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Les efforts faits en faveur du développement et du soutien des capacités des usagers

II. LES STRATEGIES ET ACTIONS EN FRANCE ET DANS QUELQUES PAYS

5  L ES STRATEGIES ET ACTIONS EN F RANCE

5.1  Développer et soutenir les capacités des usagers : une action publique restée au milieu du gué . 30

5.1.3  Les efforts faits en faveur du développement et du soutien des capacités des usagers

Si l’importance de favoriser l’observance des traitements est de plus en plus soulignée par les stratégies et plans des autorités publiques en santé, si les approches obéissant à une logique

« d’empowerment » commencent à s’imposer, cherchant à mettre en œuvre des formes de « disease management63 », si des dispositions nombreuses ont été prises pour traduire dans les faits de tels objectifs, si les crédits consacrés à ces actions n’ont cessé d’augmenter, pour autant le bilan est modeste et l’action publique conduite n’est pas exempte de critiques.

61 Voir le rapport d’évaluation de la HAS et de l’IRDES en 2008.

62 Asalée : l’Action de Santé Libérale En Équipe

63 « Le disease management a pour objectif principal de favoriser une meilleure prise en charge par les malades eux-mêmes de leur pathologie ». Rapport IGAS RM 2006-136P. Septembre 2006. Pierre-Louis BRAS, Gilles DUHAMEL, Etienne GRASS.

o L’action menée n’est pas à la hauteur des besoins :

Les besoins potentiels d’interventions concernent potentiellement environ 15 millions de personnes – le nombre de malades souffrant de pathologies chroniques en France. Dans son rapport sur les charges et produits pour 2016, la CNAMTS estime qu’environ 34% des assurés du régime général étaient concernés par une pathologie ou un traitement chronique en 2013.

Même si toutes les personnes souffrant de pathologie chronique ne réclament pas le même type d’accompagnement utile pour favoriser l’observance de leur traitement, leur nombre est plutôt appelé à augmenter du fait du vieillissement de la population et des progrès thérapeutiques. Ainsi, quatre ans après le vote de la loi HPST, l’Académie nationale de Médecine estime que l’ETP « est encore réservée, en France, à un trop petit nombre de patients et que les moyens restent insuffisants, à tous les niveaux, pour faciliter son développement. »64. Et dans une enquête menée par le CISS en mai 2015 auprès de 154 responsables et membres associatifs, particulièrement informés des actions menées en faveur du développement et du soutien des capacités des patients, un peu moins de 20% seulement avaient connaissance de programmes de soutien à l’observance développés dans leurs pathologies.

o L’investissement est inégal selon les pathologies :

Les programmes d’ETP portent majoritairement sur les problèmes de santé suivants : diabète, maladies respiratoires telles que l’asthme ou l’apnée du sommeil, et maladies cardiovasculaires65. Certaines pathologies, comme le cancer par exemple, sont peu représentées au sein des programmes d’ETP (1 à 2% des actions menées, selon l’INCA).

o L’organisation de ces programmes peut être très variable :

Il peut exister une grande diversité en termes de format (fréquence des séances, durée des séances et des programmes), de contenu, de coordination, de support, de participation des professionnels et de patients ressources.

o Les programmes d’accompagnement sont peu développés :

Le défaut de réglementation pour définir les programmes d’accompagnement et leur cahier des charges entrave leur développement. Mis à part les programmes conduits par les régimes d’assurance maladie, tel SOPHIA, le plus souvent ils sont engagés par des associations d’usagers sans financement public spécifique. Les mutuelles, telles la MGEN, conduisent des programmes d’accompagnement, mais l’effort reste modeste même si les expériences peuvent présenter un grand intérêt66.

o Ces différents programmes d’ETP, d’accompagnement et d’apprentissage ne sont pas développés de façon complémentaire :

Dans son rapport de septembre 2008 sur l’ETP67, Christian SAOUT définit celle-ci comme une intervention visant « à rendre le malade plus autonome par l’appropriation de savoirs et de compétences afin qu’ils deviennent l’acteur de son changement de comportement ». Dans ce même rapport, il définit l’accompagnement du malade comme « un processus externe veillant à soutenir le patient et son entourage ».

64 Rapport du 10 décembre 2013.

65 En Lorraine, par exemple, en 2014, 28% des programmes d’ETP autorisés traitaient du diabète, 21% des maladies respiratoires, 16% des maladies cardio-vasculaires et 10% de l’insuffisance rénale.

66 Exemple du programme VIVOPTIM de la MGEN.

67 Pour une politique nationale d’éducation thérapeutique du patient. Rapport présenté à la ministre de la santé. Christian SAOUT. Septembre 2008.

Il faut en effet distinguer la transmission de savoirs et de compétences, d’un accompagnement par des aides matérielles, physiques, psychologiques. Ce ne sont pas les mêmes méthodes mises en œuvre, ni les mêmes acteurs. Ce n’est pas la même relation qui est établie avec la personne malade. Mais il peut être nécessaire de s’engager dans ces deux voies à la fois pour un patient donné. Un programme d’accompagnement devrait donc pouvoir s’envisager en amont ou en aval d’un programme d’ETP, et inclure éventuellement un programme d’apprentissage. C’est assez peu souvent le cas. Il est rare en effet qu’un même opérateur, ou plusieurs sur un même territoire, développent aussi bien des programmes d’ETP que des programmes d’accompagnement. Quant aux programmes d’apprentissage, très peu nombreux68, ils sont conçus et mis en œuvre de façon totalement isolée par rapport à ces autres interventions possibles auprès du patient que sont l’ETP et l’accompagnement.

o L’ETP reste l’apanage de l’hôpital, se développe peu à partir de l’ambulatoire Si l’ETP apparaît comme liée aux soins hospitaliers, commencée dans le cadre d’une hospitalisation, le plus souvent elle concerne des patients retournés à domicile. L’essentiel de cette activité devrait donc relever d’une activité ambulatoire. Pourtant, elle est surtout développée par des services hospitaliers69. Il est vrai que l’exigence de pluridisciplinarité nécessaire à la mise en œuvre de ces programmes est plus aisément satisfaite à l’hôpital.

Il n’est pas anormal que les services hospitaliers soient à l’origine d’actions d’ETP naturellement, même si celles-ci sont mises en œuvre pour des patients retournés à domicile.

Cependant, il est dommage que la part prise dans le développement de ces interventions par des dispositifs proprement ambulatoires (maisons de santé, associations d’usagers…) soit si faible, car il peut s’en suivre un moindre investissement de ceux-ci dans des actions qui doivent pouvoir être intégrées dans la prise en charge plus globale des patients atteints d’une pathologie chronique.

o Les pharmaciens d’officine jouent un rôle de plus en plus important en faveur de l’observance des traitements

Depuis toujours les pharmaciens d’officine apportent à leurs clients des informations et des conseils qui vont favoriser une bonne observance des traitements.

Ce rôle se structure davantage, prend une place plus large dans les activités de ces professionnels de santé, dans le cadre :

- des programmes d’accompagnement sur la prescription des anti-vitamines K mis en œuvre par l’assurance maladie ;

- de la conciliation médicamenteuse qui permet d’éviter bien des accidents iatrogéniques70 ;

- de la préparation des doses administrées (PDA).

Les pharmaciens d’officine disposent d’outils simples de détection des problèmes d’observance qu’ils peuvent utiliser au contact de leurs clients reçus au comptoir. Leur place dans les actions destinées à améliorer l’observance des traitements est bien sûr très utile, ne serait-ce que parce que connaître les médicaments, leurs effets secondaires et leurs incompatibilités possibles, est au cœur de leur métier. Leur mobilisation sur ces sujets restera cependant modeste, tant que n’aura pas été défini un mode de rémunération de ces activités et que cette profession ne se sera pas organisée pour y répondre (aménagements des locaux, espace de confidentialité, disponibilité…).

68 Depuis 2012, 15 demandes d’autorisation de programmes d’apprentissage ont été instruites par l’ANSM. En 2015, une seule demande a été déposée.

69Par exemple, en région Lorraine, en 2014, 54% des crédits alloués aux programmes d’ETP ont concerné des établissements de santé, 45% des réseaux, et 1% des maisons de santé pluridisciplinaires.

70 Voir le rapport de la HAS sur la conciliation médicamenteuse en date du 18 décembre 2014.

5.1.4 Le pilotage des actions, dispersé entre plusieurs autorités publiques,