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Elaboration de la politique montagne : Quel(s) référentiel(s) ?

La première partie de ce mémoire nous a donné une prise sur la construction du sens de la politique montagne. Ce n’est pas tant l’absence de visibilité sur les orientations et les moyens qui nous posait problème, ceux-là doivent faire l’objet d’une conception durant l’année 2016 aboutissant à une délibération cadre en fin de cette année ou en début 2017. Le problème identifié est le manque d’explicitation de l’intention, notamment dans la délibération du 3 avril 2015, et de fait l’incompréhension des raisons, du problème et des possibles objectifs que veulent mener les élus à l’origine du projet. C’est donc à la recherche du référentiel que nous sommes partis.

Dans cette partie, nous allons chercher à prendre de la hauteur à partir de ce qui a été écrit dans le carnet de bord. Nous sortons de la démarche ethnographique afin de mieux comprendre la construction de ce référentiel. On a fait en première hypothèse que la politique montagne pouvait être une innovation politique, que la métropole construit son propre référentiel. Pour citer de nouveau Pierre Muller, pour qu’il y ait innovation politique, ou du moins un changement de direction, il faut que les objectifs de la politique diffèrent des «  cadres normatifs qui orientent l’action publique » ; il faut aussi un changement dans ses instruments qui sont les moyens de concrétiser l’action, et enfin, il faut un changement des cadres institutionnels qui « structurent l’action dans le domaine concerné » (Muller, 1990). Il est un peu tôt dans le projet pour parler des instruments, cette partie ciblera alors en premier temps le référentiel propre au cadre institutionnel. Puisque les objectifs de cette politique ne sont pas encore bien définis, on s’intéressera en second temps aux représentations que la métropole construit autour de la montagne, représentations qui pourront être à l’origine des objectifs. Pour constater l’innovation, on va tenter d’analyser si le référentiel se distingue ou au contraire entre en continuité avec le champ de la montagne en politique aux différentes échelles.

La première hypothèse structure le plan et nous permettra de vérifier la seconde hypothèse qui dépend du cadre institutionnel et contribue à construire le rapport avec la montagne. Celle-ci s’inspirait des premières observations et supposait que la politique montagne pouvait avoir comme objectif premier le dialogue, à la fois entre les 49 communes de la métropole et avec les PNR et territoires voisins. Un certain nombre d’indices, dans le carnet de bord nous fait aller dans ce sens notamment avec le retour sur l’atelier d’élus. Afin de saisir le référentiel de la politique montagne, et de vérifier et développer les hypothèses, on alimentera notre réflexion avec une littérature au sujet de la montagne en politique, on se servira du carnet de bord et notamment des éléments ressortis dans les tableaux et enfin on mettra en perspective les éléments du carnet avec les quelques entretiens faits auprès d’élus, de techniciens et d’acteurs extérieurs.

A. Une politique montagne à l’échelle métropolitaine : une nouvelle forme

institutionnelle qui puise, pour la montagne, ses références dans des

cadres institutionnels plus anciens ?

Il existe en France aux différentes échelles et en Europe des politiques dédiées à la montagne. Or l’objet montagne saisi par l’échelle métropolitaine, statut juridique de fait très récent, nous a interpelé. On a une communauté d’agglomération qui ne s’est jamais saisie clairement de l’objet montagne au sein d’une politique, et avec un travail de benchmark on a pu remarquer que, si cela était le cas pour quelques villes, cet objet montagne était très peu saisi par les intercommunalités. De plus, avec le travail de diagnostic amont à la politique, on a supposé que le territoire de la métropole ne correspondait pas exactement à l’imaginaire de la montagne. On a pu constater cela à partir de données topographiques et surtout socio-économiques : peu de populations dans les hauteurs, des populations urbaines ou périurbaines avec un faible taux de ruraux et peu de tourisme d’hiver. On a pu aussi constater ce décalage des représentations à partir des dire d’acteurs, qu’ils s’agissent de techniciens métropolitains ou d’habitants lambdas pour qui la montagne semblait être un «  ailleurs  ». C’est pour ces diverses raisons que l’on a énoncé l’hypothèse d’une innovation politique. L’innovation ne se trouve pas dans l’objet qu’est la montagne mais dans la représentation construite autour d’elle. L’idée d’une innovation est renforcée par une réponse de l’élue à la forêt, l’agriculture et la montagne à la question : « Est-ce que la politique montagne entre en continuité avec les politiques montagne d’autres échelles territoriales ? ». Sa réponse fut ainsi « Non on a même été les précurseurs ». Elle ajoute que la politique montagne se fera à partir des besoins qui remonteront des élus et des habitants des communes. Cependant, de manière contradictoire mais non forcément incompatible, l’élue a des attentes auprès de l’ANEM à laquelle la métropole s’est inscrite depuis début 2015. Elle a aussi des attentes auprès du volet deux de la loi montagne. Cela dit, l’élue affirme que la politique montagne n’est pour l’instant inspirée d’aucune autre politique de la montagne. Or si cela n’est pas fait volontairement, les représentations du cadre institutionnel de la montagne en politique peuvent se transmettre. Sur ce point nous souhaitons alors chercher les influences possibles de l’intégration de la montagne dans une politique publique.

1. Quelles influences pour la conception d’une politique montagne dans un

contexte intercommunal ?

Inscrire une politique montagne dans l’agenda politique d’une intercommunalité naissante peut sembler anodin. Cependant en regardant dans les logiques stratégiques passées et encore présentes de l’État, on peut se poser la question de l’héritage politique et idéologique.

a) D’une posture interventionniste à la promotion de l’auto-développement : la