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Des entrepreneurs aux profils sociologiques relativement homogènes Le monde agricole est aujourd’hui confronté à des évolutions sociologiques fortes qui,

MARCHANDE DES PRODUCTEURS DE FRUITS ET LEGUMES

2. Les entrepreneurs en fruits et légumes : profils, trajectoires et motivations motivations

2.1. Des entrepreneurs aux profils sociologiques relativement homogènes Le monde agricole est aujourd’hui confronté à des évolutions sociologiques fortes qui,

si elles questionnent aujourd’hui fortement le devenir de ce groupe professionnel, n’en sont pas récentes pour autant. Le premier élément relevé par les travaux analysant l’évolution de ce groupe professionnel est son vieillissement : on dénombrait ainsi en 2006 moins de 60 000 agriculteurs de moins de 35 ans, contre 120 000 en 1994 (Lefebvre, 2010). Il est également marqué par un processus de décloisonnement social important, qui touche cependant les exploitations de manière inégale, se traduisant à la fois par un renouvellement des profils sociaux des agriculteurs, une part croissante des nouveaux installés n’étant pas constituée d’enfants d’agriculteurs (alors que ce groupe a longtemps été marqué par une reproduction sociale forte) et par une complexification de leur trajectoire sociale (stages hors de l’exploitation, expériences professionnelles hors monde agricole, etc.). On note enfin une ouverture des ménages agricoles à d’autres groupes sociaux et à leurs modes de vie (Dubuisson-Quellier, Giraud, 2010). Le fait est que, dans un contexte dans lequel l’agriculture en général et certaines industries en particulier, dont celle des fruits et légumes, sont questionnées quant à leur place et à leur rôle dans la société, le renouvellement des profils sociologiques des agriculteurs interpelle les chercheurs de manière croissante. En effet, ces évolutions contribuent à faire évoluer les lignes de partage et les rapports de force au sein de la filière. De ce point de vue, montrer la diversité des profils sociologiques des producteurs de la filière des fruits et légumes frais est une première étape dans la mise en avant des oppositions, voire des conflits potentiels, qui peuvent exister entre eux dans la manière de définir les conceptions du contrôle au sein de la filière.

De manière générale, la moyenne d’âge des producteurs de fruits et légumes en Aquitaine est élevée. D’après les données issues du recensement de 2010 publiées par le service statistique de la DRAAF Aquitaine, celui-ci était de 50,9 ans pour l’ensemble des producteurs. En moyenne, les producteurs de fruits en activité sont âgés de deux ans de plus que les producteurs de légumes (51,8 ans contre 49,6 ans)58. Cette différence se retrouve également dans l’âge de prise de direction de l’entreprise : 32,7 ans pour les producteurs de fruits, 30,5 ans pour les producteurs de légumes, pour un âge moyen de 31,8 ans pour l’ensemble des producteurs aquitains. En Aquitaine, les producteurs commercialisant principalement leurs fruits ou leurs légumes via des circuits courts sont en moyenne un peu

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L’âge moyen des producteurs de notre échantillon est de 50,7 ans, celui des producteurs de fruits de 51,5 ans et celui des producteurs de légumes de 50,7 ans.

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plus âgés que ceux qui les commercialisent via des circuits d’expédition : 50,8 ans en moyenne contre 50,6 ans pour les seconds.

Ces entrepreneurs ont également des niveaux de formation relativement homogènes et sont en général peu ou pas diplômés (Annexe 5, Tableau 13, p. 402), ce qui s’explique en grande partie par un effet d’âge. Environ 60 % d’entre eux ont un diplôme général équivalent à un Brevet d’Etudes Professionnelles (BEP) ou un Certificat d’Aptitude Professionnelle (CAP). Environ 1 sur 5 n’a pas de diplôme. Un peu moins du quart d’entre eux a un diplôme équivalent ou supérieur au bac. Bien qu’elles restent peu significatives, les différences de niveau de diplôme en fonction de l’existence d’un atelier de commercialisation en circuits courts sont un peu plus importantes, les producteurs ayant recours à au moins un de ces modes de commercialisation étant en moyenne plus diplômés que ceux n’y ayant pas recours, 26,7 % ayant un diplôme équivalent ou supérieur au bac, contre 22,4 % pour les autres (Annexe 5, Tableau 14, p. 402). Là encore, ces chiffres montrent une homogénéité forte de ce groupe professionnel par rapport au niveau de formation.

La plupart de ces producteurs ont suivi une formation agricole, principalement des filières courtes, comme en témoigne le taux élevé de BEP et CAP parmi eux (35 %). Là aussi, les différences en fonction des orientations productives sont minimes, même si la part des producteurs de fruits n’ayant pas obtenu de diplôme agricole est sensiblement plus élevée que celle des producteurs de légumes (Annexe 5, Tableau 15, p. 402). Concernant la présence d’un atelier de commercialisation en circuits courts, les différences sont aussi faiblement significatives. On peut simplement noter un niveau de formation agricole légèrement supérieur pour les producteurs vendant via des circuits courts par rapport à ceux qui ne les utilisent pas (Annexe 5, Tableau 16, p. 403).

Ainsi, du point de vue de leur âge comme de leur niveau de diplôme général ou agricole, les producteurs aquitains de fruits et légumes présentent des profils relativement homogènes, le niveau de formation ne variant que faiblement en fonction de la spécialisation productive comme de la présence d’un atelier de commercialisation en circuit court. En revanche, la filiation au monde agricole, mesurée par l’existence d’un lien de parenté ascendant direct, apparaît comme un facteur déterminant l’orientation des systèmes de commercialisation des entreprises agricoles. Si un peu plus de 80 % des producteurs de notre échantillon sont issus de familles dans lesquelles au moins un de leurs parents travaillait sur une exploitation agricole en tant que salarié ou chef d’exploitation, les agriculteurs commercialisant principalement leurs fruits ou leurs légumes via des circuits courts sont

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surreprésentés parmi les personnes n’entretenant pas de liens de filiation directe avec le monde agricole. Qui plus est, plus la part du chiffre d’affaire réalisée grâce à des circuits courts est importante, plus la part de chefs d’exploitation « hors cadres familiaux » augmente (Tableau 17).

Tableau 17 : Filiation au monde agricole et commercialisation des fruits et légumes Principal mode de

commercialisation

Filiation au monde agricole

TOTAL Aucun parent AE Parent AE

Circuits courts 33,30% 66,70% 100% (33) Coopérative 14,30% 85,70% 100% (42) Circuits longs 6,90% 93,10% 100% (29) La dépendance est significative. chi2 = 7,97, ddl = 2, 1-p = 98,14%.

V de Cramer : 7,67%

Part des circuits courts dans le chiffre d'affaire

Moins de 25 % 10,30% 89,70% 100% (58) De 25 à 75 % 15,80% 84,20% 100% (19) Plus de 75 % 37,00% 63,00% 100% (27) TOTAL 18,30% 81,70% 100% (104) La dépendance est significative. chi2 = 8,89, ddl = 2, 1-p = 98,82%.

V de Cramer : 8,54%

Source : Enquête projet Région « VFL »

Du point de vue de leurs profils sociologiques, les entrepreneurs produisant des fruits et des légumes apparaissent comme un groupe relativement homogène, aucune des principales variables étudiées (âge, niveau de diplôme, formation agricole) ne semblant avoir d’effet discriminant sur l’orientation des systèmes de commercialisation. En revanche, le fait d’avoir ou non des parents eux-mêmes agriculteurs semble avoir un effet plus important sur le choix d’une orientation commerciale spécifique. De ce point de vue, le recours à des circuits d’expédition (vente à la coopérative ou via des circuits longs) renvoie à des agriculteurs dont les parents l’étaient eux-mêmes. A l’inverse, le fait de ne pas avoir de liens familiaux avec ce milieu incite plutôt les entrepreneurs à se tourner vers des circuits courts. Ceci peut s’expliquer par la pression foncière à laquelle sont soumis les agriculteurs cherchant un terrain pour s’installer, particulièrement à proximité des zones urbaines, qui force les entrepreneurs à privilégier des installations sur de petites surfaces plus propices à la commercialisation en circuits courts. De plus, une partie de ces entrepreneurs « hors cadres familiaux » sont dans des dynamiques de rejet vis-à-vis de systèmes de commercialisation qu’ils assimilent à une

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forme d’industrialisation et recherchent dans la proximité et les contacts avec les clients de nouvelles formes de « réalisation de soi ».

2.2. Des entrepreneurs aux trajectoires sociales distinctes, animés par des

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