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Extériorisation et ré intériorisation

Une infime fraction des prothèses et des orthèses sont implantées dans le corps humain L’immense majorité des prothèses, inactives comme automatisées, demeurent détachables, ce sont des outils « traditionnels ».

L’hominidé, selon Yves Coppens384, est apparu il y a environ 7 millions d’années. Nous ne

disposons, de l’activité préhistorique, que de traces matérielles fort éparses. Les discours, les gestes et les pratiques se sont perdus dans « le sombre abîme du temps »385.

Nous ne pouvons pas savoir exactement quand ni comment les premiers hominidés eurent recours à des outils improvisés (c’est-à-dire à l’usage de bâtons, de pierres, d’os ramassés ça et là).

Les comportements des grands primates contemporains peuvent cependant nous donner quelques informations sur ce sujet. L’observation de chimpanzés nous montre que certains d'entre eux sont en mesure d’utiliser des outils improvisés simples (utilisation de baguette pour obtenir du miel) et même des objets façonnés. Leur utilisation d'outils façonnés donne lieu à une transmission que certains auteurs (Hirata en 1998, Leblan en 2008) jugent comme « culturelle ». Ces objets en question sont des « tabourets de chimpanzés », des coussins de feuilles de palmiers386.

Peut-être que ces « constructions », élaborées par des primates, ont des similarités avec les premiers outils des premiers humains, dans la mesure où ils sont un témoignage d’une activité technique rudimentaire mais que cette activité technique, totalement biodégradable, n’a pas été en mesure de franchir les années.

Les premiers outils rudimentaires façonnés par les premiers humains, selon Yves Coppens, dateraient d’environ 3,5 millions d’années. Pour André Leroi-Gourhan387, « l’apparition de l’outil

384 Ces chiffres sont ceux donnés dans le cadre du cours de Yves Coppens, donnés au Collège de France en 2005. 385 Laurent Olivier, Le sombre abîme du temps. Mémoire et archéologie, Paris, Seuil, 2008.

386 Vincent Leblan. Analyse spatiale des relations entre les hommes et les chimpanzés dans la région de Boké (Guinée), thèse de

doctorat d'anthropologie sociale à l EHESS, 2008.

parmi les caractères spécifiques marque précisément la frontière particulière de l’humanité, par une longue transition au cours de laquelle la sociologie prend lentement le relais de la zoologie388 ».

L’industrie lithique, de par sa capacité de très grande conservation à travers le temps, demeure l’accès privilégié pour les humains de notre époque, à la connaissance de l’activité technique des premiers hommes et femmes qui ont parcouru la surface de la Terre.

L’homo sapiens, né en Afrique, il y a environ 200 000 ans, n’a eu de cesse de développer une approche d’ordre technique, qui lui a permis peu à peu de coloniser la plupart des écosystèmes du globe terrestre. Chez l’homo sapiens, on a observé un recours constant aux outils détachables. Ces outils sont des dispositifs techniques qui résultent de l’activité conjointe du cerveau et de la main. L'homo sapiens est un homo faber. Par rapport à un outil improvisé, l’outil façonné est le fruit d’un travail, il représente le dévoilement389 d’une technique.

Les premiers outils façonnés complexes (que l’on a à notre connaissance) sont en os, en perles, en coquillage et composés de petits blocs d’ocre et comportent des incisions géométriques porteuses d’un sens probablement symbolique (décoratif ou mystique). Ces premières expressions, caractéristiques d’un art ou tout au moins d’un artisanat, dateraient de -75 000 à -80 000 avant notre ère. Elles ont été découvertes sur le site de Blombos en Afrique du Sud390.

Comme nous l'avons évoqué dans l'introduction, les prothèses informatisées représentent une rupture historique dans cette histoire de l'outillage car ces objets sont des automates, dotés de capacité de calcul et d'exécution de programmes, capable de parfois de mise en réseau et en outre, demeurant tout aussi faciles à transporter qu'un outil lithique.

Je me suis focalisé dans la première partie de cette thèse sur l’expérience concrète du vécu de porteurs d’implants actifs cardiaques ainsi que sur les pratiques et les discours des médecins et des industriels de ce secteur afin d'examiner au plus près les enjeux de la ré-intériorisation physiologique des outils informatisés. L'objectif des observations participantes et des entretiens fut d'observer les conditions de vie et surtout de récolter le discours d'humains disposant d'une machine informatique logée dans leur « microcosme391 » corporel.

Mais le processus de ré-intériorisation présente deux versants : le premier est corporel avec l'irruption du Métal dans la Chair, le second est psychologique et imaginaire avec l'inclusion dans le schéma corporel et l'introjection du programme dans l'esprit.

prolongements, des projections organiques permettant à l’humain de se doter de fonctionnalités nouvelles (démultiplier sa force, frapper à distance, creuser le sol…). Chaque outil, de ce point de vue, peut-être donc perçu comme une forme de prothèse. Cf. Michel Tibon-Cornillot « D'une origine biologique des techniques », Alliage, n°20-21, 1994. Url : http://www.tribunes.com/tribune/alliage/20-21/tibo.htm. [consulté le 18/11/12].

388 André Leroi-Gourhan, Le geste et la parole, tome I - Technique et langage, Albin Michel, 1964, p. 129.

389 Martin Heidegger, « La question de la technique » in Essais et Conférences (1954), Paris, Gallimard, Coll. « Tel », 1958, pp. 9-

48.

390 Vincent Mourre, P. Villa et C.-S. Henshilwood, « Early use of pressure flaking on lithic artifacts at Blombos Cave, South

Africa », Science, vol. 330, n°6004, 2010.

391 Sur cette notion de « microcosme » corporel, se référer à : Marie-Christine Pouchelle, Corps et chirurgie à l'apogée du Moyen-

Au cours de ma recherche, il m'est apparu que ce qui est finalement le plus déterminant, au plan anthropologique, ce n'est pas la localisation anatomique de la prothèse mais plutôt son influence sur le cerveau et les comportements.

Les outils informatisés les plus problématiques socialement ne sont donc pas les plus rares et les plus impressionnants (les implants thérapeutiques et expérimentaux) car leur utilisation est très strictement encadrée, mais ce sont plutôt les plus répandus (les prothèses cognitives) qui déferlent de façon anarchiques dans notre monde social.

Les outils informatisés qui accompagnent le corps, quand ils sont implantés (in), ont finalement tendance à se faire oublier quand l'appropriation et la compliance se déroulent normalement et qu'il n'y a pas de dysfonction. Les endoprothèses sont conçues pour devenir transparentes et silencieuses. L'accompagnement médical qui accompagne le recours aux endoprothèses et aux membres détachables permet de tempérer des éventuels effets délétères de ces outils. La dangerosité et l'utilité des endoprothèses sont socialement reconnues. Ce n'est pas encore le cas pour les outils informatiques détachables (out).

Le postulat qui semble érigé en norme actuellement est que « le monde moderne » impliquerait une familiarisation à tout âge, avec toutes les sortes d'outils informatiques. Ces appareils tendent donc à être systématiquement présents auprès de nous au cours de notre quotidien, comme de notre vie professionnelle.

Ce qui paraît le plus préoccupant c'est que ces machines sont considérées comme inoffensives. Effectivement, elles ne provoquent ni infection, ni nécrose ni maladie nosocomiale. Pourtant, certains effets de l'usage de prothèses détachables sont eux-aussi de l'ordre de la iatrogénèse. L'action de ces outils informatiques est en mesure de pénétrer profondément « à l'intérieur » d'un individu en modifiant sa perception de la réalité et de son environnement social.

André Leroi-Gourhan assimile la capacité technique humaine à un moyen pour les humains de court-circuiter les mécanismes évolutifs darwiniens. Une famille d'outil peut être comparable à une spéciation réversible.

La spéciation permet aux animaux d'évoluer dans des écosystèmes précis. Les dauphins sont, par exemple, des mammifères qui demeurent continuellement dans l'eau en raison de leur morphologie et, de la même manière, les gorilles sont des mammifères qui vivent dans les forêts.

Certains outils ne sont utiles qu’à certains moments et la pluralité de l'outillage humain nous permet d'adapter notre corps à la tâche que nous voulons effectuer. Se rendre à la plage ne nécessite pas un équipement identique que quand il s'agit de faire du ski. Le deltaplane permet à un humain de planer mais heureusement celui-ci peut s'en défaire au cours de sa vie quotidienne. André Leroi-Gourhan écrit ceci :

L'espèce humaine échappe périodiquement, en se limitant au rôle d'animation, à une spécialisation organique qui la lierait définitivement. Toute adaptation de la main des premiers Anthropiens en outil proprement dit n'aurait créé qu'un groupe de Mammifères hautement adaptés à des actions restreintes et non pas pas l'homme dont l'inadaptation physique (et mentale) est le trait génétique distinctif : tortue lorsqu'elle se retire sous un toit, crabe lorsqu'il prolonge sa main par une pince, cheval lorsqu'il devient cavalier, il redevient chaque fois disponible, sa mémoire transportée dans les livres, sa force multipliée dans le b œuf, son poing amélioré par le marteau.392

Selon André Leroi-Gourhan, le corps humain est « superspécialisé pour rester apte à tout faire393 ». Les humains, en effet, n’ont ni des mâchoires de tigre, ni des griffes d’ours, pas d’ailes, ni

de nageoires. La main est « l’outil des outils394 ». Sa combinaison avec la puissance du cerveau nous

permet d’élaborer des artefacts qui compensent nos faiblesses. La capacité de projeter des extensions, réalisées artificiellement, permet aux êtres humains de ne plus demeurer tributaires de l’évolution des espèces par voie de sélection naturelle395 pour bénéficier de capacités adaptées à

leurs milieux de vie.

La caractéristique fondamentale du corps humain est donc peut-être, en définitive, sa

polyvalence. Un être humain peut utiliser une multitude d’accessoires détachables et

interchangeables, qui ne le spécialisent que momentanément.

Un outil, comme une épée, ne sera porté que pendant les entraînements et le combat. En temps de paix, le guerrier peut, quand il le désire, échanger cette arme contre un pinceau ou un outil de jardinage. Ce n’est pas le cas dans le règne animal ou des changements aussi drastiques ne se font pas à l’échelle ontogénétique, de la vie d’un individu mais à l’échelle phylogénétique de l’évolution de l’espèce sur des centaines ou des milliers d’années.

Cette absence de spécialisation du corps humain serait un lourd déficit capacitaire si elle n’était contrebalancée par l’action du cerveau et le bénéfice de la totalisation culturelle d’expériences antérieures que propose le cadrage culturel.

Le corps humain gagne à conserver cette capacité comparable au phénomène de « totipotence396 ». L'usage prolongé d'un outil entraîne quand même une certaine adaptation du

corps à celui-ci.

En sociologie, on observe que ce sont les corps des classes sociales dominées qui portent les stigmates d’une spécialisation. Schématiquement, les pratiques physiques et sportives des classes sociales supérieures valorisent le développement du bien être et la santé du corps en n’hésitant pas à

392André Leroi-Gourhan, Le geste et la parole, tome II – La mémoire et les rythmes, Albin Michel, 1964, p. 48, cité par Michel

Tibon-Cornillot in « Déferlement des techniques contemporaines: instabilité, disparition des sociétés industrielles », texte d'une conférence donnée à Osaka le 30/10/2004, url: ddata.over-blog.com/4/37/62/00/articles/intervdefJapon28-4-05.pdf [consulté le 18/11/12].

393 André Leroi-Gourhan, Le geste et la parole, tome II -La mémoire et les rythmes, p. 24. 394 Aristote, Parties des animaux IV, 10, 687a et Aristote, Traité de l’âme, III, 8, 432a. 395 Il se réfère aux thèses développées par Charles Darwin en 1859.

396 La totipotence correspond à une caractéristique des cellules embryonnaires qui sont à même de constituer toutes les types de

recourir à du matériel coûteux (yacht, golf, équitation)397. Les classes populaires valorisent

davantage la force physique que les classes supérieures. Selon Pierre Bourdieu :

le rapport instrumental au corps propre que les classes populaires expriment dans toutes les pratiques ayant le corps pour objet ou enjeu, régime alimentaire ou soins de beauté, rapport à la maladie ou soins de santé, se manifeste aussi dans le choix demandant un grand investissement d’efforts, de peine ou même de souffrance398.

Il est intéressant de s'interroger sur le type d'extériorisation qui correspond aux outils cognitifs détachables. La « pseudo spéciation » qui correspond aux outils détachables informatisés cognitifs est celle qui donne la possibilité aux humains d'accéder à un réseau de données que certains dénomment « noosphère ». Cet accès à un réseau permet de faire se rencontrer les univers numériques et notre vécu réel immédiat. La confrontation entre ces deux espaces différents nécessite impérativement une prothèse de type électronique. Sans outil spécifique il est impossible pour le corps de se connecter au web, de téléphoner ou de regarder la télévision.

La capacité humaine d'extériorisation des organes de la technicité permet entre autres, d'extérioriser une partie de la mémoire. Les supports écrits sont déjà une expression de ce processus d'extériorisation cognitive. La cognition ne se réduit pas à la mémoire mais cette faculté de se souvenir, de rendre présent une information perçue à un moment antérieur est fondamentale pour la constitution de connaissances et pour mener une réflexion sur le milieu environnant comme sur les conséquences des actions entreprises.

Les prothèses informatisées détachables cognitives sont conçues pour accompagner une personne, pour stocker des données, aider à communiquer, élaborer des projets, distraire, acheter des produits... Une forme de fusion, d'hybridation entre Métal et Chair se met en place sans qu'il y ait eu la moindre implantation. Cette hybridation se structure autour de la représentation psycho- sociale qu'à l'utilisateur de son rapport à l'outil technique. L'outil n'est plus perçu comme un simple outil détachable mais comme une partie détachable de son corps. Le besoin d'y recourir est ressenti en permanence.

Tout comme la nourriture que nous ingérons a une action invasive, les informations que nous percevons sont également invasives car elles sculptent nos aires cérébrales. Ce que nous voyons, écoutons, sentons, touchons, goûtons est en effet capable de modifier la configuration de l'organe qui est le siège principal de notre pensée.

Les machines détachables, quand nous les utilisons, ont donc un effet invasif physiologique qui est loin d'être évident au premier abord. Cette aspect de mon questionnement sera au centre de la seconde partie de cette thèse.

397 Pierre Bourdieu, La Distinction. Critique sociale du jugement, Paris, Les Éditions de Minuit, 1979, p. 239. 398 Pierre Bourdieu, op. cit., p. 234.

L'invasivité des prothèses cognitives détachables est subtile mais réelle. Elle est le résultat non pas d'un acte ponctuel d'implantation mais plutôt d'un habituation sur de longues périodes. Pour proposer une image pour décrire ce processus, l'invasivité des prothèses cognitives détachable ressemble à la modification du corps suite à une musculation progressive alors que l'invasivité des endoprothèse s'inscrit dans une perspective chirurgicale.

La fréquence d'usage est directement liée à leur attractivité, à leurs chatoiement et aux promesses de plaisir sensoriel qu'elles suscitent. Les prothèses cognitives sont élaborées pour donner l'envie de les manipuler. Il est facile d'en devenir « accro » psychologiquement. L'attraction cognitive provoquée par ces prothèses sera probablement encore renforcée quand elles prendront la forme de réalité augmentée avec la mise à disposition de lunettes connectées. Les prothèses cognitives qui nous connectent à certains de nos proches et en même temps à des bases de données immenses, à des institutions multinationales ou nationales très structurées, sont des appareils qui deviennent facilement, pour le meilleur comme pour le pire, des sortes de « GPS de l'esprit399 ».

Est-il pertinent de promouvoir à tout âge le recours à l'informatique ? Que se passe t-il si le cerveau se développe sans avoir jamais connu une absence de prothèse cognitive?

Sherry Turkle400 veut que la société réfléchisse sérieusement sur les effets négatifs potentiels de

l'électronique implantée, notamment la traçabilité qu'elle rend possible. Mais elle a aussi étudié la façon dont les gens racontent leur relation à leur téléphone et note que certains d'entre eux se considèrent comme des cyborgs.

« Certains ne peuvent littéralement pas vivre sans leur outil », nous dit Turkle. « Ils ne se sentent pas bien quand ils ne sont pas connectés. Nous ressentons nos téléphones comme s’ils étaient une partie de notre corps. ».

De là à souhaiter implanter le téléphone au corps, il n'y a qu'un pas que franchit sans hésitation le journaliste Jim Giles401:

« peut-être qu’avoir un téléphone implanté n'est pas si contre nature. Ce serait juste une chose évidente à faire avec une machine à laquelle nous sommes déjà fortement attachés 402»

Des chercheurs d'Autodesk, à Toronto, ont prouvé que les boutons, l'écran tactile, les LED et la connexion GSM comme le bluetooth, fonctionnent quand ils sont implantés dans le bras d'un

399 Les écrits d'Edward Barnays (double neveu de Sigmund Freud, par son père et par sa mère), au début d

XXe siècle, à propos des

moyens mis en place pour fabriquer des consentements vis à vis de différents produits comme de politiques publiques (guerre mondiale, tabac, automobile, fluor, viande porcine...), sont édifiants. Günther Anders comme l'École de Francfort analyseront les méfaits des médias de masse. Noam Chomsky n'aura de cesse tout au long de sa carrière de critiquer l'impact des médias et des manipulations qu'ils occasionnent. Actuellement Michel Desmurget a compilé un grand nombre d'études portant sur la consommation de télévision dans son ouvrage : TV Lobotomie- La vérité scientifique sur les effets de la télévision, Max Milo. 2011. L'essor actuel des publicité contextuelles, de l'application Google Now, d'éventuelles publicités subliminales diffusées par des lunettes de réalité augmentée témoignent d'une sophistication croissante des méthodes pour influencer nos comportements au moyen de notre environnement informatisé. Le neuromarketing est le dernier développement du marketing visant à court- circuiter le mécanisme même de consentement. Se référer par exemple à l'ouvrage : Read Montague, Your Brain Is (Almost)

Perfect: How We Make Decisions, New York, Plume Books, 2007.

400 Jim Giles, « The gadget inside, would you become one with your smartphone? », New Scientist , 12 may 2012, n°2864, p. 22 401 Loc. cit.

cadavre et sont actuellement en train de concevoir des interfaces implantables403. Implanter un

téléphone portable est donc techniquement possible à très court terme. Les connaissances liées matériaux bicompatibles ont été acquises dans le cadre des recherches portant sur les implants médicaux actifs.

Il est quand même, préférable d'un point de vue médical, de n’utiliser les prothèses plus invasives biologiquement qu’en dernier recours, pour permettre le maintien d’une bonne santé physiologique et non pas pour élaborer de nouveaux gadgets.

Pour chaque « interfaçage », même quand il ne s'agit pas d'une implantation, il est probablement nécessaire de procéder à un jugement rationnel basé sur un bilan coût/avantage afin de déterminer si oui ou non celui-ci est bon physiquement et psychiquement pour l'utilisateur. Cette question ne doit pas être négligée quand il s'agit de concevoir un accompagnement pédagogique.

Or, pour des motifs économiques, les industriels cherchent avant tout à ce que le consommateur ait un comportement d'achat compulsif et soit « accro » à des produits manufacturés.

L'idéologie qui accompagne le matériel informatisé et les prothèses détachables tend à nous présenter les ordinateurs et les programmes informatiques comme des outils qui améliorent le quotidien, qui sont indispensables pour tout le monde et à tout âge. La fascination des humains contemporains de tous âges pour ces dispositifs qui mettent à disposition des univers virtuels et des environnements numériques est entretenue aux moyens de tous les leviers du marketing et de la propagande.

La possibilité de construire un outil ne suffit pas pour légitimer son utilisation par n'importe qui n'importe comment. Les enfants forment un public très particulier car ils sont à une époque charnière pour la structuration de leur activité cognitive et pour la mise en place de comportements sociaux qui se maintiendront, pour certains, par la suite. Une réflexion est donc importante principalement dans une perspective éducative afin d'encadrer le recours à des prothèses informatiques détachables. En effet, l'usage de prothèses cognitives même détachables n'est