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Section 1. New Public Management, histoire et fondements

1. Genèse du New Public Management

1.1. Esquisse Etymologique et Epistémologique

La gestion des activités de l'État a émergé à travers une évolution de la pensée humaine depuis plusieurs siècles. Les bureaucraties anciennes se sont forgées à travers la nécessité d'optimiser leurs gestions. L'ancienne Chine a été un exemple phare pour les chercheurs du domaine du management public sans toutefois être mise en avant (Laurence E. Linn, JR). En effet, Confucius souligne que "l’État doit rechercher les différents et les opinions les plus divergentes

pour approcher les problèmes, l’impartialité sera de rigueur et les acteurs doivent être impersonnels dans leurs études". Cela dit, l'ancienne Chine était un précurseur des pensées

contemporaines de l'administration.

La réflexion sur le sujet a depuis évolué, trouvant un point de départ historique dans le Caméralisme en Allemagne et en Autriche, lequel centre son intérêt sur la classe moyenne par opposition à celle aristocratique.

1.1.1. Etymologie de la Gestion de l'État

Le mot management est parvenu à l’Anglais depuis l’Italien « managgiare », qui représente le dressage et la montée à cheval avec compétences (16ème siècle). Il faisait référence aux commandements des guerres et autres affaires publiques (Hood, 2007). Après la rébellion Jacobite en 1745, il prit le sens de manipulation politique avec le « Scottish Manager » dans le gouvernement Britannique (Kellas, 1980: 88). Bentham y applique le terme à la délivrance de service public et fonde la théorie du well-worked-out.

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L'apparition du terme « Administration » survient au 19ème siècle. Celui-ci prend ses origines dans le Latin « ministrare ou servir », suite à la démocratisation, la constitutionnalisation des États et le développement du parlementarisme. En effet, le terme hybride «Management Administratif» apparaît aux États-Unis en 1937, faisant référence au double design, opérationnel et exécutif, du gouvernement sous Franklin Roosevelt, lequel instaura la Commission Brownlow. Suite à la dernière guerre, le terme Management est à nouveau largement utilisé, après avoir subi l'effet de la guerre.

Le Public Management est apparu, en outre, comme une activité et un terrain de recherche avec une généralisation quasi-mondiale de l’approche, par une large intervention de l’université (classe intellectuelle).

1.1.2. Mouvement Caméraliste

Apparu en Europe du Nord-est, ce mouvement a été fondé par une classe intellectuelle au 16ème siècle, son principal focus étant l'organisation des dépenses publiques. En effet, le terme tient son origine de l'Allemand "Kamera" qui représente le lieu de conservation des deniers publics. Celui de Camerarius fait référence à l'administrateur des finances publiques et Caméraliste englobe tous les acteurs se préoccupant de l’enrichissement de l’état. Par ailleurs, ce mouvement aspirait à une formation des gestionnaires d'une part et à l'ascension d'une classe scientifique à l'exécutif, par opposition à la classe féodale, d'autre part.

Le caméralisme a souvent été présenté comme la forme allemande du mercantilisme, les caméralistes enseignant les règles de bonne gestion des finances du Prince. L'accroissement de la prospérité des nations ne s'obtenait plus par des conquêtes militaires, mais grâce à un développement économique soutenu grâce à un commerce extérieur contrôlé. Une forte religiosité est toutefois relevée, notamment par la collecte de l'épargne à travers des liturgies ralliant ainsi le service public à l'Église.

L'évolution de la pensée se développe et évolue par la suite en Angleterre. 1.1.3. Révolution Benthamite

Jérémy Bentham aspira à une gouvernance par la raison assurée par des antagonistes compétents en chrestomathie. Il introduisit la logique utilitariste dans le public management. Le développement mené par Jeremy Bentham reste à débattre. Shirley Letwin (1985) argumente qu'il y avait une dimension quasi-religieuse distincte dans la vision Benthamite du PM. En effet, Bentham suggérait que les Églises devaient se convertir en banques publiques après la collecte

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de l'épargne, lors des messes du dimanche. Il voyait également les gestionnaires des hospices comme des ayants droit à un usufruit, par le biais de l'Église (Charles Bahmueller, 1981: 197-200). Cette vision se voit renforcer la religiosité du PM en le dénaturant de toutes ses valeurs managériales.

Toutefois, le renvoi à la notion utilitariste représente un saut dans l'évolution de l'économie, tant au niveau macro que micro-économique. Adam Smith a également défendu la logique utilitariste en relâchant cette fois toute religiosité au niveau du PM.

 Une mauvaise lecture de la pensée d’Adam Smith

« Ce n’est pas de la bienveillance du boucher, du marchand de bière ou du boulanger que nous

attendons notre dîner, mais bien du soin qu’ils apportent à leurs intérêts. Nous ne nous adressons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme ; et ce n’est jamais de leur besoin que nous leur parlons, c’est toujours de leur avantage » (la Richesse des Nations). On a déduit à tort de

cette phrase que Smith pensait que l’égoïsme ou l’utilitarisme pouvait garantir une bonne société.

 Le même Smith disait

« L’homme, selon les Stoïciens, devrait se considérer non pas comme séparé et détaché de tout, mais comme un citoyen du monde, un membre de la vaste communauté qu’est la nature…Dans l’intérêt de cette grande communauté, il devrait à tout instant être disposé à sacrifier son propre intérêt » (Théorie des sentiments moraux).

 La pensée de Smith

 Les contrats et échanges ont l’expression d’accords mutuellement avantageux  Le comportement désintéressé est la marque de l’humain

1.1.4. Reforme Idéologique Tylorienne

Taylor, hormis les sources religieuses de son mouvement, a développé sa doctrine du management en mettant la science comme système moral, pour remplacer ce qu'il estimait morbide dans la religion conventionnelle (Merkel, 1980: 40-1). Il a, par ailleurs, estimé que les gouvernements et les services publics représentaient un site de choix pour l'application de ses principes de contrôle et de motivations.

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Ce courant tentait de transformer à la fois les gouvernements et l'industrie par des ingénieurs-managers formés en systèmes d'observations méthodiques et de motivations rationnelles, en réaction à l'exclusion et à la gestion archaïque.

1.1.5. Public Management des années 80-90

Ce mouvement a mis l'accent sur la production, l'engineering et le leadership managérial plutôt que la régulation bureaucratique qui est l'essence-même d'un gouvernement exécutif. Deux traditions sont reconnues : benthamite et tayloriste. Millet (1954: vii-viii) distinguait deux problèmes, en favorisant le second ;

 politiques et d'administration publique : mise en place d'une responsabilité institutionnelle et constitutionnelle

 de management : les questions les plus prosaïques pour « faire faire »

De même, Andrew Dunsire et Richard Chapman (1971:17) avaient une réflexion similaire sauf qu'ils distinguaient deux styles ou traditions en favorisant le premier ;

 Benthamite et Tayloriste  Macaulayte et Briges

Par ailleurs, le mouvement du public management des années 80-90 engendra, à son tour, de l'antagonisme sous formes de réactions anti-managériales de toutes sortes. Les caméralistes ont été contrés par une nouvelle génération de juristes qui estimaient que la primauté du régime de droit, qui a succédé à l'absolutisme, résidait en la dotation de juristes plutôt que de managers. L'utilitarisme de Bentham et Shadwick a été influencé par le mouvement chinois du Mandarinisme qui favorise un régime de savant/intellectuel laïque plutôt que celui des connaissances utiles.

Le Taylorisme a également connu le mix de la ferveur quasi-religieuse et de la dénonciation qui n'a pas cessé d'entourer la notion de Public Management depuis le début. Le Management Scientifique était pratiqué par plusieurs États aux États-Unis et était devenu un paradigme pour le régime communiste en URSS, introduisant ainsi le contrôle de gestion et le paiement à la performance, lesquels ont connu une grande opposition. En effet, le syndicat des services publics a « monté » une guerre contre le management scientifique et a fait que des éléments du système de Taylor soient interdits par le congrès du gouvernement fédéral américain après 1912 (Merkle 1980: 29 et 271). Le mouvement du PM des années 80-90 a subi l'interdiction du terme

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management et managerialisme en Angleterre dans les années 1990, suite à l'utilisation provocatrice du terme par la gauche. Cependant, dans ce même pays, Michel Heseltine, Ministre de la couronne, a déclaré en 1980 que l'Ethos (management étique) devrait construire une ligne de vie nationale.

De plus, le PM des dernières décennies a connu différentes réactions anti-managériales de la part des juristes, syndicats et organisations professionnelles (éducation et santé) partisans de la vision Wébérienne. Cette vision de la bureaucratie était régie par des règles qui soutenaient que les écoles de PM minimisaient la responsabilité et l'éthique des fonctionnaires. Ainsi, plusieurs savants ont vu l'expansion de la portée du management sur le gouvernement comme un problème et non comme une solution. Un exemple de ce dernier type d'hérésie est Shan Martin (1983) qui a présenté le modèle de "manager sans managers" pour plusieurs types de services publics opérationnels. Il soutenait que les réductions devraient être adressées vers les managers de façon disproportionnée et que les coopératives de travail de groupe devraient être encouragées. Walter Kikert (1997) a dénoncé cela, considérant que l'approche Anglo-Américaine du PM était étrangère aux gouvernements exécutifs et au service public de l'Europe continentale qui avait une approche centrée sur les lois.

Une troisième forme du mouvement social et quasi-religieux du PM est la combinaison d'idées et d'intérêts. Les doctrines de Peter Aucoin (1990) comprenaient un mélange d'idées d'économie institutionnelle et de management d'entreprise, mais leur nouveauté et cohérence ont été très controversées. Pour ce qui est du côté "intérêt" de l'équation, le managerialisme comme un mouvement qui reflète les intérêts et les idéaux des managers en tant que groupe, a été déjà discuté au moins depuis la révolution managériale de Burnham en 1941.

La quatrième forme du mouvement social résidait en la présence d'un style rhétorique et d'une idéologie distinctive, ou d'une vision universelle qui lie l'étiologie, la politique et la prophylaxie. La dimension rhétorique d’argument managérial a été très explorée par des auteurs comme Hood et Jackson (1991) et Huczynski (1993).

Même si le débat sur les managers, comme un groupe d'intérêt est loin d'être nouveau, l'une des caractéristiques qui semble distinguer le mouvement le plus récent du PM est l'étendue du "New PM" qui a grandi avec le mouvement. Le développement inter-lié des conseils, de technologies de l'information et de la distribution a également changé le contexte (Margetts 1999).

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Reste à savoir si ces dernières fonctions vont causer de l'instabilité ou vont plutôt donner une plus grande étendue au PM que celle de ses prédécesseurs.

1.2. Réformes de l'administration française : changement et résistance