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5. Etre un médecin malade

5.4. L’interférence du médecin

5.4.1. Etre un patient 1 Un cho

Dès l’initiation de la prise en charge, quatre médecins ont expliqué avoir opté pour un comportement clair. L’idée d’être « comme un patient » est revenue plusieurs fois.

« Et moi j’ai fait comme si j’étais un patient normal […] j’ai fait le patient lambda, standard » Dr C « Mais je ne me suis pas comporté comme un médecin qui se fait soigner, je me suis comporté comme

un patient qui se fait soigner, voilà. Je pense que c’est toute la différence » Dr C

« Il faut retirer sa casquette de médecin quand… quand on a une pathologie comme ça et redevenir…

devenir un patient » Dr G

« J’ai réagi un peu comme ça. Bon on va faire ça, ça, ça. Un peu comme si j’étais un patient » Dr L « J’ai suivi le même parcours que les patients » Dr A

« Le fait que je sois médecin, j’ai justement mis ça de côté » Dr C

« Il sert à avoir des soins quand il y a des problèmes de santé. Là, je laisse la blouse » Dr K

Les médecins ont eux-mêmes qualifié leur comportement. La notion de patient facile est revenue avec quatre occurrences.

« J’ai fait comme… j’ai été docile, j’ai été un patient compliant et gentil » Dr I « Gentil… pas exigent » Dr I

« Je ne pense pas être un patient exigeant, emmerdant » Dr F

« Je suis compliant, je suis obéissant. Quand ils me disent vraiment de faire quelque chose, je le fais

[…] on peut plus discuter là, on ne discute plus là, on n’impose rien du tout. On est pris dans… comment dire ça… une espèce de mécanisme qui est bien rodé et cætera » Dr G

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« J’ai fait mon traitement comme un bon petit soldat […] Mais en tant que patient, j’ai fait

rigoureusement ce qu’on m’a dit de faire, sans poser de questions » Dr C

5.4.1.2. Les raisons

La principale raison d’avoir volontairement abandonné la position de médecin semble être la simplicité qui en découle, pour le patient comme pour les soignants.

5.4.1.2.1. Pour une meilleure prise en charge

Pour l’un des médecins, la position de patient est préférable pour suivre la prise en charge de façon optimale.

« En tant que médecin il faut faire abstraction qu’on est médecin et suivre le même cursus que les

patients, sinon, on va se rassurer faussement » Dr A

« Il faut suivre le même cursus que le patient lambda pour se sentir suivie, et ne pas être lâchée dans la nature » Dr A

« Je ne fais que le chef d’orchestre. Dès que j’ai une pathologie, ce n’est pas moi qui me soigne

particulièrement hein. Simplement je coordonne » Dr L

« De toute façon gynéco, ça a toujours été. Là faut lâcher un peu, faut pas tout faire (rires) » Dr H « Je savais déjà que je pouvais pas être mon propre médecin » Dr G

5.4.1.2.2. Pour la simplicité

« C’est plus simple pour eux ça c’est sûr et pour moi aussi » Dr C

« Je me suis laissé complétement faire, sans poser de questions parce que ça me paraissait plus

simple » Dr C

« Donc je redeviens patient et c’est plus confortable » Dr G

5.4.1.3. Une prise en charge décidée par le confrère

Pour tous les médecins, la décision de prise en charge pour au moins l’une de leurs pathologies a été prise initialement ou à terme par les confrères. La décision concerne les traitements, le suivi comme le repos.

Au sujet de son hernie discale « elle [la neurochirurgienne] avait formulé d’abord le corset avant la

chirurgie » Dr K

« J’ai vu rapidement Mme L [sa pneumologue] qui est d’accord avec le chirurgien, on va d’abord

enlever la tumeur puis voir » Dr A

« Donc j’ai pris le traitement qui est prévu pour les infarctus quoi » Dr B

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« On m’a dit que le pet scan ne montrait pas de… de fixation particulière mais que le chirurgien avait

voulu y aller… » Dr L

« Quand il me demandait une radio, j’en faisais une » Dr I

Au sujet de son cancer du testicule : « on m’a fait une… castration évidement. Et après… euh…Je

n’ai pas de chimiothérapie parce que c’était un séminome pur mais par contre, à l’époque, j’ai eu une radiothérapie » Dr D

Au sujet de son lymphome : « On traite ça avec du R-CHOP […] vous ferez 4 séances » Dr C

« C’est là qu’elle m’a dit qu’il fallait que j’arrête longtemps. Alors c’est là que c’est compliqué,

quasiment impossible. Donc, c’est elle qui m’a dit « il vous reste à peine un an et demi, c’est pas la peine » Je ne sais plus comment elle a dit » Dr E

« J’ai respecté, là j’avais pas le choix, je me suis fait arrêter par la gynéco. J’ai fait tout ce qu’il

fallait » Dr H

Au sujet de sa menace d’accouchement prématuré : « C’était mieux mais il m’a prolongé quand

même » Dr J

5.4.1.4. Un suivi réalisé par un confrère

Lors de l’évocation du suivi, sept médecins interrogés ont expliqué respecter ou avoir respecté une certaine régularité dans le suivi, aussi bien en ce qui concerne les consultations que les examens d’imagerie.

« La mammographie tous les ans pour l’autre sein » Dr A

« Au début je la voyais toutes les semaines ou tous les quinze jours. Maintenant, je la vois tous les

mois » Dr E

« Je vois le professeur une fois par an, au début c’était deux fois et maintenant finalement j’ai

espacé » Dr I

« - Je fais toujours le suivi cardio. Ah oui.

- Avec qui ? C’est vous qui le faites ? (question de l’enquêteur) - Oh non, c’est un cardiologue. Là, j’essaie pas de discuter » Dr G

« Je vais le voir tous les six mois, il me fait mon ordonnance » Dr I

« C’est-à-dire « tu fais un électrocardiogramme… tu fais ton fond d’œil euh… ton hémoglobine

glyquée tu la fais au moins tous les trois mois. Et tu fais pas chier et cætera. Tu reviens me voir dans 1 an ou dans 6 mois » » Dr G

Au sujet de son lymphome : « Je faisais mes séances au CHU et… j’ai fait 6 séances en fait avec

72 « Oh je fais des épreuves d’effort » Dr B

5.4.1.5. L’observance

Elle est variable. On observe chez certains un respect scrupuleux des règles. « Je prends mes cachetons, mon Levothyrox tous les matins quand même » Dr F

Au sujet de son traitement d’hypothyroïdie : « je veux pas revivre le truc, je prends bien à distance du

repas, c’est calé » Dr H

« - Observant avec les médicaments? (question de l’enquêteur)

- Oui » Dr L

A deux occasions, les consignes sont suivies selon la tolérance au traitement.

Au sujet de son appareillage pour l’apnée du sommeil : « J’arrive à garder l’appareil 4 heures voire

4h30. J’arrête euh parce que parfois j’ai la bouche très sèche et euh j’ai du mal à le garder toute euh toute toute la nuit » Dr L

Au sujet du traitement antidiabétique : « c’est très difficile de tenir un traitement et un régime au long

cours » Dr G

« Le régime, c’est très difficile à faire. Je le fais un peu et puis je me traite » Dr G

« J’ai été un mauvais patient pour l’observance des médicaments au début » Dr E

5.4.2. Interférer dans les soins