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Section 3. Rôle des politiques de microfinance dans le renforcement de l’inclusion financière financière

1.2 Expériences des Etats de l’UEMOA

Nous allons présenter distinctement les initiatives menées par les gouvernements des états membres de l’Union et celles menées par les partenaires au développement (BM, FMI, UNCDF, AFD, etc). Il convient de préciser que ces actions sont initiées et mises en œuvre au niveau pays ou au niveau régional, en vue de promouvoir l'inclusion financière des populations de l’Union.

a. Les Stratégies Nationales d’inclusion financière ou de Finance Inclusive

En plus de la Stratégie Régionale d’Inclusion Financière (SRIF) abordée plus haut, la plupart des pays de l'Union ont élaboré et adopté leur stratégie nationale d'inclusion financière. La SRIF retrace les grandes lignes au niveau communautaire avec un plan

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d’action uniforme pour tous les Etats membres. Les stratégies nationales quant à elles, traitent des caractéristiques spécifiques à chaque pays et la mise en œuvre est assurée par les autorités locales. Certains Etats membres en disposent déjà une première ou une seconde édition de la dite stratégie, d’autres par contre n’en disposent pas jusqu’à ce jour. Le Niger a élaboré sa Stratégie Nationale de Finance Inclusive (SNFI) en 2015 et qui est pilotée par le Ministère des Finances. Sa mission est de « faciliter l’accès de manière

durable aux produits et services financiers diversifiés, innovants, de qualité et à coût abordable à une clientèle croissante (la population), particulièrement les groupes financièrement exclus, les couches économiquement vulnérables, notamment les femmes, les jeunes, les acteurs du secteur rural et du secteur informel43. » La SNFI est assortie d’un plan d’action qui se compose en trois axes principaux, au sein desquels figurent des sous objectifs. Pour la mise en œuvre, un comité national a été mis en place et coordonné par une structure du Ministère en charge des finances.

Cependant, la SNFI 2015 risque fort de pâtir du même sort que celle de 2004 qui n'a jamais connu un véritable démarrage des activités prévues. En effet, adoptée depuis le conseil des ministres du Gouvernement du Niger du 29 juillet 2015, trois années plus tard aucune action n'a été réalisée. C'est après avoir accusé ce retard considérable qu'un Comité National de Suivi a été créé et qui doit se réunir sur une base trimestrielle. A ce jour, un retard est accusé dans la mise en œuvre du plan d'action de cette stratégie. Les autorités doivent faire de la SNFI un véritable cheval de bataille pour renforcer l'inclusion financière. Cela doit passer par une tenue régulière des rencontres avec toutes les parties prenantes, afin d’assoir une mise en œuvre rigoureuse des différentes actions prévues.

b. Le dispositif de soutien au financement des PME/PMI dans l'UEMOA

Le financement des micros activités constitue une problématique à laquelle est confrontée la plupart des pays en développement. Selon les données de l’AfDB, seulement 20% PME/PMI africaines obtiennent des lignes de crédit d'une institution financière. Au niveau des pays de l'UEMOA, en moyenne 51% des crédits recensés à la Centrale des Risques sont portés par « les 400 entreprises plus grosses consommatrices du

crédit bancaire et qui représentent que 1% en terme de nombre de bénéficiaires ».

Plusieurs contraintes sont à l'origine de cette situation qui n’est pas manifestement le caractère d’un financement optimal des économies. Il s'agit d'une inadéquation ou

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insuffisance du cadre juridique ou d'une asymétrie d’information, du fait notamment des difficultés qu’éprouvent les PME/PMI à produire des informations comptables et financières fiables et de bonne qualité. Ces contraintes peuvent aussi être expliquées par le caractère informel de la plupart de ces structures et dont certaines éprouvent des difficultés même à sécuriser les crédits qui leur sont offerts par les institutions financières. Elles peuvent aussi être attribuées à la faible diversification des sources de financements. En effet, il existe dans la zone très peu d'institutions spécialisées dans le capital-investissement, le crédit-bail, qui pourraient ainsi compléter les financements des banques classiques. Les autorités de l’Union ont à cet égard analysé les enjeux du financement des PME/PMI au regard de sa contribution au dynamisme et à la résilience des économies. C'est en ce sens que dans le Plan d'action pour le financement des économies de l'UEMOA adopté en 2012, les Chefs d’États de l'Union ont recommandé de « mutualiser les initiatives et les moyens de l'ensemble des parties prenantes pour apporter

des solutions durables à la problématique du financement des PME/PMI dans l'Union ».

Ainsi, à la demande du sommet des Chefs d’Etats, des réflexions ont été engagées au sein de la BCEAO pour mettre en place un mécanisme d'appui au financement des PME/PMI dans la zone. Ce dispositif, adopté par le Conseil des Ministres de l’Union44, repose sur trois piliers. Pour le premier pilier, il s'agit de l'instauration d'un mécanisme de définition et de sélection des PME/PMI bénéficiaires. Au regard de leur caractère informel pour une bonne partie et de leur activité parfois supposée plus ou moins risquée pour les banques, l'ensemble des micros activités ne peut évidemment être retenu dans ce dispositif de financement. Il est basé sur un certain nombre de critères uniformes et retenus au niveau de tous les pays de l'Union. Peuvent être retenues dans le dispositif, les PME/PMI ayant déjà bénéficié d'un crédit sécurisé par une institution de garantie reconnue, ou admissible à un accord de classement de la BCEAO ou ayant bénéficié de financements en fonds propres ou quasi-fonds propres octroyés par une entreprise de capital-risque. Le deuxième pilier est relatif à l'admissibilité au refinancement de la BCEAO. Les crédits portés par les PME/PMI sélectionnées selon les modalités susmentionnées seront admissibles de facto au refinancement de la Banque Centrale. Pour le troisième pilier, il s'agit d'une incitation réglementaire. La réduction de la pondération sur les prêts aux PME/PMI sélectionnées, de 20% à 0%.

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c. La création des structures ministérielles de suivi des SFD (SMS)

Le secteur de la microfinance a connu un essor très marqué depuis l’avènement de la Loi PARMEC en 1993. Le nombre d'IMF augmente considérablement au fil des années. Cet état de fait a eu comme conséquences, une certaine anarchie au regard de l'accroissement du volume des activités, notamment les détournements commis par les gérants des IMF, l'augmentation d'institutions exerçant l'activité de microfinance sans autorisation préalable du ministre en charge des finances, et des problèmes de gouvernance en général. Face à tous ces problèmes, les autorités publiques du l’Union ont pris l'initiative de créer une structure autonome de supervision et qui servira d'interface pour traiter toute les questions relatives à la microfinance dans le pays. La création de cette structure, prévue par la Loi portant réglementation des SFD, a été uniformisée au niveau de tous les pays de la zone et communément appelée « Structure Ministérielle de Suivi (SMS) des SFD ». La SMS du Niger est dénommée Agence de Régulation du Secteur de la Microfinance (ARSM). Elle a été créée sur Décret présidentiel et a comme prérogatives : la délivrance des autorisations d’exercice ; le contrôle sur pièces et sur place des institutions de microfinance exerçant sur le territoire ; la collecte, le traitement et la diffusion de l’information sur le secteur ; la faculté de sanctionner ; la collaboration avec les autres acteurs du secteur de la microfinance. Elle dispose de deux instances pour son fonctionnement. Une instance suprême, la « Commission Nationale de Régulation de la Microfinance (CNRM) » pour le côté décisionnel et un secrétariat exécutif pour les aspects techniques. Ce dernier dispose d’une équipe de superviseurs qui assurent la surveillance du secteur de la microfinance en collaboration avec la BCEAO. La supervision consiste à veiller au respect des dispositifs réglementaires par les SFD à partir de leurs états périodiques transmis à la tutelle (contrôle sur place) ou bien à effectuer des investigations dans les locaux des SFD (contrôle sur place). A l’issue de ce dernier, un rapport est élaboré avec des recommandations formulées à l’endroit des dirigeants du SFD concerné, en vue de leur mise en œuvre sous peine de sanction ou même de retrait de l’agrément dans certains cas. Une autre mission est dépêchée dans le même SFD pour veiller à la prise en compte effective des insuffisances relevées. Par leurs actions, les SMS des pays de l’UEMOA ont beaucoup contribué à l’assainissement du secteur de la microfinance dans les Etats membres.

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d. Les projets et programme de développement en rapport avec l'inclusion financière : cas du Niger

Les autorités publiques des différents États membres se sont mises à pied d’œuvre pour améliorer l’accès des populations aux services financiers formels afin de réduire l’exclusion financière dans les pays. Pour le cas spécifique du Niger par exemple, les actions et initiatives ci-après ont été mises en œuvre.

d-1. La création de la Banque Agricole du Niger (BAGRI)

L'agriculture étant le moteur de la croissance économique dans les pays de l'Union et emploie la quasi-totalité des populations rurales. Cependant, selon les données de la Centrale des Risques de la BCEAO, moins d'un pourcentage des crédits bancaires sont alloués à ce secteur. Dans un esprit d'élargir l’accessibilité des services bancaires à ce secteur de l’économie, le Gouvernement nigérien a entrepris en 2011 la création d'une Banque Agricole pour le Niger, dénommée « BAGRI » avec un capital au départ de 10 milliards. Dans la zone existe aussi deux banques agricoles, au Burkina et au Sénégal. La mission de la BAGRI est de contribuer à l’amélioration de la bancarisation au Niger d'une part, et mettre en place un système de financement élargi aux populations exerçant des activités agro-sylvo-pastorales d’autres parts. Toutefois, il est important de rappeler les conditions de réussite d'une banque agricole, dans des pays sahéliens comme le Niger, étant donné le caractère risqué du financement de l'agriculture. En effet, au risque de délaisser la banque pâtir sur une faillite face aux aléas climatiques, trois fonds doivent être mis en place pour accompagner le fonctionnement de la banque agricole : un fonds de bonification des intérêts, un fonds de garantie agricole et un fonds de calamités. Le premier est créé pour atténuer le coût du crédit pour les producteurs agricoles sans pour autant compromettre la rentabilité de la banque. Le second fonds vise à couvrir une certaine partie du montant du crédit impayé en cas de défaut de paiement des producteurs. Le troisième permet d'assurer la résilience des producteurs après une catastrophe naturelle. Tous ces fonds ont été créés au démarrage des activités de la BAGRI sur ordonnances du Chef de l'Etat du Niger. Cependant cette création reste théorique dans la mesure où le fonds de garantie n'a pas connu une mise en place effective.

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d-2. La création de l'Agence Nationale de Financement des Collectivité Territoriales (ANFICT)

Depuis l’avènement de la décentralisation qui a permis à la République du Niger de s’ériger en 265 communes rurales et urbaines, les autorités publiques et les PTF œuvrent en synergie pour améliorer la gouvernance locale à travers un vaste programme d’aménagement du territoire. En effet, ces collectivités ou communes vivent soit de transfert de fiscalité, soit par la fiscalité propre, soit par subvention (fonds d’appui à la décentralisation, fonds de péréquation). Pour celles qui sont localisées dans les zones rurales et reculées, la gestion de ces ressources se passe de la manière la plus archaïque possible. En plus elles sont quasiment exclues du système bancaire, et n'ont aucun accès aux services financiers tels que les retraits et versements de leurs trésoreries et financement de leurs projets, etc., qui sont quand même une nécessité pour leur fonctionnement. Ainsi, l'attente des objectifs de ces communes (rurales surtout), passe nécessairement d’une part, par une accélération des transferts de compétences et de ressources de l’État vers les collectivités territoriales, et d’autre part, par leur intégration dans le système financier formel. A juste titre, l'ANFICT a été créée en 2008, même si son installation officielle n'a vu le jour qu'en 2013. Cette structure est un instrument fondamental pour assurer le financement des investissements publics territoriaux, et pourrait constituer un outil susceptible d’inclure toutes les communes, en particulier les collectivités les plus reculées, dans les rouages du système bancaire et financier conventionnel. Elle est en outre d'une importance capitale dans la mesure où elle gère l'essentiel des ressources d'investissement des communes ainsi que les appuis reçus, en vue de promouvoir et développer les services de proximité au profit des populations.

d-3. La mise en place du Fonds d’Investissement pour la Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (FISAN)

Partant du constat que la qualité ou le volume du financement orienté vers le développement de l’agriculture est insuffisant pour assurer la sécurité alimentaire et nutritionnelle au Niger, les autorités publiques ont mis en place ce fonds dénommé FISAN. Ce dernier est un instrument prévu dans le document cadre de stratégie de

l’initiative 3N (les nigériens nourrissent les nigériens) et vient compléter en effet le

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producteurs et aux activités du monde rural en général. A cet égard, le FISAN vise à assurer un accès inclusif à des services financiers formels et adaptés aux besoins des populations exerçant dans le secteur agro-sylvo-pastoral, à travers ses trois facilités qui sont : « i) soutien au financement agricole, ii) financement des investissements

structurants agricoles, iii) financement du conseil agricole, de la recherche agricole, et du renforcement de capacités ». Ce programme a bénéficié de plusieurs coopérations et a été

adopté au Niger en août 2017. La pertinence du FISAN ne fait pas de doute et sa médiatisation a conduit à une bonne appropriation par la quasi-totalité des acteurs. Toutefois, il y a lieu de s’interroger sur le démarrage effectif de ses activités après deux années d’adoption. A ce jour par exemple, de la facilité 1 qui valorise le dispositif du financement agricole via les institutions financières (banques, EF, SFD), devrait ressortir quelques statistiques sur cette imbrication entre acteurs induisant une inclusion financière massive des producteurs agricoles et d’autres acteurs des chaines de valeur.

2. Initiatives et programmes menés par les partenaires au développement

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