• Aucun résultat trouvé

a) Dépasser la dichotomie urbain-rural en coopération avec les PNR

En 2015, les directeurs des PNR Vercors, Chartreuse et de l’Espace Belledonne écrivent l’article « La métropole à la (re)découverte de ses massifs (et vice-versa) ». Celui-ci met en évidence la séparation qui s’est révélée depuis près d’un siècle entre Grenoble et la montagne (R. Favier). Il

présente aussi la nécessité de reformer institutionnellement ces liens alors que « les choix de vie de la population de la région grenobloise (au sens large du terme), entre lieux de vie, de travail, de consommation, de loisirs, etc., tissent de fait des liens entre la ville et les montagnes, dans une complémentarité de services, d’espaces, de milieux, etc. ». Cet article propose ainsi deux comportements à avoir ou modifier. Le premier serait d’avoir une dynamique de projet sur des sujets comme la culture, la production, la mobilité, l’approvisionnement etc. Le deuxième comportement serait justement d’en changer, en ne distinguant plus deux milieux différents où l’un dominerait l’autre, mais où l’un et l’autre travailleraient ensemble sur un grand nombre de thématiques. L’idée est de «  gérer  » ou «  améliorer  » ce rapport qu’entretiennent de fait les habitants.

Grenoble-Alpes Métropole, avec sa nouvelle composition territoriale, a intégralement ou partiellement une dizaine de communes dans chacun des parcs. La coopération et le dialogue se posent alors comme une évidence voire une intention marquée pour beaucoup d’acteurs participant à l’élaboration de la politique montagne. Lorsque l’on regarde l’état actuel de cette coopération on peut affirmer qu’elle est extrêmement faible. Un entretien avec un élu métropolitain, représentant dans le PNR du Vercors appuie cette affirmation. A la question sur nos relations avec les PNR, il répond : « Si je dois mettre un chiffre entre 0 et 10 je dirais 1. Ca ne va pas du tout. ». Autour de 2004 et 2005 la communauté d’agglomération grenobloise avait signé des chartes d’objectifs avec les PNR Vercors et Chartreuse, qui sont à présent désuets. La coopération actuelle avec les PNR se fait autour de projets ciblés, tel le projet «  Territoire à Energie Positive » avec le Vercors, la stratégie alimentaire ou encore le projet de paysage et de mobilité durable issu du programme Rurbance sur le PNR Chartreuse et l’Espace Belledonne. L’ensemble de ces projets, au centre des idéaux du développement durable, n’ont pas de cohérence les unes avec les autres, ils ne font pas office d’une convention cadre entre la métropole et les différents massifs. Avec la politique montagne, cette volonté est engagée (notamment avec le développement d’un contrat de réciprocité 4*M, métropole et les trois massifs).

Si on peut voir cette volonté politique comme nouvelle, voire innovante, elle ne l’est en rien lorsque l’on s’intéresse à l’histoire et aux conditions de création des PNR (N. Baron, R. Lajarge, 2015). Il y a maintenant une cinquantaine d’années, les PNR furent créés «  au croisement des perpectives de l’écologie scientifique, de l’écologie associative et d’une sensibilité écologique de la société » et ainsi par une énergie montante afin de repenser les liens entre « nature et culture ». Les PNR furent à la fois pensés dans une nostalgie de la ruralité française, à la fois dans la vague d’aménagement du territoire de la seconde moitié du XXème siècle. Dans cette seconde perspective, les hauts fonctionnaires ainsi que les agents de la Datar, se posèrent la question des espaces pertinents où développer les premiers PNR. Pour eux, ils devaient s’inscrire en résonance avec d’autres plans d’aménagement et notamment les métropoles d’équilibre. Les PNR devaient être pensés comme des lieux de développement des espaces ruraux, notamment en déclin avec la crise industrielle ou l’exode rural, tout en étant des espaces naturels protégés. Le tourisme faisait partie de ce possible développement. Nacima Baron et Romain Lajarge dans leur ouvrage, Les parcs naturels régionaux, citent Olivier Guichard délégué à l’Aménagement du

territoire au début des années 1960. Dans l’un de ses discours il affirme que les PNR doivent « répondre aux défis de la modernisation et de l’urbanisation accélérées du pays » en étant des « infrastructures naturelles en réseau ». Il précise que ces espaces doivent se trouver à « moins de deux ou trois heures des métropoles d’équilibre, et seront l’indispensable complément ». Ainsi, en 1965, onze sites vont être créés « dans l’orbite d’une ville française ». Dans notre cas on retiendra le PNR du Vercors.

Le croisement entre une EPCI «  dernière génération  » et les PNR serait en quelque sorte un aboutissement de l’intention de départ sur la création de ces parcs. De plus, entre les années 1960 et aujourd’hui les frontières se sont affaiblies entre les différents espaces. Les PNR ne sont plus qu’un «  poumon vert  » ou une «  bulle d’air  » pour les citadins, mais sont devenus pour beaucoup leur lieu de vie avec le phénomène de périurbanisation. La dichotomie urbain-rural s’est amoindrie, le manque de dialogue entre les PNR et la métropole ne demande alors qu’à être rétabli autour de projets interterritoriaux (Vanier, 2010). C’est notamment une condition imposée par l’Union Européenne pour obtenir des fonds tels que ceux du programme LEADER. Ce programme qui a pour objectif de financer des projets de développement ruraux, impose depuis quelques années que les territoires répondant à l’appel à projet (compétence de la Région) aient des axes de développement construits avec une ville ou métropole proche. Sur ces mots, nous allons poursuivre justement sur le rôle que peut jouer l’Europe dans la construction du référentiel de la métropole concernant la montagne, notamment sur cette thématique « lien ville-montagne ».