçu et habitent

depuis sa réalisation en 1987, ils se sont retrouvés, comme à leur habitude, à l’heure du dîner, autour de mets préparés par leurs soins et de bons vins. Ce soir là, la plupart des membres du noyau dur du groupe sont présents. Aux cotés d’Adélie, qui se dédie à temps plein à sa fonction de secrétaire régionale des Verts, se trouvent deux autres habitants : Antonin, vice-président de conseil régional, et sa femme Alice. Cette ancienne directrice

9 Elle est également chargée du développement social, de la santé et du handicap.

10 Ces points paraissent significatifs de l’exceptionnelle « bonne tenue » des réunions de cette commission, au regard des observations et préconisations faites dans le cadre de l’audit participatif interne (API), réalisé en 2002 par Benoît Rihoux, Albert Peirano et Florence Faucher pour le compte de la direction des Verts. Voir Benoît RIHOUX, Albert PEIRANO et Florence FAUCHER, Audit Participatif Interne (API). Rapport Final. Vers un

parti en mouvement : démocratie, efficacité, convivialité, 22 octobre 2002, p. 42-44.

11 C’est l’unité organisationnelle de base chez les Verts. En fonction du nombre de militants inscrits, un groupe local peut s’étendre sur une ou plusieurs communes.

12 Ce système permet à plusieurs familles de se regrouper pour concevoir un logement correspondant aux besoins et capacités financières de chacun. Certains projets comportent également des locaux communs et des espaces extérieurs partagés. La plupart du temps, les constructions sont non seulement réalisées dans le respect des normes environnementales, mais sont particulièrement vertueuses en la matière. Le Mouvement de l’habitat groupé autogéré (M.H.G.A), créé en 1977, et rebaptisé Éco habitat groupé, aide les volontaires dans l’élaboration et la mise en œuvre de ces projets. Voir pour les détails http://ecohabitatgroupe.fr/

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d’école milite également chez les Verts et préside l’AMAP13 qu’elle a lancée quelques années

auparavant. Tout près d’eux, la secrétaire du groupe local, Lison. Ingénieure informaticienne, elle siège, elle, au Conseil statutaire des Verts14. Adélie et Antonin sont également conseillers

d’opposition depuis les dernières élections municipales de 2001, à l’occasion desquelles le groupe « Écolos d’ici et d’ailleurs » s’est composé pour la première fois. Font également partie de ce noyau dur, plusieurs autres militants ou sympathisants verts, qui étaient déjà sur la liste municipale de 2001 et avaient participé à la réalisation d’un journal local, Le

mouton à 5 pattes, que les membres du groupe avaient créé dans la foulée des élections :

Jean-Baptiste, artiste-peintre et illustrateur pour le journal ; Louis, cadre technique au ministère des Transports, engagé à l’association Mieux se déplacer à bicyclette15 ; et Virginie,

géographe retraitée, militante citoyenne multicartes et ancienne élue de conseil de quartier.

Ce soir, ils accueillent de nouveaux venus intéressés par l’écologie et la politique locale. Si c’est la première véritable réunion politique pour Ali, un professeur d’éducation physique, et pour Jean-Luc et sa compagne Bernadette, tous deux psychothérapeutes, ils se côtoient et côtoient d’autres membres du groupe depuis longtemps, partageant le souvenir d’une enfance dans l’un des immeubles communautaires de la ville, chantant dans la même chorale, ou dédiant une part de leur temps aux activités de l’AMAP. C’est d’ailleurs par ce biais que Marjolaine, chargée de mission le secteur de la santé et Pauline, consultante en informatique, ont rencontré et mieux connu les membres du groupe, et ont été amenées à s’engager dans cette campagne municipale. Quant à Paul, il a cette fois décidé de suivre sa femme Virginie dans l’aventure, même s’il le fait avec toute la distance que cet ancien directeur de recherche à l’INRA sait mettre entre les activités partisanes et lui. Restent autour de la table, les derniers venus : Ludovic, ingénieur de recherche impliqué à MDB, et Clarisse, une jeune ingénieure d’étude de l’INRA récemment intéressée par la politique locale et le développement durable. Peu d’inconnus donc à cette réunion, dont l’ordre du jour est dédié à la composition de la future liste électorale et à l’organisation des premières tâches de campagne.

13 Une AMAP (Association pour le maintien de l’agriculture paysanne) est un regroupement contractuel de plusieurs consommateurs et d’un agriculteur. L’agriculteur s’engage à produire en respectant la charte de l’agriculture paysanne et le cahier des charges de l’agriculture biologique, et à distribuer sa production. Les consommateurs s’engagent à pré payer un prix équitable cette production, qui leur est livrée sous forme de paniers, selon une périodicité convenue. Les AMAP locales font partie du réseau national de l’Association pour le maintien de l’agriculture paysanne. Voir les détails sur http://www.reseau-amap.org/

14 Élu selon des modalités décrites dans l’Agrément intérieur, il veille au respect des statuts et agréments ainsi qu’à celui des décisions des instances internes du parti.

15 Créée en 1974, et initialement intitulée Mouvement de défense de la bicyclette, cette association a pour objectif de défendre l’usage du vélo en tant que moyen de transport quotidien. Elle a été renommée Mieux se déplacer à bicyclette en 2004.

La première partie de la réunion est consacrée à la répartition des places sur la liste qu’ils présenteront aux élections. Prenant à cœur, par anticipation, son rôle de tête de liste, Antonin propose une méthode de travail pour l’élaboration du programme et rappelle, aidé en cela par Adélie, les contraintes légales et les manières d’organiser les campagnes chez les Verts. Toute l’expérience militante des anciens du groupe, des élus et des cadres du parti irrigue la réunion et permet aux nouveaux venus de se familiariser avec les tâches et les rôles avec lesquels ils devront composer. Le groupe dispose déjà de beaucoup de ressources, chacun ayant l’habitude de mettre au service de l’ensemble ses compétences professionnelles ou ses réseaux de connaissances, et toutes les informations à la fois triviales mais essentielles pour mener campagne sont connues : le nombre de tracts qu’il faut imprimer pour diffuser aux heures d’affluence au métro, le nombre de boîtes aux lettres de la ville, les lieux et les heures où l’on rencontre le plus de citoyens, les temps de fabrication et de reproduction des documents de campagne, la procédure de réservation de salles municipales… Les anciens entraînent les nouveaux à se déclarer volontaires pour telle ou telle tâche, qu’ils n’effectueront jamais seuls dans un premier temps. Le « groupe organisationnel »16 est rapidement constitué et s’affaire déjà en aparté à composer un

premier planning. Antonin enchaîne sur le contenu programmatique et a déjà un texte stratégique à proposer au groupe. Il s’agit de présenter les membres de la liste, de trouver un titre et un slogan, de définir une charte graphique et « sémiologique » afin que la liste se démarque clairement de celles des concurrents. Les idées fusent, les mots d’esprit sont légion, tout comme les rires et les clins d’œil. Malgré les heures passées et la fatigue, les membres du groupe sont toujours présents et concentrés. À vingt-trois heures trente, le groupe a épuisé, comme l’on dit ici, l’ordre du jour ; il ne reste rien des tartes salées, ni des boissons et des desserts qui avaient été apportés et personne ne part sans avoir participé à la vaisselle et à la remise en ordre de la salle commune. Rendez-vous est pris pour la semaine suivante, même lieu, même heure, pour la deuxième d’une longue série de réunions de campagne dans laquelle tous décident de s’engager, seuls ou en famille, en fonction du temps qu’ils ont, de leurs croyances, de leurs valeurs et de leurs histoires personnelles.

Les participants à ces deux réunions, auxquelles nous avons assisté en enquêtant sur deux de nos terrains, « commission nationale Économie et social » et « groupe local », forment un ensemble très bigarré de militants et de sympathisants, aux âges et aux expériences militantes variés. Au-delà de la convivialité apparente de leurs échanges, nous sentions que leurs prises de positions n’étaient bien sûr pas si unanimes. Quelques conflits ou animosités étaient même perceptibles, que signalaient les « mimiques », « sous