• Aucun résultat trouvé

IV. Méthodologie  de  recherche

3.   La  séquence

3.2   Les  tâches

3.2.1   Les  tâches  de  découverte  des  livres

3.2.1.5   Différentes  entrées  dans  les  livres

forte. C’est le style d’interaction forte qui est privilégié dans notre séquence puisque son but est « […] plutôt de susciter un questionnement du texte, à partir de l’observation (dans le cas de l’album imagé) ou en réaction à des énoncés lus » (p. 66). C’est également l’occasion de mettre en place différentes stratégies de lecture chez les élèves comme de « vérifier les anticipations de départ et en émettre de nouvelles », « relier le contenu du texte à ses connaissances », « effectuer des relations entre des parties du texte (inférences) » ou encore de « se poser des questions » (Giasson, 2005, p. 93).

3.2.1.4  Discussion      

La discussion suite à la lecture porte sur l’histoire lue et son contenu, mais c’est également l’occasion de comparer les différents livres. En effet, comme le précise Giasson (2005) au sujet de la lecture thématique, l’élément essentiel dans la présentation de différents livres ayant des traits communs est la comparaison (p. 148). Ces comparaisons partent des rapprochements faits par les élèves, soit de manière autonome, soit suite à une sollicitation de l’enseignante incitant les élèves à faire des liens entre certains livres ou certains passages.

C’est le cas, par exemple, après la lecture du deuxième album de la collection (Les vacances de Milton) : l’enseignante demande ce qui se ressemble entre ce livre et Milton et le corbeau.

L’enseignante relance également les comparaisons après la lecture de Milton chez le vétérinaire en incitant les élèves à faire des liens entre ce livre et ceux lus précédemment, à partir de certaines double-pages qu’elle leur montre. Ces pages contiennent les phrases suivantes : « Quoi ? Encore la cage ? C’est pas possible » (cage dans laquelle Milton était déjà dans Les vacances de Milton), « Vite, je me cache » (comme dans Mais où est passé Milton ? dans lequel il passe son temps à se cacher) et « Je m’occuperai des oiseaux plus tard » (qui fait penser à Milton et le corbeau dans lequel il chasse déjà les oiseaux).

3.2.1.5  Différentes  entrées  dans  les  livres    

Voici maintenant une description détaillée de certaines des tâches permettant la découverte des nouveaux livres.

   

Milton  et  le  corbeau    

Cette tâche est la première de la séquence. Elle a pour objectif, avant même la présentation de l’album qui sera lu, d’établir les indices conventionnels qui caractérisent le chat et de discuter des représentations graphiques de cet animal. Pour cela, lors d’un moment en collectif sur les petits bancs, l’enseignante annonce aux élèves que la prochaine histoire qu’elle s’apprête à leur lire est l’histoire d’un chat. Elle leur demande ensuite : « comment c’est un chat ? ».

Après les réponses de quelques élèves, elle leur explique qu’ils vont maintenant dessiner un chat (annexe 1). Une fois leur dessin terminé, les élèves viennent individuellement vers l’enseignante pour lui expliquer à quoi on reconnait que c’est un chat sur leur dessin. Ils doivent alors verbaliser les conventions graphiques qu’ils ont employées pour représenter cet animal. Par la suite, tous les dessins des élèves sont affichés au tableau. L’enseignante demande alors aux élèves de désigner les dessins qui représentent le mieux un chat et d’expliquer pourquoi. Il ne s’agit alors pas de dire si les dessins sont jolis ou non mais de mettre en avant quels indices graphiques, en l’occurrence les caractéristiques du chat (moustaches, oreilles, queue, etc.), font qu’on reconnait facilement que c’est un chat.

L’enseignante montre ensuite une page de l’album Milton et le corbeau, sur laquelle on voit le personnage du chat Milton et dont le texte indique les caractéristiques physiques. Le reste de l’album est soigneusement masqué : les élèves ne peuvent voir ni les pages de couverture, ni l’autre moitié de la double page.

L’enseignante demande alors aux élèves de décrire, à partir de cette illustration, comment est représenté le chat de l’histoire. En d’autres termes, il s’agit de mettre en avant les conventions graphiques utilisées par Haydé pour représenter le personnage puisqu’« […] une image est autre chose qu’une copie de la réalité préétablie […] », c’est un ensemble de codes et de symboles graphiques à interpréter (Bautier et al., 2012, p. 72). La représentation graphique du personnage de Milton étant un indice important pour la reconnaissance des albums de la série des Milton (qui sera l’enjeu des tâches suivantes), cette activité permet de lister ces

caractéristiques. L’enseignante fait deviner aux élèves les mots écrits avant de les leur lire pour confirmer leurs hypothèses. Lors de la séance suivante, l’album Milton et le corbeau est présenté par la première page de couverture.

 

Les  vacances  de  Milton  (Ardalan,  H.)  

Après avoir découvert, deux semaines auparavant, l’album Milton et le corbeau, les élèves doivent se créer un horizon d’attente à partir du titre d’une nouvelle histoire. En l’occurrence, un autre album de la série des Milton, Les vacances de Milton. L’enseignante montre aux élèves le livre sur lequel tout (le format également) est masqué sauf le titre.

Les élèves font alors des hypothèses sur ce qui pourrait être écrit. Précisons ici que plusieurs tâches sur le code, que nous allons maintenant présenter brièvement, précèdent l’entrée dans cet album, donnant ainsi aux élèves les moyens de reconnaitre le nom Milton. En effet, les élèves ont déjà assisté à la lecture de l’album Milton et le corbeau dont le titre a été noté sur l’affiche de référence au tableau lors de la deuxième semaine de la séquence. La semaine suivante, l’enseignante a écrit le titre au tableau et questionné les élèves à son sujet (combien de mots ? de lettres ?) avant de leur donner un exercice dans lequel ils devaient remettre les mots du titre dans l’ordre (annexes 8 et 9). Deux jours plus tard, l’enseignante a écrit le mot Milton au tableau et demandé aux élèves de le reconnaitre et d’identifier les lettres qui le composent. Pour finir, les élèves ont dû écrire le mot Milton à partir d’un modèle.

Parallèlement à cela, les élèves ont fait, parmi les ateliers qu’ils font quotidiennement le matin, un exercice de reconnaissance du nom Milton. Lorsque, quelques jours plus tard, l’enseignante montre aux élèves le titre de l’album Les vacances de Milton, ces derniers peuvent alors être en mesure de reconnaitre le nom du personnage. Nous observons ici que la mise en réseaux des albums est donc également soutenue par un travail sur le code, effectué parallèlement à la découverte des albums et en lien avec cette dernière, tout au long de la séquence. Par la suite, l’enseignante leur lit le titre à voix haute afin que les élèves qui n’ont pas identifié le nom du personnage puissent néanmoins se construire un horizon d’attente.

Elle leur explique ensuite que le personnage principal de l’histoire est dessiné sur la

couverture mais qu’elle ne le leur montre pas encore. Sur une fiche (annexe 15), ils doivent dessiner le personnage auquel ils s’attendent.

 

Mon  chat  (Allen,  J.)  

Cet album est présenté aux élèves à partir de la première de couverture. Il s’agit de Mon chat, album qui ne fait pas partie de la série des Milton mais dont le personnage principal est également un chat. Autre point commun avec les albums d’Haydé, les pages intérieures du début et de la fin sont couvertes de dessins de chats. Par contre, le chat représenté ne ressemble pas à Milton : il n’est pas noir et blanc. Le titre ne comporte pas le nom de Milton, mais il commence aussi par la lettre M ce qui oblige les élèves à aller au-delà de l’indice de la première lettre du titre. De plus, l’auteur et l’éditeur (dont les noms figurent sur la première de couverture) sont différents.

 

Moi,  Milton  

Lors de la découverte de l’album Moi, Milton, les élèves doivent se créer un horizon d’attente à partir de l’illustration de la quatrième de couverture, représentant le chat Milton de dos.

Cette fois-ci, c’est la représentation graphique du personnage de Milton qui est l’indice du personnage, mais de façon limitée puisqu’on ne voit pas le personnage sous son profil habituel. Cette entrée dans l’album provoque des débats car on peut soutenir que c’est Milton au vue de certains indices graphiques (noir et blanc, moustaches), mais il est également

envisageable que ce soit un autre personnage partageant ces caractéristiques-là. Insistons ici sur l’importance de ces négociations puisque, comme le précise Garcia-Debanc (2005) :

Si l’enseignant propose aux élèves de comparer des textes, ce ne doit pas être pour arriver le plus rapidement possible à la solution. Les controverses doivent occuper un temps important, car la recherche de justifications permet une observation plus attentive des textes. Les élèves essaient ainsi de mettre en relation leurs intuitions de lecteurs et des indices textuels. (p. 86)

Je  mangerais  bien  une  souris  (Boujon,  C.)    

Les élèves découvrent ensuite l’album Je mangerais bien une souris, qui ne fait pas partie de la série des Milton, à partir de la première de couverture. Dans cet album, la représentation graphique du personnage est proche de celle de Milton : ce chat est lui aussi noir et blanc.

Cela oblige les élèves à justifier leurs hypothèses quant au personnage en affinant leurs propos (il ne suffit plus de dire « il n’est pas noir et blanc ») ou en fonction d’autres indices de la série que la représentation graphique : absence du mot Milton dans le titre, autre nom d’auteur, autre nom d’éditeur, ou encore format différent.

Mais  où  est  passé  Milton  ?  (Ardalan,  H.)    

L’album Mais où est passé Milton est présenté aux élèves par le biais de sa première de couverture uniquement. Sur la couverture de cet album, le dessin ne montre que les yeux de Milton dans le noir. Cette fois-ci, les élèves ne peuvent pas se baser sur la représentation graphique du personnage (excepté les yeux, qui ne sont pas un indice suffisant). Les indices permettant alors de reconnaitre l’appartenance de l’album à la série des Milton sont les suivants : le format, le mot Milton dans le titre, la police d’écriture, le nom de l’auteur

(Haydé) et le nom de l’éditeur (la joie de lire). Concernant ces deux derniers indices, plusieurs activités effectuées en classe permettent aux élèves de les prendre en compte. Au fil des semaines, le nom de l’auteur et de l’éditeur ont été relevés à chaque observation des premières pages de couverture et notés sur une affiche. De plus, durant la cinquième semaine, les élèves ont eu à faire un exercice dans lequel ils devaient découper les noms de l’auteur et de l’éditeur pour les coller au bon endroit sur les copies des couvertures de Milton et le corbeau et Les vacances de Milton (annexes 18 et 19). Suite à la découverte de l’album Mais où est passé Milton ?, ils effectueront encore un nouvel exercice dans lequel ils devront cette fois écrire le nom de l’auteur et de l’éditeur, qui ont été masqués, sur une photocopie de la couverture de cet album (annexe 20).

Milton  chez  le  vétérinaire  (Ardalan,  H.)  

L’album Milton chez le vétérinaire est présenté à partir d’une page uniquement, sur laquelle il est écrit : « Quoi ! Encore la cage ! C’est pas possible ! » avec le dessin d’un quadrillage représentant la cage, le tout en noir sur fond blanc. Pour les élèves non-lecteurs auxquels la tâche s’adresse, les indices de la série sont alors la police de caractère, similaire à celle des autres albums, le fait que la page soit en noir et blanc, et éventuellement l’illustration de la cage, bien qu’il soit difficile de l’identifier comme telle sans recours au texte. Nous voyons dans ce cas de figure que, comme l’expliquent Bautier et al. (2012), « […] une image est rarement interprétable à elle seule ; le texte qui l’accompagne en réduit l’ambigüité » (p. 72).

C’est donc à partir de cette page (dont le texte n’est encore pas lu à haute voix par l’enseignante) que les élèves font leurs premières hypothèses. Par la suite, l’enseignante leur lit le texte de la page en question. Les élèves peuvent alors se baser sur d’autres indices comme la narration en « je » et l’évocation de la cage dans laquelle Milton avait déjà été enfermé dans Les vacances de Milton.

 

Le  chat  coquin  (Kerner,  E.)  

Comme pour Milton chez le vétérinaire, l’album Le chat coquin est présenté à partir d’une page de texte uniquement. Le texte est dans une police de caractère noire sur une page blanche, dans une typographie légèrement différente de celle des albums de Milton. C’est donc, à ce stade, le seul critère qui peut permettre aux élèves non-lecteurs de distinguer cet album de la série. Ensuite, une autre page est montrée aux élèves.

Sur celle-ci, le texte est écrit en couleur, ce qui n’est jamais le cas dans les albums de Milton.

Pour finir, le texte de la première page montrée est lu aux élèves : « Le chat coquin léchait les mains de son maitre ». Les indices pour exclure le livre de la série sont alors divers : l’énonciation (narrateur externe à la 3ème personne au lieu de Milton comme narrateur interne à la 1ère personne, texte au passé au lieu du présent), mais également le contenu (dans les histoires de Milton lues jusque là, son maitre n’est jamais mentionné).

 

Le  chat  (Her,  C.-­‐F.)  

Le livre Le chat est le premier livre de genre documentaire sur le chat présenté aux élèves suite à l’abondance de récits mettant en scène ce félin. Les élèves font tout d’abord des hypothèses sur la 1ère de couverture et celle-ci est comparée aux autres couvertures des livres de chats lues jusque là. La discussion porte alors sur l’histoire (quelle va être l’histoire ? est-ce qu’il y aura une histoire ?) et sur la nature de l’illustration de la couverture (dessin ou

photo ?). Après la lecture, l’enseignante demande aux élèves de résumer l’histoire. Face à la difficulté d’identifier une histoire, l’enseignante pousse alors les élèves à définir la visée de ce livre. Au fil des documentaires présentés en classe, le but est de mettre en avant le fait que certains textes servent à donner des informations alors que d’autres racontent une histoire.

 

Mon  chat  le  plus  bête  du  monde  (Bachelet,  G.)  

La lecture de cet album constitue un prolongement, prenant place à la fin de la séquence.

Après que les élèves ont été confrontés à des livres montrant la variété des référents auxquels peut renvoyer le terme chat (tant des personnages de chats que des chats objets de savoir), et après qu’ils ont questionné les caractéristiques de cet animal et ses représentations graphiques, les élèves se trouvent face à un album dans lequel le texte parle d’un chat mais les images montrent un éléphant.

L’enseignante montre la première page de couverture et encourage les élèves à décrire ce qu’ils voient, en l’occurrence un éléphant. Elle leur lit ensuite le titre, provoquant ainsi surprise et interrogation : pourquoi le titre parle de « mon chat » alors qu’on voit un éléphant sur l’image ? L’enseignante laisse alors les élèves s’exprimer autour de cette question avant de lire l’histoire. À la fin de la lecture, elle relance le questionnement en demandant pourquoi on parle d’un chat alors que l’on voit un éléphant sur les images. Nous voyons ici, comme le dit Sève (1996) qu’« il s’agit toujours pour comprendre, de construire un référent textuel, en suivant une règle fictionnelle, dans une intention perceptible, quand bien même se dissimulerait-elle » (p. 55). Le travail sur cet album permet d’approfondir certaines notions abordées au fil de la séquence. Tout d’abord, le point de vue puisque c’est la focalisation sur le personnage, narrateur de l’histoire croyant avoir un chat alors qu’il a un éléphant, qui conduit à une contradiction entre le texte et l’image. La notion d’auteur également, puisque le questionnement consiste à savoir dans quel but l’auteur crée un décalage entre le texte qu’il écrit et les images qu’il dessine.

3.2.2  Les  tâches  de  tri  de  textes    

Lors des deux dernières semaines de la séquences (sixième et septième semaines), les élèves découvrent des textes documentaires se distinguant des récits vus jusqu’alors. Pendant la dernière semaine, l’enseignante demande aux élèves (en demi-classe) de classer en deux piles des livres dont ils voient la couverture et qu’ils ont eu l’occasion de feuilleter. D’un côté, ils doivent classer les livres qui racontent une histoire, de l’autre, ceux qui donnent des informations sur le chat. Les élèves se basent donc principalement sur les couvertures des livres dont l’indice majeur est la nature de l’image : une photographie dans les documentaires et un dessin pour les récits, mais également sur la mise en page du texte et des images sur les pages dans le livre. Un autre indice est la récurrence où non d’un personnage représenté dans le livre. L’enseignante demande aux élèves de justifier leurs réponses, l’activité lui permettant alors de « [...] cerner l’état des compétences textuelles des élèves et le métalangage disponible pour parler des textes » (p. 86). À ce stade, il ne s’agit que des prémices d’une catégorisation des ouvrages en fonction des caractéristiques des genres, mais cette tâche permet de faire réaliser aux élèves que le but des textes (raconter une histoire ou donner des informations) peut être un critère pour classer ces derniers.

 

3.2.3  L’institutionnalisation    

Nous venons de le voir, lors des séances sur les albums, l’accent est mis sur le questionnement de l’appartenance ou non des albums à la série des Milton. La représentation graphique, le titre de l’histoire ou encore le nom de l’auteur, la variété de critères pouvant être mobilisés par les élèves doivent, à un certain point, être listés sous la forme d’institutionnalisation. Comme le précise Schneuwly (2009), « l’institutionnalisation a des fonctions précises dans l’enseignement. Elle fixe de manière explicite et conventionnelle le statut cognitif d’un savoir pour construire un apprentissage. L’élève sait qu’il peut l’utiliser dans des circonstances nouvelles et que le maitre peut l’exiger » (p. 39). Rabatel (2004) explique quant à lui l’importance d’ « […] un bilan collectif assumé par le maitre […]

rassemblant les étapes essentielles de la démarche et les savoirs qu’elles ont permis de dégager » (p. 48). C’est l’objectif de la séance, prenant place l’avant-dernière semaine de la séquence (6ème semaine), durant laquelle l’enseignante demande aux élèves de récapituler les indices de la série (quelles sont les choses qui permettent de savoir si c’est une histoire de Milton ?). Une affiche est alors créée à partir des propositions des élèves (annexe 23). Afin de